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    Les Femmes en Europe

    Petite histoire d’une exception mondiale

     

    La femme en Europe est-elle différente de celles des autres continents ? Avec un mariage tardif, la monogamie et une longue vie la femme européenne est une une exception dans le monde, explique Françoise Thibaut, correspondant de l’Académie des sciences morales et politiques dans une émission diffusée par Canal Académie.

    A l’occasion de la semaine de l’Europe, Françoise Thibaut est revenue sur la condition des Européennes dans un monde où priment les droits de l’Homme. La correspondant de l’Académie des sciences morales et politiques dresse la liste des avancées, mais surtout des lacunes, qu’accumulent nos sociétés dites modernes. Une émission "Point de vue" à partager ou à critiquer...

       
     

     

    Les femmes d’Europe (les Européennes, au sens large, y compris les Américaines du Nord, car les Américains blancs sont des Européens) ont encore beaucoup à revendiquer. Elles ont de nombreux sujets de mécontentement, de frustration, de colère. Parmi elles les Françaises bataillent durement, avec des procédés très divers, pour la reconnaissance de droits, l’abandon de préjugés et d’inégalités. Pour être « reconnues » tout simplement, en tant que femmes, en tant qu’individus à part entière.

    Le chemin est long et tumultueux, chargé de l’histoire de siècles sinistres. Mais aussi de périodes moins sombres, et de grandes diversités selon les lieux géographiques, les types de sociétés et de catégories sociales. Les hommes, c’est bien connu, ont peur de ce qu’ils connaissent mal et de ce qui possède un pouvoir hors de leur portée . Pour maîtriser cet inconnu et leur peur, les hommes asservissent les objets de leur crainte : la nature, les animaux, les femmes.

    Ils éliminent ou maîtrisent.

      

    Les femmes sont porteuses d’un inconnu incontournable qui interdit de les éliminer : la perpétuation de l’espèce, le secret de la vie ; donc on ne peut s’en passer.

    Alors, les hommes les asservissent, les enserrent de règles aliénantes, les enferment, les réduisent parfois à une quasi « inexistence » pour qu’elles ne leur échappent pas, pour qu’elles ne les dominent pas. Ils leurs inventent des pieds minuscules qui ne les portent plus, les parent de crinolines qui les empêchent de passer dans les portes, les affublent d’un régime matrimonial qui leur vole leurs noms, leurs biens, jusqu’à leur intégrité physique.

    petite fille Afghane

    Certes, il existe quelques sociétés où les femmes sont dominantes, mais cela est rare, et continue d’être présenté de nos jours comme une exception.

    Bref, tout cela n’est pas très glorieux. Longtemps considérée comme physiquement faible, ou bien mentalement bécasse, exploitable au delà du possible, la femme se délie progressivement de ses chaînes, mais c’est pénible, long, difficile, et toujours remis en cause.

     

      

    Certes, certaines périodes sont favorables : les romaines parfois, certains milieux médiévaux, lorsque les hommes étaient à la Croisade, une brève embellie révolutionnaire…avec toujours cette différence de sort due à la naissance, à l’accès à l’éducation, à la fortune et aux héritages. Ne parlons pas des veuves britanniques exclues de la succession directe de leur défunt : tout est dans Jane Austen et Thackeray.

    Mais revenons à notre temps : tout en étant le plus souvent la proie de quelque houle revendicatrice, l’Européenne se caractérise par 3 traits principaux qui en font un être féminin tout à fait à part :

    D’abord le « mariage tardif » : en France à partir du début du XVIIe siècle, hors la caste très limitée de la très haute noblesse et des héritiers de souverainetés, il y a peu de mariages d’enfants : les nobles unissent plutôt des terres et des revenus fonciers, afin de protéger leurs patrimoines, les revenus des dits-biens et leur pouvoir dans la durée.

    Par contre dans les classes moyennes et paysannes, le mariage est soumis à quelques règles aussi impératives que simples : d’abord toute relation sexuelle hors des liens du mariage est un terrible péché, dans un monde pétri de religion et de superstition cette perspective est un moyen assez efficace de contraception.

      

    Ensuite le mariage est soumis depuis une Ordonnance de novembre 1639 à l’autorisation parentale, au surplus de l’obligation de publication due à l’Ordonnance de Blois de 1592 : cette autorisation (qui éclaire bien des romans et des pièces de théâtre) est liée à l’obligation pour les nouveaux mariés de « pouvoir subvenir à leurs besoins », sans aide ni assistance.

      

      

    Le mariage est donc à la fois un sacrement et un contrat, en principe indestructible qui se présente à la fois comme une protection et une servitude. Ce contexte très familial et quasi clanique, explosera avec la naissance d’un monde ouvrier et du départ massif dans les villes, ce qui explique la déchéance dans laquelle se trouveront souvent les femmes dotées d’enfants plus ou moins réguliers, sans protection juridique.

    En second lieu la particularité de l’Europe est le principe de monogamie : l’époux en Europe a une seule épouse, et pas de concubine. Les maîtresse royales sont un anachronisme brillantissime, dû à une tradition d’obligation de « puissance » du souverain, sous toutes ses formes.

      

    Partout ailleurs sur la planète, quelle que soit l’époque, le territoire et le mode de société, la polygamie est la règle, souvent assortie de concubinage officiel. Cela dans l’obsession de la perpétuation de l’espèce, lorsque l’on se rappelle de l’importance de la mortalité infantile. Le mâle « doit » procréer : c’est la règle, en Chine, dans le monde islamique, aux Indes…

    L’Européen, avec son épouse unique, semble pauvre et limité ; il contourne d’ailleurs assez souvent cette obligation, surtout lorsqu’il est noble, ou bien dans l’ambiance coloniale. Inversement, les peuples exotiques, sous l’influence occidentale, et aussi par nécessité économique, adoptent progressivement des usages plus modérés, tendent souvent à l’épouse unique.

    Cette monogamie est, elle aussi, une garantie de la modération de la croissance démographique, ce qui assure l’enrichissement collectif, une garantie de moralité, et une certitude patrimoniale de non-division excessive de l’héritage ; la règle du droit d’aînesse garantit d’ailleurs un peu plus cette assurance.

    La Révolution, en introduisant l’égalité des héritiers, mènera à la division des patrimoines (cela explique de nos jours le fait que les « très riches » Français sont souvent des « pauvres » au regard des nations qui ont gardé le principe du privilège de la primogéniture).

    L’obligation monogamique connaît encore bien des distorsions : les latino-américains ont très couramment 2 foyers, voire trois ; la seule limite est l’obligation d’assurer leur subsistance, si possible de manière à peu près égale.

    Jean-Sebastien Bach
    Jean-Sebastien Bach
    Deux femmes et 21 enfants

    Si l’épouse ou le couple sont stériles, cette règle peut virer au drame, voire au meurtre ; Les femmes qui ont joui de cette protection d’exclusivité, l’ont aussi payée très cher, souvent au prix de leur vie, dans des enfantements interminables : Thomas Jefferson, ce grand homme, obsédé par la nécessité d’avoir un fils a littéralement « tué » son épouse adorée par des grossesses successives, bien que dangereuses, et des fausses couches ou des accouchements aussi répétés que tragiques. Georgiana, duchesse de Devonshire, fut maudite par la naissance répétée de filles, tant qu’elle n’a pas mis au monde un héritier. Et Jean Sébastien Bach présenté souvent comme un saint homme : 21 enfants en 2 épouses successives, onze pour la première (qui en est morte d’épuisement), dix pour la seconde et seulement 7 enfants survivants.

    De nos jours, l’Européen, dont presque tous les nouveaux nés se portent bien, va dans le sens inverse, une « limitation » volontaire des naissances, qui aboutit tragiquement à une dénatalité. Et la règle de monogamie aboutit à ce qui est appelé désormais « la monogamie successive » : on se sépare, divorce, « pacse », avec d’éventuels enfants de passage, ce qui donne ces familles « recomposées » qui en elles-mêmes ne sont pas tellement nouvelles, mais qui dans notre monde complexe et pressé sont difficiles à bien maîtriser.

    Il n’y a pas si longtemps, le principe religieux était très présent et l’on se mariait pour l’éternité : mais vu le degré élevé de mortalité des femmes en couches, cette « éternité » était parfois fort brève, réduite à quelque années, voire quelques mois.

      

    Jeanne Seymour

    Jane Seymour
    Jane Seymour
    Une courte vie

    Voir la malheureuse Jeanne Seymour, troisième épouse d’Henri VIII Tudor, obsédé par sa succession, mère du bref Edouard VI, décédée dans la première année de sa royale union. Quant à Napoléon Bonaparte, nous connaissons tous le dilemme impérial… On sait depuis très peu de temps que le sexe de l’enfant est déterminé par l’homme ; combien d’injustices, de malédictions, de meurtres et de répudiations ont-ils été perpétrés au nom de la recherche de la masculinité ? Que de larmes et de désespérance, quel acharnement, parfois encore dans l’obscurantisme du cerveau masculin. Peut-on dire que l’obsession masculine de la succession mâle est progressivement contrebalancée par la lucidité et l’obstination de femmes clairvoyantes ?

    Pourtant la Chine obscure continue à se débarrasser des filles, au grand péril de l’équilibre humain à venir.

    Ces deux caractères créent une situation féminine très particulière, faite d’avantages incontestables, de respect et d’exclusivismes possibles, assortie d’inconvénients redoutables, d’interdits, de risques vitaux ; soumise à ce système, la femme européenne a largement contribué à l’enrichissement de l’Europe ainsi qu’à l‘émancipation balbutiante de femmes d‘autres régions du globe.

    Enfin, troisième particularité du sort de l’Européenne, la longue vie autorisée après la possibilité d’enfanter : vu les risques des enfantements et la pauvreté de la médecine, cette possibilité était souvent illusoire ; l’âge moyen de décès des femmes au début du XVIIIe siècle, est aux alentours de 35 ans, quelle que soit la catégorie sociale : d’un côté la pauvreté et l’ignorance, de l’autre l’obligation de procréer. Mais si elle passe l’obstacle, la veuve, la vieille femme, sont autorisées à vivre, à continuer à avoir un rôle social, encouragées d’ailleurs par l’organisation collective (la pratique des marraines qui suppléent les mères décédées) . Beaucoup de sociétés de par le monde, notamment en Asie, chez les Indiens d’Amérique, ont eu tendance à se débarrasser des « vieilles » femmes, les envoyant mourir dans les forêts ou les trucidant carrément (bouche inutile à nourrir, décrépitude physique insupportable).

      

    La femme âgée est un phénomène récent, par exemple au Japon, actuellement submergé par des petites vieilles très pimpantes qui jouissent de la retraite de leurs époux décédés par « burn out » ou Karochi au travail…Depuis fort longtemps, l’Européenne a bénéficié d’une protection juridique dans son grand âge, l’obligation sacrée pour les familles de l’assister et de la considérer, reprise par le Code civil et la sécurité sociale.

    L'émancipation des femmes 1914-1918
    L’émancipation des femmes 1914-1918

    Ces Européennes âgées ont largement contribué à la construction d’une mentalité d’affranchissement du joug masculin, par leurs écrits, leurs discours, leurs expériences. Une fois de plus, le monde ouvrier du XIXe siècle modifiera cette image, faisant de l’ouvrière âgée une exception. Il faudra attendre la Première Guerre Mondiale et ses immenses conséquences sociales pour que les femmes seules, suppléant les hommes, ayant coupé cheveux et jupes, élevant des orphelins, prennent une place conséquente dans le monde du travail.

    Voilà ce qui donne à l’Européenne une place si particulière dans l’histoire des femmes et dans leur émancipation. Elles sont presque toujours un modèle, et juridiquement on peut s’extasier sur le fait qu’elles ont beaucoup d’avance sur les Africaines, les Indiennes, voire même les Chinoises, qui malgré tant de communisme restent très esclavagées.

