• Années 50....Les racines du ciel, Romain Gary
     
     
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    Romain Gary
     

    "Lorsque j’entreprends un roman, c’est pour courir là où je ne suis pas, pour aller voir ce qui se passe chez les autres, pour me quitter, pour me réincarner" Roamin Gary
     

    En 1956, le prix Goncourt est décerné à Romain Gary pour "Les racines du ciel".Gary, qui après guerre a entamé une carrière diplomatique est en Bolivie. Il raconte : "A La Paz, on m’a prévenu que j’avais…le Nobel. [...] Entre les horloges de la Paz et celle de Paris, il y a un décalage de cinq heures…Je vais dans mon bureau. Deux minutes après, le correspondant de l’United Press, un Espagnol, entre et me saute au cou : "Monsieur l’Ambassadeur, je vous félicite. Vous avez le prix Nobel !". Puis il tire de sa poche un télégramme en anglais daté de la veille :
     "Question ambassadeur de France à la Paz pour premier prix concours. Prendre déclaration"…Juste à ce moment-là, la porte s’ouvrit de nouveau. Une brassée de 25 télégrammes arrivait de Paris" Gary comprend enfin qu’il a le Goncourt. (in Portrait interview de Paul Guth, "Le Figaro littéraire" du 22 décembre 1956).
     

    Dans cette deuxième décennie des années 50, les conflits africains sont omniprésents sur la scène internationale : revendications anticolonialistes de l'Afrique du Nord, révolte des Mau Mau , apartheid, pan-islamisme égyptien. L' Afrique apparait comme le continent des possibles ".. il y avait là comme dans chaque paysage africain, une place immense à prendre, une place illimitée et qui semble toujours suggérer quelque formidable désertion. Cela évoque irrésistiblement l'idée de quelque bête préhistorique à sa mesure aujourd'hui disparue, mais dont tout cet espace vide prit réclamer le retour"
     

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    Romain Gary et sa femme Jean Seberg en 1961 sur le tournage des "oiseaux vont mourir au Pérou"
     

    "Un Français, Morel, entreprend en Afrique une campagne pour la défense des éléphants, menacés de tous les côtés par les lois dites "inexorables" du progrès.Lors de la Conférence pour la Protection de la Faune (Congo, Bukavu, 1953) constate elle-même qu'il serait vain de vouloir imposer au public le respect de la nature uniquement par les méthodes légales", Morel ne craint pas de recourir aux armes. Aidé par quelques compagnons convaincus comme lui que le respect de la nature n'est pas incompatible avec les exigences du progrès, il prend le maquis contre la barbarie et la cruauté sous toutes ses formes, cependant que de tous les côtés des conspirateurs habiles essayent d'utiliser sa magnifique obsession et son apparente naïveté à leurs propres fins.
    Ridiculisé ou haï, accusé de préférer les bêtes aux hommes, traité de misanthrope et de nihiliste, trahi par les uns, aidé par quelques autres, exploité par un apprenti dictateur, et par des agitateurs politiques, le "Français fou" continue envers et contre tout à défendre les éléphants au risque de sa vie. Face à la haine raciale et religieuse, à la démagogie nationaliste, Morel poursuit sa campagne pour la protection de la nature, pour le respect de ce qu'il appelle "la marge humaine", quels que soient les systèmes, les doctrines et les idéologies de rencontre.
     D'aventure en aventure, d'avatar en avatar, il triomphe avec une tranquille confiance de toutes les déceptions et de toutes les ruses, persuadé que les hommes sont assez généreux pour accepter de s'encombrer des éléphants dans leur difficile marche en avant, et de ne pas céder à la tentation du totalitaire sans marge, de la fin qui justifie les moyens et du rendement absolu.
      
    Et peu à peu, une complicité souriante et amicale se forme autour de celui qui "ne sait pas désespérer" et de ces géants menacés, et des volontaires de tous les pays, de toutes les races et de toutes les opinions se rangent autour de cet aventurier de l'humain." (Romain Gary, Les racines du ciel, quatrième de couverture, édition de 1956.)"
     

    Pour Gary Morel, résistant contre la tentation de l’abandon et du désespoir, combat seul contre l’extermination des éléphants, affirmant ainsi sa nature humaine contre ce qui cherche à la nier : le totalitarisme la petitesse et l’adversité."L'islam appelle cela "les racines du ciel", pour les indiens du Mexique, c'est l'arbre de vie" qui les pousse les uns vers les autres à tomber à genoux et à lever les yeux en frappant leur poitrine tourmentée. Un besoin de protection auquel les obstinés comme Morel cherchent à échapper par des pétitions, de comités de lutte et des syndicats de défense..." Les racines du ciel.
     

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    Les racines du ciel, film de John Huston - 1958 - Trevor Howard, Errol Flynn
     

    Morel, à l'engagement contre le colonialisme et au combat nationaliste préfère limiter son action à la défense de la faune africaine,ce que lui reprocheront ses compagnons. Romain Gary a toujours affiché une grande méfiance face "à tous les géniaux pères des peuples". Il précise dans son avant propos "je tiens a dire ceci : mon livre traite du problème, essentiel pour nous, de la protection de la nature [...] Je ne vois guère comment on saurait laisser la responsabilité de cette oeuvre généreuse à ceux qui puisent leur force politique aux sources primitives de la haine raciale et religieuse et de la mystique tribale". Mais peu à peu le combat de Morel va être instrumentalisé par les partisans de l'indépendance, il finira par l'accepter considérant que Waîtari le leader indépendantiste veut l'indépendance pour que "les africains prennent eux mêmes en mains la protection de la nature, puisque malgré touts nos conférences nous n'y sommes pas parvenus..." A la fin Morel est quasiment l'otage des indépendantistes, qui décide même de l'exécuter, pour faire d'un personnage devenu encombrant un héros de l'indépendance. Mais Youssef le jeune militant chargé de l'exécution se prend d'amitié pour Morel et ils disparaissent tous deux dans la forêt.
     

    Mais si Gary se méfie des mouvements nationalistes,cela ne l'empêche pas de dénoncer le système colonial. Toute sa vie, écrivent Paul Audi et Jean-François Hangoüet, dans le Cahier de l'Herne consacré à Romain Gary, Gary se sera battu pour préserver tout ce qui, dans l’homme, échappe aux définitions que peuvent en donner les idéomaniaques de toutes provenances et de toutes obédiences".
     

