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     Poupées BARBIE 

      

    L'apparition de la poupée Barbie, en 1959, peu après Lolita (1955), semble avoir marqué une rupture, un changement dans les pratiques sociales liées à l'enfance et dans la socialisation des petites filles, car elle substitue une poupée femme à une poupée enfant.

    Ce phénomène était-il vraiment nouveau ? N'y avait-il pas des poupées « mannequins » aux XIXe et XXe siècles ?1 Bleuette, en France, au début du siècle, et bien d'autres, dès le XIVe siècle. Ainsi la poupée Barbie suggérerait seulement que le cycle de la vie des poupées est un éternel recommencement. Cependant la singularité de la poupée Barbie s'affirme sur plusieurs points : son caractère « sexy » et pin up ; son succès non démenti depuis plus de trente ans ; le caractère symbolique de son personnage et sa diffusion mondiale.

      

    La poupée est un jeu d'enfant ­ au double sens du terme ­ c'est un jeu joué par les enfants et qui a traditionnellement pour objet un enfant2. Mais c'est aussi un jeu d'adulte car l'enfant se projette dans l'avenir et traditionnellement dans le rôle de mère. Pourtant avec Barbie la poupée est d'un âge indéterminé, prétendument adolescente mais en réalité femme. Et du même coup se pose la question du rapport de l'enfant à la poupée.

      

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    Celle-ci n'incarne plus le rôle de mère mais de femme. Avec la poupée Barbie, la fonction de parent disparaît ; l'enfant qui joue n'est pas censée jouer à la mère, et dans la vaste « famille » qui entoure Barbie les parents sont totalement absents. Ils n'apparaissent donc ni en joueurs ni en jouets ­ à la différence d'autres marques qui fabriquent des familles avec parents.

      

      

    Pour comprendre la signification du phénomène Barbie, la poupée sans père ni mère, nous interrogerons d'abord le contexte historique dans lequel elle est née. Nous examinerons de près ses origines, pour considérer ensuite la poupée comme marchandise avant de l'étudier comme jouet. Puis nous déterminerons progressivement la signification du personnage et de son message, c'est-à-dire la pensée Barbie, étroitement liée à la culture Barbie.

      

      

    Barbie et les années 1950

    Aux États-Unis, les années 1950 sont celles de la guerre froide, du baby boom, de la feminine mystique3 du consumérisme triomphant, années où sont glorifiées et exploitées les valeurs incarnées par la famille, la maternité, l'enfance. C'est aussi l'époque où la commercialisation de ces valeurs donne une importance particulière à une étape du cycle de vie des jeunes ­ l'adolescence. Les teenagers acquièrent une visibilité particulière, avec la musique rock, les transistors, les socquettes et les bagnoles à moteur trafiqué ( hot rods). Selon les termes de Marilyn Ferris Motz, « l'adolescence est vue comme une période unique dans la vie »4.

      

      

    La culture des adolescents donne lieu à une exploitation commerciale sans précédent et l'adolescente devient une star de la scène sociale avant d'être une star tout court. À l'écran on voit deux modèles de beauté féminine : la femme voluptueuse, du style Ava Gardner, Heddy Lamar, Dorothy Lamour et la beauté adolescente qui n'est pas encore une femme, incarnée dans les films par des actrices adolescentes comme Debbie Reynolds et Sandra Dee5. Les deux se combinent, pourrait-on dire, dans Marilyn Monroe dont le côté enfantin rappelle les stars adolescentes et le sex-appeal la femme voluptueuse.

     

      

    Ainsi le pouvoir de séduction de l'adolescente s'affirme au cinéma et, d'une certaine façon, avec la poupée Barbie. Ses activités au début sont caractéristiques de celles des teenagers : elle fait du baby-sitting, elle va danser… Certes Barbie évolue dans le temps : étudiante dans les années 1970, elle fait carrière dans les années 1980. Mais elle pratique le sport et elle suit toujours la mode, celle-ci étant, en quelque sorte, le fil conducteur de son évolution. Néanmoins, jusqu'à une époque très récente, Barbie est restée fidèle à l'idéal féminin des années 1950, à l'écart de toute activité professionnelle.

     

      

    Les années 1950 sont aussi celles où le baby boom permet à l'industrie du jouet de se développer de façon extraordinaire et de contribuer à la culture de masse : or, la poupée Barbie sera un des produits emblématiques de cette culture6. Tous les récits sur la création de Barbie colportent l'idée que la poupée est née dans la tête de la femme du fondateur de Mattel en voyant jouer sa fille Barbara. Mais elle est aussi présentée comme le produit du génie inventif des Américains, car on souligne toujours les noms des designers (hommes) américains qui l'ont dessinée, Jack Ryan, selon la documentation Mattel Californie, et Bill Barton, codesigner selon Newsweek7. La réalité est un peu différente : Barbie est née d'une copie d'une poupée allemande, Lilli, créée au début des années 1950 et présentée à la foire de Munich8. S'il n'y a aucune trace de ce fait dans la documentation fournie par Mattel Californie, ni dans les journaux, curieusement la documentation officielle de Mattel France y fait référence.

      

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     Le couple Handler qui reprend l'affaire après le départ de l'associé Mattson est décrit en ces termes : « Elliot le créatif et Ruth la commerciale ; le couple impose rapidement Mattel comme fabricant de jouets réputé aux États-Unis, mais aussi à l'étranger, tandis que Ruth parcourt en effet l'Europe à la recherche d'idées et de contrats. L'histoire raconte que c'est lors d'un voyage en Allemagne qu'elle découvrit en 1955 un personnage de bande dessinée très populaire : Lilli. Et Lilli, conçue au départ comme un personnage pour le quotidien allemand Bild Zeitung, devint une poupée pour adultes »9. Le conte de fées n'est pas abandonné pour autant : « Plus tard, en voyant jouer sa fille avec des figurines de carton qu'elle habillait, Ruth aurait eu l'idée de créer une poupée en trois dimensions dans laquelle la petite fille pourrait se projeter : une poupée mannequin avec de vrais vêtements et de vrais accessoires.