    Encore aujourd’hui les inégalités sont criantes : une femmes doit toujours être « bien meilleure » qu’un homme pour être reconnue, respectée ; dans les élites sociales, intellectuelles, économiques, les femmes sont encore conçues comme une minorité revancharde et agaçante. Joachim du Bellay magnifiait le teint de rose des jeunes femmes, pleurait leur vieillesse précoce et leur vie fragile, mais il était en extase devant cette fragilité et le bonheur que procure la gent féminine…Souhaitons que les hommes de notre temps se souviennent toujours de l’éblouissement bienfaisant de l’amour des femmes.

    Texte de Françoise Thibaut.

    Ses propos n’engagent qu’elle-même et non l’académie dont elle est membre correspondant ni l’Institut de France.

     

    http://www.toutpourlesfemmes.com/conseil/Les-Femmes-en-Europe.html

    par Elsa Menanteau, dimanche 29 mai 2011

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    Maria Malibran, par Gonzague Saint Bris

    Avant la Callas, il y eut une autre Maria : Malibran. A l’inverse de la Pasta, diva également mezzo de la génération antérieure, qui perdit la voix et finit par chanter faux, Maria Malibran meurt au sommet de sa carrière à 28 ans, telle une comète inoubliable (né en 1808), étoile à jamais éternelle, fauchée à son firmament. De fait, Maria Malibran incarne plus que la superdiva romantique : elle est la prima donna assoluta, devenue de son vivant même, un mythe vocal et artistique, la Madone de toute une génération ardente et vive, généreuse en enthousiasmes passionnels, celle des Romantiques : Chateaubriand, Liszt, Chopin, Stendahl, Balzac, Hugo, Lamartine, Gautier…
    La mezzo à la voix étendue n’est pas qu’une virtuose de l’acrobatie vocale, c’est surtout une interprète qui saisit par la justesse et la vérité de son jeu d’actrice née. Elle n’inspire pas à notre actuelle mezzo légendaire, Cecilia Bartoli, cet engagement quasi gémellaire pour rien (voir le cd "Maria", édité par Cecilia Bartoli en hommage à « la » Malibran, chez Decca).
    La biographie éditée en mai 2009 par Belfond retrace à la manière d’un roman ou d’une fiction romanesque, la vie trop courte mais si intense de la diva d’origine espagnole, fille de l’intraitable et tyrannique Manuel Garcia, le baryténor le plus doué de sa génération qui « fit » l’excellence vocale de ses deux filles, Maria et sa cadette, Pauline (née en 1821, future Viardot).
    L’amour, la musique, -ces deux ailes de l’âme, comme le dit si bien Berlioz-, Maria Malibran les aura toutes deux ardemment vécues, avec une énergie exceptionnelle : déployée en seulement 28 années, de 1808 à 1836, soit en pleine vague romantique. C’est une femme libre qui « ose » s’affranchir de la tutelle affective et artistique de son mentor de père, Manuel, adulé jusqu’à New York (où il rencontre l’octogénaire Lorenzo Da Ponte, le librettiste de Mozart!). D’ailleurs, l’audacieuse fille surclasse symboliquement le père en chantant le rôle qu’il incarna sans pareil, Otello dans l’opéra éponyme de Rossini : prise de rôle qui en dit assez long sur le défi que s’est imposé Maria et aussi sur le plan vocal, qui révèle l’étendue de sa tessiture de mezzo grave.

    Elle s’impose aussi à son premier mari, Eugène Malibran dont elle obtient le divorce, afin d’épouser son seul et véritable amour, le violoniste né à Louvain en 1802, rival de Paganini, Charles de Bériot. En diva unique et singulière, en héroïne romantique digne de Balzac et de Chateaubriand, Maria conquiert pas à pas sa liberté de femme indépendante : une double de Georges Sand, laquelle évidemment est frappée par le jeu et l’éclat de la cantatrice sur scène.

    L’auteur développe ainsi un polyptique en 11 tableaux afin d’évoquer une vie d’exception capable de nourrir la trame d’un roman sentimental. Il s’arrête naturellement sur les talents de la diva, ses qualités d’interprète (5è tableau) dont témoignent nombre d’auteurs légendaires, moult critiques parmi les plus exigeants (Fétis). Reine du Théâtre Italien à Paris, à l’époque de la Restauration, sous le règne de Charles X, quand triomphe l’esthétique de Rossini, « la » Malibran s’affirme en diva ... rossinienne chantant Tancrède, Semiramis, Rosina du Barbier de Séville, surtout Otello, Iago et Desdemone dans Otello (!), mais aussi les personnages de Bellini (Amina), Donizetti, et Beethoven. Celle qui éblouit le parterre par sa grâce digne d’une Vierge peinte par Raphaël (Sand), a ce beau chant expressif et pathétique (Fétis) grâce à sa tessiture de 3 octaves, du sol grave de contralto au mi suraigu de soprano. Une disposition quasi surhumaine... qui fait la magie de chacune de ses apparitions.

    Telle paraît « la » Malibran, portraiturée entre autres par Henri Decaisne (Salon, 1831) : égérie souple et angélique, posant sa beauté mystérieuse et souveraine parmi les hommes, main délicate et expressive, mine songeuse ; ou par François Bouchot (1800-1842) qui la représente dans le rôle de Desdemone (comme dans le portrait de Decaisne) qu'elle interpréta en 1834, dans l'Otello de Rossini (couverture du livre) .
    Mais la diva adulée fut aussi compositrice, ainsi que le reconnaît (superbe hommage) Rossini lui-même dans une lettre adressée en 1832 : Maria fut l’auteur entre autres de mélodies mémorables exigeant de l’interprète, intensité, articulation, audace (comme le fut la cantatrice) dont « La voix qui dit je t’aime » (le titre de la chanson sert de sous-titre à la présente biographie). En outre, Maria écrit comme Berlioz, avec précision, aisance, naturel, dévoilant une intelligence rare. Elle est douée d’un esprit vif et plein d’humour, d’une simplicité attachante comme le montre sa conversation rapportée avec Lamartine. Elle est de plus nageuse et surtout cavalière hors pair : le cheval est son autre grande passion… qui lui sera fatale.


    Tout cela, Gonzague Saint Bris le dévoile avec verve et lyrisme. Celle qui vécut à Paris dans un somptueux appartement, au 47 rue de Provence, décoré par Romagnesse, dans le pur style romantique, riche et confortable, découvre surtout le grand amour au soir de courte existence, en août 1829, au Château de Chimay en Belgique : la diva y rencontre le violoniste Charles de Bériot en une aimantation immédiate qui rappelle la fusion amoureuse des autres grands romantiques : Sand et Musset, Chateaubriand et Juliette Récamier, Marie d’Agoult et Liszt !

    L’histoire supplante parfois – et dans la vie de Marie, souvent-, la fiction d’une écriture romanesque : Charles de Bériot amant d’une autre diva célèbre, venait d’en être éconduit : Henriette Sontag lui préféra en effet le Comte Rossi. Or à Paris, entre 1828 et 1829, les deux cantatrices se sont prises au jeu d’une rivalité plus feinte que réelle, chantant les mêmes rôles rossiniens, exaltant toute une génération d’âmes romantiques. Au terme de leur confrontation, c’est Maria qui sortit triomphante. « Pourquoi chante-t-elle si bien ? » déclara vaincue « la » Sontag. Décidément, « La » Malibran était un être d’exception. Ce livre en témoigne avec fidélité.

    Gonzague Saint Bris : La Malibran. La voix qui dit je t’aime. Biographie. Editions Belfond. Parution : mai 2009.
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    La prostitution à Paris au XIXe siècle , Paris, Seuil, Points-Histoire, 2008 (réédition d'un texte de 1836, republié en 1981), 238 p. dont 50 pages de Présentation et Bibliographie d'Alain Corbin, par Jean-Paul Salles

     

    Alexandre PARENT-DUCHÂTELET

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    Alexandre PARENT-DUCHÂTELET, La prostitution à Paris au XIXe siècle

    L'auteur, « petit homme rabougri, au visage chafouin derrière son binocle » (Corbin), fut tout d'abord un médecin hygiéniste, soucieux de rendre la ville propre. Il était responsable du Conseil de salubrité de la ville de Paris, parfait connaisseur de ses égouts. Mais au même titre que ceux-ci, pense-t-il, dans une agglomération d'hommes, les prostituées sont tout aussi inévitables. Pensant que les lois interdisant la prostitution sont inutiles, il propose donc de la surveiller, « d'atténuer par tous les moyens possibles les inconvénients qui [lui] sont inhérents ». Et ceci nous vaut une enquête de terrain de 8 années qui fait de lui, écrit Corbin, « un des pionniers de la sociologie empirique ». « A toutes les heures du jour et de la nuit, écrit-il, j'ai pu visiter les maisons dont il est question ici » (p.70). Sur la même page, il dit qu'il lui a fallu plus de courage pour visiter « ces repaires abjects de la prostitution » que pour « visiter les égouts remplis de fange et d'air infect ».

    Ainsi ce texte est le premier ouvrage consacré, en France, à un groupe de femmes. On est renseigné sur leur origine géographique, leur origine sociale, leur degré d'instruction. Souvent enfants abandonnées – une sur 4 est une enfant naturelle – beaucoup ne savent pas signer, ou fort mal. Cependant, quelques ouvrières, du linge notamment, se livrent à la prostitution pour compléter des salaires de misère. Au total « les Messalines (1) sont rares », écrit-il, très peu d'entre elles se livrant à la prostitution pour dévergondage. Insistant sur l'esprit de solidarité qui règne entre elles, sur le souci que beaucoup d'entre elles ont de leurs enfants, il les réintègre en quelque sorte dans la société. Même si elles ont une voix particulière, rauque – à cause de l'abus d'alcool –, elles ont la taille, les couleurs de cheveux de tout un chacun. Et ce n'est pas la taille de leur clitoris ou des caractéristiques particulières de leur organe sexuel qui explique la prostitution, mais « l'excès de misère ».

    Il propose donc de tolérer « des maisons de débauche » : « les prostituées s'y contiennent et ne se disséminent plus ». Voilà l'avantage, ainsi on pourra éviter qu'elles jouxtent les écoles ou les églises. De plus, les prostituées étant « inscrites », surveillées par « la dame de maison », elles seront plus facilement visitées par le médecin, jusqu'à une fois par semaine au moment de l'enquête. En ce deuxième quart du XIXe siècle, la syphilis est répandue déjà, menaçant la « race » de dégénérescence, pensent de nombreux médecins. Il faut donc tolérer un mal (la prostitution réglementée) pour en éviter un plus grand (p.184). Si Parent-Duchâtelet donne des précisions sur les prisons dans lesquelles séjournaient les prostituées, il est moins loquace sur les hôpitaux

      

     – souvent mouroirs –

      

     où les malades étaient enfermées. C'est après des campagnes menées par les abolitionnistes, scandalisés par la quasi réduction de ces femmes en esclavage afin que leurs clients soient rendus « intacts » à leur famille, que les prostituées purent retrouver le trottoir. Mais une nouvelle attaque de la syphilis, avant la guerre de 14, amena un nouvel enfermement.

    Salles Jean-Paul.

    (1) Messaline, femme de l'Empereur romain Claude, était célèbre par ses débauches. Elle se livra même à la prostitution. Son mari finit par la faire assassiner.

     

     

    Pour citer cet article

     

    PARENT-DUCHÂTELET Alexandre. La prostitution à Paris au XIXe siècle , Paris, Seuil, Points-Histoire, 2008 (réédition d'un texte de 1836, republié en 1981), 238 p. dont 50 pages de Présentation et Bibliographie d'Alain Corbin, 9 € : par Jean-Paul Salles.