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    Raphael Matta , surveillant de la réserve de Bouna - 1958
     

    Raphaêl Matta, le double réel de Morel
     

    Un jour qu'il visitait le zoo de Vincennes, il apprit que 600 espèces de mammifères étaient en voie de disparition.Raphael Matta était alors agé de 30 ans et travaille dans une société d'import-export à Paris. Il renonce a sa vie parisienne pour prendre un travail de surveillant de la réserve de Bouna a 400 km de l'équateur en Côte d'Ivoire.
     

    Accompagné par sa femme Christiana, qui a Paris s'occupe de mode,Matta s'installe dans dans la réserve. Maigre, brun le regard perçant, il va vivre plus de 5 ans en pays lobi au milieu des bêtes
     

    Les Lobis, de farouches chasseurs, l'appelle "Kongo Massa",le Maître de la brousse. Mais pour eux hippopotames et antilopes sont source de viande, les dépouilles sont revendus comme trophée aux chasseurs, et les africains achètent très cher les organes sexuels des éléphants pour leur rites de fertilité.  
     

    Matta dispose seulement d'un second, Sogli, et de quatre gardes pour couvrir tout le territoire de la réserve.L'administration est plutôt encline à tolérer le braconnage des Lobis. Un nouveau comptage en 1958 révèle la disparition de 40 éléphants sur les 100 que comptaient la réserve deux ans plus tôt, Matta devient de plus en plus fanatique, il confisque les armes dans les villages, envoi des lettres incendiaires à ses supérieurs signées Raphael Matta député des éléphants devant le Parlement Mondial, se disant prêt à monter sur l'échafaud pour que vivent les éléphants. "Je suis tout-puissant parce que ma foi montera au-dessus des montagnes." ajoute-t-il
     

    Des Dioulas s'étant plaint à Matta d'un tort infligé par les Lobis,Matta se rendit immédiatement au village, accompagné par son second et quelques gardes noirs. Il arrive en pleine cérémonie d'initiation des jeunes guerriers, une cérémonie interdite aux étrangers. Les jeunes guerriers crient à la trahison Matta doit s'enfuir, son escorte n'interviendra pas.
     

    Il sera retrouvé mort, la tête fracassée et le corps lardé de flèches empoisonnées le 16 janvier 1959
     

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    Raphael Matta , surveillant de la réserve de Bouna avec ses enfants - 1958
     

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    Romain Gary
     

    Romain Gary, de son vrai nom Roman Kacew(il a utilisé aussi les pseudonymes de Fosco Sinibaldi, Shatan Bogat et Emile Ajar) est né Né le 8 mai 1914 à Wilna, à l’époque ville russe appartenant à l’empire tsariste. Il se définissait lui-même comme "un cosaque un peu tartare mâtiné de juif." En 1928, sa mère décide de l'emmener à Nice, en France. Romain Gary racontera plus tard, dans "La promesse de l'aube", cette adolescence niçoise. En 1940 il sert dans les Forces aériennes françaises libres autour du général de Gaulle.
     

    “De Gaulle c’était la faiblesse qui dit non à la force,c’était l’homme tout seul, dans sa faiblesse absolue, à Londres, disait non aux plus grandes puissances du monde, non à l’écrasement, non à la capitulation. C’était la situation même de l’homme, la condition même de l’homme, et ce refus de capituler, c’est à peu près la seule dignité à laquelle nous pouvons prétendre”. Romain Gary. Il termine la guerre comme compagnon de la Libération et commandeur de la Légion d'honneur.
     

    Après guerre , il entame une carrière de diplomate.À ce titre, il séjourne en Bulgarie, en Suisse, à New York (aux Nations Unies, 1952-54), en Bolivie, puis en qualité de Consul général de France à Los Angeles de 1957 à 1961, date à laquelle il se met en congé du ministère des Affaires étrangères.
     

    En 1961 il adapte au cinéma son livre"Les oiseaux vont mourir Pérou", il réalisera un second film en en 1972 "Kill".
    Il fut l'époux de l'écrivain britannique Lesley Blanch et de l'actrice américaine Jean Seberg,dont il divorça. Un peu plus d'un an après le suicide de celle-ci en septembre 1979, il se donne la mort en se tirant une balle dans la bouche laissant ce dernier mot : "Je me suis bien amusé. Au revoir et merci".
     

    Personnage aux multiples facettes, aux identités insaisissablesil a publié 31 ouvrages de son vivant, plus un après a mort. Il est le seul écrivain a avoir obtenu deux fois le prix Goncourt à l’issue d’une supercherie littéraire. Le second prix ayant été obtenu sous le pseudonyme d’Emile Ajar, sous lequel il a écrit quatre livres, en en faisant endosser la paternité à son petit neveu Paul Pavlowitch.
     

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    Les Racines du ciel

     
    The Roots of Heaven
    John Huston - 1958
     
    Avec Errol Flynn, Juliette Gréco, Trevor Howard, Eddie Albert, Orson Welles...
     

    On peut se demander pourquoi Huston, chasseur acharné, fervent de la tauromachieadapta le roman écologique de Gary. Juliette Gréco dans "Jujube" note "Peter Viertel a écrit sur Huston un petit livre, Le Chasseur blanc. C’est malgré tout à lui que l’on a demandé de mettre en scène Les Racines du ciel. Étrange situation que celle du chasseur qui doit mettre en images l’histoire d’un homme qui se bat pour la protection de l’espèce animale, contre l’extermination de la faune africaine et spécialement celle des éléphants… Il reste si peu de ces pauvres et splendides animaux traqués par les assassins mondains et fortunés que l’on est obligé d’envoyer une troisième équipe à leur recherche, bien loin des lieux du tournage. Ils grèveront de tout leur poids le budget, et cela ne sera que justice"
     

    Entièrement filmé en Afrique équatoriale française, le film connut un tournage difficile : la dysentrie frappe l'équipe à l'exception d'Errol Flynn et de John Huston, saouls la plupart du temps. C'est le dernier film d'Errol Flynn et sans doute pas le meilleur de Huston empêtré dans une distribution hétéroclite et un scénario trop bavard..
      
      
      
     
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  • Villes françaises - Carcassonne -

     

    Au cœur du département de l'Aude, traversée par le fleuve du même nom, Carcassonne est la plus grande ville fortifiée d'Europe. La cité médiévale est désormais l'une des villes françaises les plus connues au monde. Entre montagnes de garrigue et plaine viticole, Carcassonne dévoile aux curieux ses merveilles et ses secrets.