      

    Le célèbre concepteur Jack Ryan eut ensuite le privilège de la façonner et de lui créer son inimitable silhouette fine et élancée qui fit son succès » (document Mattel France, Barbie, Histoire d'une star). C'est ce que reconnaît enfin l'ouvrage de Billy Boy, Barbie,Her Life and Times (1987)10.

    Ce qui est intéressant ici, c'est le va-et-vient entre l'Europe et l'Amérique. La culture de masse a souvent puisé ses idées en Europe, mais le produit a dû être adopté par les États-Unis pour être ensuite diffusé dans le monde entier11. Soulignons également le contraste avec le XIXe siècle, époque à laquelle les poupées européennes faisaient voyager les modes vers les États-Unis. Au XXe siècle, la poupée Barbie fait voyager le prêt-à-porter américain vers l'Europe.

      

    Barbie une marchandise, un jouet en évolution constante

    Au début des années 1990, la firme Mattel, qui produit la poupée Barbie, est un des plus gros fabricants de jouets du monde. Son siège se trouve à El Segundo en Californie du sud. Elle emploie 15 000 personnes, possède 24 filiales et 8 usines dans le monde (dont une en Italie). Son service « Design and Development » compte 200 personnes. C'est Jill Barad qui a fait la carrière de Barbie après avoir elle-même fait carrière dans les produits de beauté.

      

    La poupée Barbie a d'abord été fabriquée aux États-Unis et au Japon ; et plus tard dans divers pays d'Asie du sud-est : Malaisie12, Philippines, Formose, Corée, République Populaire de Chine, Indonésie, Hongkong et Mexique. À en croire un récit paru récemment dans Mondo Barbie, à l'époque où les poupées étaient fabriquées en Californie, la visite de l'usine était un divertissement proposé aux enfants en vacances13.

    La firme Mattel avait un chiffre d'affaires global de 1,6 milliards de dollars en 1991, les ventes de la poupée représentant environ 1 milliard. Selon Le Figaro du 5 mars 1993, le chiffre d'affaires de Mattel a augmenté de 17% en 1992 par rapport à 1991 et les bénéfices ont augmenté de 31%. Source essentielle de revenus, la poupée Barbie se vend dans plus de 100 pays. La firme a des formes de commercialisation adaptées à chaque nation, l'exemple de Mattel France pourrait être exploré pour illustrer les caractéristiques de ce marketing « nationalisé ».

      

      

      

    Mattel déclare avoir vendu 650 millions de poupées dans le monde depuis 1959. En 1963, la firme en avait vendu 5 millions aux États-Unis, en 1988, 20 millions, en 1989, 30 millions et 50 millions dans le monde14. En 1983, Newsweek estimait à 20 millions le nombre de vêtements de poupées vendus dans l'année. Tous les records ont été battus en France avec 3,5 millions de poupées vendues en 1992 (dont 600 000 Barbie « ultra-chevelure », un des derniers modèles aux cheveux très longs). Toujours en France, on aurait vendu en 1992 trois millions de tenues, quatre millions de paires de chaussures et 150 000 sacs à main15.

      

    C'est que les petites filles se les arrachent, ces poupées, si l'on en croit les chiffres fournis par Mattel et la presse : les petites Américaines en posséderaient sept en moyenne, les petites Françaises âgées de 3 à 11 ans deux, les Italiennes trois, les Allemandes trois. « Celles qui n'en ont aucune sont minoritaires : 14% en France, 2% en Allemagne Fédérale, 3% aux États-Unis, 4% en Italie »16.

    Outre la vente de Barbie, Mattel passe des contrats de partenariat avec divers groupes, le groupe Disney, par exemple. La stratégie commerciale de la firme, c'est aussi de pousser au maximum la vente des accessoires de Barbie et d'établir des accords avec des fabricants de vêtements (en particulier les vêtements de nuit d'enfants). Mattel a passé contrat avec la firme Aviva, spécialiste de chaussures d'enfants et avec Benneton ( joint venture)17.

      

      

      

    Il est des collectionneurs qui possèdent 5000, et jusqu'à 11 000 poupées Barbie. D'où l'impression d'une multiplicité de modèles. En réalité, il y a une poupée de base, qui a subi quelques modifications depuis sa naissance, mais qui est restée fondamentalement la même. Selon la documentation Mattel France, « Barbie avait la silhouette idéale dans l'optique de la culture occidentale : jambes élancées, longs bras, taille fine, long cou… la beauté à l'état pur ». Cette beauté est anatomiquement improbable : les mensurations de Barbie (d'une grandeur de 29 cm à l'origine) en font un prodige ou un monstre de la nature…, sa poitrine proéminente étant hors mesure par rapport au reste18.

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    L'âge de Barbie est indéterminable ­ à la fois adolescente supposée et adulte proclamée, sexuellement typée mais anatomiquement incorrecte ­ pour ne rien dire de Ken, son compagnon. Plusieurs « générations » de Barbie se sont succédées entre 1959 et 1971. Les tout premiers modèles étaient soit bruns soit blonds, mais très rapidement la poupée blonde s'est imposée.

