• Histoires gourmandes
     
     
     
     
     
    Depuis l'aube des temps (juste avant le petit déjeuner), l'homme mange pour vivre...

    Mais depuis quelques siècles, le simple besoin de se nourrir a laissé la place au plaisir, AUX plaisirs ! Par l'imagination et la passion des uns et des autres, la cuisine a été élevée au rang d'art, et les plats de chefs d'oeuvre. Mais tout ne s'est pas fait d'un coup. Cette rubrique a pour objectif de vous faire découvrir l'histoire de la cuisine et des produits qui font chaque jour le bonheur de nos papilles !
      
      
      
      
     

    La fameuse histoire du jambon de Bayonne

     

    Depuis 1426, la célèbre foire perpétue la légende et les saveurs de la cochonnaille durant la fête pascale avec concours enchères et dégustations pantagruéliques.

     
    La fameuse histoire du  jambon de  Bayonne
    La fameuse histoire du  jambon de  Bayonne
    La fameuse histoire du jambon de Bayonne DDM

     Selon la légende, l'histoire du jambon de Bayonne commence au cours d'une battue au sanglier mais la suite ne dit pas à quelle époque exactement la scène se déroule. On sait seulement que le chasseur s'appelait Gaston Phoebus, et que ce jour-là, il aurait blessé un spécimen de la harde. L'animal prit la fuite et sera découvert plus tard noyé et en parfait état de conservation dans une source salée de Salies de Béarn. C'est ainsi que commence la salaison de la viande dans le bassin de l'Adour. D'autres explications courent. Par exemple, dès l'an X, un général romain évoque dans un récit le commerce florissant du jambon entre Bordeaux et Bayonne. Ce week-end, tout en humant le jambon à l'étal, les 26 charcutiers du pays vous diront également que la richesse minérale des saumures de l'Adour (eau salée des salines) donne toujours son goût particulier au jambon de Bayonne. Vous croiserez peut-être durant cette fête pascale quelqu'un d'érudit qui vous assurera que Rabelais et Henri VI se faisaient souvent livrer jusqu'à Paris. C'est le lot des produits d'exception d'avoir des lettres.

    En l'occurrence, le jambon de Bayonne a été consacré en 1999 par l'obtention de l'indication géographique protégée (IGP), un label qui identifie les seuls vrais jambons de Bayonne sur la base d'un strict cahier des charges : sélection des races de porcs, salage au sel de Bayonne avec sept mois d'affinage minimum. Avec un million trois cent mille jambons produits par an, la profession regroupe 2 000 éleveurs et une vingtaine d'entreprises de salaison et sa cinquantaine d'artisans. Sachez si vous n'êtes pas de la région, que sa belle couleur orangée est due à l'utilisation du piment d'Espelette, autre production réputée du pays Basque. Le rituel veut que la foire commence le jeudi Saint à 8 heures, avec le jury des maîtres charcutiers qui pèse, sonde, hume et note le jambon. Ensuite les membres de la Confrérie du jambon de Bayonne apposent un sceau sur les meilleurs jambons et les trois premiers seront vendus aux enchères après le concours. Cette grand-messe de la cochonnaille se perpétue depuis 1 426. Elle rime à Bayonne avec concerts de txarangas, ces orchestres populaires qui animent la ville au son de leurs instruments traditionnels, txistu et gaitas

     

    Le jambon de Bayonne :
    L'origine

    Le jambon de Bayonne est exclusivement produit dans le bassin de l'Adour. Plus d'un million de jambons sont produits chaque année, ce qui représente une production de 8 000 tonnes sur un total national de 40 000 tonnes.

    Le jambon de Bayonne est un jambon de porc d'environ 7 kilos à sec. Il est de couleur rouge foncé uniforme et son épaisseur de gras est de 8 mm. Principale caractéristique de ce jambon : son moëlleux.

    La fabrication :

    Le jambon de Bayonne est issu de porcs du sud-ouest ou d'autres régions. A noter que sa viande est toujours fraîche. Avant toute salaison, le jambon est massé afin d'éliminer le sang résiduel et d'attendrir la viande.

    Une fois cette opération effectuée, le jambon est pesé, marqué puis salé au sel gemme de Salies-de-Béarn ou de Mouguerre additionné de salpêtre. L'opération dure quelques minutes. Le jambon recouvert de sel est ensuite stocké entre 8 et 12 jours à une température avoisinant les 3-4°C. Passé ce délai, le jambon est dessalé, nettoyé et subit une maturation à froid en chambre ventilée pendant environ 2 mois. Ce n'est pas terminé. Le jambon est de nouveau nettoyé, et cette fois il est séché pendant 7 à 12 mois à une température de 14°C. C'est au cours de ce dernier séchage que les producteurs graissent les parties musculaires du jambon pour en éviter le croûtage.
    A noter que certains producteurs maintiennent une vieille tradition : frotter le jambon au piment d'Espelette.

      

    Notre conseil :

    Servir le jambon de Bayonne en hors d'œuvre ou accompagné d'autres charcuteries. Le jambon de Bayonne se marie fort bien avec le melon.

    Texte osources : riginal : Unhttp://www.ladepeche.fr/article/2008/03/20/443783-La-fameuse-histoire-du-jambon-de-Bayonne.htmlivers des Gourmets

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    SA MAJESTÉ L'ORTIE

    L'ortie est l'une des plantes médicinales les plus riches et les plus efficaces de nos climats tempérés, mais la majorité de nos contemporains semble l'ignorer.

    Connue des Gaulois et des Romains, célébrée par la fameuse École de Salerne, peinte par Albert Dürer (1471-1528) dans la main d'un ange volant vers le trône de Dieu, la grande ortie (Urtica dioica), de la famille des urticacées, est une plante commune de nos campagnes et de nos jardins. Sa tige peut atteindre un mètre de haut. Ses feuilles sont opposées et, comme la tige, hérissées de poils urticants.

    Considérée par les jardiniers et les paysans comme une mauvaise herbe, l'ortie est fauchée, arrachée, piétinée, malmenée, combattue avec des pesticides, empoisonnée sans aucune pitié. Pourtant cette grande dame ne mérite pas ce traitement indigne de la part de l'homme dont elle est la nourricière et la protectrice tutélaire.

    En effet, non seulement elle constitue un aliment de choix, riche en enzymes, en oligo-éléments et en précieuses vitamines, mais, contre beaucoup de maladies, et des plus graves, elle est le plus efficace des médecins. L'ortie prolifère dans les lieux laissés à l'abandon, dans les décharges publiques ou sur les terrains en friche.

    Comme c'est une plante dominante et tenace, elle réapparaît souvent inopinément dans les jardins les mieux entretenus.

      

    Mauvaise réputation

    L'ortie commune doit sa mauvaise réputation aux poils urticants qui garnissent le dessous de sa feuille et de sa tige, secrètant un liquide âcre contenant de l'acide formique et des enzymes analogues à celles de certains venins de serpent..

    Son contact provoque une démangeaison douloureuse et prolongée. Mais c'est ce liquide irritant qui représente une valeur non négligeable de la plante.

      

    RECETTES  - lien - http://knol.google.com/k/ortie-piquante#  

    Cueillette

    Pour cueillir l'ortie à la main sans douleur, mieux vaut revêtir des gants ou saisir fermement la tige entre le pouce et l'index, sans toucher le dessous des feuilles, avant de la briser, sans laisser le reste de la main au contact de la plante.

    Toute la plante se consomme, en toute saison, mais l'ortie se cueille de préférence jeune, à l'aube, au printemps, ou, lorsqu'elle a été fauchée, lors de sa repousse de la fin de l'été. On dit que ses racines sont les plus riches au début du printemps ou à la fin de l'automne.

    Si l'ortie sauvage, hôte fréquent mais non souhaité de nos jardins et de nos champs est devenue le cauchemar du jardinier et du cultivateur, il n'en a pas toujours été ainsi.

    Et nos anciens reconnaissaient en elle une des plantes les plus utiles à la santé des hommes et des animaux. Pour l'adepte convaincu de la vertu des plantes l'ortie remplace à elle seule toute une valise de médicaments.

      

    Animaux

    Séchée, l'ortie constitue un excellent fourrage et beaucoup de cultivateurs écobiologiques la laissent volontiers proliférer dans leurs herbages à foin et à regain. Jadis, nos anciens hachaient les orties importunes de leurs jardins potagers et la donnaient à manger aux volailles, aux canards, aux cochons qu'elles protégeaient des parasites et des maladies.

    Les maquignons qui connaissaient ses propriétés, mêlaient l'ortie à l'avoine, cela rendait les chevaux plus fringants et leur donnait un poil plus brillant.

    Mélangée à la pâtée des poules, elle active naturellement la ponte. (Mulot : Opus cit.)

    Horticulture

    «Mon voisin utilise les orties également pour détruire les insectes nuisibles et ravageurs de son jardin. Il met de grandes quantités d'orties dans un récipient contenant 300 litres d'eau (on peut évidemment utiliser de plus petites quantités d'orties), où il laisse macérer les orties pendant une période de temps assez longue.

    Avec ce liquide à base d'orties, il arrose ensuite ses autres plantes, empêchant ainsi les insectes nuisibles d'intervenir, sans utiliser de produits chimiques. Les vers n'entrent plus non plus dans les carottes !» (Maria Treben).

      

      

    Cuisine

    Les orties ont été dégustées depuis les temps les plus reculés, soit en légumes (même préparation que pour les épinards), soit en soupes. Mixée elle devient une soupe délicieuse et raffinée (ajouter une ou deux pommes de terre), cuire dix minutes à la cocotte minute, mixer, ajouter du lait ou de la crème fraîche avant de servir. La "soupe d'orties" de nos grands-mères est un véritable régal. Séchée ou cuite, les orties ne sont plus irritantes ("au contraire, nous dit Mésségué, elles sont douces comme un velours sur la langue...*").

    Dans certaines régions de France, on mange les jeunes pousses de l'ortie blanche (qui elle ne pique pas) soit en potage soit en vinaigrette ou même crues comme au XVIIIe siècle. Les Orties sont en effet des plantes fort nutritives, riches en fer, (indispensable à la reconstitution des globules rouges, et pour la bonne oxygénation des tissus), magnésium, etc.).

    L'ortie représente l'avantage sur les épinards de n'être pas trop acide, donc favorable aux rhumatisants, aux goutteux, et aux arthritiques.

    Elle contient en outre de la sécrétine, une hormone excellent stimulant des glandes digestives de l'estomac, de l'intestin, du foie, du pancréas et de la vésicule biliaire. «Mangez de l'ortie, nous dit Mésségué, le goût en est délicieux, lorsque les feuilles sont choisies bien tendres, et vous y gagnerez en outre la santé.»

      

      

    Herbier de Santé

    Maurice Mésségué, dans son Herbier de Santé dit de l'ortie : «L'ortie, cette herbe que l'on dit cruelle parce qu'elle sait se défendre, peut aussi prendre la défense des autres. J'interdis formellement à mes fermiers de l'arracher, le long des vieux murs, des mares, des terrains vagues ou des jardins bien fumés où elle pousse en vagues épaisses ; et j'envoie mes ramasseurs d'herbes en cueillir de grands sacs trois fois par an... »

    Aphrodisiaque

    Les vertus aphrodisiaques de l'ortie sont connues depuis l'antiquité. Le poète latin Pétrone préconisait, pour renflouer la virilité déficiente des hommes, de les fouetter avec un bouquet d'orties "au-dessous du nombril, sur les reins et sur les fesses". Mességué corrobore cette qualité stimulante de la plante en nous contant la cure adoptée par l'un de ses vieux amis gascons qui, "incorrigible coureur de jupons, pour se redonner du coeur à l'ouvrage, se roulait périodiquement dans un champ d'orties..."

      

    Vertus médicinales

    L'ortie a un effet thérapeutique de la racine à la tige, des feuilles aux fleurs.

    La sagesse populaire de nos anciens, préconisait l'urtication, c'est-à-dire la flagellation aux orties, comme révulsif. On l'ordonnait contre les fièvres (typhoïde), les rhumatismes, les crises d'apoplexie et l'absence de règles chez les femmes. Les piqûres du végétal stimulent l'organisme (on disait aux enfants qui revenaient les mollets tout piqués d'orties, qu'ils avaient gagné la santé pour la vie, et qu'en tout cas ils n'auraient jamais plus de rhumatismes). (Mésségué Opus cit.)

    En tant que plante médicinale, l'ortie est vraiment prodigieuse. Diurétique (elle est efficace contre les rhumatismes, la goutte, les calculs urinaires, l'énurésie (incontinence) mais également contre la rétention d'urine. Elle est antidiarrhéique : on l'a employée notamment contre le choléra. Elle arrête les saignements de nez, les crachements de sang, les hémorragies de toutes sortes, ainsi que les écoulement désagréables du rhume de cerveau et des voies respiratoires.

    Elle est reconstituante, fait venir le lait chez les femmes qui en manquent, elle régularise les règles ou les fait réapparaître si elles sont interrompues anormalement ; elle est dépurative et combat l'acné et les boutons de fièvre ; e

    lle est vermifuge et révulsive. En médecine populaire, la tisane à l'ortie est conseillée contre les troubles du foie et de la rate, des crampes et des ulcères d'estomac et intestinaux ou des maladies pulmonaires. En usage externe, elle donne les meilleurs résultats contre les rhumatismes (ceux des hommes comme ceux des animaux.

    «C'est avec l'ortie, le chou et la chélidoine que je soigne mes vieux chiens», reconnaît Mésségué. En gargarismes, elle est souveraine contre les infections de la bouche, les aphtes, les gingivites et les angines. En lotions et en compresses, c'est une herbe de beauté : elle nettoie la peau, fait disparaître l'acné et l'eczéma, et combat la chute des cheveux.

    Récolte

    Mésségué recommande : «Ne coupez pas toutes les orties qui poussent dans votre jardin ; ne les traitez surtout pas aux herbicides (ce qui est éminemment dangereux pour toutes les autres plantes... et pour votre santé. Loin d'être des "mauvaises herbes", les orties aident bien plutôt à la croissance des espèces fragiles, et notamment des espèces médicinales que vous aurez plantées tout à côté ; une rangée d'orties vous fournira des soupes, des mets délicieux, des médicaments contre nombre de troubles, et... renforcera la teneur de vos autres herbes aromatiques ou médicinales en principes actifs. Récoltez les feuilles, les sommités fleuries des tiges et les racines, en toutes saisons, selon vos besoins ; ne les utilisez que fraîches.»

      

    Préparation et emploi

    Infusion ou décoction de feuilles :

    2 poignées de feuilles fraîches dans un litre d'eau. (3 tasses par jour).

    Infusion ou décoction de feuilles et de fleurs (pour l'usage externe : gargarismes en cas d'angine,

    pansements, lotions de beauté, shampooings contre l'alopécie (chute des cheveux, pellicules, etc.) : jetez 3 poignées de feuilles et de fleurs fraîches dans un litre d'eau.

    Bains de mains et de pieds contre l'acné, l'urticaire, les règles douloureuses, pour favoriser la circulation sanguine et surtout contre les rhumatismes : 2 poignées de feuilles fraîches par litre d'eau. Lotion spéciale

    Contre les rhumatismes : hachez trois poignées de feuilles d'orties, deux de feuilles et de fleurs de chélidoine, et deux belles feuilles de chou ;

    faites-les macérer pendant 48 heures dans deux litres d'eau de pluie ; filtrez.

    (En applications locales).

     Suc frais d'orties : prenez-en un grand verre par jour ou utilisez-le à l'extérieur, en compresses, lotions, etc. Décoction de racines (diurétique, dépurative et reconstituante) : jetez une poignée de racines fraîches et soigneusement nettoyées dans un litre d'eau. (3 tasses par jour).

    L'ortie blanche ou lamier blanc (Lamium album)

    Famille des Labiacées. Son suc est préconisé contre les métrorragies (hémorragie d'origine utérine survenant en dehors des règles normales), la leucorrhée (pertes blanches), et généralement contre tous les troubles du bas-ventre et de la menstruation.

    La tisane et l'infusion de fleurs de lamier blanc ont une action dépurative, elles combattent les insomnies nerveuses. En bain de siège (plantes entières) c'est généralement un remède efficace contres les différentes maladies féminines.

    Témoignages : «J'ai pu conseiller à une mère de sept enfants, qui souffrait constamment d'eczéma depuis la naissance de son dernier, de boire de la tisane d'orties. En peu de temps, l'eczéma avait disparu et avec lui les maux de tête dont elle souffrait également depuis cette époque.

    Comme l'ortie aide en cas de calculs rénaux et urinaires, et que je pensai que les reins ne fonctionnaient plus très bien depuis le dernier accouchement, je lui conseillai cette tisane. Lors de maladies des reins, l'on souffre souvent de maux de tête. En peu de temps, l'eczéma et les maux de tête avaient disparu.

    Comme l'eczéma a souvent une cause interne, il doit être traité par l'intérieur, au moyen de plantes dépuratives.» (Maria Treben)

    «Dans notre petite ville, je fis la connaissance d'une dame âgée qui me raconta que son médecin avait constaté de fortes excroissances cancéreuses de l'estomac. Elle ne pouvait plus se résoudre à se faire opérer, vu son grand âge.

    Quelqu'un lui conseilla alors de boire de la tisane d'ortie. Et elle se rendit tous les jours dans son jardin, où les orties foisonnaient le long de la clôture, et en ramenait chaque fois une poignée chez elle. Lorsque, quelque temps après, elle se rendit chez le médecin, celui-ci lui demanda, étonné : "Vous avez subi l'opération? Mais l'on ne voit aucune cicatrice." Les excroissances avaient totalement disparu et la vieille dame put profiter d'une vieillesse sans ennui de santé.» (Maria Treben).

      

    LES ORTIES MÉDICINALES

    Urtica dioica ou Urtica Major, ortie commune ou grande ortie. Urtica Urens ou Urtica Minor, petite ortie, ortie brûlante ou ortie piquante. L'ortie blanche ou lamier blanc (Lamium album).

      

    Vertus de l'Ortie

    Ortie commune : Propriétés : Antidiarrhéique, dépurative, diurétique, emménagogue, hémostatique, révulsive, vasodilatateur, vermifuge, virulicide.Elle est conseillée contre la goutte, les calculs urinaires, la rétention d'urine ; Dans le quart monde, on l'emploie avec succès contres les diarhhées du choléra.

    Elle arrête les saignements de nez, les crachements de sang, les hémorragies de toutes sortes. Souveraine contre les rhumes de cerveau, les embarras des voies respiratoires.

    Elle est reconstituante, elle fait venir le lait chez les femmes qui en manquent, elle régularise les règles ou les fait réapparaître si elles sont interrompues anormalement. Dépurative (une cure d'orties au printemps est la meilleure des choses), elle est vermifuge et elle est révulsive.

    La tisane à l'ortie permet de faire baisser le taux de glycémie, elle aide les malades qui souffrent de diabète. Ses propriétés virulicides et antibactériennes sont souveraines dans les maladies infectieuses. En cas d'hydropisie, les propriétés diurétiques de l'ortie font leurs preuves.

    Ses substances hémostatiques sont d'un grand secours en cas de pâleur, d'anémie, et d'autres graves maladies du sang. En association avec d'autres plantes médicinales, I'on utilise également avec succès l'ortie contre la leucémie.

    Elle supplée à la carence de l'organisme en fer.

    On dit que l'Ortie est souveraine contre l'Anémie, les Maux de tête, les Allergies (notamment le rhume des foins), la Sciatique, le lumbago, les névrites. Pour enrayer la chute des cheveux : décoction de feuilles, tiges et de racines d'orties, teinture d'ortie. - hypoglycémiantes (feuilles) : diabète - diurétiques (feuilles) : goutte, cure de diurèse - aphrodisiaques (semences) : stimulant sexuel - antiénurésiques : «pipi au lit».

      

    Recettes

    Quelle que soit leur provenance, les crampes indiquent des troubles de la circulation sanguine. En cas de sciatique, de lumbago et de névrites aux bras et aux jambes, l'on frotte légèrement les parties douloureuses avec de l'ortie fraîche.

    Par exemple, en cas de sciatique, l'on masse très lentement avec la plante fraîche, en commençant par la cheville, sur le côté externe de la jambe, jusqu'à la hanche, et de là sur le côté externe de la jambe, jusqu'au talon.

    L'on répète deux fois le processus et pour finir, I'on frotte de la hanche, en descendant vers le bassin. L'on procède de la même façon pour les autres régions malades. Recouvrir ensuite de poudre les endroits frictionnés.

      

    Soupe à l'ortie

    Cuire 100 grammes de têtes d'orties fraîches lavées, dans un litre d'eau salée (sel de mer naturel) avec trois pommes de terre moyennes. (Dix minutes à l'autocuiseur). Passer au mixeur jusqu'à ce que le liquide soit parfaitement homogène, sans traces de fibres.

    Au moment de servir, ajouter un peu de lait ou de crème fraîche.

    Légumes

    Pour quatre personnes : cuire à gros bouillons 400 grammes de jeunes feuilles d'ortie dans 2 litres d'eau salée, égoutter en recueillant à part l'eau de cuisson. Servir chaud comme des épinards, avec un peu de poivre et de muscade. Ajouter une cuillère de crème fraîche. L'eau de cuisson de l'ortie est un excellent jus naturel. Se boit chaud ou rafraichi.

      

    Jus d'ortie fraîche

    Mixer un sac d'orties fraîchement cueillies et en filtrer le jus que l'on boit frais. Le broyat retenu par le tamis ou le filtre peut servir d'emplâtre ou de cataplasme à appliquer sur le cuir chevelu si l'on souffre d'alopécie, de psoriasis, de pellicules, d'eczéma.

    Bain d'ortie fraîche

    Jeter 200 g de plantes fraîches dans l'eau de bain à 50 degrés. Laisser refroidir jusqu'à ce que la température soit supportable. Ne pas retirer les plantes du bain (elles ne piquent plus !).

      

    Bains de pied et de mains

    Jeter 100 grammes de plantes fraîches dans trois litres d'eau bouillante. L'eau et les plantes peuvent être réutilisées trois fois.

      

    Cataplasmes

    Appliquer un broyat d'orties fraîches sur la partie lésée.

    Conseils d'utilisation

    Plus les orties sont utilisées fraîches, plus le succès thérapeutique est grand. Les orties de printemps (mois de mai) sont réputé les meilleures. C'est aussi celles que l'on conseille de récolter pour les sécher pour l'hiver.

    Cure d'ortie

    Maria Treben écrit : «J'ai pris l'habitude d'en faire une cure de quatre semaines, au printemps avec les jeunes pousses, et en automne après le regain, lorsque les jeunes pousses ressortent un peu partout. J'en bois une tasse le matin à jeûn, une demiheure avant le petit déjeuner, et une ou deux tasses réparties au cours de la journée, par gorgées.Pour augmenter l'efficacité, il serait bon de boire également la tisane avant le petit déjeuner par gorgées.