    D'après une légende occitane, Carcassonne tire son nom de Dame Carcas, une princesse qui sonna toutes les cloches à la levée du siège de la ville par Charlemagne. Pour célébrer cette victoire, les habitants s'écrièrent : "Carcas sonne" !
    Riche de 2 000 ans d'histoire, Carcassonne offre des merveilles monumentales à visiter. La ville séduit ainsi des milliers de visiteurs par sa culture ensoleillée et son patrimoine hérité du Moyen-âge.

    Un passé mouvementé

    Sa position stratégique, au carrefour des routes entre l'Espagne et la France, confère à la ville un statut privilégié. Au XIIe siècle, sous l'autorité des vicomtes de Trencavel, Carcassonne, en plein essor, prend sa physionomie actuelle. Après la croisade contre les Albigeois, au XIIIe siècle, elle passe sous domination royale. Ville frontière, elle devient la forteresse emblématique de la région. Cependant, en 1659, le Roussillon est rattaché à la France, par le traité des Pyrénées. Carcassonne perd ainsi son rôle militaire. Mais ses précieuses murailles ont préservé leur charme d'antan.

    L'héritage médiéval

    Carcassonne jouit d'une stature imposante et prestigieuse au sein du paysage architectural français. La ville a réussi à conserver son aspect du XIIIe siècle, période faste de la forteresse.

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    Elle se compose de la Cité ou "ville haute", située sur un plateau de la rive droite de l'Aude, et de la Bastide Saint-Louis ou "ville basse" qui s'étend sur la rive gauche.
    De la Cité à la Bastide, les visiteurs parcourent les vestiges d'un passé marqué par les Romains, les Sarrasins et les Cathares. Le château comtal, symbole de la ville, et la basilique Saint-Nazaire, réputée pour ses splendides vitraux, dominent la Cité. Le vieux quartier renferme également de belles maisons anciennes et la promenade très appréciée des Lices.

    Sur l'autre rive, la Bastide constitue le centre marchand et résidentiel de Carcassonne. La ville basse vit au rythme de ses rues commerçantes et de ses places animées. Ses hôtels particuliers valent également le coup d'œil. Depuis le XIVe siècle, ce quartier dynamique est relié à la Cité par le célèbre pont Vieux.

    Restaurée à partir du XIXe siècle, la ville phare de l'Aude est désormais classée au patrimoine mondial de l'humanité de l'UNESCO. Carcassonne incarne ainsi un témoignage extraordinaire du riche passé languedocien.


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    Située dans le département de l'Aude, Carcassonne est l'une des villes françaises les plus connues au monde. La plus puissante forteresse d'Europe, classée au patrimoine mondial par l'UNESCO, a conservé son apparence médiévale.


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    La basilique Saint-Nazaire est réputée pour ses magnifiques vitraux. Evoquée pour la première fois en 925, l'église est bénie par le pape Urbain en 1096. Mais sa construction ne fut achevée que dans la première moitié du XIIe siècle.


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    A proximité de Carcassonne, les vins du Cabardès font partie des meilleurs vins du Languedoc. Rouge ou rosé, à vous de choisir !


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    Le pont de pierre date du début du XIVe siècle. D'une longueur de 225 m, il enjambe l'Aude et fut le premier lien entre les deux parties de la ville : la Cité et la Bastide.


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    La porte d'Aude, percée au XIIIe siècle dans la muraille de la cité, est un lieu de promenade apprécié des Carcassonnais.


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    Le château comtal

    C'est le symbole de Carcassonne. Construit au XIIe siècle par les Trencavel, Vicomtes de Carcassonne, a connu bon nombre de modifications.


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    Le lac de la Cavayère est un espace de loisirs pour tous les habitants de la région de Carcassonne. Cette vaste étendue d'eau, retenue par un barrage, permet aux petits et aux grands de se livrer aux joies de la baignade dès l'arrivée des beaux jours. Promenade, pique-nique, sport et jeux en tous genres : une agréable manière de se détendre aux portes de la cité médiévale.


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    La porte monumentale des Jacobins est le dernier vestige des quatre portes qui ceinturaient la ville basse.


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    La chapelle des Jésuites date de 1667. Ses éléments baroques, tels que les plafonds, les galeries et balustrades, furent restaurés en 2000.


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    Carcassonne connaît une vie culturelle et sportive intense, caractérisée par de nombreux matchs de rugby et des festivals de musique et de théâtre.
      
      
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    FRANCE

    La folle histoire des assignats

      


    La monnaie est au cœur de la Révolution française, ce qu’on oublie parfois, et la folle histoire des assignats a laissé des traces profondes dans nos esprits, participant à la peur collective de la planche à billets. Il faut prendre conscience du caractère très particulier – et absolument pas généralisable à nos économies actuelles – de cette tragique histoire (la guillotine fut mise en branle aussi pour des raisons financières!) pour cesser d’avoir peur de la création monétaire.

    1 Le contexte et le lancement des assignats

    Le motif de la convocation des états généraux est d’ordre financier. Le roi est au bord de la faillite. La moitié du budget royal est consacré à servir des rentes et à éponger des dettes (estimées 4 à 5 milliards de livres par l’historien François Crouzet, et soumise à un taux d’intérêt moyen évalué à 7,5% par an)… Il lui faut de nouvelles ressources, impôts et emprunts. La révolution de 1789 ne suffit évidemment pas à résoudre le problème. Le 10 octobre 1789, Talleyrand propose à la toute nouvelle assemblée nationale ce qu’on appellerait aujourd’hui une nationalisation des biens de l’église, évalués 2 à 3 milliards de livres de l’époque. Le 2 novembre 1789 l’Assemblée décide de mettre les biens du Clergé à la disposition de la Nation.
    Une caisse des extraordinaires est créée et émet 400 millions de billets, divisés en coupures de 1000 livres et portant intérêt à 5 % : les assignats. Ils sont supposés être gagés sur la vente prévue des biens nationaux, à désigner ultérieurement…Il sont convertibles en or et permettent d’acheter des biens nationaux. Ils n’ont pas (encore) cours forcé, ce n'est donc pas de la monnaie, mais techniquement des obligations hypothécaires. A ce stade, indépendamment du jugement qu’on peut porter sur la « nationalisation », il s’agit d’une opération raisonnable au plan financier, qui aurait pu réussir. Mais rapidement les choses n’en restèrent pas là.