    À voir le nombre de modèles mis sur le marché (trente par an environ ces derniers temps), on ne peut s'empêcher de penser aux changements des modèles de voiture. L'obsolescence aurait-elle aussi un sens quand on parle de poupées ? Malgré la nouveauté sans cesse proclamée, la poupée reste identique. Les changements sont mineurs mais significatifs. Ils tiennent aux cheveux, à la taille, à la couleur, et surtout aux costumes. Il est vrai que la morphologie de Barbie s'est un peu modifiée.

     

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    Dans les deux années qui ont suivi sa naissance son visage s'est adouci, ses sourcils sont devenus moins accentués19. En 1963, Barbie a encore changé de visage grâce à des perruques interchangeables. En 1967, elle a pris un visage plus souriant, un regard plus droit, des cheveux longs et son buste pivote. Grande innovation cette année-là : les anciennes poupées peuvent être échangées contre les nouvelles ; moyennant quoi, celles-ci ne coûtent qu'un dollar cinquante au lieu de trois dollars (1,2 millions de “vieilles” poupées auraient été rendues en un mois). Ce qui fait dire à Alvin Toffler que l'on apprend ainsi très tôt aux petites filles que les objets de consommation sont faits pour être renouvelés. Nous sommes bien à l'ère du jetable20.

      

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    En 1971, dans la série dite « Malibu », Barbie et Ken (né en 1961) apparaîtront bronzés. En 1973, Ken, à son tour, change de visage : il a des cheveux plus longs, une barbe, des moustaches et des pattes. Barbie a les traits de Super-Star Barbie. À la fin des années 1970, une Barbie « géante » de 45 cm est mise sur le marché, mais c'est la Barbie de 29 cm qui continue d'être la plus vendue. Dans ces années-là, Barbie ressemble de plus en plus à un photo-model, reflétant l'extraordinaire succès de l'industrie de la mode et l'influence des magazines de mode comme Seventeen, lancé dans les années 196021.

     

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    Au même moment les mannequins deviennent des vedettes et la photo de mode est de plus en plus sophistiquée. Les magazines de mode propagent le concept de beautiful people, en s'inspirant de célébrités (comme Jacqueline Kennedy) qui par leur richesse et leur goût sont l'objet de reportages innombrables dans les magazines. Seront d'ailleurs incluses dans les nouveaux modèles Barbie des vedettes de la télévision, sans oublier Miss America.

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    Dans les années récentes, le renouvellement des modèles s'accélère. En 1992, Mattel crée une Barbie “mannequin” justement, de la taille d'un enfant « My Size Barbie »22. Elle est présentée comme « la première poupée Barbie avec laquelle les petites filles peuvent échanger des vêtements ». Son prix, 100 dollars, ne la met pas à portée de toutes les bourses, mais, en même temps, sont mises sur le marché deux Barbie spéciales : « The Empress Bride », d'une valeur de 250 dollars, en crinoline de tulle rose et une diva miniature « Neptune's Fantasy » pour 170 dollars. L'une et l'autre parlent, ce qui nous amène à dire que les modifications morphologiques sont peut-être moins flagrantes que les changements techniques.

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    Au départ, complètement rigide, la poupée Barbie a acquis, par la suite, une certaine souplesse. En 1964, elle sait plier ses genoux, ses yeux s'ouvrent et se ferment. À partir de 1965, toutes les poupées de la famille ont des jambes articulées. En 1967, son buste pivote. L'année suivante, Barbie se met à parler. Au début des années 1970, une nouvelle amélioration technique permet d'articuler les mains et les pouces, puis vient une poupée (Kelley) dont on peut friser et laver les cheveux. En 1975, on crée la « Growing Up Skipper » qui a la capacité de grandir : grâce à un système de rotation de ses bras, elle s'allonge et sa poitrine se développe.

      

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    Cette poupée provoqua de vives réactions chez les féministes et fut retirée du marché deux ans plus tard23. La même année, grâce à une autre amélioration (une pression dorsale), des poupées dites « olympiques » pourront faire des gestes. En 1979, Barbie envoie des baisers et fait un mouvement du bras si l'on appuie sur son dos. Et elle peut se maquiller grâce à un petit tube de rouge à lèvres. En 1986 la firme Mattel a même mis sur le marché des poupées qui ont toutes un handicap24.

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    On sait que l'activité langagière de Barbie a été récemment perfectionnée. La Teen Talk Barbie prononce quatre phrases sélectionnées parmi 270 phrases programmables. Une des phrases choisies « le cours de maths est duraille » a provoqué un tollé chez les féministes de l'Association des femmes universitaires (AAUW) et de l'Association des professeurs de mathématiques (National Council of Teachers of Mathematics)25. Or, les phrases choisies étaient, paraît-il, le produit d'un sondage qui avait permis de savoir ce que les enfants souhaitaient entendre. Autre innovation de 1992 : la Barbie sirène qui chante sous l'eau et dont la chevelure change de couleur dans l'eau glacée et « Miss Make Up », laquelle change de teint, sans parler de la « Totally Hair Barbie » dont nous avons vu qu'elle faisait des ravages sur le marché français.

     

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    Jusqu'en 1990, la seule poupée que l'on voyait dans la publicité écrite et télévisée avait un teint clair et des yeux bleus26. Ce n'est qu'à partir de cette date que Mattel, conscient de l'importance du marché « ethnique » a inséré les poupées « ethniques » dans sa publicité. Car si le modèle qui se vend le plus reste le modèle « occidental », en 1967, Mattel a mis sur le marché une poupée noire, Francie, à laquelle sont venus s'ajouter par la suite Marina, l'Asiatique, Teresa, l'Hispanique et Christie et Steven, le couple de noirs. Tout comme l'Asiatique ou l'Hispanique, la Noire n'était qu'une version en couleur peu typée de la poupée Barbie. Compte tenu de la volonté de certains groupes d'affirmer leur identité ethnique, Mattel a lancé en octobre 1991 une nouvelle série de poupées noires Shani plus typées.

