• Mademoiselle COCO CHANEL (I)

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    Qui a dit que la mode était superficielle?

     

    Orpheline, issue d’un milieu modeste, elle réussit à s’afficher comme la figure la plus influente de l’univers de la mode au vingtième siècle. Avant elle, les femmes de la Belle Époque portaient des corsets et des vêtements si structurés qu’elles pouvaient à peine monter et descendre d’une voiture.

    C’est justement l’avènement de l’automobile qui lui inspire la création du style « sport », un look épuré dont la coupe octroie raffinement et confort à la femme qui l’aborde. Elle ira même jusqu’à façonner le vêtement féminin dans le jersey, un tissu qui avait toujours été utilisé à la fabrication de sous-vêtements masculins. Voilà qui diffère des soieries et des dentelles, et annonce le début des coupes unisexes. Tout le travail de Chanel personnifie l’avant-garde.

    Nous lui devons aussi les fausses perles, les pierres du rRhin et l’or plaqué. Nous lui devons la popularité du bronzage et du rouge à lèvres. Coco, c’est la démocratisation de la mode, autrefois accessible à une élite. C’est la féminité dans sa forme la plus pure.

    Si les modes passent, le style Chanel demeure. D’ailleurs, Chanel No. 5 est encore le parfum le plus vendu dans le monde. Découvrez un documentaire sur l’histoire de la vie de cette femme hors de l’ordinaire, lundi et mardi à 21h30. Mercredi, visitez les ateliers actuels de la griffe Coco Chanel et découvrez comment cette marque survit au fil des décennies.

     

     

      

     

      

    Coco Chanel-Interview de Edmonde Charles-Roux
     
     

     

    Coco Chanel, un nom qui rime avec élégance, avec luxe, avec discrétion aussi. La fameuse créatrice a mis au point deux grands classiques : la petite robe noire, toute simple, et le parfum, ce célèbre Nø 5 que Marilyne Monroe portait pour dormir. Gabrielle Chanel est une " cousette " qui a accédé aux plus hautes marches de la haute couture. La légende de Gabrielle Chanel ressemble à ses créations, en portant haut l'anticonformisme.

    De l'enfance de Coco, on ne connaît pas grand-chose. La grande dame a ouvré toute sa vie pour " masquer ses origines ", comme l'a noté Edmonde Charles-Roux dans son ouvrage consacré à la créatrice (1). Elle est née à Saumur, le 19 août 1883. La petite Gabrielle est alors la deuxième fille illégitime d'Albert Chanel, un camelot, et Jeanne Devolle, couturière. La mère de la fillette meurt, épuisée par ses grossesses successives, à trente-trois ans à peine.
      
    Gabrielle a douze ans tout juste. Bientôt, un second coup du sort s'abat sur elle : son père l'abandonne, et va tenter sa chance en Amérique. Il ne reviendra jamais. Elle devient une orpheline, mot qu'elle ne pourra entendre, sa vie durant, sans être " glacée d'effroi ". La jeune fille est confiée à des religieuses, près de Brive, puis à Moulins. Elle apprendra la couture auprès d'elles.

    Moulins est une ville de garnison, Gabrielle est une jolie cousette, et elle a de l'ambition à revendre. " Tout engagée dans la guerre de plaire ", elle passe ses soirées à chanter devant des soldats Qui qu'a vu Coco dans le Trocadéro. Elle devient bientôt une sorte de mascotte, et gagne un surnom au passage.
     
     
      
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    Chanel, l'irrégulière Vie et destin.

     

    Pour Edmonde Charles-Roux, sa biographe, elle a su changer la vie des femmes quand d'autres n'ont fait que l'embellir.


    Pourquoi vous êtes-vous intéressée au personnage de Gabrielle Chanel ?

     

     

     


    Edmonde Charles-Roux.

      

    Elle est un cas unique dans l'histoire de la femme française. On ne peut pas imaginer extraction sociale plus modeste que celle des journaliers au XIXe siècle. C'était la plèbe. Le village d'origine des Chanel, c'était le Moyen ¶ge.
     

      

    Pensez que la fille d'un paysan d'une terre pauvre, les Cévennes, est arrivée à devenir l'impératrice de la mode nationale et internationale. Je ne connais pas de cas d'une ascension d'une pareille misère conduisant, par le métier manuel de couturière, à un véritable empire mondial.

     

      

    Vous avez dit que Chanel était un " génie de la vie ". Pourquoi ?
     

      

    Edmonde Charles-Roux.

      

    Elle savait attraper au vol les questions positives que la vie nous pose au lieu de les éluder ou de s'en détourner. Gabrielle Chanel était comme une abeille.
    Elle a fait de ses mains son alvéole jour après jour commençant dans une chambre de château où elle était une femme entretenue. Les jeunes femmes qui acceptaient de vivre hors mariage avec les fils de famille étaient vouées tôt ou tard à la misère.
    Elle est sortie de cette condition pour se retrouver couturière. Elle a boulonné, elle a commencé par faire des chapeaux pour ses copines. Elles étaient d'immenses comédiennes et lui ont fait une publicité à tout casser.

     

      

    Quel exemple pourrait illustrer ce génie ?Photos


    Edmonde Charles-Roux.