    Après une telle cure, je me sens extrêmement bien et j'ai chaque fois l'impression que je pourrais avoir une activité triple de celle que j'ai d'habitude. Ma famille et moi, nous n'avons plus besoin de médicaments depuis des années, et je me sens souple et jeune.

    La tisane n'a pas mauvais goût. On la boit sans sucre. Mais les personnes quelque peu délicates peuvent y mélanger un peu de camomille ou de menthe pour en améliorer le goût.» (Maria Treben Opus cit.)

      

    CONSEILS D'UTILISATION

    Infusion : ébouillanter une cuillerée à café avec 1/4 de litre d'eau, laisser infuser peu de temps.Teinture d'ortie: laver les racines déterrées au printemps ou en automne et les brosser, les couper menu et les remplir dans une bouteille jusqu'au goulot.

    Recouvrir d'eau-de-vie de grain à 38 à 40%, et laisser reposer 14 jours à un endroit chaud.

    Bains de pieds : Faire macérer dans 5 litres d'eau pendant la nuit deux poignées bien remplies de racines bien lavées et brossées ainsi que d'orties fraîches (tiges et feuilles), et les porter à ébulliton le lendemain.

    Prendre un bain de pieds aussi chaud que l'on peut le supporter, pendant 20 minutes.

    Les orties restent dans l'eau pendant le bain de pieds. Ce dernier peut être réutilisé réchauffé deux à trois fois. Shampooing : réchauffer lentement, à petite flamme, 4 à 5 fois le contenu de deux poignées bien remplies d'orties fraîches ou séchées dans un récipient de 5 litres rempli d'eau froide. Laisser infuser 5 minutes.

    Si l'on utilise des racines d'orties, l'on en fait macérer une bonne poignée dans de l'eau froide pendant la nuit, on les réchauffe le lendemain jusqu'à ébullition, et on laisse ensuite infuser 10 minutes. Pour laver la tête, l'on devrait dans ce cas utiliser un savon de Marseille.

      

    L'ortie : un aliment de survie en période de famine

          

    Si l'ortie était considérée avec autant de respect  par les peuples de l'Europe du nord, c'est sans doute qu'elle a sauvé plus d'une fois ces populations en période de disette.

     

    L'un des premiers témoignages de cet usage est celui de Galien,  médecin romain du IIème siècle, qui précise qu'à son époque, l'ortie n'était plus consommée qu'en période de famine.

     

    On trouve ensuite des témoignages de consommation d'ortie lors des  grandes famines de la fin du Moyen Age et sous Louis XIV. Sous Louis XVI, on sait qu'elle était consommée par les paysans français qui en étaient très friands et la préparaient en soupe et comme les épinards.

     

    Elle a permis à des villageois allemands de survivre en période de famine au    XVIIIème siècle, puis dans le pays dévasté par les guerres napoléoniennes. Et de nombreux irlandais lui ont dû la vie lors de la grande famine provoquée par le mildiou de la  pomme de terre au XIXème.

    Plus près de nous, elle a servi à des déportés au Goulag et dans  les camps de déportation nazis à améliorer leur ordinaire et à rester en vie, tout simplement.

      

    MARIE ANTOINETTE MULOT : VERTUS DE L'ORTIE

      

    Cette plante bien connue de vous tous pousse et vous le savez dans les lieux incultes, les décombres mais hélas aussi dans nos jardins les mieux entretenus, où elle tente des apparitions.

      

    Tiges

    Elles sont dressées à partir d'une tige souterraine et terriblement traçante.

    Ces tiges mesurent 1 mètre environ.

      

    Feuilles

    Elles sont couvertes de poils irritants. Elles sont ovales, allongées, pointues et très dentelées.

      

    Fleurs

    Disposées en grappes, elles sont vert jaune. La récolte des feuilles s'effectue en été. Pour ces deux variétés, les feuilles sont utilisées, les semences, les racines également.

    Composition

    La plante contient une substance histaminique qui favorise la dilatation des capillaires avec augmentation de la perméabilité locale, (piqûre d'ortie) elle contracte les bronches et l'intestin et augmente les secrétions gastriques, salivaires et médullo-surénnaliennes, du potassium, de la silice, un tanin, des vitamines A et C.

    Les poils urticants de l'ortie contiennent de l'acide formique qui irrite tant la peau.L'Ecole de Salerne prescrivait l'ortie et de nos jours elle est bien prescrite également. Elle est considérée comme un fortifiant général, comme un dépuratif régénérateur du sang, ou stimulant des fonctions digestives.

    C'est aussi un appoint précieux contre le diabète, et également contre l'hydropisie et les rhumatismes, puisqu'elle facilite la sécrétion urinaire. Elle est aussi utilisée avec succès, dans les cas de diarrhée, d'entérite et d'hémorragie.

    En cas d'hémorragie interne, utérine, d'hémoroïdes, le docteur Leclerc recommande le sirop d'orties.

    Sur 250 grammes de feuilles fraîches, verser 1/2 litre d'eau bouillante.

    Laisser infuser 12 heures, filtrer et ajouter 500 g de sucre.

    Prendre 4 à 5 cuillerées à soupe par jour, entre les repas.«Les graines prises avec du vin cuit excitent au jeu de l'amour» dit Galien qui conseille contre 1'impuissance 1 cuillerée à café de graines réduites en poudre, mélangées à du miel ou de la confiture.

    Elles sont en «remède de bonne femme» utilisées à la campagne contre le «pipi au lit».

    Il y a deux façons de procéder, nous diton : 15 g de semences d'orties pilées et 50 g de farine de seigle.Préparer une pâtée en ajoutant de l'eau chaude miellée.

    Façonnez 6 petits pains, faites-les cuire au four, et que l'enfant les mange le soir pendant une quinzaine de soirs de suite.

    Seconde façon de procéder : 15 g de semences dans 50 g de beurre 20 g de poudre d'écorce de chêne 20 g de poudre de tormentille.Étaler comme de la confiture cette pâte sur les biscottes en y ajoutant du miel, ou de la crême de marrons et faire manger à l'enfant au repas du soir.Le suc de jeunes feuilles introduit dans les narines stoppe l'hémorragie nasale.

    Pour tonifier le cuir chevelu, empêcher les cheveux de tomber, faire disparaître les pellicules, vous pourriez faire des lotions quotidiennes avec : 100 g de racines d'orties pour 1 1itre d'eau. Faire bouillir pendant 1/4 d'heure. Filtrer.

    Ou encore faire macérer dans 1 litre d'alcool à 45° pendant 15 jours, 60 g de racines d'orties, 50 g de marjolaine, filtrer. Lotion quotidienne du cuir chevelu.Vous pouvez également passer au mixeur des feuilles d'orties. Passez le suc obtenu sur le cuir chevelu avant le shampooing en l'y gardant 10 minutes.

    Voici à présent «un truc» pour garder les mains blanches.

    Faire bouillir pendant 10 minutes dans 3/4 de litre de vin blanc plus 1/4 de litre de vinaigre de vin, 80 g de racines d'orties.

    Filtrez, conservez en flacons bien bouchés et lotionnez-vous chaque soir au coucher les mains avec ce liquide.Maintenant un «guérisseur» que j'ai bien connu guérissait les rhumatismes de ses clients en les fouettant littéralement là où se trouvait le mal, avec des orties fraîches... C'est terrible... mais il réussissait... à guérir le client.

    Un dernier tuyau que je découvre dans un vieux cahier de recettes :

    En cas de perte de cheveux, surtout au moment où tombent les châtaignes, ou après un traitement aux antibiotiques, faire bouillir pendant 20 minutes :100 g de feuilles d'orties 500 g de vinaigre de vin 500 g d'eau.

    Passer, faire des frictions quotidiennes du cuir chevelu, et un excellent shampooing, formule de Quintefeuille : - racines d'orties - semences de capucines - saponaire - bois de Panama.

    C'est naturel, efficace, peut être utilisé pour tous types de cheveux, et plusieurs fois par semaine.

      

    Bibliographie

    La Santé à la Pharmacie du Bon Dieu : Édition W. Ennsthaler, Steyr, Autriche. (Diffusion Soleils).

    Les Guérisons de Maria Treben (Même éditeur). Marie-Antoinette Mulot : Secrets d'une Herboriste, Editions du Dauphin 43, rue de la Tombe Issoire 75014 PARIS

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    L'homme de Néandertal mangeait aussi des légumes....L'analyse de traces de graines et de tubercules cuits dans le tartre dentaire de trois individus confirme que ce cousin de l'homme moderne pouvait diversifier ses menus...

     

    De la cueillette à la culture Les premiers hommes vivaient de chasse et de cueillette. Pendant la période Paléolithique, entre 30 000 et 10 000 ans avant Jésus-Christ, les seuls fruits et légumes consommés étaient des espèces sauvages, des baies, des salades ou épinards primitifs. Au début de la période suivante, le Néolithique, nos ancêtres commencèrent à observer que certaines plantes comestibles pouvaient être préservées d'une saison sur l'autre grâce à leurs graines.  

      

    Lien article MENUS PREHISTORIQUES

    http://geozine.free.fr/Geozine/forme/alimentation_prehistorique.htm

    Les plantes, sélectionnées pour leur pouvoir germinatif, la dimension plus importante de leur partie comestible (feuille, fruit, racine) et la qualité gustative de celle-ci, étaient replantées et donnaient ainsi des plantes améliorées. On apprit ensuite, grâce à des techniques de culture comme le greffage, à créer des variétés plus résistantes ou plus nourrissantes. Ce n'est que bien plus tard qu'apparurent les variétés hybrides, issues de croisements entre des individus de lignées différentes.

      

    Des Américains antérieurs à la culture de Clovis | Prehistoire | Scoop.it

    Un site de taille d'outils en pierre retrouvé au Texas montre que des chasseurs-cueilleurs vivaient en Amérique avant l'apparition de la culture Clovis, qui caractérisait jusqu'ici les plus anciennes traces humaines connues sur ce continent...       

      

    L'agriculture proprement dite, c'est-à-dire l'art de cultiver une plante d'une année sur l'autre en quantité suffisante pour alimenter les communautés humaines, a commencé vers le VIIe millénaire av. J-C., probablement au cœur du "croissant fertile", une vaste région allant de la Mésopotamie à l'Egypte. C'est d'ailleurs dans cette même région que sont apparues les premières civilisations, les premières écritures, les premières cités... Sumer d'abord, puis Babylone, dont les célèbres Jardins suspendus, une des 7 Merveilles du monde, étaient en fait des vergers et potagers irrigués par un système très sophistiqué.

      

      

    En Egypte, 7000 ans av. J-C, les potagers du pharaon Chéops, bâtisseur de la Grande Pyramide, étaient riches de fruits et légumes variés : melons, radis, aulx, laitues, concombres, asperges, lentilles, poireaux, prunes, dattes...

     

      

    Fruits et légumes de l'Empire Romain

     

    Plus tard, vers le IVe millénaire av.J-C., l'arboricultureet le maraîchage commençaient à apparaître : ils allaient devenir une activité majeure des peuples de la Méditerranée. La Grèce se couvrait de cultures d'oliviers, de vignes et de figuiers. Grecs, Etrusques, puis Romains, profitant de leurs conquêtes lointaines, rapportaient de l'Orient et des côtes africaines, des plants de légumes et d'arbres fruitiers : le cédrat, par exemple, qui fut le premier agrume importé en Europe par Alexandre le Grand, mais aussi le fenouil et la rhubarbe, venus d'Orient, l'artichaut d'Afrique du nord, etc. Les tables des riches Romains débordaient de délices provenant des quatre coins de l'Empire... Mais ces échanges se faisaient aussi dans l'autre sens ! La conquête de la Gaule par Jules César amena, dans les bagages des Légions, de nombreux fruits et légumes qui allaient eux-mêmes "coloniser" le pays : la vigne et l'olivier dans le sud, les salades et les choux dans le nord.

      

      

    Car la seule culture de légumes connue des peuples celtes de Gaule étaient celle de... la carotte. A noter tout de même que les Gaulois étaient d'excellents céréaliers et que leurs outils de moissons étaient largement supérieurs à ceux de leurs conquérants...

      

     

    La naissance du maraîchage en France

     

    Après la chute de l'Empire Romain, le Moyen-Age fut pour les fruits et légumes une longue période de régression et d'appauvrissement. Nombre d'entre eux étaient déclarés "impurs" par l'Eglise et seuls quelques monastères et enclos seigneuriaux conservaient des potagers dignes de ce nom.  La disette sévissait dans les campagnes où les paysans étaient contraints de manger des "racines", en fait des légumes-racines comme la carotte, le navet, le topinambour ou la betterave. On cultivait des choux, des courges et des poireaux, que l'on faisait bouillir dans de grandes marmites appelées "pots", d'où les noms de "potage" et de "poule au pot"...

     

     

     

     

     

      

    C'est à l'époque de la Renaissance que l'influence italienne fait revenir sur les tables de France une plus grande variété de fruits et de légumes verts. Dès lors prolifèrent autour des grandes villes des "ceintures maraîchères", vastes espaces dédiés à la culture des fruits et légumes, dont les produits sont apportés au centre des villes dans les "halles". Celles de Paris, créées par le roi Philippe-Auguste au XIIIème siècle, connaissent l'abondance à partir du XVe siècle : on y rencontre des producteurs venus de toute la région parisienne et même de Picardie ou de Belgique...

     

     

    Le potager du Roi Soleil

     

    Les fruits et légumes frais allaient s'imposer sous le règne de Louis XIV, qui en était particulièrement friand. Ce roi gourmet fit construire à Versailles, sur d'anciens marais situés en contrebas du château, un très grand potager dans lequel le maître des lieux, M. de La Quintinie, sut faire prospérer toutes sortes de délices royaux. Le monarque exigeant des fruits et légumes toute l'année, il mit au point des cultures sous cloches qui permettaient de faire pousser hors saison des fraises, des melons, du cresson et toutes sortes de salades, de l'oseille, des aubergines (originaires de l'Inde), des concombres, des asperges et surtout des petits pois, dont le roi raffolait. M. de La Quintinie a dressé la liste de tous les fruits et légumes cultivés à Versailles dans le potager du Roi ; une vingtaine d'espèces n'est aujourd'hui plus à la mode (mais elles demeurent cultivées) comme les plantains ou les oxalis... Elle seront sans doute redécouvertes un jour, à l'instar du pâtisson ou du topinambour...

      

     

    A propos, le potager du Roy existe toujours à Versailles : il est encore en activité et on peut le visiter !

     

     

     PARMENTIER

      

    L'arrivée des "américaines" : pomme de terre et tomate

     

    La pomme de terre est née dans la Cordillère des Andes, chez les tribus Incas, comme d'ailleurs la tomate, le maïs et... le cacao. Quelques plants furent expédiés à la Cour d'Espagne, puis au Pape en 1588 par un adjoint de Pizzaro.

     

    Elle fut dès lors produite à titre de curiosité, notamment en Allemagne.Un certain Parmentier, pharmacien militaire prisonnier en Westphalie en 1763, eut l'occasion de goûter cet étrange tubercule destiné aux porcs et... aux prisonniers.

     

      

      Tomates des ANDES

    La tomate : un légume révolutionnaire.

     

    La tomate, une autre américaine, prisée dans les pays méridionaux et dans le sud de la France fut aussi la grande découverte de la fin du XVIIIe siècle : ce sont les Marseillais, montés à Paris pendant la Révolution, qui la firent apprécier des consommateurs parisiens.

     

     

    Oubliés et retrouvés

    Les fruits et légumes frais, à partir du XIXe siècle, vont entrer dans les menus quotidiens des peuples d'Europe. Beaucoup resteront pourtant pendant longtemps des produits relativement rares, réservés à une petite partie de la population. Jusqu'au milieu du XXe siècle, la base de l'alimentation reste la viande, le pain, la pomme de terre, le chou, la carotte... La connaissance des vertus des fruits et légumes frais va se diffuser partout dès les années 50.

    A mesure que le niveau de vie s'élève, la qualité de la nourriture consommée s'équilibre : moins de viande et de pain, plus d'aliments riches en fibres et en vitamines. Aujourd'hui, les fruits et légumes frais ont conquis le monde entier. Mais la grande variété des fruits et légumes actuels n'empêche pas la redécouverte de produits anciens, revenant un jour ou l'autre sur l'étal des marchés : le pâtisson est de ceux là, ainsi que la roquette, le mesclun, le pourpier, le crambé maritime ou la tétragone...

      

      

    On redécouvre aussi des légumes sauvages : le pissenlit, l'ortie ou les fleurs comestibles...

     

     

    Gros plan sur ...

     

    Le cardon

     

    C'est un légume assez courant dans le Midi. Proche de l'artichaut, il est comme lui issu du chardon sauvage. Il était connu dans l'Antiquité, on le cultivait à Carthage et c'était à Rome un légume de luxe, réservé aux riches. Légume méditerranéen, il apporte une note originale aux menus d'hiver. Sa saveur subtile est très appréciée par les connaisseurs : on le cuisine avec d'autres légumes, notamment les pommes de terre, coupé en bâtonnets et revenu dans du beurre.On peut aussi le cuire au four, préparé en fins tronçons et gratiné avec du jambon et du fromage râpé.

     

     Les Lyonnais l'apprécient avec une sauce à la crème, et les Provençaux le cuisinent avec de l'huile d'olive, des tomates et des anchois. Certains le consomment aussi en salade, parfumé de coriandre fraîche ciselée. On le trouve entre les mois d'octobre et de mars, particulièrement en Provence et dans la vallée du Rhône.

     

      

    Le crosne

     

    C'est un tubercule originaire de Chine, qui fut introduit en France en 1882 par MM. Bois et Pailleux, qui le firent pousser dans leur jardin de Crosnes, en banlieue parisienne, et entreprirent de le commercialiser dans tout le pays.  Après avoir connu son heure de gloire, le crosne fut peu à peu oublié. Il commence à réapparaître, sous une forme "prête à cuisiner", évitant au consommateur le fastidieux nettoyage d'autrefois. On le cuit à la casserole, dans de l'eau bouillante salée et on le déguste avec du beurre et du persil, ou bien avec un coulis de tomate au basilic.

     

     

     

    On peut aussi le cuire à la vapeur, assaisonné d'herbes fraîches. On le trouve chez certains commerçants entre novembre et mars, mais attention, il est encore rare !

      

     

    La pomme de terre primeur

     

    Elle est récoltée avant sa complète maturité : sa peau est encore très fine, sa chair - riche en eau - a une saveur légèrement sucrée. Il en existe de nombreuses variétés : les plus connues sont la Belle de Fontenay, la Charlotte, la Roseval, la Pompadour, la Francine, la Ratte... Précoce, elle est plantée dès le mois de février dans des régions de bord de mer où la terre sablonneuse est alors à l'abri du gel. Récoltée juste au moment où elle commence à "prendre peau", elle est immédiatement lavée et conditionnée, pour éviter que sa peau ne devienne verte.

     

     

     

    Elle est vendue entre 3 jours et une semaine après son arrachage. En France, elle est récoltée de mai à septembre, mais au-delà du 31 juillet, elle perd son appellation "primeur". A noter que les pommes de terre dites "de conservation" (comme la Bintje par exemple) se récoltent à maturité et se conservent plus longtemps (plusieurs mois).

     

    Les pommes de terre primeur sont délicieuses à consommer "en robe des champs", cuites à l'eau ou à la vapeur et servies dans leur peau, avec une noix de beurre et une pincée de sel. On peut aussi les manger en salade tiède, avec des petits oignons frais et de la ciboulette.

     

     En France, la pomme de terre était bannie pour cause de "maladrerie": on disait qu'elle propageait la peste. Parmentier rédigea un Traité sur la culture et l'usage de la pomme de terre, dans lequel il proposait d'en faire... du pain. Il en fit planter un champ près de Paris dans la plaine des Sablons. Pour attirer l'attention, le champ était gardé par des soldats pendant la journée.

      

    La nuit tombée, on laissait les curieux venir chiper quelques plants et c'est ainsi que la consommation de la pomme de terre commença à se propager en France. Le tubercule fut jugé intéressant par le roi Louis XVI qui daigna en porter la fleur à son chapeau. La consommation commença à se développer. Plus tard, le gouvernement révolutionnaire adopta la pomme de terre pour sauver le peuple de la disette.

     

    Elles s'associent merveilleusement avec les haricots verts frais et les pois gourmands, en jardinière de légumes, et accompagnent bien sûr les viandes et les poissons pour le plus grand bonheur des gourmets.

     

     

     DES BONS LEGUMES... PETITES POMMES de TERRE, TOMATES, CIBOULETTE, COURGETTES, OIGNONS, THYM, PERSIL, HARICOTS VERTS.... BASILIC.. PERSIL...

      

    L'abricot

     

    Historique :

    Originaire de Chine où il pousse à l'état sauvage depuis 4000 ans, l'abricot a longtemps été appelé "prune ou pomme d'Arménie" car on le croyait natif d'Arménie. Arrivé au Moyen-Orient par la Route de la Soie, il fut introduit dans l'empire gréco-romain mais dut attendre le XVème siècle avant d'atteindre nos tables car on le jugeait, à tort, responsable de diarrhées ou de fièvre. C'est aujourd'hui le fruit par excellence de nos corbeilles d'été !

    Qualité nutritive :

    L'abricot est un fruit peu calorique et d'un très bon apport en provitamine A. (www.fraichattitude.com/fruits-legumes-fiche-fruit-legume.html&pagefl=essentiel&fruit=Abricot)

    Propriétés culinaires :

    L'abricot est le fruit de l'abricotier, un arbre de la famille des rosacées. L'abricotier est souvent greffé sur des pruniers, des pêchers ou des amandiers ce qui lui permet de s'adapter plus facilement aux contraintes du climat et du sol. Peu exigeant, l'abricotier s'accomode de terrains caillouteux ou riches en calcaire mais est en revanche très sensible aux gelées et à la sécheresse. De la fleur à la récolte, il faut compter environ 140 jours. Fruit de l'été par excellence, l'abricot cesse de mûrir après la récolte. Il révèle sa palette d'aromes lorsqu'il est cueilli mûr à point et est très sensible au transport et au passage en chambres froides. Sitôt cueilli, sitôt dégusté ! De quoi en faire un fruit à privilégier lors de vos visites dans nos cueillettes Chapeau de Paille !

     

    Info santé Bonne source de vitamine C (même après cuisson), la pomme de terre primeur se distingue des autres féculents (pâtes ou riz, par exemple), qui n'en contiennent pas. Cette vitamine qui améliore l'assimilation du fer et facilite la résistance aux infections est particulièrement importante pour la bonne santé de l'enfant.

     

     

    Tomates anciennes

    Historique :

    La tomate est une grande voyageuse !  Elle est née au Pérou, son ancêtre avait la taille d'une cerise, les galions espagnoles lui font conquérir les potagers du monde entier après une escale au Mexique, les premiers plants européens poussent dans les jardins de Séville courant du 16ème siècle.