      

      

    Commentaire d'une responsable de chez Mattel : « La Barbie noire a été bien accueillie, mais elle n'était pas considérée “ethniquement correcte” ». Les poupées Shani ont un visage dont les traits ressemblent davantage au type africain-américain : « la firme espère que cela l'aidera à conquérir une plus grande part du marché »27. C'est l'argument décisif comme le montre l'exemple du Japon. Moba Barbie, la poupée que Mattel avait fabriquée spécialement pour le marché japonais en 1983, était conforme « à l'idée que l'on avait de ce que le consommateur japonais voulait à l'époque » ­ « une poupée aux traits aimables, aux yeux de biche, avec un nez retroussé, de douces lèvres et l'apparence d'une petite fille ». Le Japon était le seul pays où la poupée Barbie déviait par rapport à la norme. Mais tests et enquêtes ont récemment prouvé que « le marché japonais est prêt pour une version plus sophistiquée de la poupée car l'attitude des Japonais à l'égard des biens de consommation occidentaux a changé. » On trouve désormais sur le marché une poupée plus occidentalisée.

     

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    Mattel a produit un certain nombre de poupées qui, dans la publicité, dans les journaux des Fans de Barbie sont présentées comme faisant partie de sa « famille » et de ses amis. Successivement sont apparus Ken, le petit ami de Barbie (1961), Midge, la meilleure amie de Barbie (1963), Skipper, la petite sœur et Allan, l'ami de Ken (1964), Skooter et Ricky, amies de Skipper (1965), Francie, la cousine « moderne » de Barbie, Tutti et Todd, petite sœur et petit frère de Barbie et Skipper (1966). Puis, de nouveaux amis Casey (1967), Stacey, qui est anglais et Christie, noire, font leur apparition en 1968.

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    Le cercle s'élargit dans les années 1970, puis se rétrécit par la suite. Parallèlement aux membres de la « famille » apparaissent des vedettes de télévision (1972). Selon la formule citée dans Le XXe siècle des femmes, « la seule Française `Barbifiée' sera Chantal Goya (1990) »28.

      

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    Dans les années 1980, à côté des poupées « ethniques » Mattel lancera la collection des Barbie internationales : ­ on aurait dit jadis folkloriques ­ Italienne, Parisienne, Anglaise, Esquimaude, Hindoue…

      

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    La naissance de la poupée Barbie s'est accompagnée de la création d'un univers, peuplé d'autres poupées et surtout d'objets, d'accessoires, d'équipements de toutes sortes, allant des patins à roulettes à l'ordinateur en passant par le hulla hoop, la boîte à maquillage, les yachts, les « maisons de rêve »... La présentation de Barbie est une « mise en situation », constamment renouvelée, qui préfigure les « installations » de l'art contemporain.

     

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    Avec la venue de Barbie, on a vu également surgir le Club des amies de Barbie (et, dit-on même, des Barbie Block clubs de quartier…). En 1963, le courrier de Barbie, selon Newsweek, atteignait 10 000 lettres par semaine aux États-Unis29. Quinze personnes de la firme Mattel étaient chargées de faire fonctionner le club qui publiait un magazine Barbie auquel 100 000 petites filles étaient abonnées (et comprenait environ 500 000 membres dans le monde).

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    En 1982, Mattel France a fondé un club qui, paraît-il, a remporté un vif succès. En France, Barbie enverrait en moyenne par an une dizaine de messages personnalisés à chaque membre. Le plus important reste cependant les histoires de Barbie que raconte le magazine et les jeux qu'il propose. Selon un article du Nouvel Observateur qui, visiblement, utilisait la documentation maison, 300 000 petites Françaises adhèrent au Club où arrivent 50 à 100 lettres par jour. Des responsables soulignent l'efficacité « implacable » du Club : « Notre but est d'utiliser cet outil formidable qu'est le courrier personnalisé pour fidéliser notre clientèle de petites filles, 300 000 au départ. Et le parrainage permet d'en toucher de nouvelles. Nous avons là une cible privilégiée pour présenter nos produits »30.

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    Depuis des années, la poupée Barbie est devenue une star de la télévision31. Des émissions publicitaires (dont certaines durent 30 minutes) mettent en scène diverses histoires dont Barbie est l'héroïne et qui présentent les innombrables costumes, objets, animaux favoris qui peuplent son univers. Films, vidéocassettes et compact-disques font de Barbie un personnage vedette et créent une « culture Barbie » qui inspire les jeux des enfants.

      

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    Le modèle Barbie

    Mattel s'est toujours efforcé de doter Barbie des attributs d'une personne humaine. Ainsi le discours publicitaire présente-t-il la « biographie » de Barbie. Son curriculum vitae est jalonné d'activités professionnelles successives : baby-sitter, pilote, docteur, rock star… Mais, dans cette « biographie », on appréciera tout particulièrement le passage suivant : « En 1967 alors que les États-Unis se débattaient dans les problèmes de l'intégration raciale, Barbie prit une décision audacieuse. Un an avant le Président Johnson et la loi sur les droits civiques, elle devint la première poupée à avoir une amie noire, Francie. L'année suivante, Mattel introduisit Christie, une autre amie noire avec des traits racialement corrects »32. On s'étonne de ne pas voir Francie et Christie participer aux manifestations du mouvement noir et de ne pas trouver, dans les mises en scène présentées par Mattel, la prison de Birmingham et la marche de Selma.