    2 Une émission de billets croissant plus qu’exponentiellement

    Au printemps 1790, les 400 millions sont dépensés….et une émission complémentaire de 400 millions est faite. Puis une autre, puis une autre. Progressivement les pièces métalliques ne circulent plus (elles sont thésaurisées en France ou à l’étranger) et les assignats circulent de plus en plus vite. La spéculation contre l’assignat (qui fait la fortune de certains…) s’installe. Le système s’emballe : l’Etat doit émettre de plus en plus de billets pour faire face à ses besoins, accrus par les faibles rentrées fiscales et les exigences d’une économie de guerre (déclaration de guerre en 1792), mais aussi pour faire face à la demande de monnaie, nécessaire aux échanges.

    Assignat de 200 livres avec l'indication du taux d'intérêt de 4 deniers par jours

    (sachant qu'une livre représente 240 deniers, cela correspond à un intérêt annuel de l'ordre de 3%)

    Voici les émissions (selon les estimations de B.Daste) faites dans le temps, en millions de livres, sachant que le franc est réintroduit en 1795. Pour situer les ordres de grandeur la masse monétaire métallique est estimée à l’époque à environ 2 milliards de livres :

    Date

    Fin

    1789

    Mars

    1790

    Sept

    1790

    Mai

    1791

    Déc.

    1791

    1792

    1793

    1794 (1)

    1795

    1796

    Montant de l'émission

    400

    400

    800

    600

    300

    1000

    3500

    3000

    20000

    15000

    Montant cumulé

    400

    800

    1600

    2200

    2500

    3500

    7000

    10000

    30000

    45000 (2)

     

    (1) Chute de Robespierre le 27 juillet

    (2) Ce dernier chiffre semble bien établi (voir La légende du franc, de Georges Valence)

     

    Assignat de 100 francs (émission du 7 janvier 1795)

    1796, c’est la fin des assignats, après une émission cumulée de 45 milliards. Une deuxième tentative d’émission monétaire (les mandats) est relancée et échoue début 1797…Une période de dépression économique s’installe alors du fait du manque de numéraire.

      

    Promesse de mandat territorial de 25 francs (émission du 18 mars 1796)

    La folle histoire des assignats

     

    3 Les mesures prises pour soutenir l’assignat

    Consciente des difficultés, l’assemblée prit une série de mesures, dont certaines radicales, pour soutenir l’assignat :

      -date 1790   confiscation complète des biens de l’église (1790)
      - 17 avril 1790   cours forcé de l’assignat, avec peine de prison
      - 1791   interdiction de l’exportation des métaux précieux
      - 1793   fermeture de la bourse et fin de la publication des cours de change
      - 1793   cours forcé avec peine de mort
      - novembre 1793   confiscation de l’or et de l’argent
      - septembre 1793   blocage des prix et salaires (loi du maximum général)
      - 1795   passage de l’assignat Livre à l’assignat Franc

    Mais rien n’y fit.

    4 La dépréciation irrésistible de l’assignat

    On voit dans le tableau ci-dessus que, dès 1791, l’émission de billets est proche de la valeur estimée des biens en garantie…Instinctivement on en déduit que la valeur des assignats n’a pu que se déprécier par rapport à la monnaie métallique. Il semble que la dépréciation de l’assignat ait vraiment démarrée fin 1791, pour s’emballer irréversiblement. La valeur des assignats ne cessa de décroître comme le montre le tableau suivant (chiffres indicatifs, reconstitués à partir des différentes sources citées en bibliographie) accréditant dans les esprits l’idée qu’une émission monétaire est toujours inflationniste. On en redira deux mots dans quelques lignes.

    Date - fin d'année

    1789

    1790

    1791

    1792

    1793

    1794

    1795

    1796

    Valeur en numéraire de 100 livres d'assignat

    100

    90

    75

    65

    50

    30

    5

    0

    Cette dépréciation de l’assignat s’accompagna nécessairement d’une hausse des prix exprimés en livre assignat. Mais pas de celle des prix exprimés en monnaie métallique. En fait cette histoire est essentiellement illustrative de la célèbre « loi de Gresham » : la bonne monnaie chasse la mauvaise. Durant ces 7 années il y eut deux types de monnaie en circulation et l’assignat inspirant moins confiance que la monnaie métallique, celle-ci fut conservée pour des motifs de sécurité, de spéculation et sans doute aussi pour des raisons politiques (les adversaires de la révolution furent sans doute conscients des conséquences économiques de la fuite des capitaux qu’ils réalisaient).

    5 Les leçons de l’histoire

    La première leçon fut tirée en 1797 par l’abandon de ce type de monnaie, créée en quelque sorte impunément. Bonaparte redoubla de prudence quand il créa la banque de France en 1800 (qui ne devint l’institut d’émission avec monopole de fabrication de billets qu’en 1848) et créa le franc germinal qui fut un modèle historique de stabilité.

    La deuxième leçon fut plus inconsciente. La peur de la « planche à billets » s’installa dans les esprits. L’association « création de monnaie-planche à billets-inflation » s’imprima durablement dans les esprits. Il n’est pourtant pas possible de plaquer cette histoire (ni ses cousines , celles de Law et de Weimar, et des hyper-inflations de la deuxième partie du XX° siècle en Amérique du Sud et en Europe de l’Est) sur le cas d’une économie moderne.

    Les spécificités économiques de cette période peuvent être évoquées rapidement :

      -  

    l’assignat constituait de fait une deuxième monnaie et non une création de monnaie complémentaire, comme ce serait le cas aujourd’hui si la banque centrale créait de la monnaie,

      -  

    le budget de l’état était en crise (rentrées fiscales difficiles, augmentation des besoins),

      -  

    l’économie réelle était également en crise (avec notamment des besoins d’importation de céréales pour compenser les pénuries agricoles) et évidemment absolument incapable de réagir à une augmentation de la demande par une augmentation de l’offre,

      -  

    dès 1792, c’était en plus une économie de guerre,

      -  

    la fuite en avant spectaculaire (45 milliards créés alors que l’objectif initial était de 2 à 3 milliards) due au contexte révolutionnaire n’a aucun rapport avec ce que pourrait être une création monétaire maîtrisée rationnellement dans une économie structurée.