    Qualité nutritive :

    La tomate est un "légume-fruit" qui  joue un rôle bénéfique dans  notre alimentation. Sans aucun apport énergétique superflu, la tomate  fournit des quantités appréciables de minéraux (calcium, potassium,  magnésium et phosphore). (source Aprifel)

    "Son  intérêt en matière de prévention des cancers a été reconnu,  grâce à différentes enquêtes épidémiologiques. Elles ont montré qu'une  consommation régulière et suffisante de tomate (comme de chou et de  carotte, d'ailleurs) était corrélée avec un moindre taux d'apparition de  cancers. On pense que le lycopène de la carotte (ce pigment caroténoïde  proche de la provitamine A) pourrait avoir une action protectrice  contre le cancer. Action peut-être renforcée par la présence de vitamine  C, de vitamine E et de fibres, autres facteurs efficaces dans ce  domaine". Aprifel

     

    (http://www.aprifel.com/fiches,produits.php?p=70&c=2)

    Propriétés culinaires :

    Les cueillettes Chapeau de Paille vous proposent dès le début de l'été et jusqu'à la fin octobre, de venir découvrir, ou redécouvrir nos variétés de tomates oubliées.... Leur aspect de forme et de couleur variées, quelque fois un peu surprenant, cache un cœur tendre, une chaire avec peu de pépins et un gout étonnant ! Essayez-les, vous ne pourrez plus vous en passer. Cœur de bœuf, Cornue des Andes, Noir de Crimée, Green zébra, chacune d'elles vous réserve une surprise dans les saveurs, parfums, goût.

    Les tomates oubliées, cueillez-les, conservez-les, vous vous en souviendrez et les attendrez avec impatience dès la saison suivante. Enfin une tomate qui vous met en appétit...

      

    SOURCES : superbe blog potager..http://www.chapeaudepaille.fr/produit.php?prod=139

      

     

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  • Alimentation dans la préhistoire 

     

    "L'homme préhistorique était carnivore, dévorant à pleines dents de la chair fraîche". Voilà ce que l'on imagine généralement en pensant à l'homme préhistorique. Cette image d'Epinal est enracinée dans notre culture et permet à certains esprits étroits de se dire que, décidément nous sommes bien différents de cet ancêtre.
    La réalité est toute autre et nos origines sont plutôt végétariennes que carnivores !

     

    Etude de la faune, de la flore et de l'environnement de l'époque 



    La connaissance des hominidés (ou des homininés), de leurs savoir-faire (armes de chasse, outils) et de l'environnement, permet également de visualiser leurs ressources disponibles:
    - soit au sens géographique, comme la rareté de la végétation dans les régions nordiques (mais même les Inuits ont toujours eu une ration végétale d’environ 20 % de leur ration énergétique quotidienne)
    - soit au sens des possibilités, comme la chasse des grands animaux rendue uniquement possible par l'utilisation d'armes.

     

    Evolution chronologique du régime alimentaire des hominidés

     

     

    L'étude des hominidés, de leurs squelettes, de leurs dents et de leur environnement permetd'estimer leur régime alimentaire.
    A noter: les hominidés du paléolithique avaient véritablement des habitudes alimentaires très différentes suivant le climat sous lequel ils se trouvaient.

     

     

     

     

     

     

    Période végétarienne et insectivore : le Miocène

     


    Aussi loin que l'on recherche notre ancêtre, vers 7 millions d'années, nous retrouvons des êtres se nourrissant de végétaux, de tubercules, de racines, d'insectes et éventuellement de petitsanimaux.
     

     

     

     

    Introduction de la viande : le Pliocène  

     


    Si les hominidés de cette période ont toujours principalement un régime alimentaire végétarien, certaines espèces semblent consommer de plus en plus de viande. C'est d'abord par charognage (solution la plus simple) puis peu à peu en chassant que l'alimentation carnée est introduite.

     

     

     


    L'alimentation carnée s'amplifie : le paléolithique ancien


    Les viandes (et pour ce que l'on en sait assez tardivement, le poisson) deviennent les principaux aliments de nos ancêtres. Bien sûr la consommation de végétaux et de fruits est toujours importante car elle représente, entre autres, un apport nécessaire de vitamines (et d'indispensables fibres végétales).

     

    Il faut noter que les hominidés de cette période consommaient 3 à 10 fois plus de vitamines que l'homme moderne.

     

     


    Introduction des céréales et du lait : le néolithique  


    Le changement de vie au néolithique s'accompagne rapidement de modifications profondes dans l'alimentation des hommes, au détriment de la viande. D'abord cueillies,

     

    les céréales sont cultivées et prennent une place importante dans le régime alimentaire.

     L'élevage des animaux permet d'introduire un aliment qui était jusque là réservé aux enfants: le lait.

     Une « nouvelle cuisine » apparaît avec la céramique : les purées et les bouillies. Conséquence sur la santé, la multiplication des caries sur les dents fossilisées qui étaient très rares au paléolithique...

     

     

    La révolution industrielle


    En industrialisant ses productions, y compris pour les aliments, l'homme va modifier encore une fois très rapidement son régimealimentaire. En moins de 200 ans nous nous sommes de plus en plus éloignés du produit frais. Lesaliments nous parviennent sucrés, enrichis, contenant de plus en plus de graisses (mauvais acides gras saturés), de sel, de conservateurs, de colorants... et bien moins de fibres végétales. Après la carie ce sont véritablement l'obésité généralisée et ses complications (diabète, maladies cardio-vasculaires) qui nous guettent !  

     

    Toujours pas habitués au lactose...


    Des récents travaux publiés dans la revue Nature Genetics montrent que le lait n'est pas encore assimilé par toutes les populations. Récemment introduit dans notre alimentation, le lait n'est pas encore toléré chez les espagnols ou les chinois par exemple !

     

    Pour Hominides.com Gilles Delluc

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  • INTRODUCTION DE LA POMME DE TERRE EN EUROPE ( II )INTRODUCTION DE LA POMME DE TERRE EN EUROPE

     

    Nous venons de voir, dans le Chapitre précédent, que d’après les données historiques et les constatations faites par les explorateurs naturalistes, on peut être conduit à admettre que le pays d’origine de la Pomme de terre sauvage devait être placé dans une région montagneuse qui se trouve située sur les confins du Chili et de l’Araucanie. Elle aurait été l’objet de premières cultures au Chili même, puis au Pérou où les Incas n’avaient pas peu contribué à faire donnera ces cultures une grande extension. Lors de la conquête du Pérou par Pizarre, vers 1533, les Espagnols constatèrent que c’était une des grandes ressources de cette contrée à demi civilisée, mais ne furent pas autrement séduits par l’intérét que devait présenter le précieux tubercule et du parti qu’on pourrait en tirer en Europe, dans les cultures espagnoles. Il n’existe, en effet, à notre connaissance, aucun document historique qui fasse même mention de l’introduction de la Pomme de terre en Espagne.

     Si elle a dû y être apportée, ce qui est indubitable, cela ne doit être dû qu’à l’effet du hasard, probablement comme un reste de provisions alimentaires, faisant partie de la cargaison de quelques-uns des vaisseaux qui étaient chargés de porter à Charles-Quint les trésors d’or et d’argent, bien autrement estimés, arrachés par Pizarre et ses compagnons aux Incas, victimes de leur rapacité. Nous verrons par la suite que, dans tous les cas, on a des traces du passage de la Pomme de terre d’Espagne en Italie et de l’Italie dans les Pays-Bas.

      

    A partir de là, les documents historiques ne font plus défaut, et nous pouvons la suivre pour ainsi dire successivement, passant des Pays-Bas en Autriche, d’Autriche en Allemagne, puis de l’Allemagne en Suisse, et de la Suisse en France. Nous traiterons plus loin de cette histoire sous le titre de l'Introduction de la Pomme de terre sur le continent européen.  II y a eu, en effet, en Europe, deux introductions distinctes de la Pomme de terre : celle dont nous venons de parler, et celle qui, dans le même temps, c’est-à-dire vers la fin du XVIe siècle, en a été faite en Angleterre. Le fait de ces deux introductions est d’autant plus remarquable qu’elles se sont effectuées sous la forme de deux variétés bien connues du Solanum tuberosum, celle à tubercules jaunâtres et à fleurs violacées pour l’Angleterre, et celle à tubercules rougeâtres et à fleurs violettes pour le continent européen . Si l’introduction qui en a été faite sur ce continent a débuté par l’importation en Espagne du précieux tubercule, apporté directement du Pérou, la Pomme de terre a suivi une autre voie pour pénétrer en Angleterre.

    Comme nous le verrons, avec de plus amples détails, on est porté à croire que son exportation directe de la Virginie, dans l’Amérique du Nord, peut être attribuée à une importation momentanée, dans cette colonie anglaise, de tubercules transportés sur des vaisseaux espagnols qui auraient été pillés par des navires anglais. Car le Solanum tuberosum n’étant pas indigène dans la Virginie, il fallait bien expliquer de quelque façon que ce fût son apparition dans ces parages à peine explorés, en provenance du Pérou où il était cultivé depuis un temps immémorial.

    Voyons donc quels sont les documents historiques qui permettent de suivre pas à pas ce qui s’est passé en Angleterre, à ce propos, vers la fin du XVIe siècle.

    § 1. Introduction de la Pomme de terre en Angleterre. —

    En 1584, Sir Walter Raleigh avait reçu de la Reine Elisabeth une patente royale, qui lui avait été octroyée à charge par lui d’organiser la colonisation anglaise dans un territoire de l’Amérique du Nord, nouvellement découvert, et qui en l’honneur de la Reine et de son célibat fut appelé Virginie. Le point central où les débarquements se sont effectués paraît avoir été surtout l’île de Roanoak. Plusieurs expéditions furent faites, mais sans résultats pratiques, jusqu’en 1588, et Raleigh se dessaisit de sa patente en 1590. Dans l’une de ces malheureuses expéditions, des colons étaient restés en Virginie toute une année, dénués de toutes les ressources qu’ils avaient espéré y trouver pour s’y établir, et n’attendant plus avec anxiété que l’arrivée du navire qui devait leur apporter des secours de toute espèce.

     Avant l’arrivée de ce navire, il advint que  l’Amiral Drake, de retour d’une expédition contre les Espagnols à Carthagène et dans leurs possessions des Indes occidentales, débarquait inopinément en Virginie pour prendre des nouvelles des colons. Ceux-ci, qui n’avaient plus qu’un désir, celui de quitter la colonie, jugèrent prudent de profiter d’un retour possible en Angleterre, et, avec le consentement de Drake, ils s’embarquèrent le 18 Juin 1586, et arrivèrent à Portsmouth le 27 Juillet suivant. Cette année 1586 est jugée, en Angleterre, comme l’année d’introduction, dans ce pays, de la Pomme de terre, et voici sur quoi se base bette opinion :

    Il existe un rapport de cette expédition,

    Fig. 18. — La Virginie et les Caro- lines aux États-Unis.

    daté de Février 1587, dont le titre peut se traduire ainsi : « Relation brève et véridique de la Découverte de la nouvelle terre de Virginie, des avantages qu’on y trouve et dont ou peut tirer profit, à divers points de vue commerciaux ou autres, écrit par Thomas Hériot, au service de Sir Walter Raleigh et membre de la Colonie, qui a été employé à cette découverte pendant douze mois révolus. » Or, dans la 2e partie de ce Rapport, qui traite des productions que la Virginie est apte à fournir pour la nourriture et le bien-être de la vie des hommes, et dont les « colons faisaient usage, comme les naturels, pendant le temps de leur séjour, ainsi que des productions qu’on obtient par semis et labourage », se trouve un passage où il est parlé en premier lieu du Mays, puis des Racines, et qui se termine ainsi : « Openhaukest une sorte de racines de forme arrondie, quelques-unes de la grosseur d’une noix, d’autres beaucoup plus grosses, qui se trouvent dans les terres humides et marécageuses, croissant plusieurs ensemble, l’une à côté de l’autre sur des filaments, comme si elles étaient attachées à une corde. Quand on les a fait cuire ou bouillir, elles constituent un très bon aliment ».INTRODUCTION DE LA POMME DE TERRE EN EUROPE ( II )

    M. W. S. Mitchell, qui a publié en 1886 une étude historique très remarquable, intitulée : The origin of the Potato[1] et de la  quelle nous avons extrait les détails ci-dessus, reconnaît combien ces termes d’Hériot sont vagues, bien qu’ils soient généralement considérés comme devant se rapporter à la Pomme de terre, d’autant plus qu’Hériot lui-même ne parle en quoi que ce soit, dans son Rapport, de l’introduction de l'Openhauk en Angleterre, et qu’on ne trouve aucun document qui fasse mention de cette introduction.

    Ce qui vient seulement appuyer cette croyance, c’est l’intervention dans la question d’un botaniste anglais, contemporain, John Gerarde, qui a publié, en 1596, un Catalogue des plantes cultivées dans son jardin, en y faisant figurer la Pomme de terre sous le nom de Papus orbiculalus, et qui a fait paraître, en 1597, un ouvrage descriptif, intitulé : L’Herbier de l’Histoire générale des plantes (The Herball of generall Historie of plants), dans lequel il donne une figure et une description de la Pomme de terre, qu’il appelle alors : Batata virginiana sive Virginianorum et Pappus Potatoes of Virginia ; ce qui peut se traduire par Patate de Virginie ou des Virginiens et Papas, Pommes de terre de Virginie. En rattachant à ces diverses dénominations le passage que nous avons cité ci-dessus du Rapport d’Hériot, on en est arrivé à conclure que les tubercules de l'Openhauk, dont parlait Hériot, avaient été cultivés dans le jardin de Gerarde[2], et que ces tubercules, d’après ce dernier, n’étant  autres que ceux de la Pomme de terre, cette plante que l’on cultivait ainsi en Angleterre en 1596, avait du y être apportée en 1586 de la Virginie.

    Mais traduisons ici ce que nous dit Gerarde,dans son Herball[3] de sa Patate de Virginie, qu’il appelle ainsi, du reste, pour la distinguer de sa Patate des

    Fig. 19. — Portrait de John Gerarde, qui se trouve imprimé au frontispice de son Herball, reproduit d’après la photographie publiée par M. Arthur Sutton, dans sa Conférence sur les Potatoes (Londres, 1895).

    Espagnols (Batata Hispanorum), c’est-à-dire de ce que nous appelons actuellement la Patate ou Batate (Convolvulus Batatas de Linné), très différente du Solanum tuberosumqui

     est une Solanée, puisqu’elle appartient à la Famille des Convolvulacées. Ce qui n’empêche qu’en Angleterre on ne la distingue encore actuellement du potato qui est le nom ordinaire, de notre Pomme de terre, qu’en l’appelant Sweet Potato ou Patate douce. Et cette ancienne homonymie n’a pas peu contribué à faire naître de singulières confusions entre les deux sortes de Potatoes.

     

    BATATA VIRGINIANA SIVE VIRGINIANORUM

    « Description. — La Patate de Virginie, Batata virginiana sive Virginianorum, etc., a plusieurs branches, creuses et flexibles, traînant sur la terre, longues de 3 pieds, inégales, noueuses ou genouillées çà et là ; des nœuds part une grande feuille composée de plusieurs folioles, les unes petites, les autres grandes, disposées ensemble par couples sur une large côte médiane, d’une couleur vert foncé tirant sur le pourpre ; la feuille tout entière ressemble à celle du Cresson d’hiver[4], mais est plus large ; son goût est d’abord celui d’herbe, puis ensuite elle devient aigre et pique la langue. De l’aisselle des feuilles sortent des pédoncules grêles, arrondis, qui portent de belles et plaisantes fleurs, formées d’une seule feuille[5] qui est divisée ou plissée de telle façon qu’elle parait composée de cinq petites feuilles distinctes[6], ce dont on ne s’aperçoit que lorsqu’on la détache. Toute la fleur est d’une couleur légèrement pourprée, chaque pli ou division présentant à son milieu une petite bande d’une légère teinte jaune, comme si le pourpre et le jaune étaient mêlés ensemble, et dans le milieu de la fleur sort comme une grosse pointe aplatie, jaune d’or, du centre de laquelle s’élève une sorte de pointe aiguë verte. Le fruit, qui succède aux fleurs, est rond comme une bille, de la grosseur d’une petite Prunelle ou Prune sauvage, d’abord vert, puis noirâtre lorsqu’il est mûr, dans lequel est contenue la semence qui est plus fine qu’une graine de Moutarde.

    La racine est grosse, épaisse et tubéreuse, ne différant pas beaucoup, soit dans sa forme, sa couleur ou son goût des Patates communes[7], sauf que les racines de la Patate de Virginie ne sont pas si grandes ni si longues : certaines de ces racines sont rondes comme une  balle, d’autres ovoïdes, d’autres plus allongées, d’autres plus courtes ; ces racines noueuses sont fixées à la tige principale avec un nombre infini de fibres filamenteuses.

    » Le pays d’origine. — Elle croît naturellement en Amérique, où elle a été découverte pour la première fois, comme le rapporte Clusius[8] ; mais depuis, j’en ai reçu des racines de la Virginie, autrement appelée Norembega, qui poussent et prospèrent dans mon jardin comme dans leur propre pays natal.

    » Le temps. — Les feuilles sortent de terre au commencement de Mai ; les fleurs se montrent en Août ; le fruit est mûr en Septembre.

    » Les noms. — Les Indiens appellent cette plante Pappus, ce qui s’entend des racines : c’est sous ce nom que sont aussi désignées les Patates communes dans les contrées indiennes. Nous lui avons conservé ce même nom. Et comme elle a non seulement la forme et la même dimension que les Patates, mais qu’elle en a aussi le goût agréable et les vertus, nous avons cru pouvoir l’appeler en anglais: Potatoes of America or Virginia (Patates d’Amérique ou de Virginie).

    » Le tempérament et les vertus. — Le tempérament et les vertus se rapportent à ceux des Patates communes, étant pareillement un aliment, ainsi qu’un mets agréable, et qui les égale en bonté et en salubrité, soit qu’on les fasse toutes deux rôtir dans les cendres chaudes, soit qu’on les mange bouillies avec de l’huile, du vinaigre et du poivre, ou bien préparées de toute autre façon par les soins d’un habile cuisinier. »

    Cette description, bien que fort détaillée, laisse à désirer en ce qui concerne les tubercules. Il est difficile, dans la comparaison qui est faite des Pommes de terre avec les Batates, de comprendre bien nettement ce que voulait dire Gerarde. D’un autre côté, ce qu’il dit de Clusius au sujet de la découverte des Papas, ne peut s’expliquer que par des relations qu’il avait dû, avant 1597, entretenir avec ce savant botaniste. En effet, comme nous le verrons plus loin, l’Histoire des plantes rares (Rariorum plantarnm Historia), dans lequel ce dernier parle de la Pomme de terre, ne parut qu’en 1601.  Pour mieux nous expliquer le rapprochement que Gerarde avait établi entre les racines (ou tubercules) de sa Patate de Virginie et celle de la Patate commune, puisqu’il dit que la première était assez peu différente de la seconde, pour la forme, la couleur ou la saveur, nous nous sommes reporté à la description qu’il donne de la Patate ou Batata Hispanorum.

    Or voici ce que Gerarde dit de cette dernière : « Les racines sont peu nombreuses, grosses et noueuses, semblables à celles des Pivoines ou plutôt à celles de l’Asphodèle blanc. » Il ne parle que de la similitude de forme, mais ne nous apprend rien de leur couleur qui, d’après les auteurs de l’époque, était cependant décrite comme blanchâtre. Pour être mieux instruit sur ce point, nous avons consulté un auteur anglais qui a publié, une trentaine d’années après la 1re édition de l'Herball de Gerarde, un ouvrage assez curieux où se trouve une nouvelle description de la Pomme de terre, dont la culture s’était conservée en Angleterre. Il s’agit de John Parkinson qui, dans son livre intitulé : Paradisi in sola Paradisus terrestris, paru à Londres en 1629, au titre du Jardin potager, décrit en ces termes, d’après la traduction suivante, les Patates de Virginie.INTRODUCTION DE LA POMME DE TERRE EN EUROPE ( II )

    « Papas seu Battatas Virginianorum, Virginia Potatoes. — Les Patates de Virginie qui sont sottement appelées par certaines personnes des Pommes de jeunesse[9] (Apples of youth), appartiennent à une autre espèce de plante que les Patates d’Espagne, dont elles diffèrent beaucoup, excepté dans la couleur et le goût de la racine, car elles ont des branches faibles et quelque peu flexibles, ayant besoin pour appui d’un petit tuteur, ou d’être soutenues à la base par un étai quelconque ; ces branches sont garnies de plusieurs feuilles ailées, d’une couleur d’un vert grisâtre foncé, dont quelques-unes sont plus grandes que les autres. Les fleurs se développent plusieurs ensemble sur un long support, inséré entre les feuilles et les grandes tiges, et chaque fleur est isolée sur un court pédicule.

    Cette fleur est quelque peu semblable à celle du Tabac pour la forme : elle est composée d’une seule feuille à six angles[10], sur les bords, mais un peu plus large et d’une couleur de pourpre  pâle bleuâtre ou gorge de pigeon pâle, et parfois presque blanche, avec des filets rouges dans le milieu, laquelle entoure une grosse pointe d’un jaune d’or, terminée en vert à l’extrémité. Quand les fleurs sont passées, il vient à leur place de petits fruits ronds, aussi gros qu’une Prune de Damas, d’abord verts et ensuite presque blanchâtres, qui renferment beaucoup de graines blanches comme ceux de la Morelle.

    Les racines sont plus rondes et bien plus petites que celles de la Patate des Espagnols ; quelques-unes sont beaucoup plus grosses que les autres : elles se trouvent dispersées sous la terre au moyen de petits filaments ou de cordons qui partent des racines, et sont de la même couleur brun clair (light browne) à l’extérieur et blanche à l’intérieur que celles des Patates des Espagnols ; elles ont presque le même goût que celles-ci, mais il n’est pas tout à fait si agréable. — La Patate de Virginie, préparée de la même manière que la Patate des Espagnols, fournit un aliment presque aussi délicat. »

    Nous avons mis en italiques le passage qui nous intéressait plus particulièrement dans cette description : les racines, ou plutôt les tubercules de la Patate de Virginie sont signalés comme étant extérieurement d’un brun clair, autrement dit jaunâtre, qui est la teinte ordinaire de presque toutes les racines tubéreuses, ce qui explique peut-être que Gerarde n’en avait pas été frappé, et s’était plutôt arrêté à la forme. Mais cela nous permet d’y reconnaître une de ces variétés de Pommes de terre à tubercules ronds ou oblongs et jaunâtres, dont les fleurs sont violacées, ou gris de lin, parfois même presque blanches. Telles étaient encore les Pommes de terre cultivées en Angleterre en 1629.