      

    En 1914, la Première Guerre mondiale éclate. Deauville se vide. Chanel reste. Elle se dit que les femmes riches vont tout perdre et devront refaire leur vestiaire, sans fla-fla. Elle gagne. Depuis les départements envahis, les riches se replient sur leurs résidences secondaires de Deauville.
    Mademoiselle Chanel a pris un risque financier. Sa première boutique avait pour tout personnel Chanel, ses sours et sa tante. Elles étaient leurs propres mannequins, ne l'oublions pas. Nous voyons cette minuscule entrave familiale, et nous pouvons déjà l'imaginer dans ce qu'elle va devenir.

     

    Pourquoi a-t-elle tant souffert dans sa vie privée ?


    Edmonde Charles-Roux.

      

    Gabrielle Chanel s'est donné un mal de chien toute sa vie pour occulter sa condition sociale. Elle disait qu'elle avait été élevée par des tantes assez riches, alors qu'elle a eu une enfance misérable, dans un orphelinat provincial près de Limoges. Elle a considéré que pour arriver dans sa vie sentimentale, elle devait cacher sa vérité.
    Gabrielle Chanel est l'antithèse de Madame Sans-Gêne. Elle ne s'est pas fait un étendard de ce qui était la noblesse de sa vie. Elle a multiplié les cachotteries, triché sur ses passeports, menti à ses meilleurs amis. Elle a essayé de faire écrire ses mémoires, par Louise de Vilmorin, par Kessel, par moi, par Morand. Et toujours elle nous dictait un conte de fées.

    J'ai lancé une vaste enquête personnelle sur Chanel. Mais aussi longtemps que Chanel vivait, je ne pouvais pas d'une main être reçue chez elle comme une amie et de l'autre écrire un livre qui lui aurait déplu.

     

    Comment évaluer les impacts de la mode sur la libération des femmes ?


    Edmonde Charles-Roux.

      

    Il suffit de regarder autour de soi. Peut-on entrer dans un avion avec une malle ou transporter trois ou quatre cartons à chapeaux dans les voitures d'aujourd'hui ?
    La rapidité de vie ne permet plus qu'on prenne au minimum une heure et demie pour s'habiller. Pendant la Première Guerre mondiale, les femmes faisaient tout, remplaçant les hommes partout, pas seulement dans les champs et à la maison mais dans les usines.
    Chanel s'en est aperçue. Elle a compris qu'il s'agissait de l'effondrement d'un monde. C'était une femme remarquablement intelligente.



    Gabrielle Chanel était un personnage ambigu. Comment appréhendez-vous ses positions politiques pendant la Seconde Guerre mondiale ?


    Edmonde Charles-Roux.

      

    Elles s'expliquent par un tempérament conservateur, un peu poujadiste, qu'on trouve dans des milieux parfois très modestes. C'était peut-être l'héritage de quelques vieux paysans cévenols, assis sur trois malheureuses pièces d'or, voyant le mal et la révolution partout.
    C'est possiblement aussi l'influence des hommes avec lesquels elle vivait. Ils étaient quelquefois fabuleux, comme le poète Reverdy, ou bien répréhensibles au maximum, comme Paul Iribe. C'est le milieu Iribe qui l'a poussée vers l'esprit de collaboration. Elle l'a payé très cher, par l'exil pendant près de dix ans.



    Vous avez écrit un ouvrage intitulé l'Irrégulière, ou mon itinéraire Chanel. Pourquoi avoir choisi ce titre ?


    Edmonde Charles-Roux.

      

    J'ai écrit mon livre en m'entretenant presque sans arrêt avec Aragon. Je trouvais formidable ce mot d'" irrégulière ". Mais quand il a vu le titre, il m'a dit : " Non mais ça va pas dans la tête ? Il faut mettre "Chanel" sur la couverture ! " Alors Aragon a lui-même décidé du sous-titre : Mon itinéraire Chanel. Il a rigolé, en disant : " À travers ce sous-titre, vous égalez Chateaubriand et son Itinéraire de Paris... " Au début du livre, je cite la phrase de Proust qui s'applique très exactement aux femmes dans la situation de Chanel.
    Je préfère " irrégulière " à " cocotte ", " poule " ou " femme entretenue ". Elle était une irrégulière par rapport à la société dans laquelle elle vivait et dont elle vivait.

     

    Pourriez-vous nous expliquer pourquoi Gabrielle Chanel a tant marqué son temps ?


    Edmonde Charles-Roux.

      

    Elle a changé la vie des femmes. Les autres l'ont embellie. Chanel a installé les femmes dans le XXe siècle, sinon le XXIe. Inventant tout.
    Les femmes ne sont plus esclaves de leurs robes. Elles ont dominé la mode à travers la tenue suggérée par Mademoiselle Chanel. Elle a été novatrice en tout, dans sa manière d'être, dans l'utilisation de son argent, le mécénat qu'elle a fait tellement délicatement en aidant les artistes sans vouloir être nommée. On parlait d'ailleurs des " pensions de la grande Mademoiselle ". Une novatrice, le mot suffit à lui-même.

     

    Lénaïg Bredoux (04/10/2003)  

      
      
      
     
     
     
     
     
     

     

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