    Dans un genre plus futile, rappelons qu'on célèbre constamment les anniversaires de Barbie. Ceux-ci sont autant d'« événements » qui la font exister aux yeux du public. Un des derniers, relaté par la presse : l'ambassade américaine de Londres a donné une Barbie birthday party le 9 mars 1993, jour supposé de la naissance de Barbie, sous les auspices de Mattel U.K., party à laquelle avaient été conviés trente petites filles et un petit garçon dûment sélectionnés par un concours33.

     

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    Autre élément d'« humanisation » : la famille. Et pas seulement celle que constituent les autres poupées désignées comme ses frères et sœurs, mais sa famille d'origine. Car la poupée orpheline a quand même des parents. Dans la légende sur la création de la poupée, Barbie, Ken et Skipper sont identifiés aux enfants des fondateurs de la firme Mattel dont ils ont reçu les noms. En toute occasion, on cherche à identifier Barbie à une personne : récemment, on l'a comparée à la responsable de la promotion chez Mattel. Enfin, Barbie ou Ken existent aussi par la controverse. Mattel a produit un modèle de Ken qui porte un costume et une boucle d'oreille pouvant suggérer qu'il est homosexuel.

      

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    Aussitôt la presse s'enflamme. Un article de New York Newsday fait réagir diverses personnes : une mère anonyme, la directrice des relations publiques de Mattel, un vendeur, un designer de pendentifs pour les gays, un coiffeur de stars et un spécialiste de vêtements pour hommes donnent leur avis et font exister Ken en tant que personne34. Vu le succès de Barbie, divers fabricants ont tenté de la copier. Mais, ironie de l'histoire, puisque Barbie est elle-même la copie de la poupée allemande Lilli, Mattel a éliminé à coup de procès ses concurrentes en accusant leurs fabricants de plagiat. Mais là encore, la concurrence est toujours présentée en termes personnalisés et non en termes de business35.

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    Ce qui a peut-être contribué à donner à Barbie le statut d'une personne ce sont les réactions qu'elle a suscitées chez les psychologues, les éducateurs et les médecins. Ils lui ont attribué un pouvoir, une influence que l'on associerait davantage à une personne réelle qu'à un morceau de plastique de 29 cm. Cela était surtout vrai dans les années qui ont suivi l'apparition de Barbie. Témoin ce médecin : « Pendant un colloque de l'École de médecine de l'université de Californie sur les adolescents, le Docteur Alan F. Leveton, chef du service de thérapie familiale de l'Hôpital Mt Zion, a affirmé que des problèmes suscités par Barbie harcelaient les médecins »36.

      

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    Pychologues et médecins ont accusé Barbie de rendre anorexiques les petites filles désireuses de lui ressembler… Au début des années 1980, un des co-designers de Barbie se demandait si la poupée n'était pas plutôt « une malédiction qu'une bénédiction » en constatant que « Barbie est devenue une obsession chez les petites filles »37. Récemment un journal français présentait un cas extrême d'identification : la légende de la photo d'une jeune fille parue dans L'Humanité du 18 février 1993 nous apprenait que « cette jeune personne est passée 18 fois en quatre ans sur le billard des chirurgiens esthétiques pour pouvoir ressembler trait pour trait à son idéal de beauté féminine : la poupée Barbie ». Apparemment de la poupée femme à la femme-poupée il n'y a que quelques points de suture.

      

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    Des éducateurs ont jugé inquiétant le fait que « cette adolescente en formation précipite des mouflettes dans le monde des soutiens-gorge, des gaines, des robes de soirée et des mariages d'adolescents »38. Une enquête Mattel montre qu'à la fin des années 1960 l'âge moyen des petites filles qui jouent à la poupée Barbie était tombé de 10 ans à 6 ans. Il semble qu'aujourd'hui la poupée a le plus de succès auprès de petites filles de plus en plus jeunes, entre 4 et 10 ans.

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    La popularité de Barbie soulève la question : qu'est-ce qu'être une petite fille dans la société américaine ? Y a-t-il même encore des petites filles dans une telle société ? Dès les années 1960 certains en doutaient. Pour un journaliste, il était clair que « Barbie, Ken et 3 poupées de son entourage ont été conçues pour les petites filles qui détestent être petites »39. N'était-ce pas d'ailleurs une poupée dont la garde-robe et l'habitation luxueuse visaient à satisfaire les fantasmes des mères ?

     

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    Ces réactions soulèvent la question de savoir si Barbie incite les petites filles à devenir prématurément des adolescentes voire des adultes et en suscitent une autre : Barbie a-t-elle une influence ­ et laquelle ­ sur ces petites filles ? Une idée très répandue ­ parmi des groupes, par ailleurs en désaccord ­ semble bien être que Barbie est un modèle et l'on retrouve ici le thème, cher aux sciences sociales américaines, du role model. Cette notion renvoie à une idée très « personnalisée » de la construction de l'individualité : vous deviendrez ce que d'autres personnes ont été avant vous en les imitant dans le rôle social qu'elles assument. Outre le fait que la notion de rôle pose problème, une telle vision de la construction de l'individualité ne tient pas compte de l'ensemble complexe des réalités sociales et personnelles et ramène tout à une sorte de calque d'un modèle.

      

      

    Sur la question de savoir quelle sorte de modèle est Barbie les avis divergent. Selon la documentation de Mattel France, la « force de la poupée Barbie » est d'incarner « l'idéal physique et moral de l'Amérique et de la culture occidentale ». Un des slogans de Mattel dans les années 1960 ne disait-il pas « des jouets qui façonnent le caractère »40. Tout récemment, pour défendre et valoriser sa créature, Mattel a trouvé les mots-clés : « S'il est vrai que Barbie est très soucieuse de la mode, elle a aussi été un modèle très positif ­ à beaucoup d'égards un leader »41.