    Maintenant, nous croyons qu’il y a intérêt à revenir à l’époque de l’introduction de la Pomme de terre en Angleterre pour donner connaissance d’une autre opinion qui a été formulée à ce sujet par le Dr Puttsche, dans son Essai d’une Monographie des Pommes de terre publiée à Weimar, en 1819 (Versuch einer Monographie der Kartoffeln), opinion qui avait fait en son temps beaucoup de prosélytes. D’après cet auteur, le Capitaine John Hawkins serait le premier qui aurait essayé d’introduire en Europe la culture de la Pomme de terre. En 1565, il en aurait rapporté en Irlande, de Santa Fé de Bogota, quelques tubercules qui auraient été tout à fait négligés. Aussi le nom de Hawkins ne pourrait-il figurer que pour  mémoire dans l’histoire de l’introduction de la Pomme de terre en Europe. Mais le célèbre navigateur Franz Drake, qni avait d’abord navigué sur les vaisseaux de Hawkins, aurait reconnu toute l’étendue des services que pourrait rendre à l’Europe la culture de ce précieux végétal.

    Au retour de son expédition dans la Mer du Sud, il en aurait porté des tubercules en Virginie, où ils furent cultivés avec succès. Ce fut en Virginie qu’il prit ceux qu’il aurait portés en Angleterre en 1586, et qu’il aurait remis à son propre jardinier, en lui enjoignant de donner tous ses soins aux plantes qui en sortiraient. On s’expliquerait par ce fait pourquoi la Pomme de terre fut regardée d’abord comme originaire de la Virginie. Drake aurait donné également quelques tubercules de cette plante au botaniste anglais Gerarde, qui les aurait plantés dans son jardin à Londres, et qui, à son tour, en aurait envoyé à quelques-uns de ses amis, et particulièrement à Clusius : aussi ce dernier botaniste est-il le premier qui ait fait mention de l’espèce qui nous occupe.

    Tout porte à croire que, vers la même époque, il arriva des Pommes de terre dans le midi de l’Europe, par l’intermédiaire des Espagnols ; mais les documents historiques ne sont pas très précis à cet égard, et de plus on n’apprécia pas plus en Espagne et en Italie qu’en Angleterre l’importance de la nouvelle acquisition, qui resta dans la catégorie des raretés et qui fut même bientôt oubliée, puisque l’on regarde assez généralement cette conquête si importante pour l’Europe comme due à l’Amiral Walter Raleigh, tandis que ce célèbre marin n’eût en réalité d’autre mérite que de rapporter de nouveaux tubercules de Virginie en Irlande, au commencement du XVIIe siècle.

    Cette manière de présenter les faits tient un peu du roman, en ce qu’il mêle adroitement des vérités à des erreurs manifestes. Quoi qu’il en soit, ce récit avait séduit beaucoup d’esprits en Allemagne, à ce point qu’à Offenbourg on a même élevé, en 1853, un monument de commémoration à Franz Drake, « qui transporta la Pomme de terre en Europe en 1586 »[11]. Avant de discuter certaines  allégations du Dr Pultsche, voyons ce que disait, quatorze ans avant lui, sur le même sujet, Sir Joseph Banks.

    Le 7 Mai 1805, Joseph Banks donnait lecture à la Société d’horticulture de Londres[12] d’un intéressant Mémoire dont nous traduisons la première partie, comme il suit :

    « Essai de fixation de l’époque où la Pomme de terre (Solanum tuberosum) a été introduite pour la première fois dans le Royaume Uni.

    » Ces notes sur l’introduction de la Pomme de terre, qui, je l’espère, ne paraîtront pas à la Société dépourvues d’intérêt, ont été principalement recueillies par mon digne et savant ami, M. Dryander, et certaines d^entre elles d’après des autorités assez difficiles à se procurer.

    » La Pomme de terre (Solanum tuberosum), dont nous faisons usage actuellement, a été apportée en Angleterre par des colons qui avaient été emmenés par Sir Walter Raleigh, muni d’une patente octroyée par la Reine Elisabeth, dans le but « de découvrir et de prendre possession des contrées nouvelles, qui n’étaient pas au pouvoir de Chrétiens ». Cette patente a été revêtue du Grand Sceau en 1584. La même année, quelques-uns des vaisseaux de Sir Walter mirent à la voile; d’autres, à bord de l’un desquels se trouvait Thomas Herriot, connu depuis comme mathématicien. l’année suivante, en 1585. Cependant, tous revinrent le 27 Juillet 1586, rapportant probablement avec eux la Pomme de terre.

    » Thomas Herriot, qui devait avoir pour mission d’examiner la contrée, et de faire connaître à ceux qui l’envoyaient la nature et les produits du sol, rédigea un rapport qui fut imprimé dans la collection des Voyages de De Bry, volume I. Dans ce rapport, à l’article des tubercules, page 17, il décrit une plante appelée   Openhawk. « Ces tubercules, dit-il, sont ronds, quelques-uns du volume d’une noix, d’autres plus gros : ils croissent dans un sol humide, plusieurs pendant ensemble, comme s’ils étaient fixés à des filaments ; ils constituent un bon aliment, qu’ils soient bouillis ou rôtis ».

    » Gerarde, dans son Herbier, publié en 1597, a donné une figure de la Pomme de terre, sous le nom de Patate de Virginie, et nous apprend qu’il en a reçu les tubercules de la Virginie, autrement appelée Norembega.

    » Les minutes manuscrites de la Société royale, portant la date du 13 Décembre 1693, constatent que Sir Robert Southwell, alors Président, informa les membres de cette Société, dans une séance, que son Grand-père avait apporté en Irlande les Pommes de terre qu’il tenait de Sir Walter Raleigh[13].

    » Il est donc parfaitement prouvé que la Pomme de terre a été pour la première fois introduite en Angleterre, soit dans l’année 1586, soit très peu de temps après, et de là importée en Irlande, sans délai, par l’ancêtre de Sir Robert Southwell. Et elle a été estimée et cultivée en Irlande comme plante alimentaire, avant que le grand peuple de l’Angleterre en connaisse le prix : Gerarde, en effet, qui avait cette plante dans son jardin, en 1597, recommande les tubercules pour être consommés comme un mets délicat, non comme une nourriture vulgaire.

    » Il appert, toutefois, qu’il en arriva premièrement en Europe, dans une période antérieure, et par une voie différente, car Clusius, qui à cette époque résidait à Vienne, reçut d’abord la Pomme de terre, en 1588, du Gouverneur de Mons, en Hainaut, lequel la tenait dès l’année précédente de l’un des personnages de la suite du Légat du Pape, sous le nom de Taratoufli, et avait appris de lui qu’en Italie où elle était alors en usage, personne certainement ne savait si elle était venue originairement d’Espagne ou d’Amérique.

     » Pierre Cieça, dans sa Chronique, imprimée en 1553, nous apprend, chap. XI, p. 49, que les habitants du Quito et des environs possèdent, outre le Maïs, une racine tubéreuse qu’ils mangent et qu’ils appellent Papas, Clusius croit que c’est la plante qu’il a reçue des Flandres, et cette conjecture a été confirmée par les voyageurs qui ont, depuis cette époque, visité la contrée.

    « Nous pouvons donc parfaitement inférer de ces renseignements que la Pomme de terre a été d’abord apportée en Europe des parties montagneuses de l’Amérique du Sud, aux environs de Quito, et que les Espagnols, étant alors les seuls possesseurs de cette contrée, il n’est guère douteux qu’ils ne l’aient premièrement transportée en Espagne. Mais comme il a dû se passer un certain temps avant que l’usage s’en fût répandu chez eux et que les Italiens en vinssent à la connaître assez pour lui donner un nom[14], il y a quelque raison de croire qu’on la possédait depuis plusieurs années en Europe, avant qu’elle ait été envoyée à Clusius.

    » Dans l’Amérique du Sud, on appelait le tubercule Papas, et dans la Virginie Openhawk le nom de Potatoe lui était ici évidemment appliqué en raison d’une certaine ressemblance qu’elle avait avec la Batate ou Patate douce, et notre Pomme de terre parait avoir été distinguée de cette dernière plante par la dénomination de Patate de Virginie (Potatoe of Virginia), depuis l’année 1640, si ce n’est plus anciennement.INTRODUCTION DE LA POMME DE TERRE EN EUROPE ( II )

    » Quelques auteurs ont assuré que la Pomme de terre avait d’abord été découverte par Sir Francis Drake, dans les mers du Sud, et d’autres qu’elle avait été introduite en Angleterre par Sir John Hawkins ; mais, dans les deux cas, la plante à laquelle ils faisaient allusion était évidemment la Batate ou Patate douce, dont on a fait usage en Angleterre comme d’une friandise, longtemps avant l’introduction de notre Pomme de terre : on l’importait en grande quantité de l’Espagne et des Canaries et on lui attribuait la vertu d’être un très bon reconstituant. Les sucreries de Falstaff[15] et autres confiseries de qualités semblablement imaginaires, dont s’amu-   saient nos ancêtres, se confectionnaient principalement avec la Batate. Ces Patates douces étaient offertes en vente par des marchands ambulants, surtout dans le voisinage de Royal Exchange, et ceux qui avaient confiance dans leurs propriétés reconstituantes les achetaient même à un prix fort élevé, lorsqu’elles étaient rares. Les allusions à cette crédulité sont très fréquentes dans les pièces de théâtre de cette époque. »

    Ce que dit ainsi Joseph Banks nous parait répondre à plusieurs des allégations du Dr Puttsche. Hawkins a pu apporter la Batate, mais non la Pomme de terre. Quant à Francis Drake, aucun document n’établit qu’il a introduit cette dernière en Virginie, et il n’a joué d’autre rôle que celui d’un navigateur transportant à son bord Heriot muni peut-être du précieux tubercule. Il est vrai que Walter Raleigh n’a joué personnellement aucun rôle dans l’introduction de la Pomme de terre en Angleterre, parce qu’il n’était pas allé lui-même en Virginie. Mais si Gerarde a eu quelque rapport avec Clusius, ce qui paraît tout au moins résulter de ce qu’il dit de lui dans son Herball il ne lui a pas fait connaître la Pomme de terre : c’est, en effet, par une toute autre voie qu’elle est parvenue à Clusius, en 1588, comme vient de nous l’apprendre Joseph Banks et comme nous le verrons plus loin.

    Mais Clusius professait la botanique à Leyde, dans la chaire devenue vacante par la mort de Dodoëns, depuis 1593 jusqu’en 1609 : il peut donc se faire que Gerarde, qui n’a publié son Herball qu’en 1597, ait obtenu facilement de Clusius des renseignements qu’il a utilisés dans son ouvrage : c’est à cela seulement que devaient s’en tenir leurs relations, car Clusius n’en parle pas. Nous croyons devoir intercaler ici l’extrait suivant d’un Mémoire de M. Clos[16] qui ajoute d’autres renseignements à ceux publiés par Joseph Banks. « On dit que Sir Walter Raleigh donna quelques Pommes de terre à son jardinier, comme un beau fruit d’Amérique, avec ordre de les planter dans son jardin potager : en Août, la plante fleurit, elle fructifia en Septembre ; mais les baies furent si différentes de ce qu’attendait le Jardinier que, dans sa mauvaise humeur, il les porta à son maître, lui disant : « Est-ce là ce beau fruit d’Amérique que vous prisez si haut ? » W. Raleigh, qu’il ignorât  ou non la chose, les lui fit arracher et jeter (Philipps, History of cultivated vegetables).

    » Le botaniste Gerarde, qui reçut directement la Pomme de terre de Virginie, qui la cultiva dans son jardin en 1597, et qui même en donna dans son grand Herball une description et une figure, il est vrai assez médiocre, se borne à dire : Ces tubercules sont une nourriture aussi bien qu’un mets assez agréable, égal en bonté et en salubrité à la Batate, soit qu’on les fasse rôtir sous la cendre, soit qu’on les mange bouillis, avec de l’huile, du vinaigre et du poivre, ou préparés de toute autre manière par la main de quelque habile cuisinier. Peu après, le célèbre François Bacon écrit, dans Histoire de la vie et de la mort : « Un quart de racines farineuses, telles que celles de la Pomme de terre, mélangées avec trois quarts de grain, rendrait la bière plus saine et plus propre à prolonger la vie » (Bibl. britann.) ; et dans son Histoire naturelle, ce savant indique même un moyen d’obtenir de la plante des tubercules plus développés en tous sens.

    » D’un autre côté, la mention élogieuse précitée, due à Gerarde, devait avoir contribué à mettre la Solanée en vogue en Angleterre, au moins à titre d’aliment délicat ; car, déjà dès 1619, elle figure parmi différents articles destinés à la table royale : la quantité à fournir était très minime ; mais elle ne devint dans la Grande Bretagne un objet d’importance nationale qu’en 1662-1663. Dans un meeting du 18 Mars de cette année, fut lue une lettre de M. Buckland, gentilhomme du Somerset, recommandant la plantation de la Pomme de terre dans toutes les parties du Royaume pour prévenir la famine. A la suite d’un rapport élogieux sur cette communication, plusieurs membres furent invités à cultiver la plante. Toutefois, si l’on s’en rapporte au peu de cas qu’attachait encore Bradley à cette culture en 1718, dans ses New improvements of Planting and Gardening, on est autorisé à conclure que la Pomme de terre n’était pas, même alors, appréciée selon ses mérites.

    » En Ecosse, elle ne fut cultivée qu’en 1683. En 1728, un journalier, Thomas Prentice, planta pour la première fois des Pommes de terre en plein champ dans le Kilsyth : le succès fut tel que tout fermier et colon suivait son exemple (Philipps, l. c.). »

    Nous trouvons aussi dans l’Encyclopédie du Jardinage de Lou-  don[17] quelques passages intéressants sur le même sujet. « Gough, dit-il, dans son édition du Camden’s Britannia, assure que la Pomme de terre avait d’abord été plantée par Sir Walter Raleigh dans sa terre de Youghall, près de Cork, en Irlande, et qu’elle était « appréciée et cultivée pour la nourriture » dans cette contrée, avant qu’elle ne fût estimée en Angleterre... »INTRODUCTION DE LA POMME DE TERRE EN EUROPE ( II )

    « La Société royale, ajoute Loudon, prit en 1663 quelques mesures pour encourager la culture des Pommes de terre, en vue de prévenir la famine. Cependant, quoique leur utilité au point de vue alimentaire fût mieux connue, on n’en faisait pas grand cas. Dans les ouvrages horticoles publiés vers la fin du XVIIe siècle, cent ans après leur introduction, on n’en parle guère qu’avec dédain. « On en fait grand usage en Irlande et en Amérique pour l’alimentation, dit un auteur ; on pourrait en conseiller la culture avec avantage pour les pauvres gens ». « Je n’ai pas appris qu’on ait encore essayé de les cultiver, ajoute un autre, peut-être parce qu’on ne peut pas en obtenir de grandes quantités pour servir de nourriture aux porcs ou pour tout autre bétail ». L’érudit Evelyn lui-même semble avoir conservé contre les Pommes de terre quelque préjugé : « Plantez-les, dit-il, en 1699, dans votre plus mauvaise terre. Déterrez-les en Novembre pour les consommer l’hiver ; elles constitueront un stock qui ne diminuera pas de sitôt ».

    Les célèbres pépiniéristes, London et Wise, dans leur Complete-Gardener publié en 1719, ne considéraient pas la Pomme de terre comme digne d’appeler l’attention ; et Bradley qui, vers le même temps, écrivait avec tant de détails sur divers sujets d’horticulture, parlait des Pommes de terre comme étant inférieures au Chervis et aux raves... »

    » La culture des Pommes de terre dans les jardins en Ecosse, dit encore Loudon, était très peu comprise vers l’année 1740, et elle n’était pas encore pratiquée dans les champs, vingt années environ après cette période. II a été établi dans le General report of Scotland (vol. Il, p. 111), comme un fait bien constaté, que dans les années 1725-1726, le petit nombre de plantations de Pomme de terre existant alors dans les jardins des environs d’Edimbourg, se perpétuaient dans les mêmes plates-bandes d’année en année, comme  le recommandait Evelyn; on se contentait d’arracher quelques tubercules en Automne, et Ton recouvrait les pieds avec une bonne litière pour les préserver du froid pendant l’hiver. Depuis le milieu du XVIIIe siècle, la culture des Pommes de terre a fait par contre des progrès si rapides en Ecosse, qu’on en voit maintenant dans presque tous les jardins qui entourent les chaumières. »

    En suivant le cours de nos citations d’auteurs qui nous ont laissé quelques documents relatifs à notre histoire, nous avions espéré trouver de nouveaux renseignements dans l'Historia plantarum de John Ray, publiée à Londres en 1686, et dans le Plantarum Historia universalis de Morison qui a paru à Oxford en 1715. Mais ces deux auteurs ne font guère que répéter ce qu’avaient déjà dit leurs devanciers, en s’inspirant surtout des ouvrages des Bauhin que nous ferons connaître dans le paragraphe suivant. Ils parlent seulement tous deux de Johannes Banister, un explorateur mort victime de son dévouement à la science, qui, pendant douze ans, est resté dans la Virginie, parcourant la contrée en tous sens et recueillant toutes les plantes qui s’offraient à lui. Ray en a publié le Catalogue, daté de 1680, dans lequel ne figure pas le Solanum tuberosum. Morison ajoute même que Banister avait certifié ne l’y avoir jamais rencontré, ce que d’autres explorateurs devaient bien après lui également constater.INTRODUCTION DE LA POMME DE TERRE EN EUROPE ( II )

    L’Angleterre, cependant, a toujours tenu le premier rang en Europe pour la préconisation de la culture de la Pomme de terre. Ceci explique toute l’importance que l’on attachait déjà, au XVIIIe siècle, dans ce pays, ainsi qu’en Irlande, aux soins qu’exigeait l’amélioration de cette culture. L’article suivant, extrait du Dictionnaire des Jardiniers[18] de Philip Miller, Directeur du Jardin des Apothicaires de Londres à Chelsea, fournit la preuve de la situation privilégiée où se trouvait alors à ce point de vue l’Angleterre. Nous en donnons ci-après la traduction.

    Miller avait cru devoir classer la Pomme de terre dans le genre Lycopersicon avec les Tomates : les raisons qu’il en donne ne pouvalent prévaloir contre l’opinion de Gaspard Bauhin qui en avait fait un Solanum, opinion ratifiée par Linné et tous les botanistes

     après lui. Mais ce n’est ici qu’un point peu important et qui n’enlève rien à l’intérêt du reste de son article.

    « Lycopersicon (tuberosum), à tige herbacée, non épineuse, à feuilles pinnées, entières. — Pommes d’amour à tige herbacée, à feuilles ailées qui sont entières. — Solanum tuberosum esculentum C. B. P. 167. — Morelle tubéreuse comestible, communément appelée Potatoe et par les Indiens Batatas.

    » Il s’agit de la Pomme de terre commune, qui est une plante si bien connue maintenant qu’il n’est pas nécessaire d’en donner la description. Il y en a deux variétés : l’une qui a des tubercules[19] rouges, l’autre blancs; celle dont les tubercules sont rouges a des fleurs violacées, mais celle à tubercules blancs a des fleurs blanches. On les regarde comme n’étant que des variétés accidentelles et non comme des espèces distinctes.

    » Le nom ordinaire de Potatoe semble n’être qu’une corruption du nom indien Batatas. Cette plante a été très propagée en Angleterre depuis 30 à 40 ans, car bien qu’elle ait été introduite de l’Amérique vers l’année 1623[20], elle n’était encore que peu cultivée jusqu’en ces derniers temps; ses tubercules étaient dédaignés par les gens riches et considérés comme ne constituant qu’un aliment bon pour les pauvres gens ; cependant, ils sont à présent généralement estimés par tout le monde, et leur culture, dans les environs de Londres, dépasse, je crois, en extension celle de toute autre partie de l’Europe.

    » Cette plante a été toujours classée dans le genre Solanum ou Morelle, et elle a été maintenue dans ce genre par Linné; mais puisque le genre Lycopersicon a été établi comme un genre distinct, en considération de la division du fruit en plusieurs loges, par des partitions intermédiaires, et comme le fruit de la Pomme de terre présente exactement les caractères des autres espèces de ce genre, j’ai cru devoir l’y placer ici[21].

     » On la propage généralement au moyen de ses tubercules qui produisent beaucoup lorsqu’ils sont plantés dans un sol convenable. Le mode ordinairement suivi consiste à planter les petits tubercules coupés en morceaux, en onservant sur chaque morceau un bourgeon ou un œil ; mais cette méthode n’est pas celle que je croirais devoir recommander, car lorsqu’on plante de très petits bourgeons, ils produisent d’ordinaire un grand nombre de tubercules, mais ceux-ci sont toujours petits; quant aux morceaux des gros tubercules, ils sont sujets à pourrir, surtout si le temps devient humide aussitôt après qu’ils ont été plantés[22]. Je recommanderais plutôt de faire choix des plus beaux tubercules pour la plantation, et de leur consacrer un plus grand espace de terre, tant entre les rangées que dans les rangées mêmes, entre chaque plant : j’ai remarqué que, par cette méthode, l’automne suivant, on récolte en général de gros tubercules.INTRODUCTION DE LA POMME DE TERRE EN EUROPE ( II )

    » Le sol dans lequel la Pomme de terre réussit le mieux, est une terre grasse, légèrement sablonneuse, ni trop sèche, ni trop humide : cette terre doit être bien labourée deux ou trois fois, afin d’en rompre et diviser toutes les parties ; plus profondément elle sera labourée, d’autant mieux se développeront les tubercules. Au printemps, juste avant le dernier labour, on étendra sur la terre une grande quantité de fumier consommé, qu’on enfouira dans le sol par ce labour au commencement de Mars, si la saison se montre douce; autrement il conviendra de ne le faire que vers la fin de ce mois : car s’il survenait une forte gelée après la plantation des tubercules, ils pourraient en souffrir gravement, sinon même être détruits. Mais le plus tôt qu’on les plantera au printemps, une fois la crainte de la gelée passée, ce sera le mieux, surtout dans les terres sèches. Après le dernier labour, on aplanira le sol et on tracera alors les sillons à trois pieds de distance les uns des autres, et d’une profondeur d’environ sept à huit pouces. Au fond de chaque sillon, on placera les tubercules un à un, à la distance d’environ un pied et demi; puis on remplira le sillon avec la terre qu’on en avait retirée, et l’on continuera de même dans toute l’étendue du champ ou de la parcelle de terre où l’on s’est proposé de faire cette plantation.

     » Lorsqu’on a terminé ce travail, la terre peut rester dans le même état jusqu’à l’époque où l’on s’attendra à voir les pousses sortir du sol : on hersera alors avec soin la terre sur les deux côtés, ce qui permettra de briser les mottes de terre et de rendre le sol tout à fait uni. En n’opérant ainsi que tardivement, on détruira les mauvaises herbes qui, à cette époque, commencent à sortir de terre : cela épargnera la dépense d’un premier sarclage et retournera en même temps la surface du sol, qui, lorsqu’il a beaucoup plu après la plantation, est souvent durcie en une forte croûte, ce qui retarde la sortie des pousses.

