Si vous vous souvenez bien, je m’étais arrêtée en 1810 avec le corset à la Ninon dans mon premier article sur les origines du corset. Il est grand temps de faire un bond dans le temps et de retrouver nos chères coquettes…
La Révolution industrielle
Ce n’est que vers 1819 que la taille, demeurée pendant une vingtaine d’années très haute, redescend petit à petit et commence à se marquer par le serrement d’une ceinture. A partir de 1825 la taille a repris la place qui lui est propre. Avec la vogue du Romantisme les femmes de la haute société et de la bourgeoisie veulent se dématérialiser, n’être plus qu’un corps léger et fin, pour cela elles se lacent de plus en plus fortement pour se créer une taille de guêpe.
On peut penser que seule une minorité de femmes portaient des corsets si fortement serrés. Cet aspect est vrai jusqu’au XIXème siècle. A partir de de cette période la Révolution industrielle touche tous les niveaux, notamment le secteur du textile. Ce boom économique va précipiter l’ampleur du corset et de son utilisation.
Le commerce crée une demande nouvelle, l’ouverture des magasins de nouveautés vers 1830-1840 qui deviendront les Grands Magasins à partir de 1860, permet aux femmes de toutes les classes, de pouvoir se vêtir à un prix moins élevé et d’avoir une garde-robe plus importante en comparaison des générations précédentes. La mode et le corset se démocratisent durant la Monarchie de Juillet sous le règne de Louis-Philippe de 1830 à 1848. Le commerce prend de l’ampleur et les marchands textiles utilisent ce progrès pour mettre en place une mode vestimentaire en perpétuelle évolution. Les femmes souhaitent suivre ces tendances, on voit fleurir les journaux féminins qui décrivent chaque tenue dessinée. S’échafaude ici le système que l’on connaît bien à notre époque, à savoir l’accroissement de la demande sous l’effet de la publicité qui crée l’envie.
Tous ces facteurs permettent de voir un pic de fabrication des corsets durant la seconde moitié du XIXème siècle. En 1860 on ne vend pas moins d’un million de corsets à Paris. Qu’il soit fait sur mesure par les corsetières, ou sur des tailles standardisées par la confection, chaque femme veut son corset.
Le corset cambré 1850-1870
Ce corset est assez court, il pince fortement la taille et met en valeur la poitrine et les hanches. Les seins sont à moitié dénudés et la gorge surélevée. Quant aux hanches elles ont un aspect beaucoup plus rebondies en comparaison avec la finesse extrême de la taille. Au corset cambré est associé le port de la crinoline-cage à cette époque. Les crinolines étaient composées d’un jupon à cerceaux en acier qui permettait de créer un volume extrême aux jupes des femmes. (Ces crinolines que nous pourrons admirer au musée Galliera dès le 29 novembre
Cette silhouette a été mise à la mode par l’impératrice Eugénie qui trouvait dans ce corset le moyen de mettre en valeur sa fine taille et son décolleté.
Le buste de la femme n’est pas du tout allongé, il est pincé entre la poitrine et les hanches, comme si son tronc avait diminué. Cette silhouette diminue la longueur du buste pour accroître l’effet créé de la crinoline. On peut y voir comme une opposition des formes et des volumes dans l’élaboration même du corps. Le haut de la silhouette doit être étroit et fin, tandis que les jambes sont cachées derrière une multitude de tissus et de cerceaux.
Le corset cuirasse 1873-1885
La circonférence exagérée de la crinoline lasse. A partir de la IIIème République le volume de la jupe s’exporte vers l’arrière de la silhouette. Le devant quant à lui devient plat. Un nouvel accessoire est créé en conséquence pour créer ce volume, il s’agit de la tournure. C’est un coussinet rigide rembourré, placé sur le postérieur. Elle accentue ainsi la cambrure des reins. La silhouette de la femme est différente si on la regarde de face ou de profil. De côté on voit apparaître comme un faux-cul.
Pour ce qui est du buste un changement s’opère dû à la nouvelle mode. les femmes utilisèrent alors le corset cuirasse. Celui-ci est conçu pour amplifier, comme la tournure, la chute des reins, de ce fait il est très cambré à la taille. Pour obtenir un nouveau maintien du corps on change la forme du corset. Les seins sont plus vêtus, la taille est allongée, et le ventre amplifié par l’utilisation d’un busc, en forme de poire, qui est inséré entre la doublure et le tissu du corset. Ce busc est placé verticalement au centre, entre la taille et les hanches, il donne une forme rebondie au ventre. Les hanches enfin sont enveloppées davantage. Pour obtenir une plus forte cambrure au niveau des reins, à l’endroit même où commence la tournure, on lace très fortement la taille.