     
    Source :
    Revue éléctronique dissidences
    [en ligne], Bibliothèque de comptes rendus : juin 2011, 7 avril 2011. Disponible sur Internet : http://revuesshs.u-bourgogne.fr/dissidences/document.php?id=459

     

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  • La prostitution

    Aperçu de la prostitution occasionnelle au 19e siècle
    dans la classe ouvrière et des rapports de force qui la motivent.
    Peut-on la comparer avec le harcèlement sexuel aujourd'hui ?

     

    Transposition pour le Web du travail de Bertrand CollardContexte : condition de l'ouvrier et de l'ouvrière au 19ème siècle

      

    Au XIX ème siècle en France, en Angleterre et en Belgique, les ouvriers sont très mal payés, les conditions de travail sont très dures, certains gémissent sous le poids de l'exploitation sans cesse accrue. Privés d'argent, affamés, ils manquent de logements, et vivent dans la promiscuité. Corruption et vices règnent, l'alcoolisme est aussi un de leurs fardeaux. C'est une condition misérable qui est celle de l'ouvrier dans ce 19ème siècle. Mais c'est aussi le siècle de la diffusion des idées de progrès social qui feront de l'ouvrier prolétaire un de leurs symboles les plus forts. Quant à l'ouvrière ,il faut lui ajouter ,à la charge de ses mêmes malheurs, une position bien inférieure à celle de l'homme qui se traduit notamment par une rémunération moindre et une soumission totale à l'homme au point de vue juridique due au code napoléon misogyne et patriarcal à bien des égards. C'est dans ce contexte particulier que je présente ici la prostitution occasionnelle et les rapports de force qui la motivent.

    Les formes de la prostitution occasionnelle ouvrière :

    Elle peut prendre la forme d'une activité d'appoint, qu'on appelle à l'époque le cinquième quart de la journée. Elle permet ainsi à l'ouvrière d'arrondir son salaire et devient une activité de secours quand les revenus de l'ouvrière ne lui permettent plus de manger à sa faim ou d'élever correctement ses enfants. La prostitution peut être une activité qui permet de survivre en cas crises industriels ou grèves. On observe d'ailleurs durant ses crises une multiplication par deux du nombre de prostituées dans les bassins industriels. Une forme particulière d'exploitation sexuelle du corps de la femme est aussi le droit de cuissage exigés par certains patrons, petits chefs ou fils de patrons sous la menace de licenciement, de coups ou grâce à la promesse d'une meilleure situation financière. Si elle n'est pas à proprement parlé une forme de prostitution, elle se rapproche de la prostitution car le rapport de force financier y joue un rôle important. Ces formes de prostitutions sont toutes bien singulières pour l'époque. En effet au 19 siècle c'est une politique réglementariste qui est en vigueur face à la prostitution. Or la prostitution occasionnelle est clandestine, elle échappe donc aux agents des murs qui contrôlent l'hygiène des prostituées et la conformité des maisons de soutien. Cette prostitution est d'ailleurs plus gênante aux yeux des pouvoirs publics car elle s'exerce dans la rue ou dans les cafés à la vue de tous et est incontrôlable. Parfois cette prostitution se meut en activité principale, car pour une jeune fille de l'époque, il est souvent plus rentable de vendre ses charmes que de travailler à l'usine.

    Les causes de la prostitution occasionnelle :

    Ce qui pousse les ouvrières du 19ème siècle à se prostituer est principalement le manque de ressources. Julie Victoire Daubine décrit avec cette petite touche morale du 19ème siècle la situation des femmes de l'époque. " Dans différentes villes, selon le témoignage des inspecteurs des bureaux des murs, des femmes qui n'ont point perdu tout sentiment d'honnêteté sont poussées à l'ignominie par manque de moyen de subsistance ". Ce sont surtout les ouvrières sans famille, ni mari, qui sont amenées à se prostituer. Des orphelines, des femmes seules avec enfants dont le salaire est inférieur à celui d'un homme car celui-ci n'est considéré à l'époque que comme un salaire d'appoint. Elles se retrouvent parfois dans des situations telles que la prostitution est la seule issue pour pouvoir subvenir à leurs besoins. Quelquefois, ce sont des enfants, dont les parents servent de souteneurs qui sont livrés à la prostitution. Durant les périodes de chômage et de crises économiques, le manque de ressources qui s'accentue, amène un accroissement du nombre de prostituées.

    le personnage de Fantine dans les Misérables (ici Ulla Trurman dans le film de Billy August en 1998) est une belle incarnation de l'ouvrière que la misère accule à vendre son corps.

     

    Mais le manque de revenus n'est pas la seule cause de la prostitution occasionnelle. Certaines filles sont entraînées dans la prostitution par des souteneurs qui séduisent et font d'elles leurs vaches à laits. Pour pouvoir profiter d'elles plus tard, ils n'hésiteront d'ailleurs pas à leur prêter de l'argent tout en sachant bien qu'elles ne pourront les rembourser. Ils les contraindront grâce à ce procédé à se prostituer pour leur compte. Les patrons, les petits chefs, les fils de patrons obligent parfois certaines de leurs ouvrières à leurs accorder des services sexuels, c'est pour eux un moyen de bénéficier de services sans devoir avoir recours aux prostituées, sans devoir se déplacer et à moindre frais. Ces hommes sont garantis d'impunité. Le rapport de force qui existe entre eux et leurs ouvrières est bien trop déséquilibré pour que celles-ci osent réagir. Dans ces ouvrières abusées, on retrouve souvent deux types de femmes. Il s'agit soit de femme de familles, où la promiscuité est la règle, soit à contrario de femmes qui proviennent d'institutions fermées. Ces dernières avaient été élevées dans une ignorance de leur corps et n'avaient pas de contrepoids masculin familial à opposer au pouvoir des patrons. La très faible éducation des femmes semble avoir aussi été l'une des causes de la prostitution, bien qu'il faille mettre cette dernière en corrélation avec la pauvreté et avec cette société patriarcale qui ne fait pas de l'éducation des filles l'une de ses priorités.

      

    Condition morale de la prostituée et jugement moral

    Les administrateurs, les hygiénistes, les médecins nourrissent l'utopie d'une ville saine et paisible. Or à leurs yeux, la prostituée incarne l'ordure morale. Mais dans une position réglementariste, il tolère l'ordure puisqu'elle manifeste le bon fonctionnement de l'organisme social ; mais ils font en sorte qu'elle demeure à la fois cachée au public et accessible au regard de l'administration Son hygiène, son comportement seront surveillés, puisqu'elle remplit une fonction naturelle. Il lui faudra pour cela abandonner les postures lubriques, le langage insolent et grossier. La prostitution occasionnelle et une grande partie de la prostitution seront durant ce 19ème siècle clandestines, mais elles n'échapperont pas pour autant à la surveillance policière et un grand nombre de ces clandestines seront emprisonnées. La réglementation implique la coercition. A Paris, par exemple, s'élabore en marge du code pénal, un subtil système de punitions administratives et d'hospitalisations obligatoires. La prison et l'infirmerie-prison vont vite devenir des horizons habituels, des étapes obligées inscrites dans l'itinéraire circulaire, qui rythme désormais la vie des filles publiques. Dans ce 19ème siècle, la prostituée est vraiment considérée comme le dernier échelon de l'échelle sociale, la honte absolue pour la femme. Ce n'est donc qu'en dernier recours que les filles consentent à se prostituer, quand vraiment aucune n'autre solution ne peut être envisagée. Julie-Victoire Daubiné le montre avec deux exemples. " On peut en citer une qui lutta trois jours contre les tortures de la faim avant de succomber "...." Deux jeunes filles pour avoir repoussé cet horrible expédient tombèrent à demi morte d'inanition dans un hôpital ".

      

    Harcèlement sexuel au travail : témoignage contemporain*

    Madame B....chômeuse est embauchée par M. A, le 17 septembre 1984 comme femme de ménage. Mais n'ayant pas de contrat écrit, elle est persuadée que son employeur peut la renvoyer à tout moment. M. A ne lui donne alors que trois heures de travail par jour : son salaire est inférieur à ce qu'elle touchait comme parent isolé. Le dernier jour de son mois d'essai, M. A lui donne rendez-vous, l'invite au restaurant et lui parle d'une personne qui est d'accord de faire çà à trois. Puis il l'emmène à l'hôtel. A peine dans le taxi, il l'oblige à le caresser. A l'hôtel, elle prétend qu'elle a ses règles. Qu'à cela ne tienne, il la sodomise brutalement. Puis il la reconduit pour qu'elle prenne son travail dans l'équipe du matin. Elle obtient un contrat d'un an : 32 heures par semaine, plus sept heures supplémentaires. Dés lors, il abuse d'elle comme bon lui semble, passant sur les chantiers qu'il choisit isolés et où elle travaille seule et tard dans la soirée. Il l'oblige à le rejoindre n'importe quand dans des endroits où il ne risque pas d'être vu et reconnu. Toutes les tentatives de résistance de Mme B..... se brisent contre la menace d'un renvoi. En 1987, à bout de souffle, Mme B..... dépose finalement pendant quatre heures devant l'officier de la police Judiciaire. M A. sera finalement écrouée et inculpé pour viol aggravé, tentative de viol, attentat à la pudeur avec violence, discrimination à l'emploie

    * Résumé tiré du livre " De l'abus du pouvoir sexuel : Le harcèlement sexuel au travail , pp.24-30. "

      

    Le cours d'histoire et la prostitution occasionnelle

    Comme pour les pauvres au moyen-âge, la distinction est faite au 19ème siècle entre la bonne et la mauvaise prostituée. Celle qui se prostitue pour manger et qui est dans une misère telle qu'elle n'a plus d'autres choix, est considérée comme la bonne prostituée. Il faut alors l'aider à sortir de la prostitution. La prostituée occasionnelle en fait partie car les raisons de cette prostitution sont bien souvent économiques. Mais on considère au 19ème siècle qu'il existe aussi une mauvaise prostituée, fille sans morale qui se prostitue par choix et se complaît tout à fait dans la prostitution. Il s'agit plus ici de la courtisane ou de la prostituée de bordel.

     

    Bibliographie

    - Legardinier, C, La prostitution, Toulouse, 1996
    - Daubié, J-V, La femme pauvre au dix-neuvième siècle, tome 2, 1869
    - Aron, J, Misérable et glorieuse la femme du XIXè siècle, Poitiers, 1980
    - Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail, De l'abus du
    pouvoir sexuel : Le harcèlement sexuel au travail, Paris, 1990

    - http://www.bmlisieux.com/litterature/gambier/gambie09.htm
    - http://www.jean-duran.com/nouvelle_page.htm

     SOURCES de cet article : http://www.helmo.be/esas/mapage/euxaussi/marginal/prostocc.html

    photographies google.

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    La prostitution, paysage de la Monarchie de juillet

    Dans les villes qui se développent de manière spectaculaire sous les assauts de la révolution industrielle, la prostitution prend un essor sans précédent. Au point de valoir un retentissant rapport en 1839 d’un des plus célèbres médecins hygiènistes, le docteur Parent-Duchatelet : De la prostitution dans la ville de Paris sous le rapport de l’hygiène publique, de la morale et de l’administration. Soumise en maison close, « en carte » c’est-à-dire tolérée mais en liberté surveillée, ou clandestine, occasionnelle ou régulière, la prostituée est partout dans les quartiers populaires. Filles à soldats, pierreuses ou femmes de terrain, serveuses, mais aussi ouvrières d’infortune, elles sont des centaines, des milliers à guetter le client aux barrières de l’octroi, dans les cabarets louches, ou … dans la rue. La fille publique symbolise le désordre, l’excès, l’imprévoyance. On ne badine pas alors avec la pauvreté et la misère.

    « Je suis coquette
    Je suis lorette,
    Reine du jour, reine sans feu ni lieu !
    Eh bien ! J’espère
    Quitter la Terre
    En mon hôtel..Peut-être l’hôtel-Dieu » (chanson).