    » J’ai conseillé de disposer les rangées de Pommes de terre à trois pieds de distance, ce qui permet d’y pratiquer un binage qui sera très profitable aux tubercules : car en retournant et en remuant deux fois la terre entre les plants, non seulement on détruira les mauvaises herbes, mais on ameublira aussi le sol, de telle façon que toute l’eau des pluies pénétrera jusqu’aux tubercules et leur croissance en profitera grandement ; toutefois ces opérations devront être terminées de bonne heure dans la saison, avant que les tiges ou les rameaux des plantes commencent à s’étaler et à traîner sur la terre, parce qu’après cela il sera impossible de le faire sans leur porter préjudice.

    » Si ces labours sont pratiqués avec soin entre les rangées et si la terre est binée entre les plants dans les rangées, on préviendra la croissance des mauvaises herbes, jusqu’à ce que les tiges des plantes couvrent le sol : de cette façon, il y aura moins de danger de voir croître les mauvaises herbes et de porter atteinte à la récolte; mais comme le labour ne peut se faire qu’entre les rangées, il sera nécessaire de faire usage de la houe pour ameublir le sol et détruire les mauvaises herbes dans les rangées. Et si ce travail est exécuté pendant un temps sec, après les deux labours, il suffira de tenir le sol net jusqu’au moment où les Pommes de terre seront bonnes à être déterrées.

    » Dans les endroits où le fumier est rare, quelques personnes le répandent seulement dans les sillons où se plantent les tubercules ; mais c’est une méthode peu profitable, parce que lorsque les Pommes de terre commencent à émettre leurs racines, celles-ci s’étendent bientôt au-delà de l’étendue des sillons, et les tubercules nouveaux se forment d’ordinaire à une certaine distance du tuber-  cule-mère, si bien qu’ils dépassent la limite effective du fumier, et qu’ils n’en tirent conséquemment que peu de bénéfice. Et comme beaucoup de fermiers désirent avoir une récolte de blé après celle des Pommes de terre, celles-ci appauvrissant le sol, il en résulte que la terre n’est plus si bien préparée sur toute sa surface, ni si bien appropriée pour cette culture, comme lorsque le fumier est également répandu et qu’on a pratiqué un labour sur tout le sol, d’autant que la récolte de Pommes de terre ne sera pas non plus aussi bonne. J’ai toujours remarqué que là où cette méthode de planter les Pommes de terre a été pratiquée, la terre a produit ensuite une belle récolte de blé, et l’on voit la saison suivante n’apparaître çà et là parmi le blé que de rares pieds de Pommes de terre, ce qui me parait résulter de ce que les fermiers n’ont planté que de gros tubercules ; car lorsqu’ils ont fait la récolte à l’Automne qui a suivi cette plantation, ils ont constaté que chaque gros tubercule en avait produit six, huit ou dix également gros, et souvent beaucoup plus, et avec ceux-ci très peu de petits tubercules ; tandis que, dans les endroits où l’on avait planté des petits tubercules, il s’en produisait un grand nombre de très petits : beaucoup de ces derniers étaient même si petits, qu’on ne pouvait les découvrir lorsqu’on faisait la récolte, si bien qu’ils poussaient la saison suivante et qu’ils portaient un grave préjudice à la culture qui alors occupait le sol.

    » La tige de ces Pommes de terre meurt généralement des atteintes du premier froid en Automne : il convient alors de déterrer les tubercules aussitôt, et de les enfouir dans du sable sous des abris couverts où l’on peut les conserver secs et les protéger contre le froid. Il est vrai que tous ceux qui cultivent les Pommes de terre dans le voisinage de Londres n’attendent pas le dépérissement de la tige, car ils commencent à en déterrer une partie sitôt que les tubercules se présentent dans un état convenable pour le marché, et font également de temps en temps des récoltes suivant les besoins de la vente. Il y en a d’autres aussi qui ne les déterrent pas immédiatement après le dépérissement des tiges, mais qui les laissent en terre beaucoup plus longtemps : il n’en résulte pas de mal, pourvu qu’ils soient déterrés avant qu’une forte gelée ne les atteigne, ce qui les détruirait ; mais si l’on a besoin surtout de la terre pour y installer d’autres cultures, en ce cas, le plus tôt on les  récoltera sera le mieux, après que la tige sera fanée. Lorsqu’on entassera ces tubercules, on les recouvrira d’une grande quantité de sable ou de terre sèche, pour empêcher leur échauffement ; il ne faudra pas non plus en faire de trop gros tas pour la même raison.

    « Les jardiniers des potagers et les fermiers qui résident dans le voisinage de Manchester cultivent une grande quantité de Pommes de terre, parce que les habitants de cette ville populeuse en consomment abondamment et en sont beaucoup plus amateurs que de toute autre plante alimentaire : il en est résulté une sorte d’émulation parmi ces cultivateurs qui s’efforcent de se devancer les uns les autres, en procurant dans la saison le plus tôt possible des tubercules dans un état convenable pour la table. Dans le but d’arriver à ce résultat, ils ont fait choix des tubercules qui produisent leurs fleurs les premiers, et les ont laissés mûrir leurs graines qu’ils ont semées avec grand soin. Or les plantes ainsi obtenues ont généralement été plus précoces que les autres; et en répétant souvent ce système, ils ont si bien augmenté la précocité des tubercules qu’ils sont arrivés à en tirer parti deux mois après la plantation. C’est ainsi que l’on pourrait apporter de grandes améliorations, en appliquant cette méthode à la culture d’autres plantes alimentaires, surtout lorsqu’elle serait employée par des personnes curieuses et soucieuses de faire des expériences. »

    Après la lecture de ce document, qui nous montre à quel degré de perfectionnement en était déjà arrivée la culture de la Pomme de terre en Angleterre, on pourrait se demander ce qu’il en était alors de cette culture en Irlande. Nous trouvons une sorte de réponse à cette question dans un passage que nous extrayons du Récit du voyage qu’avait fait en Irlande Arthur Young, de 1777 à 1779. L’humoristique agronome s’exprime, en effet, comme il suit, d’après la traduction Millon.

    « La nourriture du paysan irlandais, qui consiste en Pommes de terre et en lait, a été citée plus d’une fois comme une preuve de l’extrême pauvreté du pays ; mais c’est, je crois, une opinion adoptée avec plus de légèreté que de réflexion Si quelqu’un doute de l’abondance comparative de la nourriture d’un paysan anglais et d’un paysan irlandais, qu’il fasse attention à leurs mets : l’économie avec laquelle l’Anglais mange son pain et son fromage est   bien connue ; qu’on remarque chez l’lrlandais le grand plat de Pommes de terre posé à terre, toute la famille accroupie autour, dévorant une quantité incroyable de cette nourriture, le mendiant même invité de bon cœur à en manger, le cochon en ayant sa part, aussi bien que la femme, les coqs, les poules, les dindons, les oies, le chien, le chat et peut-être la vache, et tous participant au même plat. On ne peut avoir été souvent témoin d’une pareille scène, sans être convaincu de l’abondance, et j’ajouterai de la gaîté qui l’accompagne. »

    Nous pensons ne pouvoir mieux terminer ce paragraphe qu’en en tirant deux conclusions instructives. La première, comme nous l’avons déjà établi, c’est que la Pomme de terre, introduite en Angleterre, appartenait à une variété produisant des tubercules à peau jaunâtre et à fleurs violettes. La seconde conclusion, en tenant compte de ce que nous a appris Miller, c’est qu’en 1768 une deuxième variété avait trouvé place en Angleterre à côté de la première, car ses tubercules blancs à fleurs blanches ne nous semblent devoir être considérés que comme une simple modification de la variété jaunâtre à fleurs violettes. D’où provenait la deuxième variété à tubercules rouges et à fleurs violacées ? Très probablement du continent européen, qui ne possédait que cette variété depuis le XVIe siècle. Nous n’avons pas de document qui nous l’apprenne, mais nous verrons plus loin que la variété anglaise a été, au XVIIe siècle, apportée dans les Flandres et nous constaterons de même que vers le milieu du XVIIIe siècle, en France, on possédait également ces deux variétés à tubercules rougeâtres et jaunâtres.

    § 2. Introduction de la Pomme de terre sur le continent européen. — Il a déjà été question plusieurs fois de Clusius, l’un des plus célèbres botanistes du XVIe siècle. Il s’agit de Charles de l’Ëscluse, plus connu dans le monde savant sous son nom latinisé Clusius, né le 19 février 1526 à Arras, dans l’Artois, qui faisait alors partie des Flandres et se trouvait sous la domination espa- gnole. Son père, Michel de l’Escluse, était seigneur de Watènes, près d’Armentières, et conseiller à la cour provinciale de l’Artois ; sa mère, Guilliémine Quineault, fut une femme exemplaire par ses vertus et ses belles qualités. Il était l’aîné des enfants et devait prendre, à la mort de son père, en 1573, le titre de Seigneur de  Watènes ; mais il renonça alors à son droit d’aînesse en faveur de son frère cadet, pour se consacrer entièrement à ses études scientifiques. A l’âge de vingt-deux ans, il obtint le diplôme de Licencié en droit à l’Université de Louvain. Il alla ensuite passer trois ans dans les Universités allemandes et se fit inscrire à l’Université de Montpellier en 1551. Ce fut là que se manifesta son penchant pour l’étude des sciences naturelles et en particulier pour la botanique. De retour en 1554 dans les Pays-Bas, il se lia avec le célèbre Dodoëns qui venait de faire paraître son Cruydtboeck flamand ; De l’Escluse prépara une édition nouvelle en françois de cette Histoire des plantes, qui parut en 1557 à Anvers chez Jean Loë : c’est bien certainement, dans notre langue, le plus ancien traité de Botanique descriptive. Avant d’être appelé à Vienne, en 1574, par l’empereur Maximilien H, comme intendant des Jardins impériaux, De l’Escluse avait accompagné de nobles jeunes gens dans des voyages d’instruction en France, en Espagne et en Portugal ; il en avait profité pour étudier avec beaucoup d’ardeur la végétation presque inconnue des différentes contrées qu’il traversait. Il quitta Vienne dans Tété de 1588, pour se rendre à Francfort-sur-le-Mein, où il habita jusqu’à la fin de Septembre 1593. Il se fixa alors à Leyde, où il avait été appelé par les Curateurs de l’Université pour enseigner la botanique dans la chaire de Dodoëns, décédé en 1585. De l’Escluse mourut, seize ans après, en cette même ville, le 4 Avril 1609, dans sa quatre-vingt-quatrième année. Dans le cours des nombreux voyages qu’il avait effectués, il s’était deux fois rendu en Angleterre, en 1579 et en 1581. En cette année 1581, il paraît avoir été mis en rapport, à Londres, avec Francis Drake, d’après ses biographes. 11 a fait paraître, en effet, en 1582, un petit ouvrage dans lequel il traite de plusieurs végétaux exotiques, rapportés par cet Amiral des côtes occidentales d’Amérique ; mais il n’y est nullement question de la Pomme de terre.

    Dans les ouvrages remarquables que De l’Escluse a publiés en langue latine, qui tous ont été imprimés à Anvers, par le célèbre Plantin ou son gendre et successeur Moretus (de son vrai nom Mourentorff), et sur lesquels l’auteur est toujours désigné sous la dénomination latinisée de Carolus Clusius Atrebatis (Charles de l’Escluse d’Arras), se trouvent décrites une quantité de plantes nouvelles qu’il avait recueillies dans diverses parties de l’Europe,

     et toutes celles qu’il pouvait se procurer provenant de l’Asie, de l’Afrique et surtout de l’Amérique. C’est ainsi que la Pomme de terre a été l’une des plantes qui ont plus particulièrement attiré son attention. Comme nous le verrons plus loin, c’est lui qui l’introduisit et la répandit en Allemagne : c’était donc plutôt à lui qu’à Francis Drake que l’on aurait dû, à Offenbourg, élever un

    Fig. 20 Charles de l’Escluse (ou Clusius) à l’âge de 35 ans et à celui de 79 ans. (Reproduction de la lithographie qui orne sa biographie, par Charles Morren, 1853.

    monument commémoratif, d’autant plus que la variété anglaise ne fut cultivée que beaucoup plus tard sur le continent.

    Mais l’ouvrage dans lequel de l’Escluse donne une description très détaillée de la Pomme de terre, accompagnée des renseignements qu’il avait recueillis à son sujet, n’ayant été publié qu’en 1601, il nous semble qu’il y a quelque intérêt à suivre l’ordre  chronologique dans nos citations et à donner d’abord connaissance de ce que dit de la Pomme de terre Gaspard Bauhin, dans son Phytopinax, imprimé à Bâle en 1596. C’est à ce botaniste également célèbre, que l’on doit le nom scientifique de la Pomme de terre, Solanum tuberosum, nom qui a été consacré par Linné lorsqu’il a modifié la nomenclature de G. Bauhin[23].

    Voici comment ce dernier parle de la Pomme de terre dans son Phytopinax, dont nous traduisons l’article qui s’y rapporte.

     

    « Solanum tuberosum.

    » Cette plante a une tige longue d’une coudée et demie ou de deux coudées[24], semblable à celle de la Tomate, presque arrondie, striée, légèrement velue, pleine de suc, verte et peu rameuse ; quelquefois cependant elle s’élève jusqu’à la hauteur d’un homme, et alors elle est très ramifiée, ce qui n’arrive assurément pas lorsqu’elle est plantée dans un pot. Les feuilles sont plus longues qu’une palme[25], presque velues, d’un vert pâle, subdivisées en six, huit ou plusieurs petites parties, comme si elles étaient découpées en feuilles spéciales, dont l’une est toujours placée à l’extrémité pour en terminer le nombre; elles sont oblongues-arrondies, entières, disposées rarement de manière à se faire opposition, et parmi elles il s’en trouve interposées d’ordinaire deux autres six fois plus petites. Les rameaux se divisent communément en deux pédicules, dont chacun supporte plusieurs fleurs, les unes en boutons et trois ou quatre épanouies; elles ressemblent aux fleurs des Aubergines, et sont grandes, d’un bleu purpurescent, à l’instar d’un calyce qui ne serait pas divisé jusqu’à sa base ; elles se terminent en cinq lobes aigus, parcourus par cinq lignes jaunâtres qui semblent les séparer par moitié; au centre se trouvent quatre[26]   étamines roussâtres, comme chez les Aubergines. Aux fleurs succèdent des fruits ronds, suspendus un à un à de longs pédicules en forme de grappe, ainsi que cela se voit dans la Morelle vulgaire[27] ; mais ces fruits sont plus volumineux, les uns d’une grosseur égale à une noix, les autres à peine gros comme une noisette : tous portent du reste quelques sillons égaux, comme ceux des Tomates. D’abord verts, ils noircissent, et quand ils sont mûrs ils deviennent d’un noir rougeâtre et renferment des graines petites, plates, rondes, brunes, semblables à celles de la Belladone. La racine[28] est arrondie, mais irrégulièrement ; elle est de couleur brune ou d’un noir rougeâtre, et on l’arrache de terre l’hiver, afin qu’elle ne pourrisse pas tant elle est pleine de sucs, et qu’on puisse la confier de nouveau à la terre au printemps, quoiqu’il arrive que laissée dans le sol, au printemps elle y repullule d’elle-même. Or, de la base de la tige jusqu’à la racine, poussent çà et là de longues radicelles fibreuses, sur quelques-unes desquelles naissent de plus petites racines rondes. La racine elle-même a l’habitude de pourrir lorsque la tige s’est trop développée.

    » Nous avons cru devoir appeler cette plante Solanum, en raison de la ressemblance de ses feuilles et de ses fruits avec la Tomate, et de ses fleurs avec l’Aubergine, ainsi que pour sa semence qui est celle des Solanum, et pour son odeur forte qu’elle a de commun avec ces derniers. Je reçus de la graine de cette plante qu’on appelle Pappas des Espagnols ou d’autres fois des Indes : semée dans nos jardins, elle crût au point de former une sorte d’arbrisseau ramifié ; il en fut de même dans le jardin du Dr Martin Chmielecius, chez qui elle produisit une fleur blanche. L’illustre Dr Laurent Scholtz, médecin de Breslau (dans le jardin très soigné duquel elle s’était développée), m’en envoya, comme preuve de notre ancienne amitié, un dessin colorié, mais sans le fruit ni les appendices des racines[29].

    » Nous avons appris que l’on connaît aussi cette planté sous le  nom de Tartuffoli[30] sans doute à cause de sa racine tubéreuse, car c’est le même nom qu’on donne aux Truffes en Italie, où l’on en mange les fruits à la façon des Truffes... »

    Nous ne nous arrêterons pas à présenter ici quelques observations sur ce qu’on vient de lire de G. Bauhin. Nous préférons les réserver, pour les compléter, après que nous aurons terminé toutes nos citations des auteurs du commencement du XVIIe siècle.

    Nous croyons devoir maintenant appeler l’attention sur ce que nous a laissé Charles de l’Escluse sur la Pomme de terre, dans un de ses derniers ouvrages, et non le moins remarquable, intitulé :

    Fig. 21 à 25. — Tubercules, stolons et racines de la Pomme de terre, d’aprés la gravure sur bois (réduite d’un quart) du Rariorum Plantarum Historia de Clusius (1601).

    Rariorum Plantarum Historia, imprimé par Jean Moretus, gendre et successeur du célèbre Plantin, à Anvers, en 1601. Il semble qu’il n’ait pas eu connaissance de ce qu’avait publié, cinq ans auparavant, Gaspard Bauhin, sur son Solanum tuberosum, ou que les retards apportés à l’impression de son ouvrage ne lui aient pas

    permis de modifier le chapitre consacré à ce sujet, ou bien, ce qui est plus probable, qu’il ne désirait pas entretenir de relations avec Gaspard Bauhin, car il ne cite pas ce dernier auteur. D’un autre

     côté, comme tous les botanistes de l’époque qui étaient portés à retrouver dans les traditions grecques ou latines les opinions des Anciens sur les plantes qu’on ne pouvait croire nouvelles, de l’Escluse se demande, avec quelque doute il est vrai, si la Pomme de terre ne répondait pas à une description assez vague de l’Arachidnade Théophraste, qui semble concerner une sorte de Truffe. Notre Solanée étant une plante du Nouveau-Monde,

    Fig. 26. — Sommité fleurie de la Pomme de terre, d’après la gravure sur Bois (réduite d’un quart) du Rariorum Plantarum Historia de Clusius (1601).

    et par suite inconnue aux auteurs grecs ou latins, nous supprimerons son commentaire sur l’Arachidna, mais nous traduirons ici tout le reste du Chapitre LII de son IVe Livre, intitulé : Papas des Péruviens, qu’on ne pourra lire sans grand intérêt.

    « La racine de cette nouvelle plante, dit-il, car elle n’a été connue en Europe que depuis peu d’années, est alimentaire.

    » Son tubercule ne doit être ordinairement planté chez nous qu’en Avril, et pas plus tôt. Il en sort, quelques jours après la plantation, des feuilles d’un pourpre foncé, villeuses, qui en se développant prennent une teinte verte. Leur forme ne diffère pas beaucoup de celle des feuilles du Raifort : les folioles naissent sur la même nervure médiane par cinq, sept ou davantage, et toujours en nombre impair, avec d’autres petites folioles intercalaires, l’impaire se trouvant toujours terminale. La tige, épaisse d’un pouce, est anguleuse, lanugineuse, longue de cinq et parfois six coudées[31] ; elle émet du pied plusieurs jets, et se divise en plusieurs branches,  longues, faibles, qui, lorsqu’elles ne sont pas soutenues par des échalas ou autres étais, rampent par leur propre poids sur la terre et s’étalent de tous côtés. De l’aisselle des branches sortent des pédoncules longs d’un pied, épais, qui portent dix à douze fleurs, ou plus encore ; ces fleurs sont élégantes, larges d’un pouce environ, anguleuses, d’une seule pièce, mais avec cette complexité qu’elles paraissent composées de cinq feuilles distinctes : leur couleur, qui extérieurement est d’un pourpre pâle, est intérieurement pourprée, et elles présentent, disposées en étoile autour de leur ombilic, cinq rayons verdâtres, et autant d’étamines jaunes soudées au sommet, avec un style également verdâtre proéminent. A ces fleurs, qui rappellent l’odeur de celles du Tilleul[32], succèdent des pommes rondes, assez semblables à celles de la Mandragore, mais plus petites ; ces fruits d’abord verts, puis blancs à la maturité, contiennent au milieu d’une pulpe humide beaucoup de graines plates, qui ne sont pas plus grosses que celles des Figues.

    » Elle n’a qu’une seule racine, ou parfois deux ou trois qui sont épaisses et s’enfoncent directement dans le sol ou quelquefois se ramifient; puis, à l’extrémité de ces racines, il en naît d’autres, plus ténues, blanchâtres, qui se dirigent de côté et d’autre : il arrive même qu’il en sort de nouvelles pousses, assez loin du pied mère, qui produisent des feuilles ou de nouvelles plantes. Ces racines donnent naissance à des fibres longues et épaisses, et lorsqu’au mois de Novembre, après les premières gelées, on déterre le tout, on voit adhérer à ces fibres des tubercules de grosseur variée, inégaux, qui présentent plusieurs yeux d’où sortiront les germes l’année suivante. Quant à ces tubercules, dont je me rappelle avoir récolté plus de cinquante sur un seul pied (tant la plante est prolifique !), les uns sont gros au point de peser une once ou même deux[33], et sont recouverts d’une pellicule qui est rougeâtre ou d’une couleur tirant sur le pourpre, les autres sont petits, comme s’ils n’étaient pas encore mûrs, et ont une pellicule en grande partie blanchâtre : cette pellicule est très mince sur tous les tubercules, mais la chair elle-même en est ferme et blanche. Or, soit  qu’on leur laisse les fibres auxquelles ils adhèrent, soit qu’on les en détache, on peut conserver ces tubercules, pour les replanter l’année suivante en les disposant dans un pot d’argile ou tout autre vase rempli de terre sèche que l’on rentre à la maison : on arrive au même résultat en les plaçant à nu dans un lieu sec et chaud. Mais si on laisse les racines dans le jardin, elles se détériorent pendant l’hiver, à moins qu’il n’en soit autrement dans les contrées plus tièdes : il s’ensuit que lorsqu’on les tire du sol, qu’on les débarrasse de leur terre, elles se durcissent et ne deviennent d’aucun usage. On ne doit donc compter pour la conservation de l’espèce que sur les tubercules ; il est vrai que je n’ai jamais fait d’expériences sur les graines : mais j’ai appris par d’autres personnes que, dans la même année, elles donnent aussi des fleurs dont la couleur parait différer de celles de la plante mère. Ainsi mon ami Jean Hogheland m’écrivait que les pieds, qui étaient sortis de la semence que je lui avais envoyée, avaient donné des fleurs toutes blanches, mais qu’il avait constaté que ces pieds qu’il avait déterrés à la même époque où Ton déterre ceux qui ont été produits par des tubercules, n’avait encore développé aucun de ces derniers, peut-être parce que les tiges n’avaient pas encore atteint leur maturité[34]. J’ai remarqué aussi que lorsqu’on déterrait le tubercule qui avait donné naissance à la plante, on le trouvait parfois tout à fait vide, et d’autres fois encore ferme et entier.