      

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    De leur côté, les critiques des années 1960 ont souligné que le contenu du « rôle » était défini par la firme Mattel. Les féministes des années 1960-1970 ont, pour leur part, insisté particulièrement sur le rôle de consommatrice et sur l'image de la sexualité féminine. À leurs yeux, Barbie incarne d'abord les fantasmes de la consommation qui caractérisent la société des années 1950, et plus généralement de la société contemporaine

     

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    Plus encore que les bonnes manières, Barbie apprend aux enfants qu'il faut se consacrer à la poursuite du bonheur à travers l'acquisition de biens matériels qui sont socialement connotés. L'évangile de Barbie c'est la « consommation ostentatoire » réactualisée : il importe de s'entourer de tous les signes extérieurs de richesse pour prendre du bon temps ( fun, le mot à la mode dans les années 1990), de soigner les apparences et de suivre toutes les modes. Car avant tout, c'est par le vêtement que l'on devient quelqu'un (et surtout quelqu'une) et que l'on est « popular », concept fondamental de la vie sociale des années 1950.

     

      

      

    Du coup, la multitude des amis dont Barbie s'est entourée prend un relief spécial. Selon l'analyse de David Riesman dans The Lonely Crowd ( La Foule solitaire) dans les années 1950, les Américains sont devenus avant tout des consommateurs dont le statut social est déterminé, non seulement par ce qu'ils peuvent acheter, mais aussi par le degré de conformité de leur goût à celui de leurs pairs en matière de consommation. Le goût se juge à la capacité d'évaluer la popularité d'un objet avant tout parce qu'il plaît aux autres. Si l'on reprend la suggestion de Riesman sur la socialisation du goût, on peut dire que Barbie invite donc les enfants à se conformer aux modes et à croire que chaque type d'activité exige une tenue particulière. Alors que les produits de masse sont sensiblement les mêmes, Barbie apprend aux enfants à faire des distinctions ayant une valeur sociale.

      

      

    Ainsi les vêtements de la poupée Barbie sont de trois types, qui correspondent à un « un style économique, un style de prix moyen, un style couture ». Jouer avec Barbie, c'est faire l'apprentissage de la consommation en tant qu'activité principale. N'est-il pas significatif, sous ce rapport, que, de 1959 à 1964, Mattel a produit une tenue de suburban shopper ?

     

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    On doit souligner par ailleurs que tous les accessoires produits par Mattel dans les années 1960 sont liés à des activités de loisir. Dans les années 1970, Barbie est allée à l'université ( college) et Marilyn F. Motz fait remarquer que son « campus » se réduisait alors à une chambre dans une résidence universitaire, un soda shop (avec une cabine téléphonique), un stade de football et un cinéma en plein air ( drive in). Mais la consommation va de pair avec le loisir (également ostentatoire)42. L'univers de Barbie est peuplé d'objets et de nombreux amis, jusqu'à cinquante-deux selon un collectionneur. En 1950, David Riesman décrivait ainsi la sociabilité dans la société de consommation : « [...] réussir devient presque l'équivalent de se faire des amis, ou en tout cas les amis qu'il faut ».

      

     Lorsque la popularité ou l'acceptation par ses pairs devient le but principal de la vie, alors « les gens et les amitiés sont considérés comme le plus grand des biens de consommation : le groupe de ses pairs est lui-même un objet de consommation ». Pour Marilyn Motz, la création de Barbie et de ses amis permettait aux enfants de s'acheter « un groupe de semblables », « littéralement de “collectionner des amis” ».

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    On se demande si, avec le personnage de Ken, Barbie ne montrait pas à quel point peut en arriver l'instrumentalisation des rapports humains. Tous les commentaires ­ qu'ils soient favorables comme ceux de Mattel du style : « Barbie, une femme sexy, désinvolte, anti-conventionnelle, mais pure » et « Barbie l'adolescente idéale, sexy, mais innocente » ou critiques43 ­ disent clairement qu'entre eux il ne se passe jamais rien que la morale réprouve.

      

      

      

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    Dès lors le personnage de Ken n'est rien d'autre qu'un accessoire de plus. Le message de Barbie serait donc en fin de compte, comme le dit Marilyn Motz, « soyez riche, soyez belle, ayez la cote et surtout amusez-vous », et rien de plus. Mais ce message n'est pas déchiffré de la même façon par tout le monde. Aujourd'hui, certaines féministes défendent la poupée Barbie en alléguant qu'elle a eu un rôle positif. Signe des temps et de l'évolution du féminisme, nous apprenons que des « Barbie fans » seraient d'avis que « en particulier dans les premières années de Barbie, elle représentait un contrepoids libérateur à l'image omniprésente de la femme véritable esclave de toutes les corvées ménagères »44.

     

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    Ainsi vont les commentaires du moment, mais nous en disent-ils plus sur l'influence réelle de la poupée ? Tout cela n'est peut-être que fantasmes car comment savoir quel usage les enfants font des poupées et les effets qu'elles ont sur leur vie d'adultes ? La façon dont les enfants jouent avec la poupée Barbie obéit-elle aux scénarios de la firme Mattel ?45 aux propositions de jeu du Journal de Barbie ? Il est difficile de répondre à cette question et la réponse est sans doute ambiguë. Nos enquêtes et celles menées par d'autres nous font penser que les packaged stories (histoires programmées) de Barbie ont pu orienter les jeux, mais que les enfants peuvent aussi donner libre cours à leur imagination.