    Il est donc plus qu’aventureux de généraliser ce qui se passa dans cette folle période et d’en déduire que toute création monétaire est inflationniste. Tout au plus peut-on en inférer l’hypothèse qu’en cas de circulation simultanée de deux monnaies, l’une suscitant la confiance du public et étant en outre reconnue hors des frontières, l’excès de création de la « moins bonne » conduit probablement à sa dépréciation…

    Bibliographie

    Crouzet François, « La grande inflation », Fayard, Paris 1993.

    Daste Bernard, « La monnaie et son histoire », Editions d’organisation, 1976.

    Valence Georges, « La légende du franc », Flammarion, 1996.

      

    sources : article écrit  par Monsieur Alain Grandjean (2003)

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    Au IVe millénaire avant J.C., les premières grandes civilisations se développent en Mésopotamie et en Egypte. Là se forment les trois types essentiels de chaussures : souliers, bottes, sandales.

    - Les premières sandales apparaissent dans l’Antiquité égyptienne. Ce type de chaussure plate à lanières s’explique par les conditions climatiques et géographiques de l’Egypte. Confectionnées en cuir, en paille tressée, en lanières de feuilles de palmier ou de papyrus, en jonc ou en roseaux des marécages, en or pour les notables et les pharaons, la sandale reste un objet de luxe.

    - Chez les coptes, les sandales en fibre de papyrus ou en cuir sont encore en usage, mais la mode des chaussures fermées prédomine. Comme dans toute l’Antiquité égyptienne, le talon est inconnu des coptes : chaussures bottes et sandales sont toujours à semelles plates.

    - Comme en Egypte, la sandale est la chaussure la plus courante dans la Grèce antique. Portée par les hommes et par les femmes, la sandale grecque se compose d’une semelle de cuir ou de liège, pouvant varier en épaisseur, différente pour le pied droit et pour le pied gauche. Des courroies la maintienne au pied.

    - Rome, héritière directe de la civilisation grecque, subit son influence. Aussi les chaussures romaines diffèrent-elles peu des chaussures grecques. A Rome, la chaussure est l’indice du rang et de la fortune. Certains patriciens portent des semelles en argent ou en or massif mais les plébéiens se contentent de sabots ou de rustiques souliers à semelles de bois. Les esclaves n’ont pas le droit de porter des chaussures. Ils marchent les pieds nus enduits de craie ou de plâtre.
     

    La Caliga, chaussure militaire des Romains, est une sorte de sandale. Maintenue au pied par des lanières, elle comprend une épaisse semelle de cuir ferrée de clous pointus.
    La Gallica, ancêtre de la galoche, est un soulier gallo-romain, fermé à semelle de bois.


    - Au Moyen-Age, la Gallique ou galoche à semelle de bois est toujours en usage.
    Au IXe siècle, la Heuse, chaussure montante en cuir souple annonce la Botte.
    A partir du XIe siècle, l’usage du soulier se répand.
     

    Les chausses semelées, espèces de bottes en toile renforcées par des semelles en cuir, se portent avec des patins en bois pour aller dehors.
    C’est seulement au XVe siècle que la chaussure en cuir l’emporte sur la chaussure en bois.

    - Les chaussures de l’époque Renaissance, maintenues au pied par des rubans, présentent des socles d’une hauteur exagérée pouvant atteindre cinquante-deux centimètres. Ceux-ci sont en bois ou en liège gainés de velours ou de cuir souvent richement orné.
    La pantoufle, mode importée d’Italie, est adoptée en France dès le début du XVIe siècle. Composée d’une épaisse semelle de liège sans quartiers, sa légèreté en fait une chaussure d’appartement surtout utilisée par les femmes.
     

    Dans la seconde moitié du XVI siècle, les hommes comme les femmes portent de fins souliers toujours sans talons, fermés sur le cou-de-pied et largement tailladés. La fragilité de ces souliers impose, pour sortir, le port de patins de bois, afin de protéger les cuirs et les tissus délicats des souillures de la rue. Les paysans, eux, portent des heuses de toile et des souliers grossiers. Les heuses ou houseaux, jambières sans pied ou bottes dans certains cas, formaient avec les brogues, semelles de cuir lacées autour de la jambe, un élément essentiel du costume paysan.


    - Au XVIIe siècle, dès les premières années du règne d’Henri IV, les fragiles « eschappins » de la Renaissance disparaissent. Ils sont remplacés par de solides souliers dont le dessus dépasse légèrement la semelle. La grande nouveauté de ce soulier réside dans l’apport du talon qui fit incliner le pied et qui, jusque là, était strictement réservé à la botte de cheval.

    - Au XVIIIe siècle, les hommes n’osent plus porter de souliers fins à boucle, de peur d’être catalogués d’aristocrates. Les gens du peuple portent en général des sabots.
    Si la chaussure campagnarde reste et restera encore longtemps le sabot, la chaussure portée par le peuple des villes est, pour les hommes, une chaussure de gros cuir noir dont la forme s’inspire des chaussures élégantes.

     

    Au XIXe siècle, sous le second Empire, la bottine triomphe. Elle est de cuir ou de tissu ; des broderies ou des galons l’ornent quelquefois. Le talon refait son apparition, mais son aspect est très différent de ce qu’il était sous l’Ancien Régime. Il a la forme d’une demi-bobine et se place tout à fait à l’extrémité postérieure de la semelle. On introduira maintenant sous la voûte plantaire une pièce métallique qui soutient le pied et rend inutile l’implantation ancienne du talon (sous la voûte plantaire). Quant à la tige de la bottine, elle se hausse jusqu’à la naissance du mollet.

     

     

    - Durant la seconde guerre mondiale, des types de chaussures jugées particulièrement gaspilleuses de matière première ont été interdites de la fabrication : les chaussures à double semelle ou à tige montante comme bottes ou boots. Pour le reste, des bons sont distribués aux civils regroupant des catégories :
    . usage travail : brodequin semelle cuir ou caoutchouc
    . usage fatigue : chaussures basses à semelle cuir ou caoutchouc, dessus en peausserie forte.
    . usage ville : chausserie basse semelle cuir ou caoutchouc
    . fantaisie : toute chaussure à semelle basse
    Les femmes adoptent le pantalon pour avoir moins froid, et puisqu’il n’y a plus de cuir, vive la semelle de bois !
       Et là, on peut dire qu’une très riche et très paradoxale époque de création s’ouvre.
    Les femmes auront des patins en bois et créent de superbes modèles inventifs, aux coloris chatoyants et pleins d’esprits.
     Au fur et à mesure, les techniques s’affinent, et sur les chaussures d’hommes, comme sur les modèles de sport pour femmes, on crée des semelles de bois articulées qui donnent l’illusion de la souplesse du cuir.