    Les filles légères reçoivent bientôt le surnom de « lorettes ». Car le quartier de Notre-Dame de Lorette, entre la gare Saint-Lazare et la Butte Montmartre, qui les abrite, est alors en complète construction et ces dames doivent « essuyer les plâtres », les propriétaires exigeant, en échange de bas loyers, que les appartements soient chauffés et que les fenêtres soient fermées de rideaux.

    La prostituée est perçue comme l’antithèse des valeurs bourgeoises triomphantes. La prostituée est immature et proche de l’enfant. Elle se trouve dans un état primitif de non développement, ce qui autorise la mise en tutelle. Elle est un symbole d’oisiveté, car adonnée au plaisir, type de l’hédoniste au sein du corps social. Elle est paresseuse. La prostituée est aussi imprévoyante. Elle ne sait pas économiser, elle aime le jeu. Elle ne construit rien. Elle est aussi soumise aux excès sexuels. L’époque de la Monarchie de Juillet aime à construire des physiologies (l’étudiant, le bourgeois, le dandy, etc.) et à enfermer la société dans cette typologie. La lorette est l’un de ces stéréotypes.

    La prostitution est cependant généralement considérée comme un mal nécessaire à la société. Chez les filles, les bourgeois trouvent un espace de liberté (de parole, d’acte sexuel) qu’ils n’ont peut-être pas à la maison. Dans les années 1830-1840, la prostituée est même chargée de « déniaiser » les jeunes hommes, promis à un mariage victorien.

     

    Analyse de l'image

    Le dessinateur des lorettes

    Le dessinateur Gavarni a réalisé une vignette représentant une lorette pour l’édition de La lorette des frères Goncourt chez Dentu en 1855. Pour celle de 1862, il a donné un dessin, gravé par Jules, bien plus évocateur. Auparavant dans Le charivari des années 1841, 1842, 1843, il a publié 79 planches de lorettes. Dans Paris, il publie également « les partageuses » (40 sujets) et « les lorettes vieillies » (30 sujets). D’autres lorettes apparaissent encore dans les recueils tels Paris le soir (1840) ou Les fourberies de femmes en matière de sentiment (1837, 1840, 1841).

    Pour plaire à ses contemporains et participer à ce processus de « typisation » des physiologies, Gavarni donne de ses lorettes une image d’excès en tous genres : excès de sexe d’abord, mais aussi de bavardage, d’alcool, et enfin de tabac. D’où un embonpoint précoce, une attitude pour le moins relâchée et provocante.

    Ici la lorette est avachie, vautrée sur un canapé. Le jeune bourgeois qui la regarde pointe son cigare dans sa direction. Outre la métaphore de l’organe sexuel en érection, le cigare symbolise sans nul doute l’appartenance à la classe supérieure, plus encore que le haut de forme ou la redingote. Un « dandy » comme Nestor Roqueplan, qui a inventé le nom de « lorette », ne saurait se passer de son cigare. La prostituée goûte à cet avancement social temporaire en dégustant elle aussi un cigare. Ce qui ne l’empêche bien sûr pas d’appartenir au peuple par ses propos grivois.

    Interprétation

    La « lorette » entre dans les dictionnaires d’argot du second Empire et poursuit sa carrière sous la Troisième République (cf Dictionnaire des dictionnaires, 1889). Les « lolotes » ou « rigolettes » qu’on avait pensé un temps lui substituer feront long feu. La prostitution bien entendu ne faiblira pas. Elle fera davantage peur cependant, car les maladies vénériennes se diffusent du bas vers le haut de la société. Mais malgré ces peurs, le phénomène prostitutionnel, preuve même de sa fonction sociale, s’intensifie sous la Troisième République, s’étendant de la maison close au trottoir. Les partisans de l’abolition et ceux de la réglementation pourront bien s’opposer : la prostitution se maintient.

    Auteur : Didier NOURRISSON

     

    Bibliographie

    • Jean-Paul ARON, Misérable et glorieuse, la femme au XIXe siècle, Paris, éditions Complexe, 1984.
    • Julia CSERGO, Liberté, égalité propreté : la morale de l'hygiène au XIXe siècle, Paris, Albin Michel, 1988.
    • Alain CORBIN, Les filles de noce. Misère sexuelle et prostitution aux XIXe et XXe siècles, Paris, Aubier, 1978.
    • Alain CORBIN, Le temps, le désir et l’horreur. Essai sur le XIXe siècle, Paris, Aubier, 1991.
    • François GASNAULT, Guinguettes et lorettes. Bals publics à Paris au XIXe siècle, Paris, Aubier, 1992.
    • Didier NOURRISSON, Cigarette. Histoire d’une allumeuse, Paris, Payot, 2010.
    • Alexandre PARENT-DUCHÂTELET, La prostitution à Paris au XIXe siècle, texte annoté et commenté par Alain Corbin, Paris, le Seuil, 1981, réédition coll. Points, 2008

    sources : http://www.histoire-image.org/site/oeuvre/analyse.php?i=1190

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  • Le roman des maisons closes

      

    Si vous êtes en quête de témoignagnes indiscrets, coquins, ou de détails à caractère pornographiques, je vous le dis tout de go : ce livre n’est pas celui qu’il vous faut.

    Raconté par une narratrice omnisciente (en fait la flamme vascillante d’une lanterne rouge, symbole des maisons closes), le romans des maisons closes, dont la 4ème de couverture nous promet d’ »entrer à pas feutrés » dans les coulisses, n’a de roman que le titre et le procédé narratif.

      

    En l’occurence, il s’agit plus d’une succession de chapitres passant en revue, de façon chronologique et néanmoins anecdotique, l’histoire des maisons closes, depuis la Grèce Antique, la Rome Antique (sous le nom de lupanar du latin lupa = louve), en passant par l’âge d’or des établissements dans la France de l’entre-deux guerres (certains établissements comme Le Sphinx ou le One Two Two sont le rendez-vous du tout-Paris mondain et artistique, femmes y compris), jusqu’à leur fermeture en 1946, suite au combat de Marthe Richard, ancienne prostituée.

      

    Au passage, on vous donne une idée des tarifs pratiqués et une liste en fin de livre vous apprend tous les termes servant à désigner les maisons closes, leurs tenancières et les filles.

      

    Bref, cet ouvrage qui se voulait indiscret, témoignage d’une réalité plus ou moins sordide, ne va pas au bout de ses intentions, il en dit trop ou pas assez. Sans tomber dans un voyeurisme malsain, la pudibonderie des auteurs se refusant à traiter de l’aspect sexuel, à appeler un chat un chat (sans mauvais jeu de mots) me semble totalement antinomique avec le sujet de l’ouvrage et son but proclamé de nous « dire tout ». On peut déplorer notamment que la parole n’ait pas été assez donnée aux premières concernées : les « filles » elles-même.

      

    Quant au style (mauvais), trop froid, trop factuel, trop journalistique, il ne laisse place à aucune empathie. De fait, et contrairement au titre de l’ouvrage, le lecteur reste en retrait, sans saisir l’ambiance des lieux et de l’esprit des acteurs.

    De même, le distinguo entre les sordides bordels de Province, où les filles font des passes à la chaîne (jusqu’à une cinquantaine par jour!) dans des conditions innomables, et les maisons « select » des grandes villes n’est pas assez prononcé.

      

    Si les premiers nous renseignent sur la situation plus que précaire de la femme non mariée issue des basses couches de la société, au point de n’avoir pas d’autre issue que de marchander leur corps dans des conditions psychologiques, sanitaires et financières misérables (des filles enlevées puis revendues aux mères maquerelles se retrouvant prisonnières de ces affreux bordels où elle enchaineront les passes pour rembourser la tenancière), on ne saura rien de ce qui motive celles qui « officient » dans les maisons plus raffinées.

    Nonobstant ces quelques points négatifs, cet ouvrage remplit son but purement informatif et, même s’il ne se positionne pas, ne peut empêcher le lecteur de se poser lui-même la question du bienfondé de la fermeture des maisons de tolérance.

    Le Roman des Maisons Closes, Nicolas Charbonneau et Laurent Guimier, Editions du Rocher, 2010.

    Pour aller plus loin :

    Maisons closes parisiennes – Architectures immorales des années 1930, de Paul Teyssier, Editions Parigramme, 2010.

    Exposition permanente au Musée de l’érotisme de Paris.

      

      

    source : http://retroactivefr.wordpress.com/2010/11/30/le-roman-des-maisons-closes/

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    VIDEO

    http://www.curiosphere.tv/video-documentaire/0-toutes-les-videos/106987-reportage-pierre-miquel-les-femmes-et-la-guerre-de-14-18

      

    En 1914, la France est un pays à moitié rural. Pierre Miquel raconte que c'est aux femmes qu'il incombe de prendre en charge la vie de la ferme, les enfants, les personnes âgées. Elles deviennent aussi infirmières bénévoles, travaillent dans les usines, conduisent les tramways, les taxis, deviennent facteurs, sans pour autant devenir citoyennes car elles n'ont toujours pas le droit de vote.

      

      

    Aux champs, dans les fermes et les lavoirs, les femmes ont toujours

    pris une part très importante aux dures besognes

    En 1914, avec le départ des maris et frères

    elles durent assumer tous les travaux

    jusque là réservés aux hommes...et animaux

    comme ici ces trois femmes attelés à la charrue

    Une image terrible de la condition féminine...des femmes qui durent attendre

    la fin de la dernière guerre

    pour avoir le droit de vote...!!

      

      

    Les femmes et la Première guerre mondiale

    Pupille de la Nation : Pourquoi ? 1 000 000 d'orphelins et 600 000 veuves.   

     

     

    principaux rôles tenus par les femmes pendant la Première guerre mondiale ainsi que l'histoire de certaines d'entres-elles. Alors, vous vous rendrez compte pourquoi leur appellation de "héroïnes" est justifiée...

     

    La Première guerre mondiale bouleverse le quotidien des femmes françaises. Leurs conditions de vie sont dures en temps de guerre et leurs rôles dans la société évoluent avec le poids des circonstances et la mobilisation de toutes les énergies nationales.

     

     

    La guerre rend la vie quotidienne des femmes difficiles, il s’agit tout d’abord de se procurer de la nourriture en temps de guerre au moment où les productions alimentaires se font plus rares. Les cultures sont moins productives en l’absence des hommes, d’animaux de traits et d’engrais. Il faut parfois faire la queue pendant de longs moments devant les magasins d’alimentation avant d’obtenir de la nourriture. Celle-ci est en partie rationnée au cours du conflit.

     

    Le manque de nourriture n’est pas la seule difficulté à laquelle doivent faire face les femmes, il est aussi difficile de se ravitailler en combustible de chauffage. L’essentiel des biens de la nation est d’abord affecté à l’effort de guerre et aux poilus. Cet état de fait renforce la difficulté des travaux des femmes pendant la Première Guerre mondiale, car les corps sont affaiblis par les privations. Or, certains travaux des champs et à l’usine comme le rôle de « munitionnettes » sont extrêmement physiques et éprouvants pour les corps féminins.

     

    La vie des femmes est aussi difficile en l’absence des hommes qui sont des maris, des fils, des frères. Elles vivent dans l’attente des nouvelles du front et dans l’angoisse de perdre un être cher. Ce sont de véritables souffrances morales. On décompte près de 630 000 veuves après le premier conflit mondial. Ce sont de nombreuses vies qui sont brisées par le premier conflit mondial, beaucoup de femmes resteront seules avec leurs enfants et devront se reconstruire moralement, tout en assurant la subsistance pour tout le foyer.

     

      

    Il ne faut pas non plus négliger le sort très difficile des femmes vivant dans les départements occupés par l’ennemi. On est sans nouvelle des familles et des maris pendant toute la guerre et on doit subir une occupation très dure de la part des Allemands… Des viols ont parfois été commis…

     

    Malgré ces conditions d’une dureté extrême, les femmes ont non seulement assuré leur rôle traditionnel mais, en l’absence des hommes, en ont assumé de nouveaux pendant ce conflit. Rapidement, la femme a vocation à remplacer les hommes partis se battre. La guerre correspond à une forte poussée du travail au féminin. Dès août 1914, les femmes doivent assurer le travail des champs. Le président du conseil les exhortait résolument à assurer l’approvisionnement non seulement de l’arrière mais surtout du front. L’entrée dans une guerre longue implique ensuite très vite de faire appel aux femmes dans des secteurs qui leur étaient jusqu’alors généralement étrangers.