      

      

      

    Si n'importe quel objet peut devenir un jouet, n'importe quel jouet peut également être détourné de son usage. Il y a des petites filles qui, même lorsque leur poupée était un bébé, jouaient à la transformer en jeune fille. La poupée permet de se construire toutes sortes de vies, toutes sortes de personnages. Le problème de la poupée Barbie, c'est que le packaging, l'univers fabriqué autour de Barbie, la pression de la publicité écrite et audiovisuelle incarnent des valeurs et des modèles véhiculés par toutes sortes d'autres moyens, et qui sont omniprésents dans la société. L'anthologie de Mondo Barbie suggère qu'il existe d'innombrables formes d'usage et de détournements d'usage de la poupée Barbie. Espérons donc qu'il reste encore un coin de l'imaginaire enfantin qui ne soit pas Matellisé.

      

      

      

    On ne peut qu'admirer les qualités commerciales de Mattel, l'ingéniosité de son marketing, son sens des relations publiques et du coup médiatique, son astuce dans la présentation de Barbie comme une personne, sans oublier sa capacité à récupérer toutes les modes, y compris les plus récentes et en apparence les plus avancées. Nul doute que Barbie ait l'art de « humer » l'air du temps46. Mais tout cela suffit-il à expliquer la longévité de Barbie et son caractère emblématique ?

      

     Poupées BARBIE 

      

    Poupée médiatique et planétaire, Barbie a acquis une signification sociale à travers les objets, les vêtements, tout l'univers de pacotille qui l'entoure et elle est devenue une héroïne populaire à travers les scénarios programmés par Mattel. Ainsi pour vendre et faire consommer les enfants il faut raconter des histoires, des contes de fées modernes. Mattel ce n'est pas seulement un fabricant de jouets mais un raconteur d'histoires à l'échelle mondiale. Ce n'est pas Big Brother mais Big Mother.

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    Dans les années récentes, la poupée Barbie s'est mise à occuper une place particulière dans la société. Pourquoi a-t-elle une présence si forte qu'on puisse proposer dans un journal de parapsychologie de mettre les lecteurs en rapport avec son esprit pour la somme de trois dollars ( San Francisco Chronicle, 3 avril 1993) ?

    Pourquoi suscite-t-elle des passions si dévorantes47, des formes d'identification aussi poussées ? Pourquoi l'Amérique est-elle à ce point fascinée par cette poupée qu'elle en fait une personne ?

    Cela nous dit quelque chose sur tout un monde dans lequel la personne humaine se plastifie.

      

    Poupées BARBIE

      

    Le triomphe du marketing de Mattel c'est le triomphe du simulacre. L'univers de celluloïd avait produit la star, l'univers du plastique a produit la poupée Barbie. Il est significatif que les conseillers en marketing nous expliquent que la poupée Barbie remplace les « partenaires absents », le frère et la sœur qui n'ont pas été conçus, la mère qui n'est plus au foyer. En somme nous vivons de plus en plus dans un univers de substitution.

      

      

    J'ai commencé en disant que l'apparition de Barbie avait marqué une rupture dans les pratiques sociales et la socialisation des petites filles. Il s'agissait d'une révolution dans le concept de l'enfance : elle tendait à faire disparaître celle-ci en précipitant les enfants dans un monde d'adultes et en les voyant essentiellement comme de futurs acheteurs, comme une clientèle potentielle à fidéliser. Mais la « révolution » Barbie c'est aussi celle de toute une société qui distingue de moins en moins le faux semblant de la réalité. Née dans les années 1950 et triomphante dans les années 1980, la poupée Barbie n'est qu'une forme de plus du produit d'un imaginaire social que minent les confusions entre le réel et les simulacres de toutes sortes.

      

      

    Poupées BARBIE

     

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    1987 Barbie, Her Life and Times, New York, Crown Publishing.

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    1967 « Nature des jeux », Encyclopédie de la Pléiade, vol. 33, Paris, Gallimard.

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    1993 Mondo Barbie, New York, St Martin's Press.

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    1989 Le XXe siècle des femmes, Paris, Nathan.

    MOTZ FERRIS, M., GEIST, C. et NACHBAR J. (eds)

    1983 The Popular Culture Reader, Bowling Green, Ohio, Bowling Green University Popular Press.

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    1995 Barbie's Queer Accessories, Durham, Duke UP.

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    1985 Barbie, une poupée de collection, Paris, Éditions Polichinelle.

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    WEST, E. et PETRICK, P. (eds)

    1992, Small Worlds : Children and Adolescents in America 1850-1950, Lawrence, University Press of Kansas.