    Aujourd’hui, toutes sortes de matières sont utilisées pour la fabrication des semelles de chaussures : matières plastiques, caoutchouc, fibre vulcanisée, bois métal, semelles à plusieurs couches de matériaux différents.

    Sources :
    - 4 000 ans d'histoire de la chaussure : exposition au château de Blois du 17 décembre 1983 - 22 janvier 1984
    - Musée international de la chaussure, Romans
    - 5000 ans de chaussures
     
     
     
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    JEANNE FERRES 1924-2005

      

      

    Madame Ferres explique aux élèves qu’elle avait leur âge , 15 ans, juste avant la guerre. Elle garde un souvenir très heureux de cette époque-là : une société normale, peu informée de tout ce qui se tramait en Allemagne ( les camps de concentration, les mesures contre les opposants au nazisme, les Instituts d’Euthanasie,…) ;

    on croyait aux slogans patriotiques : « nous vaincrons parce que nous sommes les meilleurs » ; on avait confiance dans la Ligne Maginot

      

    Elle habitait Cherbourg. La défaite soudaine fut pour elle, comme pour tous les Français, un coup sur la tête . Et l’arrivée des blindés allemands un spectacle épouvantable, une apocalypse. Honte et tristesse… Son père embarque et gagne l’Angleterre avec la flotte dans l’intention d’y poursuivre le combat.

    Il fallut participer à l’exode, d’autant que la maison familiale avait été bombardée.Jeanne se rend chez ses grands-parents à la campagne, avec sa mère et les deux autres enfants. On camoufle la maison dans l’espoir d’éviter les bombes.

    Les Français de la zone occupée se sentent prisonniers. Ils ont un très fort ressentiment envers les Allemands, des intrus, , qui accaparent la nourrriture, instaurent des cartes de rationnement ( nourriture, textiles ), privent les Français de leurs libertés en muselant la presse, en interdisant les rassemblements, en imposant le couvre-feu à 20 h..

      

    Pour certains Français, l’humiliation et le déshonneur ressentis sont insupportables.

      

    S’engager est alors un devoir pour certains français au patriotisme développé. L ’Appel du Général De Gaulle leur sert de déclencheur.

     

    La culture familiale des Ferrès portait à la résistance.

    D’assez nombreuses personnes avaient, comme mon père, décidé de poursuivre le combat en choisissant de passer en Espagne ou en Algérie. Ceux-là ne supportaient pas la défaite ni le discours pétainiste.

    Jeanne revient donc à Cherbourg pour y loger chez un oncle.

    Ce dernier cachait alors deux employés d’une compagnie d’assurance anglaise, en réalité des agents des services secrets britanniques résidant à Cherbourg avant l’arrivée des troupes allemandes, et qui n’avaient pas voulu regagner leur pays afin de continuer à le servir en territoire occupé.

     

    Ce fut le premier contact de Jeanne avec la Résistance.

    Après une rapide formation, elle dut accomplir un travail de renseignement pour le compte direct des services spéciaux anglais. Cette phase dura quelques mois.

      

    Puis, elle fut recrutée en fin 1940 par le Service inter-allié , section des services secrets polonais.

     

    Jeanne nous indique qu’il y eut pendant la guerre 228 réseaux homologués, dont 8230 membres sont morts, 2318 internés et 7381 déportés.

     

    La mère de Jeanne Ferrès ignorait tout des activités de sa fille, qui savait que le meilleur moyen de se préserver était de ne parler à personne. Sa mère finit cependant par se douter de ses agissements.

     

    Jeanne ignorait elle-même jusqu’où la mènerait son action…

     

    Elle travaillait avec son oncle, elle devait colporter tous les renseignements susceptibles d’intéresser les Alliés : dépôts de munitions, ouvrages militaires, concentrations de troupes, nature des divisions, aérodromes, dépôts d’essence ou avancement du Mur de l’Atlantique. Ces renseignements étaient collectés par des agents de liaison qui se chargeaient de les communiquer à un intermédiaire, lui-même en contact avec le chef du réseau.

     

    Son arrestation se produisit le 6 Novembre 1941 à Saint-Lô (Manche), par le service de contre espionnage allemand , l’Abwehr, opérant en France sous les ordres de l’Amiral Wilhelm Canaris (1). Elle avait été trahie par un agent corrompu du réseau. Jeanne Ferrès revient à plusieurs reprises sur l’abomination que furent les dénonciations entre français.

     

    Elle passa deux jours dans la prison de Saint-Lô, puis fut transférée à la prison de la Santé à Paris et mise au secret pendant vingt deux mois . Elle ne reçut ni visites, ni paquets, ni lectures. Dans sa cellule , pas de fenêtre, et juste une cruche d’eau pour toute une journée sans promenade.

    Les cellules n’étaient pas chauffées, et l’hiver 1941-42 fut très froid :

    les engelures et autres maux accompagnaient la douleur morale d’être totalement coupée du monde.

     

    La seule façon de combattre était le rêve, moyen d’auto-défense, la croyance en la victoire des Alliés. 17 ans, c’est l’âge de l’espoir et des rêves… La demi-douzaine d’interrogatoires qu’elle dut subir se déroulèrent à l’Hôtel Georges V à Paris. Les Allemands restaient courtois, mais ils exerçaient une pression morale, « un chantage affectif » en évoquant le sort qui serait réservé à sa famille si elle ne disait rien. Mais cela ne la troublait pas trop dans la mesure où elle savait son père hors de France et donc hors de danger.

    Si Jeanne confrontée à l’Abwehr n’a subi aucune torture, il n’en a pas été de même pour ceux qui eurent affaire à la Gestapo, laquelle infligeait sévices et tortures morales à ses prisonniers. On peut citer ici une anecdote : Jeanne Ferrès avait une voisine de cellule, Renée Lévy, professeur de lettres, qu’elle ne connaissait que par les « dialogues » sommaires établis en tapant aux cloisons. Un soir, celle-ci, se sachant condamnée à mort, lui fit parvenir ses dernières affaires par un gardien complice.

      

    Elle fut exécutée à la hache en Allemagne, et ses cendres reposent aujourd’hui au Mont-Valérien près de Paris. Jeanne Ferres découvrit, longtemps après, les traits du visage de son amie d’infortune sur un timbre-poste faisant partie d’une série consacrée aux personnalités de la Résistance.