     

      

    Les « munitionnettes » s’habillent comme des hommes, font des gestes d’hommes, travaillent comme des hommes… Les femmes s’impliquent aussi plus directement dans un certain nombre d’emplois.

     

    La figure de l’infirmière est typiquement féminine : l’infirmière dont l’habit blanc est synonyme de pureté, guérit les corps et les âmes. Elle accompagne l’action des médecins tout en consolant les blessés.

     

    Les "marraines de guerre" ont aussi pour rôle de soutenir les combattants qui n’ont pas de familles ou qui se trouvent dans les zones occupées par les Allemands.

     

    Enfin, elles ont aussi été employés dans les services publics. Dans tous les cas, l’intervention des femmes se fait au nom du service de la patrie. C’est bien toute la nation qui est mobilisée pour faire triompher l’indépendance nationale.

     

    La guerre totale a donc complètement modifié et transformé le rôle et la place des femmes dans le monde du travail et dans la société.

     


    Adieu la vie, adieu l'amour,
    Adieu toutes les femmes;

    C'est bien fini, c'est pour toujours,
    De cette guerre infâme;
    C'est à Craonne, sur le plateau
    Qu'on doit laisser sa peau
    Car nous sommes tous des condamnés
    Nous sommes les sacrifiés.
    (extraits de la Chanson de Craonne)   

      

      

    sources : Blog - http://didinou.canalblog.com/archives/2008/12/13/11736950.html

    photos google  

      

      

      

      

     

      

     

     

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    Les femmes engagées dans les Forces françaises libres

     

    Miss Travers, chauffeur de Koenig à Bir HakeimIl ne faut pas oublier ces Françaises courageuses qui ont traversé l'Espagne, connu les prisons de Franco, embarqué sur l'Atlantique pour rejoindre le général de Gaulle en 1940 et continué le combat de la France Libre, au même titre que les hommes. À leur arrivée à Londres, elles sont rapidement réunies dans le Corps des Volontaires féminines, conçu sur le modèle des unités de Volontaires anglaises. Mais leurs affectations évoluent au fur et à mesure des combats. Entre 1943 et 1945, l'armée française est probablement la seule à employer des femmes mêlées aux forces combattantes.

    Le Train est le premier corps à créer des sections de conductrices automobiles (instruction du 5 décembre 1942)1_3_2_2_b_image_2 et les 150 premières recrues du général Martin porteront le surnom de "Merlinettes" ! Le grand nombre de blessés entraîne la création d'un nouveau service féminin de santé militaire. Pour étudier les conditions d'insertion des différents corps féminins dans l'armée, l'épouse du général Catroux, infirmière pendant la Grande Guerre est nommée inspectrice du personnel féminin (IGPF), en août 1943. Plus de 3 000 femmes constituent les effectifs de tous les services auxiliaires, en 1944, ce qui nécessite un commandement féminin aux côtés de l'autorité militaire : le commandant Hélène Terré, les capitaines Dupont et Dumesnil sont affectées au commandement des Volontaires féminines de terre, de mer et de l'air.

    Femmes engagees forces francaises libresLe général Jurion, à la tête de la DPCF, tient à rappeler l'importance de ces auxiliaires féminines et le respect qui leur est dû : "Le personnel féminin en raison de sa situation particulière et de la participation très appréciée et sans cesse accrue qu'il apporte à l'effort de guerre, a le droit le plus légitime à la considération et au respect de tous : civils et militaires (...). C'est au moment où les femmes vont participer plus directement à l'effort de guerre qu'il importe au plus haut point qu'elles trouvent dans le monde militaire l'accueil et les égards auxquels elles ont droit (...). Le Corps des AFAT en uniforme officiellement créé en 1944 pour le temps de la guerre, sera donc supprimé et remplacé en 1946.

    À leur départ, le général de Lattre de Tassigny félicitera ces femmes professionnelles et dévouées de l'Armée de terre qui ont contribué à la libération de la France : "Demain le souvenir des 53 AFAT qui ont donné leur vie au cours de nos combats victorieux inspirera, j'en suis sûr, les 4 000 Françaises choisies pour servir sous l'uniforme des Personnels féminins de notre armée nouvelle".

     

     

     Quelles sont les raisons des engagés et comment se sont-ils engagés?

    A cette période, les raisons qui ont poussé certains français à rejoindre le général de Gaulle à Londres étaient nombreuses mais les plus importantes sont le patriotisme et les raisons idéologiques. L'indépendance de la France est la motivation la plus souvent avancé, suivie de la volonté de laver l'humiliation de la défaite, bien avant la lutte contre le nazisme ou le salut de la démocratie et de la république.

    I. le corps des volontaires françaises :

    Entre le 7 novembre 1940 , date de création du "corps des volontaires française libre, et le 31 juillet 1943 (date à laquelle se réalise l'amalgamme des FFL et de l'armée

    d'Afrique),elles sont 430, mues par un même sentiment patriotique ,à signer un

    engagement dans les forces française libres .

    Elles sont françaises (de métropole ou de l'Empire) immigrées ou étrangéres,de 17 à 50 ans ,issues de toutes les catégories sociales et professionelles et de toutes les familles de pensées politique ou religieuses . Elles constituent le Corps des Volontairesféminine ; Entre 1943 et 1945 la france est la seul à employer des femmesfrançaises mêlées aux forces combattantes.

    Le train est le premier corps à créer des section de conductrices automobiles (le 5 décembre 1942) et les 150 premières recrues du general Martin porteront le surnom de " Merlinettes".Puis un service intervient à cause du grand nombre de blessés c'est le service feminin de santé militaire.

    L'épouse du générale Catroux, a été pendant la Grande Guerre infirmière, et maintenant elle à été nommée inspectrice du personnel féminin (I.G.P.F) en août 1943, plus de 3000 femmes constituent les effectifs de tous les services auxiliares , en 1944 , ce qui nécessite un commandement féminin aux côtés de l'autorité militaire: le commandement Hélène Terré, les capitaines du pont sont affectés au commandement des volontaires féminines de terre, de mer et de l'air.

     

    Le général Jurion au commandement de la DPSF, tient à rappeler l'importance des ces auxiliaires féminines et le

    respect qu'il leur est dû: " le personnel féminin en raison de sa situation particulière et de la participation très appréciée et sans cesse accrue qu'il apporte à l'effort de guerre, a le droit le plus légitime à la considération et au respect de tous: civils et militaires. (...) Le corps des AFAT (Auxiliares Féminines de l' Armée de Terre) en uniforme officiellement crée en 1944 pour le temps de la guerre sera remplacé en 1946."

    Le corps des volontaires féminines et les unités féminines qui ont combattu depuis 1940 obligent les hommes à reconnaître la place nouvelle ces femmes dans l'armée. Pour la première fois dans l'histoire du pays, des femmes de toute condition sociale, de tout âges, ont été partie prenante dans une guerre .

     

    II.Biographie de jeanne Bohec (1919-...

     

    Jeanne Bohec naît dan une famille de marin. Elle poursuit des études scientifiques et devient aide-chimiste.Le 18 juin ,jour de l'arivéedes troupes allemandes à Brest , sanssavoir entendu l'appel du général de Gaulle , elle part pour la Grande-Bretagne.

    Le 6 janvier 1941 elle signe son engagement dans les Forçes Françaises Libres .

    Elle est affectée comme secretaire au service technique et de l'armement.

    Au printemps 1942 , faisant valoir ses compétences de chimiste , elle intègre le

    laboratoire où sont conduites des recherches sur les techniques de sabotage. Impatiente d'agir à son tour, grâce à l'appui d' Henry Frenay en visite au labo, elle entre au BCRA et suit les formations d'instructeurs sabotage ( sabotage, tir, combat, parachutage, sécurité ).

    Elle est désignée comme instructeur sabotage pour la région M3 ( Bretagne), sous le nom de code de "râteau".

      

    Elle est parachutée avec dix autres femmes la plupart d'entre elles comme opératrices radio, sur la France, dans la région d'Alençon, dans la nuit du 20 février 1944.

    Devenue la "plastiqueuse à bicyclette", elle parcoure tous les départements bretons pour instruire à domicile une armée de saboteurs dans la perspéctive des combats de la libération.

    Elle participe aux combats du maquis de Saint-Marcel ainsi qu'à ceux de la libération de Quimper, début août 1944.

     

     

     

     

      

     

    sources : diverses.. Wikipedia et autres..
      
    www.france-libre.net/portraits/collectifs/femmes-engagees-forces-francaises-libres.php
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  • Les femmes qui lisent sont dangereuses

     


    Alexander Deineka – Jeune femme au livre, 1934

    PROJET
    D’UNE
    LOI
    PORTANT DÉFENSE
    D’APPRENDRE À LIRE AUX FEMMES
    Par S**-M***

    À PARIS,
    Chez MASSE, Éditeur, rue Helvétius, nº. 580.

    AN IX. 1801.

     

    AUX CHEFS DE MAISON,
    AUX PÈRES DE FAMILLE,
    ET AUX MARIS.

    Qui plus que vous doit sentir la nécessité et l’urgence de la Loi dont le Projet vous est adressé, et soumis à votre prudence? Les bons ménages deviennent rares; et c’est vous, les premiers, qui portez la peine des préjugés et des abus qui ont envahi l’éducation des femmes.

    Vous tiendrez donc la main à ce Règlement ; il vous intéresse plus peut-être encore que les femmes qui en sont l’objet principal.

    Les puissances mâles et femelles du Bas-Empire de la Littérature, vont s’agiter à la promulgation de la présente Loi. On prononcera malédiction sur le Législateur indiscret et téméraire. Déjà en butte aux prêtres, comment n’a-t-il pas craint de leur donner les femmes de lettres pour auxiliaires? La coalition des femmes de lettres et des prêtres, est une rude chose; mais que pourra-t-elle si les bons esprits, si les têtes saines opposent leur égide, et placent cette Loi sous le bouclier de la raison?

    Les bonnes mères de famille, les excellentes femmes de ménage, les épouses sensibles, les jeunes filles naïves et toutes naturelles, vengées enfin du méprisant abandon où on les reléguait, sauront peut-être quelque gré au Rédacteur de cette Loi, et rendront justice à la pureté de ses intentions.

    Nous ne sommes point dupes (s’écrieront quelques flatteurs des femmes) des ménagemens qu’on prend ici pour faire entendre que les deux sexes ne doivent pas être rangés précisément sur la même ligne, dans la grande échelle des êtres, et qu’il faut placer un sexe au-dessous de l’autre.

    Il faut répondre: ce n’est point là du tout la pensée du Législateur des femmes. Dans le plan qu’il s’est tracé de la nature, il n’y a pas un seul être inférieur à un autre. Toutes les productions sorties de ses mains sont autant de chef-d’œuvres; et parmi une infinité de chef-d’œuvres, il seroit absurde d’établir ou de supposer des préférences.

    Les deux sexes sont parfaitement égaux; c’est-à-dire, aussi parfaits l’un que l’autre, dans ce qui les constitue. Rien dans la nature n’est comparable à un bel homme, qu’une belle femme.

    Ajoutons pour finir: il n’y a rien de plus laid au monde qu’un homme singeant la femme, si ce n’est une femme singeant l’homme.

    Ce Projet de Loi ne pouvait paraître plus à propos, qu’au moment où l’on s’occupe de l’organisation définitive des études.