    » Cette plante fleurit en Juillet, et souvent elle ne cesse de porter fleur et fruit jusqu’en Automne, ou même jusqu’aux premières gelées qu’elle supporte difficilement.

    » C’est Philippe de Sivry, Seigneur de Walhain et Préfet de la ville de Mons, en Hainaut (Belgique), qui m’a le premier fait connaître cette plante : il m’en envoya d’abord deux tubercules avec un fruit à Vienne, en Autriche, au commencement de l’année 1588, puis l’année suivante le dessin colorié d’un rameau fleuri. Il m’écrivit qu’il la tenait de l’un des personnages qui avaient accompagné le Légat du Pape en Belgique, et qui la lui avait don-

     née sous le nom de Taratouffli[35], Jacob Garet, le jeune, m’en adressa ensuite à Francfort un autre dessin, représentant toute la plante. Mais je n’ai pas cru devoir faire reproduire ici ces deux dessins, parce que j’en avais fait exécuter d’autres sur deux planches, d’après des chantillons vivants, l’une représentant les fleurs et le fruit, l’autre les

    Fig. 27 à 29. — Reproduction (réduite au tiers) du dessin colorié d un rameau fleuri et de deux tubercules de la Pomme de terre envoyé à Clusius, en 1588, par Philippe de Sivry.

    racines et les tubercules adhérents à leurs fibres.

    » La plante est-elle originaire d’Italie ? On l’ignore. Il est certain qu’on en a eu de l’Espagne ou de l’Amérique. On a toutefois lieu d’être surpris d’avoir connu si tardivement cette plante, alors, dit-on, qu’on en faisait communément usage en Italie, où l’on mangeait ses tubercules cuits avec de la viande de mouton, comme si c’était des navets ou des carottes, où même on en nourrissait les porcs. Mais ce qui est encore plus surprenant, c’est que, malgré cela, cette plante était encore inconnue de l’École de Padoue, ce que j’ai appris par des amis qui étudiaient la médecine dans cette ville, et à qui de Francfort j’avais envoyé des tubercules. Il est vrai que cette plante commence à devenir assez commune dans  la plupart des jardins de l’Allemagne, tant elle est féconde[36].

    » Du reste, on ne peut douter que ce ne soit la même plante dont parle Pierre Cieça, au Chapitre XL de sa Chronique espagnole. Il s’exprime en ces termes : « Aux environs de Quito, les indigènes possèdent, outre le Maïs, deux autres plantes qui constituent leur principale nourriture, lis appellent la première Papas : elle a des racines assez semblables à des Truffes, mais qui sont dépourvues de toute enveloppe plus ou moins dure ; lorsqu’elles sont cuites, elles ont la pulpe aussi tendre que de la purée de Châtaignes. On les fait sécher au soleil, et, sous le nom de Chumo on en fait une conserve alimentaire. Le fruit produit une tige qui ressemble à celle du Pavot (il faut pardonner cette comparaison à un soldat). La seconde plante est le Quinüa[37], qui s’élève à la hauteur d’un homme, et qui a les feuilles de la Blette de Mauritanie ; sa graine est petite, blanche ou rouge : on en prépare une boisson, et, après l’avoir fait cuire, on la mange comme nous le faisons du riz.

    » Augustin Çarate, ainsi que Gomara, dans son Histoire générale des Indes, parlent également des Papas. Celles-ci ne paraissent pas différer beaucoup de ces racines que les Virginiens appellent Openawk[38].

    » Le Légat, à ce que j’ai compris, mangeait de ces tubercules, qu’on lui préparait de la même façon que des Châtaignes ou des Carottes, pour se fortifier, parce qu’il était d’une santé très délicate. Je crois, en effet, qu’ils sont non moins nourrissants que les Châtaignes ou les Carottes, mais qu’ils sont cependant flatulents : en outre, certaines personnes les estiment comme de bons reconstituants. J’ajouterai qu’après les avoir dépouillés autant dire de leur épiderme, plutôt que de leur pellicule, car ils s’épluchent facilement, je les ai fait cuire entre deux plats, puis je les ai dégustés, après macération dans une sauce grasse de navets ou de raves et de mouton : je les ai trouvés certes non moins sapides et agréables au palais que les navets eux-mêmes. Mais j’estime qu’on ne peut les manger crus, car ils sont alors âpres et indigestes ».

     

     convient ici de donner quelques explications au sujet de ce que nous venons de traduire de l’Histoire des plantes rares de Charles de l’Escluse. Quand on parcourt cet ouvrage remarquable, qui ne contient pas moins de 1135 gravures sur bois, on peut y suivre pour ainsi dire l’existence de son auteur pas à pas et connaître le grand nombre de ses amis ou correspondants qui lui envoyaient des plantes de tous les points de l’Europe.

    C’est ainsi que nous apprenons que Jacob Garet le jeune était un pharmacien belge, et que son ami Jean Hogheland résidait à Leyde. Il nous fait connaître aussi qu’il était arrivé à Vienne en Août 1573, et qu’il avait quitté cette ville vers la fin de l’été de 1588, pour se rendre à Francfort-sur-le-Mein où il resta jusqu’aux derniers jours de Septembre 1593 ; il était appelé alors à Leyde pour professer la botanique dans l’Université de cette ville. Il a dû par suite cultiver la Pomme de terre à Vienne, pendant l’année 1588, et ensuite à Francfort, de 1589 à 1593. 11 faisait cette culture, avec celle d’autres plantes, dans un jardin particulier, dont il pouvait disposer librement, dans chacune de ces deux villes. 11 dit, en effet, à propos de la Fritillaire impériale : « Elle a poussé, à Vienne, dans mon petit jardin (in meo hortulo) », et d’un Narcisse : « Je l’ai observé en fleur, in hortulo meo ». Il ajoute même, en donnant la description d’un Allium : « Lorsque j’eus quitté Vienne, j’en trouvais quelques pieds aux environs de Francfort et je les transportais dans mon petit jardin (in meum hortulum) ».

    Cette culture lui a permis de récolter assez de tubercules de Pommes de terre pour les distribuer surtout en Allemagne, de tous les côtés, puisqu’il déclare lui-même que « cette plante est assez commune dans la plupart des jardins[39] de l’Allemagne, tant elle est féconde ! ». Du reste, cette culture des plantes qui l’intéressaient plus particulièrement, se trouve en quelque sorte confirmée, dans une de ses lettres à Mourentorff,successeur du célèbre Plantin, son éditeur, et conservée au Musée Plantin, à Anvers.

    « Pour ce que j’ay en ceste année (1592),   dit Clusius, en fleur ledit Ranunculus siharum pleno flore de deux diverses sortes, il me faudra changer tout ce que j’en ay écrit en ma copie, et me servir de ce que j’ay écrit et observé ceste année, à fin d’en faire la description plus parfaicte... »[40].

    Après les précieux renseignements que nous a donnés Charles de l’Escluse, nous croyons utile de reproduire ceux que nous trouvons dons un second ouvrage de Gaspard Bauhin, qui a été publié à Francfort-sur-le-Mein, en 1620, sous le titre de Prodromes Theatri botanici. Il y parle de nouveau de la Pomme de terre, qu’il nomme alors Solanum tuberosum esculentum, ajoutant à son nom primitif le qualificatif de esculentum pour rappeler ses qualités alimentaires. Il s’exprime à son sujet dans les termes suivants, dont voici la traduction.

    INTRODUCTION DE LA POMME DE TERRE EN EUROPE ( II )« Solanum tuberosum esculentum. — Cette plante a une tige qui s’élève de deux à trois coudées[41], et qui dépasse rarement la hauteur d’un homme : elle est épaisse, anguleuse, striée, légèrement velue, et se ramifie en un certain nombre de branches assez faibles pour ramper sur la terre si on ne les soutient par des étais ; aux aisselles de ces branches sont des pédicules épais, anguleux, qui portent les fleurs. Les premières feuilles qui naissent sont semblables à celles de l’Herbe Ste-Barbe (Barbarea) (ainsi que l’exprime fort bien, avec toutes les parties de la plante, la figure que nous avons publiée dans notre édition des Commentaires de Matthiole et que nous reproduisons ici) et d’un noir purpurescent, presque velues. Les autres feuilles sont d’un vert pâle, sans pétiole et longues comme la main : elles sont divisées en six ou huit folioles, ou davantage, qui sont fixées sur une côte médiane et oblongues-arrondies, entières; entre chacune d’elles se trouvent intercalées deux folioles six fois plus petites, et une foliole plus grande que les autres, mais de même forme, et qui se trouvant être la septième ou la neuvième, termine cette feuille ailée. Les fleurs sont élégantes, extérieurement d’un blanc pourpre, intérieurement purpurescentes ou d’un bleu violacé (on dit qu’on en a obtenu de doubles ou flore pleno en Autriche) : elles sont au nombre de dix, douze ou plus encore, les unes en boutons, plusieurs autres épa-

     

     nouies, et grandes, assez semblables à celle des Aubergines ; elles ne sont composées que d’une seule feuille à cinq angles[42]avec cinq lignes ou rayons d’un vert jaunâtre qui parcourent les lobes dans leur longueur ; au milieu de ces fleurs se trouvent d’ordinaire cinq étamines roussâtres ou plutôt jaunâtres, autour du style verdâtre proéminent. Ces fleurs exhalent une odeur qui

    Fig. 30 à 33. — Une tige fleurie et tuber- culifère de Pomme de terre, avec deux fleurs et un fruit (plus grossis) d’après la gravure sur bois (réduite d’un quart) du Prodomos Theatri botanici de Gaspard Bauhin (1620).

    rappelle en quelque sorte celle des fleurs du Tilleul[43]. Les fruits ronds qui leur succèdent pendent plusieurs ensemble en forme de grappe et sont portés sur de longs pédicules, comme ceux de la Morelle noire . quelques-uns de ces fruits sont de la grosseur d’une petite noix, d’autres d’une noisette ; d’autres enfin sont plus petits, pas encore mûrs, et d’une couleur d’un vert noirâtre. Lorsque les fruits sont mûrs, ils deviennent d’un brun rougeâtre, plus rarement blancs et striés, et contiennent une pulpe humide et blanchâtre qui est remplie de nombreuses graines, petites, plates, presque rondes, brunes, qui rappellent celles de la Belladone. Quant aux tubercules, ils sont quelquefois de la grosseur du poing, d’autres fois plus petits ; leur forme est oblongue, très rarement phalloïde, et leur surface inégale présente des yeux, indices des germes de l’année suivante ; ils sont couverts d’une pellicule brune ou d’un

      noir rougeâtre et pleins d’une moelle ou chair ferme et blanche. Lorsqu’on déterre le tubercule dont est sortie la plante, on le trouve vide et flasque. De la base de la tige partent plusieurs racines, fibreuses, oblongues, blanchâtres, qu’on rencontre éparses dans la terre, mais qui parfois s’enfoncent dans la profondeur du sol et y forment d’autres racines tubéreuses, si bien qu’en arrachant toute la plante vers l’hiver, nous avons pu compter qu’elle

    avait produit plus de quarante

    Fig. 34 à 38. — Tubercule, fleurs et baies, dont une coupée, avec graines libres, de Pomme de terre, d’après la gravure sur bois (réduite d’un quart), du Prodromos Theatri botanici de G. Bauhin (1620).

    (d’autres disent même cinquante) tubercules de différentes grosseurs. On déterre généralement ces tubercules dans la crainte qu’ils ne pourrissent pendant l’hiver, et on les place dans un endroit sec, assez chaud, ou bien on les garde dans des pots remplis de terre, et on les replante à l’arrivée du printemps. Les Bourguignons ont l’habitude aussi d’étaler les rameaux sur le sol et de les recouvrir de terre dans le but d’augmenter le nombre des tubercules. La Plante fleurit chez nous en Juin, et souvent jusqu’en automne ; mais les premières gelées blanches lui sont funestes.

    » On l’a transportée de l’Ile de Virginie d’abord en Angleterre, puis en France et dans d’autres régions[44].

    » Les tubercules de cette plante sont désignés sous le nom de Openhawk à ce que nous apprend l’auteur de son histoire. Pierre Cieça, dans sa Chronique (comme Gomara dans son Histoire générale des Indes), écrit qu’on les appelle Papas, aux environs de

      Quito ; Joseph Acosta, dans son Histoire de l’lnde, Papas, et Benzoni Pape : c’est de là qu’on leur a donné le nom de Papas des Indes ou Papas des Espagnols. Les Italiens appellent ces tubercules Tartuffoli, parce que c’est le nom qu’on a l’habitude de donner aux Truffes, et les Allemands nomment la plante Grüblingbaum, c’est à-dire Arbre à truffes.

    » Dans l’année 1590, j’ai reçu du Dr Scholtz, sous le nom de Pappas des Espagnols, un dessin colorié de cette plante, et ne l’ayant trouvée décrite nulle part, j’en ai donné la description dans mon Phytopinax en la nommant Solanum tuberosum, puis dans mon édition des Commentaires de Matthiole, Solanum tuberosum esculentum, en y ajoutant une figure, et j’en ai transmis le dessin à Clusius[45]. J’en ai fait un Solanum, à cause de la ressemblance de ses feuilles avec celles de la Tomate ; de ses fleurs, avec celles des Aubergines ; de ses fruits, avec ceux de la Morelle noire ; de sa semence, avec celle de presque tous les Solanum ; enfin, en raison de l’odeur de toute la plante qu’elle a de commun avec les Solanum.

    » Chez les Indiens, ses tubercules remplacent le pain : ils les appellent Chunno. Ils les déterrent, les font sécher en les exposant au soleil, et lorsqu’ils sont secs, ils les brisent en plusieurs morceaux qui leur servent à préparer un aliment nommé Chunno, qui se conserve assez longtemps. Mais ils mangent parfois aussi les Papas encore verts, soit cuits, soit rôtis. Je rapporte ceci d’après Acosta, qui ajoute qu’on plante également une autre sorte de Papas dans les vallées les plus chaudes, et qu’on en prépare un mets appelé Locro. Il en est de même, dans l’île de Virginie, où la plante croit dans des lieux humides et marécageux : on consomme les tubercules cuits dans l’eau. Chez nous, on fait parfois rôtir les tubercules sous la cendre comme des Truffes; puis on enlève la cuticule et on les mange avec du poivre.

    Quelques-uns les font rôtir, les nettoient, les coupent en tranches, les fricassent dans une sauce grasse avec du poivre et les mangent à titre de bon reconstituant. D’autres les croient d’un excellent usage pour les personnes affaiblies et les recommandent comme un aliment salutaire. Ils  nourrissent non moins que les Châtaignes et les Carottes, mais ils sont flatulents. On m’a raconté que les Bourguignons se sont à présent interdit Tusage de ces tubercules, parce qu’ils sont persuadés que c’est un manger qui donne la lèpre, et ils les appellent Artichauts des Indes ».

    Jean Bauhin, aussi célèbre que son frère G. Bauhin, consacre également, dans le 3e volume de son Historia plantarum generalis, publiée à Iverdun en

    Fig. 39 à 41. — Portion de tige fleurie, avec fleur, plus grossie, et tubercule de Pomme de terre, d’après la gravure sur bois (réduite d’un quart) de l'Historia plantarum generalis de Jean Bauhin (1651).

    1651, un de ses articles à la Pomme de terre. Il y reproduit sommairement presque tout ce qu’en avaient dit De l’Écluse et G. Bauhin ; mais sa description est quelque peu différente, et nous croyons qu’il n’est pas sans intérêt de la traduire ici, en la faisant suivre des renseignements qu’il a cru devoir y ajouter.

    Le titre de son article est intitulé Papas americanum.

    « Cette plante, dit-il, a une tige haute de deux à trois coudées[46], quelquefois plus : elle est assez épaisse, succulente, presque ronde, légèrement velue, verte mais tachetée de nombreux points rougeâtres, creuse, rameuse, et elle paraît inégale en raison des ailes membraneuses d’un noir pourpre et quelquefois frisées qui la parcourent entre les insertions des pétioles des feuilles. Celles-ci, longues d’une palme et demie[47], se composent de trois conjugations de folioles, dont l’une qui est l’impaire, un peu plus grande que les autres, est terminale : toutes ces folioles sont velues, assez peu régulièrement disposées, plutôt longues que larges; leur face supérieure est d’un vert foncé et lisse, et la face inférieure plus pâle et terne. De plus petites folioles arrondies se trouvent interposées

      entre les autres, et leur disposition n’est pas non plus régulière. A l’extrémité des rameaux de la tige sont insérés plusieurs pédicules qui se divisent en plusieurs autres, lesquels sont velus et articulés, de telle sorte qu’il peut arriver que la partie supérieure tombe facilement ou spontanément avec les fleurs[48]. Ces dernières qui ont un calyce verdâtre quinquepartite, sont aussi grandes que la grande Mauve sylvestre; elles sont en dehors pâles et un peu velues, mais en dedans d’une teinte purpurescente et parfois blanchâtre. Chaque lobe de la corolle qui est d’une seule pièce est par- couru par une sorte de rayon verdâtre. Au centre se trouvent cinq étamines obtuses, d’un jaune safrané, entourant un style de couleur verte. J’ai vu également sortir en ce point de très petites folioles, de la même couleur que la fleur, qui peuvent être considérées comme des pétales rudimentaires et comme une tendance de la nature à en faire une fleur double. Les fruits succèdent en nombre égal aux fleurs ; ils sont presque aussi gros qu’une Châtaigne, mais de forme orbiculaire, d*un vert noirâtre et un peu velus. Ils renferment beaucoup de semence qui est petite, plate et semblable à celle des Solanum. Les tubercules sont épais, longs d’une palme ou d’une palme et demie[49], ou même beaucoup plus petits : ils sont en dehors d’un rouge foncé et en dedans d’un blanc pâle. Un tubercule donne naissance à plusieurs tiges et produit plusieurs fibres, auxquelles adhèrent plusieurs autres tubercules, gros et petits, insipides. La plante rampe sous terre et s’y propage singulièrement.

    » Benzo dit qu’il existe, chez les Péruviens, une sorte de tubercule qu’ils appellent Pape, et qui est une espèce de Truffe, sans presque de saveur. D’après Thom. Heriot, on donne le nom d’Openhauk aux tubercules de l’île de Virginie, qui sont comme liés les uns aux autres, et qui une fois cuits sont bons à manger. Suivant Pierre Ciéça, les tubercules dits Papas, lorsqu’ils sont cuits, ont la pulpe aussi tendre que celle des Châtaignes bouillies : il

     ajoute que ceux que l’on fait sécher au soleil s’appellent Chunno ».

    Jean Bauhin termine son article en assurant que « la plante que Gaspard Bauhin dit être nommée Artichaut des Indes par les Bourguignons est très différente du Pappa d’Amérique ou de son Solanum tuberosum esculentum »[50].

    Si nous essayons de résumer les observations de ces savants descripteurs, nous constaterons d’abord la petitesse primitive des tubercules à pelure rougeâtre des Pommes de terre cultivées pour la première fois sur le continent européen, puis l’augmentation sensible du volume de ces tubercules après un demi-siècle, leur production quoique petits en nombre d’abord considérable (près de 50 par pied), la haute dimension des tiges (deux mètres), puis la floraison abondante, la couleur violacée ou blanche des corolles, et la formation initiale de beaucoup de fruits avec nombreuses graines, tous les caractères enfin qui dénotent une plante presque sauvage, de végétation vigoureuse, mais s’adaptant fort bien aux nouveaux climats qu’elle trouvait en Europe. D’un autre côté, nous prendrons note d’une allégation toute nouvelle et bien inattendue, sur laquelle, du reste, nous aurons à revenir dans le Chapitre suivant, c’est l’indice même de la première réprobation dont a été frappée la Pomme de terre et qui ferait croire qu’elle a eu assez d’influence pour retarder l’essor que devait prendre la culture du précieux tubercule.

    Mais revenons à l’histoire de l’introduction de la Pomme de terre en Europe. Nous avons vu qu’elle s’était faite en Angleterre d’une façon toute spéciale : nous n’avons pas trouvé de documents qui permettent d’établir qu’elle ait été, au commencement du XVIIe siècle, importée de l’Angleterre dans les autres États européens. Par contre, Charles de l’Escluse nous a appris qu’elle avait été apportée d’Italie en Belgique par un Légat du Pape, et que des Pays-Bas elle lui avait été envoyée en Autriche, puis, que lui-même avait contribué à la répandre en Allemagne. Les Frères Bauhin nous ont fait connaître à leur tour qu’ils la possédaient en Suisse, et que de là elle avait été importée dans la Bourgogne, qui est devenue successivement la Franche-Comté, c’est-à-dire une partie de la France  actuelle. Or qu’était-elle devenue en Belgique où le Légat du Pape l’avait apportée en 1587 ? Charles Morren [Belgique horticole, IIIe volume, 1853) va nous l’apprendre. « L’histoire si intéressante de ce précieux aliment, dit-il, ne saurait s’écrire aujourd’hui sans recourir à Charles de l’Escluse qui, par le seul fait d’avoir popularisé le plus riche présent que le Nouveau Monde ait offert à l’Ancien, mérite de prendre place parmi les bienfaiteurs de l’humanité. La culture de la Pomme de terre préconisée par ce célèbre Botaniste, placé alors à la tête du Jardin impérial de Vienne, continuée par les horticulteurs de Belgique, transmise à François Van Sterrebeck au XVIIe siècle, à Verhulst de Bruges au XVIIIe, ne se perdit plus dans nos provinces, et, quand Parmentier avait trois ans, nos populations trouvaient déjà sur les marchés publics des villes les Pommes de terre en abondance. C’est à Francfort (où Jacques Garet les cultivait au XVIe siècle) que Parmentier connut les Pommes de terre, chez le pharmacien Morin dans la demeure duquel il avait reçu un billet de logement, et c’est un nommé Grégoire, paysan de Jalhay près de Liège, qui apprit à Parmentier la culture du précieux tubercule ; Grégoire fut employé en France dans les plantations de Parmentier ».

    D’un autre côté, comment se trouvait-elle en Italie avant 1587 ? Le peu de renseignements que nous possédons pour répondre à cette question, ont été imprimés par le Dr Antonio Targioni-Tazzetti dans un ouvrage qu’il a publié à Florence, en 1853[51] . Nous en extrayons et traduisons ce qui suit.