Un changement progressif s’opère, le buste est allongé tout en gardant l’amplification du volume des seins et des hanches. Toute la silhouette est conçue autour de l’amplification à outrance de la cambrure des reins.
Le corset droit devant 1890-1910
Ce n’est qu’à la toute fin du XIXème siècle qu’apparaît une mode totalement nouvelle qui crée un maintien différent au corps de la femme, la silhouette en S. Celle-ci peut être résumée en ces termes, une poitrine généreuse, une taille ultra fine et une croupe saillante: on obtient un S vu de profil.
Où se trouve la nouveauté dans cette silhouette? Elle réside dans la disparition du volume artificiel du bas du costume. La silhouette est beaucoup plus fluide.
Pour arriver à une silhouette longue et gracile, on met en place un corset droit devant ou corset sans ventre. il a pour but, comme l’indique son nom, de faire disparaître toute rondeur au niveau abdominal. Le corset est allongé, il descend très bas, il emboîte complètement les hanches et descend jusqu’à la région du pubis. En revanche ce qu’il gagne en longueur en bas, il le perd en haut, la poitrine n’est plus comprimée comme avant, les seins ont plus de liberté. Les courbes du buste sont sublimés en contorsionnant de manière très stricte cette partie du corps. Le corps doit se cambrer énormément pour obtenir cette silhouette en S. Le corset est serré abusivement au niveau de la taille pour amplifier la chute des reins, comme c’était le cas pour le corset cuirasse. Mais ici la mode bannit le ventre. La femme est vraiment prise dans un étau, entre son dos cambré et son ventre rentré, le thorax et le bassin sont comme isolés l’un de l’autre par l’évidement artificiel de la taille.
Chaque silhouette créait un maintien différent, une posture du corps qui évoluait par rapport à la précédente ou changeait radicalement. Le costume à cette époque se compose de plusieurs strates avant d’arriver à la robe elle-même. Le corset constitue une étape décisive dans la toilette de la femme. Cet artifice n’est possible et réussi que pour une seule raison: la zone du ventre est malléable. C’est l’unique section de la colonne vertébrale qui ne soit pas protégée par les os. Ainsi les femmes peuvent transformer leur corps, car sa texture accepte toute sorte de déformations.
En revanche le port du corset ne renseigne pas tout de suite sur les effets secondaires et dangereux d’une utilisation quotidienne. Le corps souple et transformable semble en bonne santé, même s’il cache des conséquences néfastes pour le corps et l’organisme des utilisatrices…
A suivre
La guêpière
Sous vêtement féminin, objet de séduction par excellence, la guêpière a la particularité d’être « deux en un ». En effet, la guêpière est un corset auquel sont accrochées des jarretelles, servant à fixer les bas sur les hanches. Mais contrairement au porte-jarretelles, la guêpière ne s’appuie pas sur les hanches.
Rendue célèbre par toutes les pin-up qui posaient pour New Look dans les années 1950, la guêpière n’est pourtant pas devenue incontournable dans la garde robe féminine.
Du Corset à la guêpière
A la fin du XIXe siècle, le corset vit des heures difficiles. Il s’accommode mal, en effet, de la mode très masculine de l’époque (les années folles), et la pratique du vélo par les femmes dans les années 1910… La première guerre mondiale sonnera le glas du corset, les femmes lui préférant la gaine, plus souple et plus pratique.
La guêpière apparait au sortir de la Seconde Guerre Mondiale. En 1946, l’atelier d’un couturier créé une guêpière très papillonnante, sensée incarner la frivolité. Elle avait alors pour objectif d’allier le confort et le glamour, être facile à porter, magnifiant la taille et la poitrine des femmes.
Mais, même si la guêpière est devenue un accessoire de séduction, d’érotisme ou de coquetterie sous une robe de mariée, pour pimenter la nuit de noce, la guêpière ne s’est jamais imposée comme un sous-vêtement de tous les jours. Le soutien gorge et le collant lui ayant volé la vedette.
En effet, le soutien gorge était moins contraignant à porter et le collant ayant remplacé les bas dans les années 1960, avec la mode de la mini-jupe, le porte-jarretelle avait perdu de son utilité…