    Vous remarquerez que dans son rapport, si estimable, sur l’Instruction publique, Chaptal garde le plus profond silence touchant les femmes; il ne leur suppose aucunement la nécessité d’apprendre à lire, à écrire, etc. Partagerait-il l’opinion que leur esprit naturel n’a pas besoin de culture?


    Nota. Celles d’entre les femmes qui prendront à cœur ce projet de Loi, pourront se permettre les réclamations, et sont invitées à les adresser au Rédacteur : il s’empressera d’y faire droit, autant que possible.

    Mais il prévient qu’il ne répondra aux injures, que par son silence accoutumé: des injures ne sont point des raisons.


    AUX FEMMES.

    Si l’on vous interdit l’arbre de la science,
    Conservez sans regret votre douce ignorance,
    Gardienne des vertus, et mère des plaisirs;
    À des jeux innocens consacrez vos loisirs, etc.

    S.


    Peter IlstedIntérieur avec une jeune fille en train de lire, 1908

    PROJET
    D’UNE LOI,
    Portant défense d’apprendre à lire aux Femmes.

    MOTIFS DE LA LOI.

    Considérant :

    1º. Que l’amour honnête, le chaste hymen, la tendresse maternelle, la piété filiale, la reconnaissance des bienfaits… etc., sont antérieurs à l’invention de l’alphabet et de l’écriture, et à l’étude des langues; ont subsisté, et peuvent encore subsister sans elles.

    Considérant :

    2º. Les inconvéniens graves qui résultent pour les deux sexes, de ce que les femmes sachent lire.

    Considérant :

    3º. Qu’apprendre à lire aux femmes est un hors-d’œuvre, nuisible à leur éducation naturelle: c’est un luxe dont l’effet fut presque toujours l’altération et la ruine des mœurs.

    Considérant :

    4º. Que cette fleur d’innocence qui caractérise une vierge, commence à perdre de son velouté, de sa fraîcheur, du moment que l’art et la science y touchent, du moment qu’un maître en approche. La première leçon que reçoit une jeune fille est le premier pas qu’on l’oblige à faire pour s’éloigner de la nature.

    Considérant :

    5º. Que l’intention de la bonne et sage nature a été que les femmes exclusivement occupées des soins domestiques, s’honoreraient de tenir dans leurs mains, non pas un livre ou une plume, mais bien une quenouille ou un fuseau.

    Considérant :

    6º. Combien une femme qui ne sait pas lire est réservée dans ses propos, pudibonde dans ses manières, parcimonieuse en paroles, timide et modeste hors de chez elle, égale et indulgente…. Combien, au contraire, celle qui sait lire et écrire a de penchant à la médisance, à l’amour propre, au dédain de tous ceux et de toutes celles qui en savent un peu moins…..

    Considérant :

    7º. Combien il est dangereux de cultiver l’esprit des femmes, d’après la Réflexion morale de la Rochefoucault qui les connaissait si bien: «L’esprit de la plupart des femmes sert plus à fortifier leur folie que leur raison.»

    Considérant :

    8º. Que la nature elle-même, en pourvoyant les femmes d’une prodigieuse aptitude à parler, semble avoir voulu leur épargner le soin d’apprendre à lire, à écrire.


    Félix Vallotton, La Liseuse, 1922

    Considérant :

    9º. Que le joli babil des femmes dédommagera avec usure de l’absence de leur style.

    Considérant :

    10º. «Que chaque sexe a son rôle. Celui de l’homme étant d’instruire et de protéger, suppose une organisation forte dans toutes ses parties. Le rôle de la femme doit être bien moins prononcé. Douceur et sensibilité en sont les deux principaux caractères. Tous ses droits, tous ses devoirs, tous ses talens se bornent là, et ce lot vaut peut-être bien l’autre.»
    (Galerie des Femmes célèbres, in-4º.)

    Considérant :

    11º. «Que la société civile, dans la distribution de ses rôles, n’en a donné qu’un passif aux femmes. Leur empire a pour limites le seuil de la maison paternelle ou maritale. C’est là qu’elles règnent véritablement. C’est là que, par leurs soins journaliers, elles dédommagent les hommes des travaux et des peines qu’ils endurent hors de leurs foyers. Compagnes tendres et soumises, les femmes ne doivent prendre d’autre ascendant que celui des graces et des vertus privées; et ce plan de conduite, conforme à la nature, a constamment rendu heureuses celles qui ont eu le bon esprit de ne pas porter leurs vues plus haut. La félicité du genre humain repose, toute, sur les mœurs domestiques.»

    Considérant :

    12º. Que les hommages que le premier sexe s’est fait une douce habitude de rendre à l’autre, ne sont point adressés au savoir des femmes, mais seulement à leurs graces et à leurs vertus.

    Considérant :

    13º. Que les femmes qui se targuent de savoir lire et de bien écrire, ne sont pas celles qui savent aimer le mieux.
    L’esprit et le talent refroidissent le cœur.
    S….

    Considérant :

    14º. Que la coquetterie d’esprit est dans les femmes un travers qui, comme l’autre coquetterie, mène au ridicule, et quelquefois au scandale.

    Considérant :

    15º. Que si la belle Aspasie n’eût point été à la hauteur des lumières acquises de Périclès; Périclès ne voyant en elle qu’une femme aimable, destinée aux délassemens d’un homme d’état, Athènes n’aurait point achevé de perdre ses mœurs sous le gouvernement tacite d’une courtisane.

    Considérant :

    16º. Que si Louise Labè ou la belle Cordière de Lyon, n’avait point eu la manie des vers, la chronique du tems ne se serait point hasardée de signaler ainsi cette femme: «Elle avait une prédilection particulière pour les poëtes et les savans, les préférant aux grands seigneurs et leur faisant courtoisie plutôt gratis, qu’aux autres pour grand nombre d’écus; aussi leur communiquait-elle privément les pièces les plus secrettes qu’elle eût.»


    Jan Vermeer – La femme en bleu, vers 1663-1664

    Considérant :

    17º. Que Marguerite de Navarre, première femme de Henri IV, aurait été moins galante, si elle n’avait pas su écrire.
    Une femme qui tient la plume pense être en droit de se permettre plus de choses que toute autre femme qui ne connaît que son aiguille.

    Considérant :

    18º. Que si Catherine de Médicis n’avait point su lire, il n’y aurait point eu en France de journée de la St.-Barthélemi.

    Considérant :

    19º. Que si la duchesse de Longueville n’eût été qu’une bonne ménagère, sans culture et sans lettres, elle n’eût point abusé de son ascendant sur le grand Turenne, au point de faire tourner la tête et les armes de ce général contre sa patrie.

    Considérant :

    20º. Que si l’on n’eût point appris à lire aux femmes, celles de l’hôtel de Rambouillet ne se seraient pas donné le ridicule ineffaçable de préférer Voiture à Corneille et Pradon à Racine. Ce qui prouve en même tems que les femmes qui savent lire ne sont pas, en fait de littérature, meilleurs juges que les autres.

    Considérant :

    21º. Que si madame Guyon s’était contentée d’être jolie, sans apprendre à lire, elle n’aurait point égaré le beau génie de Fénélon: le cœur seul du plus sensible de tous les prélats, se serait permis une tendre foiblesse.

    Considérant :

    22º. Les risques que court l’innocence d’une jeune fille livrée aux leçons d’un grammairien peu sage.
    On ne trouve plus des Origène d’humeur à cesser d’être homme pour apprendre impunément à lire aux jeunes filles et aux jeunes femmes d’Alexandrie.

    Considérant :

    23º. Combien la seule conjugaison du verbe Amo, j’aime, a occasionné de chûtes.

    Considérant :

    24º. Combien une jeune fille qui sait lire a de peine à résister à la tentation de jeter les yeux sur les lettres d’amour d’un séducteur éloquent.


    Pieter Janssens Elinga – Femme en train de lire, 1668-1670

    Considérant :

    25º. Combien les romans et les ouvrages de dévotion font de ravage dans le tendre cerveau des femmes.

    Considérant :

    26º. Combien la lecture est contagieuse: sitôt qu’une femme ouvre un livre, elle se croit en état d’en faire;
    Et femme qui compose en sait plus qu’il ne faut.
    Molière.

    Considérant :

    27º. Que l’érudition de madame Dacier la fit changer de sexe; elle oublia dans ses discussions savantes toute l’aménité du sien.

    Considérant :

    28º. Que la culture des lettres n’eût pas le pouvoir d’adoucir l’humeur violente, le caractère emporté et le brusque abord de mademoiselle de Gournay, la fille d’alliance de Michel Montaigne.

    Considérant :

    29º. Que si madame de Lasuze n’avait point été poëte, nous aurions quelques jolis vers de moins; mais elle n’aurait point donné à ses contemporains et à la postérité le contagieux exemple d’un ménage en désordre, à force d’esprit.

    Considérant :

    30º. Que madame de Ville-Dieu, veuve de trois maris, et auteur de douze volumes, n’en fut pas moins galante: les Muses ne lui apprirent pas à mettre plus d’harmonie dans sa conduite.

    Considérant :

    31º. Que pour l’ordinaire, une femme perd de ses graces et même de ses mœurs, à mesure qu’elle gagne en savoir et en talens.
    Pour peu qu’elle sache lire et écrire, une femme se croit émancipée, et hors de la tutelle où la nature et la société l’ont mise pour son propre intérêt.

    Considérant :

    32º. Que la cause supprimée, l’effet tombe de lui-même: ainsi, les femmes ne sachant plus lire, ne nous offriront plus le risible travers de ces diplomates femelles, qui du fond d’un boudoir, le Publiciste à la main, disposent des empires, font la part aux rois, aux républiques…. etc.

    Considérant :

    33º. Que la qualité de femme qui sait lire, n’ajoute rien aux titres sublimes et touchans de bonne fille, bonne épouse et bonne mère, ni aux moyens d’en remplir les devoirs doux et sacrés.


    Edward Hopper – Compartiment C, voiture 193, 1938

    Considérant :

    34º. Que la place d’une femme n’est point sur les bancs d’une école, encore moins dans une chaire de théologie, de physique ou de droit, comme il s’est vu plus d’une fois à Bologne, en Italie.

    Considérant :

    35º. Que le cardinal Barbarigo ne voulut jamais permettre à la savante Hélène Lucrece-Piscopia Cornara de se faire recevoir membre de l’université de Padoue; persuadé qu’il était qu’un chapeau de fleurs ou de plumes, sied beaucoup mieux sur la tête d’une femme qu’un bonnet de docteur.

    Considérant :

    36º. Que les femmes ayant reçu une organisation physique plus frêle et un caractère moral moins décidé que les hommes; l’étude des lettres n’est pas un puissant moyen de donner de la force et de l’énergie. De l’aveu des philosophes eux-mêmes, les lettres énervent quand elles ne corrompent point.
    Fénélon a dit:
    «Les femmes ont, d’ordinaire, l’esprit encore plus foible que les hommes.»
    Voyez son traité de l’éducation des filles.

    Considérant :

    37º. Que les femmes les mieux instruites, les plus savantes n’ont jamais enrichi les sciences et les arts d’aucune découverte. «Il n’y a jamais eu de femmes inventrices» dit Voltaire dans ses Questions Encyclop. L’invention de la gaze n’est pas même due à une femme.

    Considérant :

    38º. Que, quoiqu’on en ait dit, l’esprit et le cœur ont un sexe comme le corps dans la dépendance duquel ils sont tous deux, le moral et le physique étant unis d’une intimité si étroite qu’ils ne font qu’un.

    Considérant :

    39º. La mort précoce de plusieurs jeunes filles que leurs mères avaient condamnées à l’étude des langues et à d’autres sciences toutes aussi peu compatibles aux forces et aux goûts naturels d’une jeune personne.

    Considérant :

    40º. Que presque toujours quand les femmes tiennent la plume, c’est un homme qui la taille. Le mathématicien Clairaut rendit ce service à madame Duchatelet.
    Colletet faisait les vers de sa servante, devenue sa femme.