    Notes

    1 François Theimer 1985. Voir également la revue Polichinelle publiée dans les années 1980 ; mémoire de maîtrise de Nathalie Batté : 1987.
    2 Sur le jeu de la poupée, voir Jeanne Danos 1966 ; Roger Caillois 1967 ; Gilles Brougère 1992 ; Emission « Le téléphone sonne », France-Inter : 9 déc. 1992.
    3 Titre de l'ouvrage de Betty Friedan (1963) traduit sous le titre français de La Femme mystifiée, Paris, Denoël-Gonthier, 1964.
    4 Marilyn Ferris Motz, in Christopher D. Geist and Jack Nachbar (eds.) 1983 : 123.
    5 Lois Banner 1983 : 283-284.
    6 Gil Asakawa and Leland Rucker 1992 : 6-7 ; Elliott West and Paula Petrick (eds.) 1992 : 83-84.
    7 Newsweek, 12 sept. 1983, p. 10.
    8 Voir François Theimer 1985 et Polichinelle, n° 26, avril 1987, p. 15.
    9 Documentation Mattel, p. 3. Soulignons que l'article de Polichinelle dit : « Ruth la femme d'Elliott se joint à eux et prend en charge la création » (souligné par nous).
    10 Voir également G. Asakawa and L. Rucker 1992 : 41.
    11 L'article cité de Polichinelle indique : « En Europe Barbie fut d'abord introduite en Allemagne, en 1964, où Mattel créa sa première filiale ».
    12 En 1989, on fabriquait les vêtements de Barbie dans ce pays : Doug Stewart 1989 : 81.
    13 Voir Kathryn Harrison, in Lucinda Ebersole and Richard Peabody (eds.) 1993 : 44-45.
    14 Newsweek, 20 février 1989 ; Working Woman, mai 1990, p. 91.
    15 Documentation Mattel France, p. 7. Barbie aurait un grand succès en Russie si elle n'était pas si chère. Eleanor Randolph 1992.
    16 Montreynaud 1989 : 454 ; voir également Business Week, 8 juin 1992 ; Jill Barad in New York Times, 22 juin 1992 ; The European, 22 février 1991.
    17 Barbie est aussi une « marque qui peut faire vendre », « Mattel Fashions Boutiques » , 1er juin 1991. Les principales licences françaises de Barbie sont Les Trois Suisses : vêtements, prêt-à-porter et literie ; Edito Agenda Barbie ; Panini/France Images : albums de collection et vignettes, VICI (DIC 2) bicyclettes ; Belin : biscuits ; Editions Hema : livres d'enfants etc. ( Documentation Mattel France).
    18 Motz 1983 : 128-129 ; sur les collectionneurs, voir François Theimer 1985, Nidi Nkagbu, « In Love with a Shapely Piece of Plastic », The Independent, 23 oct. 1991 ; Carol Masciola, « Stolen, 5000 Barbies, unplayed with », International Herald Tribune, 15 oct. 1992.
    19 Selon la documentation Mattel France, « le visage de Barbie est travaillé par un sculpteur telle une œuvre d'art. Tous les 7 ans environ, le visage de Barbie est redessiné selon les tendances actuelles ».
    20 Tofler 1970 : 47-48.
    21« Barbie's Birthday », The New Yorker, 56, 26 mai 1980, p. 30.
    22 Mary Talbot, « Honey, They Blew Up Barbie », Newsweek, 3 août 1992, p. 57 ; Lori Moody, « Mattel's Material Girl is the Pink », Globe and Mail (Canada), 19 décembre 1992.
    23 Jane Leavy ,» Is There a Barbie Doll in Your Past », MS, septembre 1979, p. 102.
    24 Doris Wlikinson, « The Doll Exhibit : A Psycho-Cultural Analysis of Black Female Role Stereotypes », Journal of Popular Culture, 21, Automne 1987, p. 27.
    25« Barbie attaquée pour anti-féminisme », Quotidien de Paris, 3-4 octobre 1992 ; « Math No Longer Tough for Non-Sexist Barbie », International Herald Tribune, 21 octobre 1992.
    26« Finally Barbie Doll Ads Go Ethnic », Newsweek,13 août 1990, p. 40.
    27 June S. Bryant, « More Dolls of Color », Black Enterprise, décembre 1991, p. 10.
    28 Montreynaud 1992 : 454.
    29 Newsweek, 25 novembre 1963 ; Life, 23 août 1963.
    30 Philippe Gavi et Isabelle Lefort, « Barbie guest star du marketing », Le Nouvel Observateur, 19-25 janvier 1989, p. 59.
    31 Pour célébrer le 30e anniversaire de la poupée, Mattel France a mis en scène le simulacre d'une célèbre émission : « Champs Elysées ». Pour les effets de la publicité télévisée sur le jouet, voir Brougère 1992.
    32 Introduction à Forever Barbie, A Postcard Book, 1991.
    33 Anika Savill, The Independent, 10 mars 1993 ; en 1986 cela avait lieu au Lincoln Center avec un portrait de Barbie peint par Andy Warhol.
    34 Frank De Caro, « Barbie, Ken est-il toujours un beau mec hétéro ? », New York Newsday, traduit dans Courrier International, 1er avril 1993.
    35« Volley ot the Dolls », People's Weekly, 9 septembre 1991, p. 95.
    36« The Barbie Doll Set », The Nation, 24 août 1994, p. 407. Voir ausi Dr Leveton, Ramparts, avril 1965, p. 29.
    37 Newsweek, 12 septembre 1993, p. 10.
    38 Fred Hechinger cité dans The Nation, 24 août 1964, p. 407.
    39 Donovan Bess, Ramparts, avril 1965, p. 26.
    40 Donovan Bess 1965 : 28.
    41 Introduction à Forever Barbie, A Postcard Book, 1991.
    42 Motz 1983 : 129-165.
    43 Documentation Mattel France, pp. 19-20.
    44 Helen Cordes, « What a Doll ! Barbie : Materialistic Bimbo or Feminist Trailblazer ? », Utne Reader, mars-avril 1992, p. 46-50.
    45 On peut se poser la question de l'usage qu'en font les adultes : collection, utilisation pour des tableaux vivants érotico-artistiques : Erica Rand, 1995. Pour les enfants, Nathalie Batté 1987 et Autrement 1992 : 30-31.
    46 On ne s'étonnera pas d'apprendre que Barbie est sur Internet ! In These Times, 15 mai 1995.
    47 Carol Masciolz, « Stolen : 5000 Barbies Unplayed With », International Herald Tribune, 15 octobre 1992, p. 8 ; sur les collectionneurs, Lord : 1994.

    Pour citer cet article

    Marianne DEBOUZY, « La poupée Barbie », Clio, numéro 4-1996, Le temps des jeunes filles, [En ligne], mis en ligne le 01 janvier 2005. URL : http://clio.revues.org/index446.html. Consulté le 26 octobre 2011
      
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