    Jeanne Ferrès fut ensuite transférée à la prison de Fresnes, en Octobre 1942, et elle y resta jusqu’au printemps 1943. Les conditions étaient meilleures : eau courante et de grandes fenêtres au quatrième étage de la prison, qui lui permettaient de redécouvir les plus simples gestes de la vie : voir enfin le ciel et pouvoir respirer !

      

    Là, elle connut un prêtre allemand francophile qui lui prêtait des livres en cachette ; il était charitable, profondément bon et très apprécié de tous (2).

      

    Cet Abbé Stock, était un admirateur de Pierre Brossolette qu’il visitait dans sa cellule. Pierre Brossolette, grand résistant devait se suicider en mars 1944 pour ne pas parler sous les tortures qui lui furent infligées par ses bourreaux. Il se jeta par sa fenêtre du cinquième étage de l’immeuble où la Gestapo l’avait interrogé. Lorsque la mère de notre témoin voulut rendre visite à sa fille à la prison, on le lui refusa.

      

    L’abbé Stock s’intéressa alors à cette dame accompagnée de son tout jeune fils. Le prêtre l’écouta, et contre toutes les règles en vigueur, procura à Jeanne l’une de ses plus grandes joies dans ces tristes moments en lui faisant passer un mot de sa mère.( note et photo)

     

    Jeanne Ferrès fut ensuite transférée au camp de Romainville pendant trois mois avant d’être déportée dans celui de Ravensbrück ( note ) , réservé aux femmes, où il y eut 90.000 mortes sur les 130.000 personnes internées. Ce camp était situé au nord-est de Berlin dans une région assez touristique dotée d’un magnifique et grand lac, appelée cependant Petite Sibérie à cause de l’influence des courants climatiques venus de la Baltique.

    Lors du premier mois passé dans ce camp, les détenues étaient mises à l’épreuve avec des travaux les plus pénibles : décharger des péniches, pousser des wagonnets ou répandre les cendres des déportées incinérées dans les petits jardins SS qui surplombaient le lac proche de Ravensbrück. Les femmes étaient rassemblées dans plusieurs blocks contenant chacun huit-cents personnes, pour lesquelles il n’y avait que seize points d’eau et cinq toilettes.

      

    La journée commençait tôt (à 3 heures 30 en été et à 4 heures en hiver). Après avoir bu un breuvage chaud, c’était pour toutes l’appel qui durait souvent plus d’une heure, quel que soit le temps. Elle a connu des appels dans un froid de -32°, juste vêtue d’une robe. Les femmes étaient rangées par ordre numérique car nous n’avions plus d’identité, souligne-t-elle, nous n’étions plus qu’un numéro, toutes au garde à vous, quels que soient l’état et l’âge

      

    Les journées de travail étaient de douze heures, coupées par une demi-heure pour prendre une pause déjeuner. Les déportées étaient louées à des groupes industriels : pour Jeanne Ferrès, ce fut à l’usine Siemens. Cela rapportait de l’argent aux nazis qui tiraient vraiment partie de tout ! La journée s’achevait comme elle avait débuté, par un appel interminable, avant que les détenues ne puissent enfin prendre une soupe accompagnée d’un peu de pain.

    Le samedi après-midi et le dimanche, les détenues se retrouvaient entre elles un peu plus librement. L’été 1943 amena une chaleur torride, aggravant encore la situation. Ces conditions entraînaient une grande mortalité. Tous les matins, les cadavres étaient déposés à l’entrée du bloc et ramassés par une brigade spécialisée. Aucune disposition n’était prise pour les femmes enceintes. Ainsi les médecins du camp noyaient, étranglaient ou tuaient d’une balle dans la nuque les nouveaux-nés.

    A partir de 1944, les bébés furent laissés vivants, mais ils mouraient de faim : sur huit cents bébés , une douzaine seulement sont sortis du camp, dont trois petits français.

    Les détenues trop faibles ou malades étaient emmenées dans des camions, et leurs vêtements revenaient au camp : on savait bien qu’on les avait supprimées, mais on ne savait pas alors comment. C’est après la guerre, seulement, qu’on a appris qu’on les avait conduites dans des camps équipés où elles furent exterminées soit dans des chambres à gaz, soit dans des cliniques où l’on pratiquait l’euthanasie…

    En fait, on utilisait à Ravensbriick les femmes aussi longtemps qu’elles pouvaient avoir un certain rendement et travailler. Le travail était si rude que certaines femmes, surtout les plus âgées, mouraient sur place sur le chantier.

    Chaque matin, aux abords de chaque block, des monceaux de cadavres étaient formés, un commando de déportées se chargeait de ramasser les morts de la nuit.

     

    Certaines avaient aussi subi des expériences chirurgicales atroces.

     

    Pour Jeanne Ferrés, la situation était moins dure que pour certaines femmes. En effet, quelques-unes avaient laissé de jeunes enfants derrière elles, et l’inquiétude les conduisait parfois jusqu’à la folie. Mais Jeanne savait très bien qu’étant classée Nacht und Nebel , Nuit et Brouillard (3) elle pourrait disparaître à tout moment. Elle a confié avec une émotion difficilement contenue sa fierté d’avoir côtoyé des femmes admirables, courageuses, ayant de de l’humour et de la dignité. Très jeune encore, elle ressentait pleinement l’affection de toutes ces femmes et elle avoue ne pas avoir souffert de la promiscuité : car ces femmes étaient formidables, affirme-t-elle, la plupart savaient pourquoi elles étaient là.

      

    En effet, elle avaient été arrêtées pour acte de résistance. La vie au camp était beaucoup plus mal ressentie pour toutes les déportées arrêtées pour des raisons raciales ou celles qui, ayant été otages, avaient du être incarcérées à la place de quelqu’un d’autre… Les femmes de mon block partageaient le même idéal, notre sort était le même ; toutes étaient entre les mains de l’autorité supérieure du camp qui pouvait à n’importe quel moment venir nous chercher et nous faire subir le sort de Renée Lévy…

    Dans le camp, il n’y avait plus de barrières sociales, les vingt-trois nationalités représentées étaient toutes solidaires, on pouvait ainsi ne pas désespérer de la noblesse des êtres humains. Jeanne Ferrès a évoqué de nombreux actes de solidarité et d’amour. Ainsi celui de Mère Marie, religieuse orthodoxe qui avait été déportée pour avoir organisé un réseau d’accueil pour les évadés (4) . Lorsqu’une jeune femme juive, qui était mère, fut appelée pour être exécutée, la religieuse alla mourir à sa place…

     

    Autre souvenir, celui d’un bébé, Jean-Claude, qui fut sauvé par plusieurs détenues. Pour le nourrir, elles avaient transformé des gants de chirurgien volés et troués pour former des tétines.