    «... Baldini prétend que le premier auteur qui a donné connaissance en Italie de la Pomme de terre était Girolamo Cardano[52] vers 1580, lequel a laissé un écrit où il est question des Papas, genre de tubercules dont on fait du pain, qui se trouvent sur le versant des montagnes de la région du Pérou, Nous ferons remarquer d’autre part que Pigafetta, Italien, avait trouvé au Brésil, vers environ l’année 1519, la Batate, laquelle,comme le pense et le fait observer Carlo Amoretti, serait pour lui la Pomme de terre. Mais il pourrait être permis de douter que ce voyageur avait plutôt voulu entendre par*

      ier de ce que l’on appelle ainsi Batate, ou Racine du Convolvulus Batatas, En effet, Pigafetta a écrit qu’il avait trouvé la Batate, qui lorsqu’on la mange peut se comparer comme saveur à la Châtaigne, et qui est longue comme les navets, d’où il résulte qu’il ne s’agissait pas des Patates ou Pommes de terre, mais de la Batate. Nous avons assurément plus de certitude dans ce que dit Fiaschi, marchand florentin, dans sa lettre du 24 Janvier 1534, écrite de l’Amérique méridionale à son frère Tommaso, lorsqu’il raconte qu’outre le Maïs, à Valenzuela, on sème une certaine plante qui s’appelle Patata, laquelle produit une racine fort grosse, et que cette racine se cuit sous la cendre. De même aussi Francesco Carletti, autre marchand florentin, qui a voyagé dans l’Amérique du Sud vers la fin du XVIe siècle, dit, dans son 4e discours, avoir trouvé les Patates (comme il les appelle et qu’il décrit clairement) lorsqu’il débarqua au port de Santa, au Pérou.

    Mais jusqu’ici ces tubercules n’avaient donné lieu qu’à de simples signalements de leur existence en Amérique et nous ne les possédions pas. Or Clusius rend compte de ce fait qu’il a reçu lui-même à Vienne, en Autriche, deux de ces tubercules au commencement de 1588, de Philippe de Sivry, préfet de Mons en Belgique, lequel les tenait d’un familier du Nonce, et qu’il en avait envoyé vers cette même époque aussi en Italie. Mais la connaissance la plus certaine que nous puissions avoir de la culture des Pommes de terre dans la Toscane, est due au Père Magazzini de Vallombrosa, lequel dans son livre Dell’Agricoltura toscana, imprimé en 1623, après sa mort, attribue l’introduction des Pommes de terre en Toscane par l’Espagne et le Portugal aux Carmes déchaussés, et parle de la manière de les cultiver, de façon à faire supposer que, depuis un certain temps, elles étaient plantées et cultivées à Vallombrosa.

     C’est pourquoi rien ne peut subsister de ce que disent Zanon et Baldini, c’est-à-dire que les Pommes de terre avaient été introduites au temps du Grand-Duc Ferdinand II de Médicis, en se fondant tous les deux sur une lettre écrite par Redi à Pietro Nati, sous la date du 23 janvier 1667, dans laquelle il est question des Patatas, qu’il dit être le Topinambour, c’est-à-dire les tubercules de l'Helianthus tuberosus. Il n’en résulte pas moins de tout ceci, que dans la Toscane les Pommes de terre étaient déjà connues et cultivées au commencement du XVIIe siècle ».  Ainsi donc, les conquérants du Pérou, où la Pomme de terre était cultivée de temps immémorial, l’avaient apportée en Espagne ; des Carmes déchaussés l’avaient de l’Espagne ou du Portugal introduite en Toscane et de là elle s’était répandue en Italie. Il est toutefois à noter que Castor Durante, mort en 1590 médecin du pape Sixte-Quint, qui, dans la 1re édition de son Herbario nuovo, publiée à Venise en 1584, parle et donne le dessin de la Batate (Convolvulus Batatas) ne dit pas un mot de la Pomme de terre (Solanum tuberosum).

    En 1632, Pierre Lauremberg de Rostock publiait à Francfort-sur-le-Mein, un ouvrage assez curieux, intitulé Apparatus plantarius primus, dans lequel il parle des Pommes de terre, qu’il appelle Adenes virginiani ou Halicacabus glandifer. Il déclare qu’il les nomme ainsi pour les distinguer des Adenes canadenses, c’est-à- dire les Topinambours, auxquelles elles ressemblent singulièrement. Il ajoute qu’il les qualifie de virginiani, parce que leur patrie est la Virginie, quoiqu’on en ait ensuite importé du Pérou en grande quantité, si bien que, si l’on veut, on peut les appeler Peruviani. « Nous n’avons possédé, dit-il, et nous n’avons connu qu’une seule variété de cette plante, qui peut se propager de deux manières : 1° au moyen des graines ; 2e par les tubercules. Si l’on sème les graines, on obtient finalement un grand nombre de jeunes plantes, mais assez tardivement, après le décours de quelques années. On réussit beaucoup mieux en plantant les tubercules, car avec eux la plante est chaque année si féconde qu’on en recueille souvent cinquante autour d’une racine. Il est important pour leur multiplication de ne pas planter des fragments minuscules, ou de petits tubercules : car en opérant de la sorte, on perdra tout espoir d’obtenir des fleurs, des fruits et même des tubercules. Combien au contraire doit-on faire cas de très gros tubercules ! »

    En 1666, Chabrée publiait à Genève, sous le titre de Stirpium Icones et Sciagraphia, une sorte de Résumé très concis avec figures de l'Historia plantarum generalis de Jean Bauhin. Il n’est pas sans intérêt de relater ici ce que Chabrée dit, dans son ouvrage : « qu’on voit aujourd’hui (1666) le Papas americanum, c’est-à-dire la Pomme de terre, dans les Jardins de l’Europe. » On la voit, en effet, à cette époque, figurer dans le Catalogue des plantes du Jardin royal à Paris, publié par Vallot en 1665. Mais ce n’est qu’au siècle suivant   que nous trouvons des preuves de son existence dans les Jardins botaniques de l’Europe. Ce n’est, du reste, que pendant la première partie du XVIIIe siècle qu’elle se répand peu à peu dans les cultures. Ainsi, d’après Humboldt, la Pomme de terre n’aurait été cultivée en grand dans la Saxe que depuis 1717, et en Prusse depuis seulement 1738.

    Nous trouvons dans le Mémoire de M. Clos[53], dont nous avons déjà cité quelques fragments, les renseignements qui suivent sur l’introduction de la Pomme de terre dans d’autres États de l’Europe.

    « Les Mémoires de l’Académie royale de Suède, dit-il, nous apprennent que, dès 1747, Ch. Skytes proposait d’extraire de l’eau-de-vie des Pommes de terre par distillation, afin d’épargner le grain qui est souvent très cher dans ce pays. Et de son côté, l’illustre Linné faisait tous ses efforts pour les propager. Enfin un Édit royal fut publié en Suède en 1764, en vue d’en encourager la culture.INTRODUCTION DE LA POMME DE TERRE EN EUROPE ( II )

    « On lit dans la Bibliothèque universelle de Genève (Agric, t. VIII), qu’en 1650 la plante commença à être connue en Allemagne et cultivée ; que la Guerre de Trente ans propagea cette culture qui fut après délaissée, mais qui redevint d’un usage général à l’occasion de la Guerre de Sept ans, et surtout de la famine de 1770. Cependant, au rapport de Schkuhr, elle n’aurait été connue en Allemagne qu’en 1717 (Botanisches Handbuch), a Introduite d’assez bonne heure en Suisse, elle y reçut bon accueil, mais ne s’y propagea qu’assez tard dans quelques cantons : ainsi, ce n’est que peu d’années avant 1730, qu’au rapport de Loiseleur-Deslonchamps, elle pénètre dans le Canton de Berne ; et la vallée de Locarno (Canton du Tessin, non loin du Lac majeur) a dû ce bienfait au philosophe et littérateur suisse Bonstetten[54] 

    Toutefois la Pomme de terre ne tarda pas à gagner du terrain, comme le prouve ce passage du Dictionnaire d’histoire naturelle de Valmont de Bomare publié en 1800 : « En Suisse, depuis vingt-cinq à trente ans, la culture s’en est tellement accrue dans les champs que cette manne fait en hiver la nourriture du peuple, surtout des enfants qui, comme l’on sait, ne deviennent pas des hommes moins robustes que nos Français nourris avec le plus beau Froment. » Cet exemple était imité par le Piémont, car je lis dans la Bibliothèque britannique (Agric, t. X) que, depuis 1802, on consacrait à la Mandria plus de onze hectares à la culture de ce légume dont le produit a donné des résultats énormes.INTRODUCTION DE LA POMME DE TERRE EN EUROPE ( II )

    » Les Anglais l’apportèrent aussi en Flandre pendant les guerres de Louis XIV. Le mémoire statistique du Département de la Lys, publié par ordre du Gouvernement français en l’an XII (1803), fournit à cet égard les renseignements suivants : « Ce ne fut qu’en 1620, époque à laquelle les Religieux chartreux furent obligés de quitter l’Angleterre, que l’un d’eux, le P. Robert Clarke, surnommé le Virgile chrétien, apporta dans ce pays-là les premières Pommes de terre : elles furent plantées dans les environs de Nieuport[55]. Les bienfaits de cette introduction ne furent point appréciés d’abord, et la culture de la Pomme de terre ne s’étendit que lentement, car ce fut en 1704 seulement que les premières furent plantées dans un jardin de Bruges. Le propriétaire de ce jardin, Antoine Verhulst, désireux de multiplier, de répandre ce légume en fit des distributions gratuites, et bientôt les maraîchers, les jardiniers, aidés de ses conseils, les cultivèrent en grand et en fournirent les marchés... Les Pommes de terre ne servirent d’abord qu’à la nourriture de la classe pauvre du peuple, mais vers le milieu du siècle dernier, la consommation en augmenta, et maintenant on les trouve sur toutes les tables, presque à tous les repas. »

    Nous venons de voir plus haut qu’il a été question assez vaguement de l’introduction de la Pomme de terre dans le Piémont, vers la fin du XVIIIe siècle. Un médecin italien a publié à cette époque

      un Mémoire où il est grandement question de la Pomme de terre. Il s’agit de Filippo Baldini[56]. Nous croyons pouvoir traduire ici les passages suivants de ce Mémoire.

    « La plante a des tiges anguleuses de deux à trois pieds de haut, des rameaux qui portent des feuilles d’une couleur d’un vert blanchâtre, de la grandeur de la main, ailées, lanugineuses et découpées. Elle a en Juin des fleurs d’une couleur vineuse claire, monopétales, presque semblables à la Rose de Damas, ce que les Français appellent gris de lin. Les fruits, qui se succèdent en Août, sont autant de baies de la grosseur de nos Cerises ; ils sont d’abord verts ; dès qu’ils deviennent jaunâtres, ils sont mûrs et contiennent une quantité de petites graines arrondies. Cette plante produit sous terre, vers son pied, trente ou quarante grosses racines tubéreuses qui ressemblent à un rognon de veau, d’où partent les tiges et les radicelles capillaires. Ces racines tubéreuses, qu’on appelle Pommes de terre (Pomi di terra)[57], parfois sont grosses et rouges, d’autres fois petites et jaunes : cette diversité provient de la différence des stations ou de la force de la culture. Les meilleures sont en somme celles qui sont bien nourries, grosses et tendres, qui sont au dehors rougeâtres et blanches en dedans, et qui ont le goût presque semblable à celui des Châtaignes, sinon qu’elles sont un peu aigrelettes.INTRODUCTION DE LA POMME DE TERRE EN EUROPE ( II )

    » La terre propre à la culture des Pommes de terre doit être humide et aérée. On laboure le terrain en y creusant de profonds sillons, au fond desquels on a l’habitude de les planter après les avoir coupées en morceaux, mais de façon à laisser un ou deux yeux sur chaque morceau, pour qu’ils puissent germer. On les place à deux pieds de distance les uns des autres, puis on les recouvre avec la terre du sillon en ayant soin d’aplanir le terrain pour qu’ils demeurent à la profondeur d’un pied. Cette plantation se fait ordinairement vers la fin de Février ou au commencement de Mars ; en Août on fauche les feuilles, et finalement en Novembre et dans tout le cours de l’Hiver on récolte les Pommes de terre.INTRODUCTION DE LA POMME DE TERRE EN EUROPE ( II )

     »..... D’autres, après avoir fumé et labouré la terre trois fois, tracent des sillons avec la même charrue, placent les Pommes de terre à un pied de distance dans chaque sillon, et les recouvrent avec la terre des côtés. Lorsqu’ils voient que les tiges s’élèvent de six ou sept pouces, ils remplissent le sillon avec la charrue en la faisant avec soin passer à droite et à gauche. Après cinq ou six semaines, ils fendent et amoindrissent le plus possible la terre qui est restée au sommet des sillons pour achever de les remplir[58].

    » Comme les Pommes de terre épuisent passablement le sol, il convient de le bien gouverner. Aussi quand Tannée suivante on en replante dans le même champ, on doit de nouveau répandre le fumier dans les sillons où l’on veut les planter, autrement toute la force de la plante se dirigerait vers les feuilles, et les racines resteraient alors sèches et petites.

    » Les Pommes de terre hâtives se récoltent au commencement de l’Hiver, les tardives en Février. On les conserve soit dans un grenier bien sec, soit dans des pots d’argile. Celles qui sont destinées à la table se maintiennent très bien dans une cave, ou dans un tonneau, en les disposant par couches, savoir une de Pommes de terre, puis une autre de feuilles sèches, et successivement : de cette manière on peut fort bien les garder fraîches jusqu’à la fin de l’Été. D’autres, pour mieux les conserver, les enfouissent sous terre ; mais le plus souvent, il arrive qu’elles se gâtent, surtout dans les temps humides et froids.

    »... Il y a peu de temps encore, la culture des Pommes de terre était tout à fait négligée ; elle le serait encore, si, il y a quelques années, le très érudit signor Balio Sagramoso, qui se plaît à activer les progrès de la nation et ceux de l’humanité, n’en avait pas conseillé la plantation... On doit vraiment s’étonner que les Pommes de terre aient tardé si longtemps à trouver quelque crédit auprès des Italiens. »

    Baldini cherche alors par des expériences assez singulières à établir la bonne réputation des Pommes de terre. Il en fait cuire, en prépare des extraits qu’il distille, en obtient une liqueur assez acide pour verdir le sirop de violette et produire effervescence dans   les solutions alcalines. Il verse ensuite cette liqueur dans du sang humain, provenant de saignées, constate la coagulation du sérum, et d’autres effets suivant la qualité du sang.

    « Toutes ces expériences, ajoute-t-il, me parurent les plus propres à découvrir la nature des Pommes de terre et à nous permettre de concevoir ce qu’elles peuvent produire en nous. En m’appuyant sur ces observations, je crois pouvoir en librement déduire que la vertu des Pommes de terre est de celles qui délaient le sang visqueux, et cela avec lenteur, quand il est devenu tel, et qui lui font prendre une forte consistance lorsqu’il est trop liquide. Donc, les Pommes de terre doivent beaucoup contribuer à adoucir nos humeurs et à les rendre meilleures. Par conséquent, elles sont très utiles à ceux qui souffrent de la poitrine ou qui peuvent avoir des suppurations, en raison de leur principe balsamique et fortifiant.

    » Étant donné la valeur de ce végétal si communément déprécié, qui ne se fût empressé d’en favoriser la culture, surtout lorsqu’il faut reconnaître que ce n’est qu’avec lui qu’on peut conjurer la disette et fournir alors un aliment aux familles pauvres ? Certaines gens diront peut-être : Les Pommes de terre ne conviennent qu’aux pays où le climat est différent du nôtre ; nous ne sommes pas sûrs qu’elles pourront produire des racines chez nous. Mais c’est une idée fausse, puisqu’en plusieurs parties de l’Italie où l’on en a planté, elles ont merveilleusement germé.

    »... D’un autre côté, l’erreur populaire que les Pommes de terre engendrent des flegmes, est née de la mauvaise habitude que nous avons, les uns vis-à-vis des autres, de décrier tout ce qui n*a pas été consacré par la coutume. Et en attendant, les bonnes choses continuent à être discréditées.

    » ... Monseigneur Bâcher, évêque de la Marche d’Ancône, a fait une découverte qui devient fort importante, et qui pourrait le devenir infiniment plus, si la répétition de son expérience venait à en prouver la constance. En effet, il a remarqué que les Pommes de terre, au lieu d’être plantées au Printemps pour donner fruit en Automne, lorsqu’elles sont mises en terre aussitôt après la moisson, fleurissaient en Octobre et produisaient de gros et nombreux tubercules bons à récolter en Décembre. On tiendrait par suite les Pommes de terre en plus grande estime, si l’on avait la   certitude qu’on peut en substituer la culture à celle des Céréales, lorsque les moissons sont trop maigres, ou qu’elles sont détruites par la grêle, ou par tout autre fléau qui les frappe si souvent ».

    On n’aura pas oublié, sans doute, que, pour les mois de culture ou de récolte cités par Baldini, cet auteur n’avait en vue que ce qui devait se passer dans le Sud de l’Italie.

    Nous arrivons au XIXe siècle, qu’on pourrait appeler le siècle d’expansion de la Pomme de terre. Il n’y a eu d’arrêt dans cette expansion, qu’à partir de l’année 1845, en raison des graves désastres causés par la maladie, bien connue aujourd’hui et qui est due à l’extraordinaire propagation d’un Champignon parasite nommé Phytophtora infestans. Mais les années suivantes, les attaques de la maladie n’ont pas tardé à faiblir quelque peu, ce qui a contribué à relever le courage des cultivateurs. Puis, quelques méthodes ont été. suivies pour tâcher autant que possible de se mettre à l’abri du fléau, et insensiblement la culture de la Pomme de terre a pris une extension nouvelle. Il serait fastidieux et sans grand intérêt de suivre pas à pas, dans tous les États de l’Europe, les progrès successifs de cette culture. Nous nous contenterons de citer ici les constatations que nous avons relevées dans le récent ouvrage de M. Charles Baltet, L'Horticulture dans les cinq parties du monde (1895), en faisant avec lui le tour de l’Europe.

    « ANGLETERRE. — Les Pommes de terre qui arrivent par la Tamise sont soumises au mesurage ou au pesage par un « swornmeter » avant le débarquement, puis transportées à leur marché spécial, Great Northern, et dans les magasins particuliers « Wharves », sur les rives du Fleuve, où elles sont soumises à un criblage de classement. Le Chemin de fer Great Northern a créé auprès de la Station King’s cross Terminus, dans le West-End, d’immenses docks où viennent se ranger et les wagons de Pommes de terre, et les véhicules des acheteurs. Ce débouché permet à notre Parmentière[59] de figurer aux tableaux de 1891 pour une superficie de 530,311 hectares, ayant fourni un rendement moyen de 119 quintaux à l’hectare. La surface est ainsi répartie dans la Grande-Bretagne :  Angleterre : 143,630 hectares ;

    Écosse : 56,640 hectares ;

    Pays de Galles : 15,370 hectares ;

    Irlande : 304,660 hectares. La Production irlandaise a été de 30,855,900 quintaux.

    » JERSEY. — Dans une année, l’île a produit 50,000 tonnes de Pommes de terre, récoltées sur 125 hectares et livrées immédiatement à la consommation.

    » BELGIQUE. — Nous pouvons dire que si l’Europe produit pour 3 milliards 500 millions de Pommes de terre, la Belgique consacre à cette Solanée 6,77 pour 100 de son territoire, et dépasse ainsi la proportion des autres États européens... Un bon paquetage est indispensable. Les cultivateurs de Saint-Trond qui expédiaient jusqu’à 5,500,000 kilogrammes de Pommes de terre en Angleterre, ont perdu une partie de leur clientèle par suite d’un triage incomplet des tubercules et d’un emballage trop primitif ; ils ont dû y remédier.

    » HOLLANDE. — La province de Gröningue cultive surtout la Pomme de terre ; le rendement moyen y atteint de 180 à 250 hectolitres à l’hectare, évalué de 1 fr - à 1 fr- 50 pour la féculerie. En 1892, la Hollande consacrait à la Pomme de terre 152,064 hectares, rapportant 33,165,697 hectolitres.

    » DANEMARK. — La Pomme de terre occupe 52,000 hectares dans les champs et les jardins, et rapporte 5,000,000 d’hectolitres de tubercules.

    » NORVEGE. — En 1890, la Pomme de terre couvrait 36,000 hectares et fournissait 10,000,000 d’hectolitres de tubercules.

    » SUEDE. — La nourriture de la population est constituée, en grande partie, par la Pomme déterre; elle y fut importée en 1725 ; depuis sa culture s’est développée à ce point qu’elle occupe actuellement 160,000 hectares sur 200,000 consacrés aux légumes, sur l’ensemble du territoire. La production annuelle atteint 20,000,000 hectolitres, dont 3,000,000 pour la distillation. Parmi les 250 ou 300 sortes connues ou expérimentées, la mieux caractérisée porte le nom de Pomme de terre Munsö ; puis la variété Suartsjö, et quelques types également indigènes.

    » RUSSIE. — La Pomme de terre est de préférence élevée en plein champ. Elle est aussi cultivée parmi les primeurs.  » GRECE. — La production de la Pomme de terre dépasse aujourd’hui la consommation y et le trop plein se dirige vers la Turquie.

    » BULGARIE. — La culture des Pommes de terre commence seulement à se répandre, la région montagneuse étant quelque peu en retard.

    » AUTRICHE-HONGRIE. — En 1891, il est entré à Vienne 20,000 wagons de Pommes de terre... La Pomme de terre est populaire, tout en étant restreinte pour les variétés. On en transporte par charretées vers les agglomérations de population et les marchés. Les calculs de la Statistique classent le territoire autrichien second parmi les États de l’Europe, d’après la surface consacrée à la Pomme de terre. Cette Solanée occupe 4,8 pour 100 de l’étendue des terres cultivées, ce qui place l’Autriche-Hongrie entre la Belgique et la Hollande, où le sol est mieux utilisé. L’Autriche produit pour 600,000,000 de francs de Pomme de terre par an.

    » ALLEMAGNE. — La Pomme de terre figure dans tous les districts sous plusieurs variétés ménagères, fourragères ou féculières. La Statistique de 1883 fixe l’importance de cette culture à 2,907,400 hectares, soit 5,4 p. 100 du territoire, et la production à 249,000,000 de quintaux. Le rendement actuel a conservé sa moyenne de 769,14 par hectare.

    » SUISSE. — La Pomme de terre dépasse 9,000,000 d’hectolitres : les arrivages allemands et français comblent l’insuffisance de la récolte.