    Considérant :

    41º. Que, les femmes n’étant assujéties à aucune charge publique, à aucune fonction administrative, n’ayant pas même droit aux fauteuils de l’Institut, elles n’ont nul besoin de savoir lire, écrire….

    Considérant :

    42º. Que les femmes ont trop d’occupations dans leur ménage, pour trouver du tems de reste et à perdre en lectures, écritures…..


    Jean-Étienne Liotard – Madame Adélaïde, 1753

    Considérant :

    43º. «Que les douces fonctions de la vie privée sont assez multipliées pour occuper toute entière une femme de mérite; et que celle qui embrasse la profession d’écrire, n’est pas moins ridicule que ces soldats qui pendant les loisirs de la cazerne, prennent l’aiguille de la marchande de modes, ou le tambour de la brodeuse.»
    (Galerie Univ. des Hommes illustres, in-4º. Art. Voltaire. Notes.)

    Considérant :

    44º. Qu’il y a scandale et discorde dans un ménage, quand une femme en sait autant ou plus que le mari.

    Considérant :

    45º. Combien doit être difficile le ménage d’une femme qui fait des livres, unie à un homme qui n’en sait pas faire.

    Considérant :

    46º. Combien la première éducation des enfans, nécessairement confiée à leur mère, souffre quand la mère est distraite de ses devoirs par la manie du bel esprit.
    «La couvée est mal tenue, quand la poule veut chanter aussi haut que le coq,» dit un vieux proverbe.

    Considérant :

    47º. Que l’art de plaire et la science du ménage ne s’apprennent pas dans les livres.
    L’art d’aimer d’Ovide n’a rien appris aux femmes.

    Considérant :

    48º. Combien il est ridicule et révoltant de voir une fille à marier, une femme en ménage ou une mère de famille enfiler des rimes, coudre des mots, et pâlir sur une brochure, tandis que la mal-propreté, le désordre ou le manque de tout se fait sentir dans l’intérieur de la maison.

    Considérant :

    49º. Qu’une femme, pour ne point savoir lire, n’en est pas moins estimable, moins digne d’être aimée, moins en état de remplir toutes ses obligations d’épouse, de mère, de parente et d’amie.
    Au contraire, qu’un époux de bon sens trouve plus de véritables jouissances auprès d’une femme naturelle et sans lettre, qu’avec une autre remplie de prétentions au savoir et aux applaudissemens.

    Considérant :

    50º. Combien un maître de maison jaloux de remplir les devoirs de l’hospitalité, est confus, quand il a pour épouse et compagne une femme plus occupée de livres et de manuscrits que des détails du ménage: tout s’y fait mal, ou mal-à-propos; la table est mal servie; le lit est mal dressé; et le voyageur, en partant, plie les épaules, et se dit tout bas: «Que les Dieux me préservent d’une maison dont la maîtresse sait lire!»


    Charles Burton Barber – Jeune fille au carlin en train de lire, 1879

    … à suivre

      

    sources :http://www.petitchap.com/les-femmes-qui-lisent-sont-dangereuses-1/

      

      

      

      

      

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    Les « femmes savantes » : les femmes et l’art au Moyen Âge
         
    Ecrit par Alix Ducret
       
    Christine de Pisan (v.1365-v.1430)Épouses, mères, religieuses, les femmes du Moyen Âge, et notamment des XIIe et XIIIe siècles, étaient également des « femmes savantes » qui s’illustrèrent dans des domaines aussi variés que la littérature, la théologie, la médecine. Ainsi c’est à une femme, Herrade de Landsberg, abbesse du Mont Saint-Odile de 1167 à 1195, que l’on doit la première « encyclopédie » illustrée, destinée à l’instruction des moniales de l’abbaye. Et c’est une œuvre colossale qu’Herrade a rédigée : sous le titre poétique de Jardin des délices, elle a réuni des extraits de la Bible et des principales études de théologiens ou de Pères de l’Église et traité « d’astronomie, de chronologie, d’agriculture et horticulture, de toutes sortes de questions touchant l’homme, les arts, l’histoire », note Régine Pernoud. Mais Herrade de Landsberg n’est pas la seule religieuse à s’être préoccupée de l’instruction de ses sœurs.
    Héloïse, que l’on connaît surtout pour son aventure avec Abélard, donne une idée intéressante du degré de culture de certaines femmes au XIIe siècle.
      
    Lorsqu’elle rencontre Abélard, elle a déjà acquis une solide culture classique -philosophie et littérature- et la correspondance qu’elle entretiendra avec son ancien amant ressemble plus souvent à une discussion théologique ou philosophique qu’à un entretien amoureux. C’est d’ailleurs elle qui demandera à Abélard de rédiger un programme d’éducation -comprenant le grec, l’hébreu, le latin- afin de développer, chez les religieuses de son couvent, une meilleure compréhension de l’Écriture.
     
    Ne voit-on pas également Robert de Sorbon se rendre au béguinage de Paris, où la maîtresse du lieu enseignait, afin d’assister à ses cours et même prendre quelques notes ?
      
    À l’époque, les béguinages, où se regroupaient des laïcs, hommes ou femmes, qui vivaient en communauté, sans prononcer de vœux et se consacrant au travail et à la prière, apparaissent d’ailleurs comme des hauts-lieux de la connaissance et de la discussion. Et la correspondance que Robert de Sorbon entretint pendant des années avec les béguines de Cambrai et de Paris révèle assez clairement la haute estime en laquelle il les tenait.
     
    Outre leur apport à la culture, certaines femmes avaient également des connaissances plus « scientifiques » et même médicales. En effet, déjà à l’époque carolingienne, c’étaient les femmes qui assuraient les accouchements et les moniales fondaient, en même temps que leurs abbayes, des Hôtels-Dieu, c’est-à-dire des hôpitaux, où elles assuraient les soins. Au bas Moyen Âge, certaines femmes auront même le statut reconnu de médecin, comme une certaine Hersent, que Saint Louis désigna pour l’accompagner à la croisade. Malheureusement, l’exercice de la médecine échappera aux femmes dès la fin du XIIIe siècle, sous la pression de l’Université.
    Hildegarde de Bingen
    Hildegarde de BingenParmi ces « femmes savantes » que nous venons de voir, un nom se détache cependant : celui d’Hildegarde de Bingen. Selon le mot de Régine Pernoud, « avec Hildegarde, nous nous trouvons devant une femme qui est une réelle “ encyclopédie vivante ” ».
    Née à Bermershein, en Hesse, Hildegarde est confiée, dès l’âge de huit ans, aux bénédictines de Disibodenberg, situé sur les bords du Rhin. Elle prend le voile à quinze ans et, à trente-huit ans, en 1136, elle devient abbesse du couvent.
    Visionnaire, Hildegarde a déjà acquis une certaine renommée dans sa région lorsqu’en 1147 l’archevêque de Mayence soumet son premier ouvrage, Connais les voix du Seigneur (elle l’a commencé en 1141 après sa première expérience mystique), à l’assemblée réunie pour un synode à Trêves. L’ouvrage est applaudi, les écrits d’Hildegarde cautionnés par les plus hautes instances de l’Église -notamment le pape et saint Bernard de Clairvaux-, aussi la moniale décide-t-elle de poursuivre son œuvre.
    Le Livre des mérites, le Livre des œuvres divines succèdent à Connais les voix du Seigneur et traitent tour à tour, et avec un grand sens poétique, de la morale chrétienne, des sciences et de la doctrine de l’Église, révélant l’étonnant savoir de cette moniale. Une Vie de saint Disibod, une Vie de saint Rupert, un Livre de médecine simple, un Livre de médecine composée et les quelques trois cents lettres qu’elle a adressé aux grands de ce monde -roi, pape, empereur- ne peuvent que renforcer cette idée et rév, èlent que, comme d’autres femmes de son temps, Hildegarde avaient des « connaissances médicales approfondies ».
      
    Mais Hidegarde de Bingen ne se cantonne pas à l’écriture : elle prêche, écrit des poèmes, compose pas moins de soixante-dix symphonies et fait preuve, dans l’administration des moniales, d’une grande clairvoyance et d’une certaine connaissance juridique.
    Le fin’amor et la célébration de la femme
     
    Si Hildegarde de Bingen se révèle poète à ses heures, elle est loin d’être la seule. Mais, avant de découvrir quel fut le rôle des femmes en tant qu’auteurs, il est intéressant de voir quelle vision la littérature médiévale a donné de la femme.
      Les « femmes savantes » : les femmes et l’art au Moyen Âge
    Les chansons de geste, qui apparaissent au tout début du XIIe siècle dans les pays de langue d’oïl ne font pas une bien large part à la femme, loin s’en faut. Dans la Chanson de Roland, par exemple, si le héros a bien une fiancée, Aude, il ne semble pas s’en inquiéter et, à l’heure de mourir, toutes ses pensées vont vers son frère d’armes, Olivier. Guillaume d’Orange est, comme la Chanson de Roland, une célébration du guerrier, même si Guibourc, l’épouse de Guillaume, joue un petit rôle. En fait, la femme ne semble entrer en littérature qu’avec l’émergence du fin’amor.
     
    Né dans les pays de langue d’oc, le fin’amor est l’expression poétique de l’idéal de l’amant courtois, une apologie de la douceur de vivre. Les troubadours célèbrent alors la langueur, le bon vin, le soleil, la beauté et, avec plus ou moins de courtoisie, la femme, objet de leur passion. Mais le fin’amor repose également sur l’idée que l’amour se confond avec le désir. Et le désir, une fois assouvi, disparaît, d’où la peur de l’assouvir vraiment. L’amour doit donc se mériter et si, dans la littérature courtoise originelle, la femme est accessible, ce n’est que difficilement.
     
    Un des premiers et des plus grands troubadours célébrant le fin’amor est sans conteste Guillaume IX, duc d’Aquitaine, qui contribuera de manière significative à faire du fin’amor un véritable art de vivre. Peu à peu, et sans doute sous l’influence d’Aliénor d’Aquitaine, petite-fille de Guillaume IX, cet art de vivre va s’étendre au Nord, aux pays de langue d’oïl. Là, il va se transformer lentement et devenir ce que l’on a appelé « l’amour courtois ». 
     
    L’amour courtois et la femme-objet
     
    L’amour courtois, terme inventé au XIXe siècle, désigne l’amour idéalisé et stylisé que chantaient les trouvères. Il y a donc bien une distinction à faire entre fin’amor du Midi et amour courtois, tel que le célébraient les pays d’oïl. Ainsi, la courtoisie du Nord met en avant les notions de loyauté, de générosité, d’élégance morale, de fidélité. La femme, qui est souvent idéalisée, n’est en fait qu’un acteur de second rôle, le premier étant tenu par le soupirant. Subissant toutes sortes d’épreuves, le héros doit donc s’élever, progresser en bonté, en générosité, en valeur, pour être digne de la dame, parangon de toutes les vertus. Une vision de la femme qui n’est pas plus réaliste que les écrits leur attribuant tous les défauts…
     
    Selon Huizinga, « aimer courtoisement est, pour le noble du XIIe siècle, la grande affaire de sa vie. C’est donc un idéal de culture se fondant avec celui de l’amour ». Mais sans doute faut-il voir dans cet « idéal de culture » une échappatoire, apparu bien à propos pour calmer les cadets de la noblesse. À cette époque, en effet, seul les aînés se mariaient et héritaient du fief. Les cadets ne se sentant pas de vocation à la prêtrise étaient condamnés à vivre en célibataire… jusqu’à ce que leur suzerain leur donne les moyens de « s’installer ». L’amour courtois permettait donc à ces chevaliers d’avoir un objet d’amour et même d’adoration… et de se rapprocher de leur seigneur. En effet, lorsque l’on étudie les romans courtois, on constate que l’objet de l’amour du héros est toujours la femme de son suzerain -Lancelot et Tristan en sont les meilleurs exemples. Il ne recherche donc pas tant l’amour de la dame -que de toute façon il n’aura jamais- que l’amitié de son seigneur, amitié qu’il extériorise en courtisant sa dame.
     