    » ITALIE. — La Pomme de terre forme deux séries : la première récolte est pour les amateurs de primeurs ; la seconde, plus commune, arrive encore de bonne heure sur les marchés d’Europe et d’Afrique. La surface totale cultivée, en Italie, en 1890, était de 175,000 hectares, ayant produit 7,500,000 quintaux de tubercules.

    » ESPAGNE. — Dans les provinces du centre, les Pommes de terre approvisionnent copieusement les marchés.

    » PORTUGAL. — La Pomme de terre se plaît dans les sables de l’Alentejo et fournit, en année ordinaire, 3,000,000 d’hectolitres de tubercules. »

    Nous ne pourrions, faute de documents, suivre les différents progrès qu’a faits la culture de la Pomme de terre dans les autres parties du monde. Mais nous croyons ne pas devoir terminer ce  chapitre sans faire connaître les constatations récentes qu’a publiées M. Charles Baltet dans son même ouvrage.

    « LE CAP. — La production d’une année : 270,000 hectolitres de Pommes de terre.

    » AUSTRALIE. — La Pomme de terre fournit 30,000 tonnes (Australie méridionale).INTRODUCTION DE LA POMME DE TERRE EN EUROPE ( II )

    » TASMANIE. — La Pomme de terre constitue une spécialité pour la Tasmanie, depuis que l’île a été colonisée : de grandes quantités en ont été apportées dans les Gouvernements voisins. Les Pommes de terre de Brown-River sont supérieures à toutes les variétés renommées de l’Angleterre et de l’Amérique ; Cucular-Head et la Côte nord-ouest fournissent aussi de gros tubercules. La production de 1891 a monté à 73,158 tonnes anglaises ; l’année précédente, il en était exporté 33,386 tonnes estimées à 101,047 livres sterling, la plus grande quantité aux Colonies australiennes de Victoria, de la Nouvelle-Galles du Sud et de l’Australie méridionale.

    » CANADA. — La Pomme de terre trouve au Canada des sols légers, sableux, bien égouttés, qui lui sont favorables. Parmi les recommandables, la précoce Early-rose et la tardive Garnett-Chili sont répandues partout ; puis. Hâtive de Vermont, Hâtive d’Ohio, Flocon de neige, Chicago-Market, Saint-Patrick, Rose tardive, Mammoth Prolific, Clark’s, Puritan, Polaris.

    » ÉTATS-UNIS. — La Pomme de terre, classée immédiatement après les Céréales, vient partout, mais mieux dans la région septentrionale, pour le rendement et la qualité; les autres contrées vont s’y approvisionner des éléments de plantation, La ville de Cambridge, État de New-York, est un centre pour cette sorte d’affaires. La température des États du Sud et du Centre nuit au développement complet du tubercule; il atteint au contraire de belles proportions dans les sols irrigués des Montagnes Rocheuses. La production annuelle est évaluée à 500,000,000 de francs. Les États supérieurement cotés sont : New-York, Pensylvanie, Ohio, Michigan, Iowa, Illinois, Visconsin, Indiana, Minnesota, Missouri, Kansas, Nebraska, Californie, Dakota, Oregon, Montmédy, Washington. La variété dominante est Early rose. Le rendement moyen peut atteindre 500 boisseaux de 36 livres par acre de 41 ares. Sont également propagées partout les précoces Early Ohio et Early Maine, et Lee’ s Favorite ; puis Gem, Surprise, Beauty of Hebron. Parmi les  tardives, While Star est à grand rendement et plus fine en qualité que les bonnes Mammoth Pearl, St-Patrick, Grange.

    » D’une façon générale, la plus grosse récolte est celle de la Pomme de terre. Une moitié de la superficie des fermes à légumes est consacrée à cette plante, dont les tubercules de semences sont souvent récoltés dans les États du Nord, spécialement celui de New-York. Ces tubercules, qui arrivent à une bonne maturité en Août, peuvent être replantés en Octobre ou Novembre par le cultivateur du Sud : la garde des tubercules de Mai jusqu’à cette date serait difficile dans le climat du Golfe. La Pomme de terre universellement cultivée est Early-rose, très appréciée aux États-Unis comme Pomme de terre potagère. Le sol qui la produit est fortement fumé, et le produit net à l’hectare est de 700 à 800 francs. Depuis 1880, la valeur de la production a doublé.

    » MEXIQUE. — Les Pommes de terre sont installées seulement à la portée des villes et des ports de mer.

    » VENEZUELA. — La Pomme de terre rend 30,000 kilogrammes à l’hectare.INTRODUCTION DE LA POMME DE TERRE EN EUROPE ( II )

    » RÉPUBLIQUE ARGENTINE. — La Pomme de terre fournit 400,000 kilogrammes à l’exportation.

    » PÉROU. — (Région de la Sierra, partie montagneuse et culminante du Pérou, Cordillères des Andes) : Les indigènes des parties élevées du versant occidental de la Cordillère désignent sous le nom de Curo, la Pomme de terre sylvestre, distincte de celle qu’ils cultivent, appelée Papa. Par sa partie aérienne, le type primitif ne s’éloigne guère de l’espèce améliorée, mais ses tiges souterraines s’étendent considérablement. Quand les Indiens labourent la terre, ils recueillent un grand nombre de tubercules que la charrue met à découvert; puis ils parquent leurs porcs sur le terrain labouré. A 3,000 mètres d’altitude, le sol accidenté du Département de l’Aucucho est encore favorable à cette Solanée. Une variété spéciale « Chancha » est d’une grande précocité. Dans le Département de Puno, sur les bords du Lac Titicaca, on conserve les Pommes de terre d’une récolte à l’autre, en les séchant au soleil ou en les soumettant à l’action de la gelée, ce qui constitue un insipide aliment qui ne peut être mangé que par les indigènes, ou par des affamés qui ne disposent de nul autre comestible. On le désigne sous le nom de « Chudo ».  » (Région de la Montana) : La Pomme de terre se présente sous différentes formes, rondes ou oblongues, jaunes ou violettes, et de moyenne grosseur. Propriétaires et Colons en tirent bon parti. »

    M. Baltet a oublié de nous renseigner sur la situation où se trouve la culture de la Pomme de terre au Chili. Des renseignements particuliers nous permettent de dire que cette culture est en voie de progression, aussi bien pour la qualité des tubercules que pour leur rendement.

      

    sources : http://fr.wikisource.org/wiki/Histoire_de_la_pomme_de_terre/Chapitre_II

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  • Histoire de la Pomme de TerreOrigine Découverte sur les plateaux andins

    C'est ici que partit la pomme de terre à la conquête du monde. La papas est jaune. Séchées au soleil, ces pommes de terre peuvent se conserver pendant des années. Au temps de l'Empire Inca, l'empereur les faisait stocker pour les distribuer aux paysans durant les famines.

    La pomme de terre a été rapportée en Angleterre en 1586 par Sir Francis Drake. Si la pomme de terre fait partie du quotidien dans les Îles britanniques, ce tubercule a connu un début fort timide sous Élizabeth I car on lui trouvait un goût fade. Il gagna l'Irlande pendant la grande famine de 1845 alors qu'une maladie avait détruit les récoltes et continua son incursion en Europe continentale.

    Au jardin des Plantes en France, M. Parmentier (1737-1813) voulait à tout pris améliorer et étudier la qualité d'un tubercule à chair blanchâtre dont il avait découvert l'usage culinaire en faisant la guerre au Hanovre. En effet, alors qu'il était prisonnier de guerre en Prusse durant la guerre de Sept Ans, il réussit à survivre grâce à ce légume. Il se heurtait aux paysans qui ne voyaient, dans la pomme de terre, qu'une nourriture bonne pour les cochons. Dans certaines provinces on disait même qu'elle donnait la lèpre. Mais quiconque passait devant chez lui à l'heure du repas, pouvait être invité à partager sa "bouillie", histoire de se faire de nouveaux partisans. Louis XIV confronté devant la montée du peuple contre le prix du pain demanda aux botanistes et autres savants de trouver un substitut qui pourrait remplir le ventre du peuple. C'est ainsi que Parmentier présenta sa "bouillie" qui reçut l'accréditation et son nom passa ainsi à l'histoire et ce féculent prit sa véritable place dans l'alimentation quotidienne. C'est Louis XV qui baptisa ce légume de "pomme de terre" alors qu'avant, il était désigné sous le nom de "batata".

    Histoire de la Pomme de TerreEn Amérique L'Amérique s'est bâtie sur la pomme de terre. Ce sont les Anglais qui embarquèrent ce tubercule pour un trajet de retour vers le continent américain en même temps que les premiers colons en 1719. Vaudreuil écrit en France au ministre Bigot, le 8 août 1758:

    un habitant a fait venir de France des patates qui produisaient beaucoup avec très peu de soin. J'ai obtenu quelques centaines de tubercules et les aient distribuées aux réfugiés acadiens.

    Soyez toujours en train de manger une pomme de terre, d'en éplucher une seconde, d'en serrer une troisième et d'en regarder une quatrième Vieux dicton irlandais.

      

    La pomme de terre

    Dans certaines régions d’Afrique on appelle la pomme de terre, la pomme d’Europe. Et pourtant la pomme de terre est originaire du Chili. Elle n’est arrivée en Europe qu’au 16ème siècle. A l’époque elle n’avait pas grande cote. Ce bizarre fruit de la terre était jugé juste bon pour les cochons. Selon la grande historienne de la cuisine Maguelonne Toussaint, c’est d’ailleurs parce que les allemands estimaient que la pomme de terre était la nourriture appropriée pour les porcs et a fortiori pour les prisonniers français, qu’Antoine Augustin Parmentier, qui sera le grand promoteur de la pomme de terre en France, l’a goûtée dans sa captivité en Westphalie après la guerre de 7 ans. Et qu’au retour en France il s’est mis à planter cette tubercule dans les jardins des Invalides.

    Il était alors pharmacien chef du célèbre hospice. En France on pensait à l’époque que les humains attrapaient la lèpre en mangeant des pommes de terre. Bien que Parmentier fît de toute évidence la preuve du contraire, les gens bien informés continuaient de le regarder de travers dès qu’il abordait le sujet de la pomme de terre. Il advint qu’un jour, Louis XVI, au cours d’une visite aux Invalides ,remarqua les fleurs blanches de la plante. Quelqu’un de sa suite lui affirma qu’il s’agissait d’une lubie de Monsieur Parmentier qui croyait que la racine de cette plante sauverait le monde de la faim.

    La pomme de terre était déjà passée auparavant par la table d’un autre monarque français, Louis XIII, cuisinier averti (il avait, dit-on, la réputation de connaître 100 façons d’accommoder les oeufs). Mais c’est en vain qu’il tentera d’y associer les pommes de terre. Louis XVI, lui n’était pas un gastronome raffiné mais avait un appétit monstreux. Il prit Parmentier au sérieux et le soutint dans son action en faveur d’une popularisation de la pomme de terre : le 24 août 1786 le roi se présenta à un banquet avec un petit rameau de fleurs blanches de pomme de terre accroché à son jabot.

    Au menu figurait comme une grande nouveauté les pommes de terre appelées alors "parmentières". Le roi de France fit plus encore pour la pomme de terre, il la sema dans la plaine des Sablons, à Neuilly. Dès que les cultures verdirent, il les fit garder par des soldats baïonnettes au "canon pour la frime". Ce qui ne manqua pas d’attirer des curieux. Les commentaires allaient bon train : "ce légume à bestiaux ça serait pas si mauvais que ça puisque le roi envoie sa troupe pour la garder.

    Et pourquoi le peuple n’y aurait pas droit". Pendant la nuit la surveillance se relâchait ostensiblement et les voleurs sur lesquels les autorités comptaient bien, faisaient leur provision en même temps que la réclame du produit.

     

    Connaissez-vous l’histoire de l’arrivée de la pomme de terre en France au XVIIIe siècle par Antoine-Augustin Parmentier?

    Récolte de pomme de terre par Jules Bastien Lepage

    Saison d'octobre de Jules Bastien Lepage 1878, représentant la récolte de pomme de terre

    Ce jeune homme était pharmacien aux armées et durant sa captivité en Prusse lors de la Guerre de Sept Ans opposant la France à la Prusse, il y découvre les vertus nutritives de cette tubercule. Et oui étrangement, il se rend compte que les pommes de terre le tiennent plutôt en forme. A son retour, il devient son meilleur défenseur et va recommander la pomme de terre afin de remédier à la famine qui  ravageait le pays à cette époque. Parmentier va organiser de nombreux repas avec la « jet set » de Paris afin de leur faire découvrir des mets à base de pomme de terre et notamment le fameux hachis Parmentier. Il va même aller jusqu’à planter des champs de pomme de terre autour de Paris que le roi va faire garder le jour. Mais bien sûr la nuit, les fameuses pommes de terre s’en-volatilisaient. Leur succès était donc fait.

    Antoine Augustin Parmentier

    Statue d'Antoine Augustin Parmentier dans sa ville natale : Montdidier (Somme)

    Et n’oubliez pas que chaque variété doit s’utiliser à bon escient. On en compte 630 variétés en 1881. Petit rappel des grands classiques :

    La belle de Fontenay : à utiliser pour les salades, en vapeur et rissolées.

    La belle de Fontenay

    La belle de Fontenay

    La charlotte : pour les salades, pommes vapeur et pommes rissolées.

    La Charlotte

    La Charlotte

    La bintje : chair farineuse à utiliser pour les soupes, purées et frites.

    La pomme de terre Bintje

    La pomme de terre Bintje

    La ratte : chair ferme, fine, goût savoureux aux notes de noisette.

    La ratte

    La ratte

    La roseval : pour les salades, pommes vapeur, soufflés et gratins.

    La roseval

    La roseval

    Conseil : acheter vos pommes de terre au marché directement chez le petit maraicher. Oui, il faut souvent faire la queue et il n’a souvent pas grand chose d’autre sur son étale. Mais c’est bien pour cela que ses pommes de terre sont vraiment différentes au niveau du goût.

    En France, on mange 30 kg de pomme de terre par an, plus 25 kg sous forme de produits transformés. Alors merci Monsieur Parmentier de nous avoir ramené ce féculent si complet que l’on aime tant cuisiner.

     

    Histoire de la Pomme de TerreInvention des pommes chips

    Les chips furent préparées pour la première fois en 1853 par un cuisinier indien d'Amérique - M. George Crum - dans un hôtel à la mode de Saratoga Springs, New York State, USA. Ce nouveau plat fut préparé pour un certain Cornelius Vanderbilt, le magnat des chemins de fer - un gastronome exigeant qui se plaignait souvent que ses frites n'étaient pas coupées en tranches assez fines et qui les renvoyait aux cuisines. Après avoir essuyé plusieurs refus, le cuisinier décida de donner une leçon au client difficile. Il coupa les pommes de terre en tranches extrêmement fines puis les fit frire dans de l'huile bouillante jusqu'à ce qu'elles soient dorées et croustillantes. La plaisanterie de Crum se retourna en fait contre lui et les chips, comme on les appelle en France, connurent en fait un succès phénoménal.

      

    LE CHAPITRE SUIVANT est PLUS DETAILLE...pour les LECTEURS et les passionnés de l'Histoire de la POMME de TERRE.....

     

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    Alimentation des paysans

       

    Durant le Moyen-Age, l'alimentation des paysans est peu variée. D'ailleurs elle dépend à la fois des variations saisonnières et du calendrier liturgique qui fait alterner jours maigres et jours gras. En effet, le bon catholique de l'époque doit faire maigre en moyenne 1 jour sur 3 ! Ce qui signifie s’abstenir de manger tout produit provenant d’un animal terrestre y compris les œufs et le lait.

    Alimentation des paysans

      

    Il n’est donc pas rare, de trouver dans les ouvrages de cuisine de cette époque 2 versions d’une même recette, l’une pour les jours maigres, l’autre pour les jours gras. La viande pour les plus aisés est alors remplacée par du poisson, le lait par du lait d’amandes, le bouillon de viande par du bouillon de poisson, du vin, et parfois même par de la purée de pois secs.

     

    Les paysans pauvres se contentaient bien souvent d'un simple bouillon de légumes avec un peu de gras et un morceau de pain.

     

    Chez les paysans les plus riches, on se nourrit avec les produits de la ferme :

      

    lait, lard, légumes, oeufs et de la cueillette de fruits sauvages (fraises, mûres, cerises...) de champignons et autres plantes herbacées (pissenlits, doucette...).

      

    Lors de manifestations particulières, fêtes, noces, baptêmes, des repas spéciaux étaient cuisinés.

     

     

    Alimentation des paysansLa nourriture est composée  essentiellement de bouillies d'avoine, de lentilles, pois, vesces (plante herbacée) panais (la racine charnue du panais est plus grosse que celle de la carotte et se cuisine comme la carotte), fèves et autres légumes mais aussi de quelques fruits, et des ressources du poulailler.

      

    Leur repas est constitué surtout de soupes (ou de brouet qui est un bouillon assez liquide) accompagnées de pain réalisé à base de farine d'avoine ou de seigle. Enfin ils font les "grasses soupes" : tranches de pain et de fromage trempées dans du bouillon.

      

    Dans les régions pauvres, la châtaigne remplace parfois le pain on la mange bouillie ou grillée. Avec la culture des jardins, les paysans pourront avoir en quantité des fèves, des choux , des gourdes, des oignons, de l'aïl, des panais, des navets, des cardons... enfin des artichauts puis plus tard des pommes de terre, des tomates et des haricots verts rapportés des Amériques.

     

    Alimentation des paysansOn boit beaucoup de lait, on mange du fromage frais ou caillé, selon les régions on utilise en plus ou moins grande quantité le beurre, l'huile de noix ou l'huile d'olive  mais le paysan très pauvre ne mangera que très rarement de la viande (période de fêtes ou braconnage de gibier de passage, à poils et à plumes, en posant des collets ou en lançant dans les terriers un furet).

    Les fruits secs améliorent l'ordinaire de toutes les tables paysannes. C'est, entre autres, une poire ou pomme pelée puis séchée et enfin tapée, d'où le nom de "pomme tapée".

      

      

    Viande : la viande est un luxe, on tue le porc en hiver et on consomme sa viande tout au cours de l'année car il est salé ou fumé pour la conservation. le plus souvent un morceau de lard accompagne la soupe aux choux et le pain noir.

      

    Quelques volailles et quelques oeufs lorsque tout n'a pas été remis au Seigneur ou au propriétaire. L'élevage des moutons aura tendance à se généraliser au cours des siècles car il est considéré comme un animal miracle :

      

    on tond sa laine pour la filer et faire des étoffes, on mange sa viande, on récupère sa graisse, ses boyaux serviront à faire des cordes pour les instruments de musique et le lait des brebis donnera d'excellents fromages. Les chèvres seront également élevées.Alimentation des paysans

    Poisson :

    le poisson tient une large place dans l'alimentation : poissons d'eau douce (anguilles,carpes, saumons...), surtout pendant le carême et poissons de mer aussi près des côtes. Salé, fumé il se conserve assez bien et entre dans la composition de patés et de tourtes.

    Sel, herbes : Malgré les faux saulniers (contrebandiers) le sel, qui est cher, est surtout utilisé pour la salaison. Les herbes aromatiques tiennent une place importante dans la cuisine paysanne. La menthe, la sauge, le romarin, le persil, le cerfeuil sont utilisés. On les ajoutera aux pâtés en croûte des jours de fête.

     

     

    PAlimentation des paysansain : Au Xème et au XIème siècles, les simples manants peinaient durement pour gagner leur pain.

      

    On peut même dire que c'était une vraie galère de se procurer du pain au Moyen Age quand on n'était pas fortuné.

      

    Les fours et les moulins appartenaient aux seigneurs et les paysans devaient payer une redevance pour avoir le droit de les utiliser. Il fallait apporter ses grains  jusqu'au moulin et attendre pendant des heures que le meunier fasse son travail. Ensuite, il fallait rentrer chez soi avec sa farine, pétrir sa pâte et se remettre en route vers le four.

      

      

    Le pain des paysans pesait dans les 5 kg et durait plusieurs jours. Le tranchoir, tranche de pain rassis sur laquelle est découpée le lard, fait souvent office d'assiette.

      

    Quand les récoltes étaient bonnes, seigle et froment entraient dans sa composition sinon, lors des grandes famines, on s'accommodait d'un mélange de farines que l'on complétait parfois avec de la paille ou de fines écorces. Jusqu’au Haut Moyen-age il n'existait ni boulanger, ni pâtissier, et moins encore de four dans les chaumières. On faisait cuire le pain au château, ou au couvent, moyennant redevance. Ce n'est qu'au XIIème siècle que le manant (serf appelé ensuite paysan) obtint le droit de posséder son propre four en France et l'on vit l'apparition du four communal de village pour les moins nantis.

    Alimentation des paysans

      

    En France, à la veille de la Révolution, les problèmes d'approvisionnement étaient importants, d'autant plus que certains petits malins gardaient leur blé en attendant des hausses de prix.

      

    Au XIXème, les habitudes de consommation changent: le pain de froment (pain blanc) évince petit-à-petit le pain de seigle (pain noir) qui était autrefois le plus consommé. Vers 1900, le pain de seigle n'existait plus que dans les campagnes, qui l'ont, elles aussi, abandonné après 1950.

     

    Patisserie (quelques exemples)

      

    Fouace "gasteau" (ou fougasse): ce qui laisserait supposer qu'il y a ajout d'oeuf et/ou de beurre. La fouace était un pain de luxe au Moyen-Age.

      

    Pain d'épices : Pain d'épice : sorte de gâteau de couleur brune, qui se fait avec de la farine de seigle, du miel et des épices.

    On y ajoute souvent des morceaux de fruits confits et/ou des épices : cannelle, gingembre...

    Tarte de griottes :

    Des cerises aigres ou griottes  pilées au mortier, un peu de fromage frais, du miel, quatre œufs bien battus. Mélanger et cuire dans la poêle à petit feu (recette du 16e) et toutes autres tartes aux fruits.

    Gaufres, crêpes, Pâte d'amandes, galettes (des rois), brioches...

    Clafoutis : Selon la tradition, au temps des cerises et de la fenaison, le clafoutis est cuisiné pour les repas des paysans. Mais c'est également le gâteau du dimanche préparé avec une pâte à crêpe et des cerises sauvages dont le noyau possède un délicieux parfum. 

    Confitures : mélange de fruits et de miel (remplacé progressivement par du sucre)

      

    Boisson : Lait caillé, eau de source (quelquefois). C'est l'essor du christianisme en Gaule qui marque le véritable décollage du commerce du vin. En effet, les moines sont vite passés maîtres dans l'art de la vinification. Chaque monastère avait sa vigne, et récoltait son vin de messe…

     

     

     


    Je m'aperçois que les ARTICLES font l'objet d'énormément de visites de la part des internautes... pourtant je n'ai aucun commentaires, ni observations, ni suggestions dans la rubrique "VOTRE AVIS"..... dites moi ce qui vous intéresse le plus, et j'essaierai d'améliorer mon blog pour votre plus grande curiosité...

     

     

     

     

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