    De La Male dame à la Bonté des femmes
     
    La littérature médiévale était-elle profondément misogyne ? C’est ce que veulent nous faire croire certains érudits mais, comme pour tout, la vérité est rarement aussi tranchée. 
     
    Si on lit certains poèmes de Guillaume IX d’Aquitaine, on peut être choqué par les propos licencieux. Mais, à travers ses mots, tour à tour crus et poétiques, le duc d’Aquitaine célèbre réellement la femme, qui pour lui est avant tout belle et objet de désir. Quant aux romans courtois, ils semblent faire peu de cas de la femme en elle-même et célèbrent avant tout l’idéal de chevalerie. En fait, toute la littérature médiévale oscille entre ces deux tendances. 
     
    Ainsi, Dame escoillée ou La Male dame, poème normand du XIIIe siècle, joue sur l’inversion de l’image courtoise et dépeint une femme tyrannique avec son époux, le contredisant toujours. Par contre, à la même époque, Nicole Bozon compose Bonté des femmes qui, comme l’indique son titre, célèbre la femme sans pour autant l’idéaliser.
     
    Le mécénat féminin
     
    Comme on a pu le voir, les femmes étaient, à l’époque médiévale, souvent fort cultivées et elles eurent un rôle certain à jouer dans la propagation de la courtoisie. 
     
    La première d’entre elles est, sans conteste, Aliénor d’Aquitaine. Petite-fille du troubadour Guillaume IX, elle a été élevée dans la culture littéraire du Midi. Son arrivée à la cour de France et, plus tard, à celle d’Angleterre va grandement faciliter la propagation de cette culture dans les pays du Nord et elle peut être considérée comme un personnage central dans la renaissance médiévale du XIIe siècle. Mécène et protectrice des arts, elle influencera des troubadours, comme Bernard de Ventadour ; Wace lui dédiera le Brut et la Chronique des ducs de Normandie et Benoît de Saint-Maure son célèbre Roman de Troie. Les « femmes savantes » : les femmes et l’art au Moyen Âge
      
    Tous les spécialistes de la littérature médiévale insistent également sur le rôle qu’a eu Aliénor dans la diffusion de la légende de Tristan. Mais, « l’un des aspects les plus frappants du mécénat d’Aliénor est son caractère féminin ». Et en effet, on peut dire qu’elle a contribué très largement à permettre à la « dame » de faire une entrée triomphale dans la société comme dans la littérature.
     
    Mais Aliénor d’Aquitaine est loin d’être un cas unique et ses enfants, profondément marqués par ce qui prend l’allure d’un art typiquement familial, vont étendre et pérenniser son action.
      
    Ainsi, Richard Cœur de Lion, qui se piquait d’être un peu troubadour, écrira des poèmes ; Marie de Champagne fournira à Chrétien de Troyes le sujet de Lancelot ou le Chevalier à la charette, véritable « somme » sur la courtoisie, et fera de la cour de Champagne un des hauts-lieux de l’art courtois ; comme sa sœur, Alix de Blois se révélera un grand mécène, de même que Mathilde, épouse du duc de Bavière et de Saxe, pour qui la Chanson de Roland sera traduite en allemand ; quant au rayonnement des troubadours à la cour de Castille, il est également à mettre en rapport avec la présence d’Aliénor, une autre fille de la célèbre duchesse d’Aquitaine.
     
    Tobairitz et autres poètes
     
    Tout cela est très bien me direz-vous, mais il ne s’agit là que de mécénat. Que l’on sache, aucune des filles d’Aliénor n’a rien écrit qui ait été diffusé. Soutenir est une chose, influencer également, mais l’écriture était-elle donc l’apanage des hommes ? Eh bien non. On connaît le nom d’environ quatre cent cinquante troubadours, parmi lesquels une bonne vingtaine de femmes : les tobairitz.
     
    Ce terme méridional désigne soit les jongleuses accompagnant les troubadours, soit les interprètes -de trobar : chanter-, soit les auteurs elles-mêmes. On ne sait pas grand chose des tobairitz, qui intriguent plus qu’autre chose. Pourtant, leur existence permet de penser que, non seulement les femmes écrivaient, mais qu’elles prenaient également part aux joutes poétiques et qu’elles les organisaient. Ainsi, Marie de Ventadour (fin XIIe-début XIIIe siècle), épouse d’Elbe V, est célèbre à la fois comme auteur, pour ses dialogues avec Gui d’Ussel, comme inspiratrice de plusieurs poètes et pour avoir abrité des joutes, dans la plus pure tradition des cours d’amour.
     
    De même, la comtesse de Die, qui vécut sans doute dans le dernier quart du XIIe siècle, est l’auteur de quatre cansos -poèmes lyriques- et d’une tenso -dialogue ou discussion-, œuvres où, dans un style pur, la passion et la sincérité prédominent. Et si l’on connaît mal la vie de la comtesse de Die, ses œuvres supposent « une grande culture et une aisance littéraire surprenante ».
    Une autre poète médiévale, célèbre pourtant, a gardé sa part d’ombre. Les lais de Marie de France sont connus mais nul ne sait vraiment qui était leur auteur.
      
    Son prénom seul est connu, grâce à une note laissée dans ses Fables :
    Marie ai nun, si sui de France
    Marie ai nom et suis de France.

     
      
    Marie de France apparaît cependant comme l’un des auteurs les plus intéressants de la période médiévale. En effet, s’inspirant des contes de la tradition celtique, elle les a combinés avec le monde courtois du XIIe siècle. Voilà qui suppose déjà une certaine culture, puisqu’elle a trouvé ses « contes » chez Ovide, dans le Roman d’Eneas ou encore chez Wace. Selon Rychner, Marie nous offre « un bon exemple de ce qu’une culture et une pensée “ renaissantes ” peuvent apporter de “ moderne ” à la littérature… »
    Culture et savoir… malgré tout
     
    S’il ne fait plus de doute que les femmes étaient cultivées au XIIe siècle, qu’en est-il du reste de la période médiévale, soit des trois siècles suivants ?
    Une décision malheureuse va, au XIIIe siècle, éloigner les femmes des filières classiques du savoir : leur exclusion de et par l’Université.
     
    À l’origine, l’Université n’était qu’une « corporation » regroupant maîtres et écoliers. Mais, en 1215, elle va acquérir, selon les termes de Jean Favier, son « indépendance juridictionnelle et intellectuelle », notamment vis-à-vis de l’autorité épiscopale. Ainsi, maîtres et écoliers ont désormais la haute-main sur l’administration de l’Université, une Université qui se veut uniquement cléricale… et donc masculine (il est à noter cependant que l’Université de Paris tenta pendant deux siècles d’évincer également les ordres mendiants). 
     
    Exclues, les femmes sont donc privées du droit de recevoir son enseignement et de passer des diplômes. C’est justement ce qui justifiera l’interdiction aux femmes, par l’Université, de pratiquer la médecine. Elles ne pouvaient être médecins n’ayant pas les diplômes requis, diplômes qu’on leur refusait le droit de passer…
     
    Cela n’empêchera cependant pas les femmes d’acquérir des connaissances ou encore d’écrire. C’est le cas de Marguerite Porète, célèbre béguine du XIVe siècle, qui fut brûlée à Paris en 1310. Adepte de la doctrine du Libre-Esprit, elle rédigea un véritable ouvrage doctrinal sous le titre Miroir des âmes simples. Plus tard, Christine de Pisan s’imposera dans le monde littéraire de l’époque.
     

    Les « femmes savantes » : les femmes et l’art au Moyen Âge

     
      
      
    Une chroniqueuse à la cour de France
     
    Italienne d’origine, Christine de Pisan arrive en France vers l’âge de quatre ans, lorsque son père devient médecin et astronome-astrologue à la cour de Charles V. Mariée à quinze ans, elle devient veuve, en 1389 : elle n’a alors que vingt-cinq ans et trois enfants à charge, sans compter une mère et une nièce. Placée dans une situation matérielle extrêmement difficile avec la mort de son mari, Christine décide donc de se remettre à l’étude, tout en écrivant. 
     
    Déjà auteur de pièces lyriques et de ballades, Christine de Pisan va véritablement asseoir sa renommée en s’attaquant à la toute-puissante Université. Soutenue par Jean Gerson, théologien initiateur de la « dévotion moderne », elle se lance dans une critique acerbe de l’œuvre de Jean de Meung, le Roman de la Rose. La discussion durera trois ans et Christine en tirera, outre un Débat sur le Roman de la Rose, une grande notoriété.
    Abandonnant le style léger des ballades, elle se lance alors dans des œuvres didactiques, telles que le Livre de la Cité des dames, où elle fait l’apologie de la sagesse féminine, l’Epistre Othea, dont elle assurera en partie l’iconographie, le Livre de paix, où elle appelle les princes à la concorde et le Livre de la mutacion de fortune. Elle deviendra également la première femme chroniqueur en rédigeant le Livre des fais et bonnes meurs du sage roy Charles V.
      
    S’étant retirée au couvent de Poissy, Christine renouera une dernière fois avec l’écriture en composant, après le sacre de Charles VII, le Ditié de Jehanne d’Arc.
     
    Auteur prolixe, Christine de Pisan prouve également, à travers ses écrits, que les femmes de la fin du Moyen Âge avaient encore une certaine culture. C’est d’ailleurs ce que confirme l’étude des bibliothèques, des livres de compte ou même des testaments.
     
    Que lisaient-elles ?
     
    La recherche de Bertrand Schnerb, spécialiste de la Bourgogne aux XIVe-XVe siècles, sur Marguerite de Bécourt comparée à celle de Jacques Paviot sur la comtesse de Tonnerre permet d’avoir une vision, qui pour nous sera exemplaire, du niveau de culture des dames nobles -grande ou moyenne noblesse- au milieu du XVe siècle.
     
    La bibliothèque de Marguerite de Bécourt, qu’elle détaille elle-même dans son testament, comporte vingt-quatre manuscrits, ce qui n’est pas rien, parmi lesquels de grands classiques. On trouve deux livres de prière à l’usage des laïcs, huit traités de dévotion ou de morale, trois œuvres antiques ou ayant trait à l’Antiquité, cinq ouvrages d’histoire ou sur la façon de gouverner et trois œuvres littéraires : le Livre de Lancelot du Lac, le Roman de la Rose et le Cité des Dames de Christine de Pisan. Certes, outre les trois derniers ouvrages cités, cette bibliothèque paraît bien rébarbative et on pourrait penser qu’ils ne sont là que pour « faire genre », s’ils n’étaient pas tous en français, ce qui suppose qu’ils étaient destinés à être lus et étudiés.
     
    Jeanne de Chalon, comtesse de Tonnerre (v. 1388-v. 1450), semble, quant à elle, détenir la « bibliothèque type » du XVe siècle. Elle possède elle aussi des livres de prières, dont une Bible en français, des ouvrages historiques ou considérés comme tels, surtout axés sur l’Antiquité, des ouvrages didactiques, deux volumes traitant de géographie, Mappemonde et le Livre de Mandeville, et le Roman de la Rose, un incontournable.
    En comparant ces deux études, on peut donc dire que les dames nobles du XVe siècle ne lisaient qu’en français, aimaient être guidées dans leurs prières et se passionnaient pour les œuvres permettant de s’évader, que ce soit par le roman ou par les récits de voyages.
      
    En outre, l’étude de Jacques Paviot nous apprend que Jeanne de Chalon réunissait volontiers autour d’elle un petit cercle d’intellectuels, généralement des religieux, avec lesquels elle aimait à discuter morale et spiritualité. Pour ce faire, on suppose donc qu’elle possédait déjà une solide connaissance doctrinale et théologique propre.
      
    Les « femmes savantes » : les femmes et l’art au Moyen Âge
      
      
      
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