    Jeanne Ferrès n’était plus à Ravensbrück lorsque le camp fut libéré. En effet la Croix-Rouge, dirigée alors par le comte Bernadotte de Suède (5), avait engagé des tractations avec les Allemands. Ces derniers avaient réuni toutes les NN ressortissantes des pays occupés par l’Allemagne et les avaient acheminées sur le camp de Mauthausen.

      

    Il revint ensuite chercher les françaises. Au total, Bernadotte aurait sauvé jusqu’à 25000 détenus. Jeanne Ferrés, elle, s’était cachée avec une douzaine de ses camarades. Elles réussirent à se dissimuler pendant quelques jours dans les plafonds du block, mais finirent pas se faire prendre et elles furent échangées contre des vivres et des médicaments. Ravensbrück fut libéré une semaine après son départ.

     

    Le moment du départ du Camp ne fut pas marqué par la joie ; les cadavres entassés devaient être brûlés sans délai, les armées alliées approchant, la fumée et l’odeur étaient partout, et Jeanne a pu dire : J’en garde un souvenir tel que je n’ai jamais pu remettre les pieds, en visite, dans un camp de concentration, ni aller à aucun pèlerinage. en pensant à toutes ces femmes que je laissais là-dedans…donc, je n’étais pas contente :

    ce n’était pas la Délivrance d’un Camp…L’odeur de toutes ces femmes porteuses de plaies infectées, de maladies de toutes sortes, l’odeur de l’Humanité souffrante en plus de cette fumée issue des fours crématoires…C’est un événement que j’aurais été incapable de raconter avant car cela m’aurait fait trop mal mais désormais, je peux plus facilement témoigner.

     

    La douzaine de déportées avait alors rejoint la Suède, après avoir traversé le Danemark, qui leur avait réservé un accueil triomphal, bien que ce pays fût encore occupé par les Allemands. Dans un premier temps, elles furent placées en quarantaine dans un gymnase de Trellebeurg puis dans un petit village, Ryd, au nord de Stockholm (où théâtres et cinémas avaient été équipés pour leur hébergement).

    Le 8 mai 1945, elle put saluer la capitulation de l’Allemagne en présence d’ un représentant français.

     

    Les dangers de contamination passés, après un suivi médical très poussé, une réalimentation progressive dûment dosée (Jeanne Ferrés pesait trente-deux kgs à son arrivée !) choyées comme des nourrissons, nous sommes parties à douze dans un château situé à trois kilomètres de Stockholm, Hässelby Slott .

     

    Lorsque notre témoin rentra enfin chez elle, son père était revenu d’Angleterre. Elle ne put ni retrouver son existence antérieure, ni raconter son expérience à ses parents. Elle pesait soixante kilos à son retour ; comment expliquer ce qu’elle avait subi ? C’était incommunicable. Elle apprit de sa mère l’existence difficile que celle-ci avait dû mener avec ses deux plus jeunes enfants. Jeanne Ferrès choisit de partir de chez elle peu après son retour…

     

    Laissons la parole aux élèves :

    Nous fermons nos blocs-notes, une impression étrange flotte. Notre esprit fait un bond dans le temps avant de retrouver nos camarades flânant déjà dans le Musée.

    Pas de paroles échangées, mais nous nous rappelons la rage que nous a avoué ressentir Jeanne Ferrès lorsque des personnes nient l’existence des camps de concentration. Il nous revient aussi à l’esprit la solidarité présente à chaque horreur, à chaque injustice. Nous semblons accorder à présent peu d’importance à certaines valeurs pourtant fondamentales.

    Nous n’oublierons pas avant longtemps ce témoignage et s’il peut nous préserver de vivre les mêmes situations, ce sera une bonne chose.

     

    Voici le message final que Jeanne Ferrès a voulu délivrer aux jeunes gens venus l’écouter :

    « Je n’ai pas la moindre animosité à rencontre du peuple allemand qui a été le premier à souffrir d’un régime basé sur la terreur et la délation. Il fallait être courageux pour oser se rebeller et pourtant, il y eut la Résistance Allemande. Elle a payé très cher et fait preuve d’un courage admirable très tôt : c’est pour les opposants allemands que les premiers camps de concentration ont été construits ! La Résistance allemande était formée de catholiques, de protestants, de socio-démocrates, des communistes de l’Orchestre rouge

      

    (6 ) et d’étudiants comme ceux de la Rose blanche (7 ).

      

    Cependant, aujourd’hui, malgré les cinquante années qui se sont écoulées, je ne peux pardonner aux nazis les souffrances qu’il ont infligées à mes compagnes de déportation, aux enfants martyrisés à Ravensbrûck, pauvres victimes innocentes d’une idéologie abjecte. Témoin visuel de ces atrocités, non, je ne peux vraiment pas pardonner !

    Pas de pardon non plus pour les Français qui ont offert leurs services à ces bourreaux, les égalant même parfois. Pas de pardon aux français qui n’ont pas hésité à livrer leurs compatriotes souvent de façon anonyme, parfois pour de l’argent, sachant qu’ils les vouaient à une mort certaine.

      

    Derrière chaque déporté, il y a peut-être un français qui l’a dénoncé. Par leur attitude, les français ont participé au génocide et à l’arrestation d’autres Français qui se faisaient un devoir d’agir dans le but de réhabiliter l’honneur de la France.

    Je garde de la haine pour les nazis adeptes d’une abjecte idéologie, comme pour les négationnistes de France et d’ailleurs. Ils sont nuisibles : la seule chose à faire est de ne pas voter pour eux : le vote est , en effet, la seule arme du citoyen.

    J’ai essayé de vous apporter les précisions qui me paraissaient utiles pour un exposé très complet. Je me rends compte qu’il est très difficile de parler de soi. Je l’ai fait pour que vous serviez de relais auprès des plus jeunes qui ne pourront pas nous entendre puisque nous ne serons plus là. N’oubliez pas notre message. IL tient en un seul mot : Vigilance

     

    Après la Guerre, Jeanne Ferrès . a entrepris des études d’infirmière et d’assistante sociale.

    Et elle a trouvé un emploi dans un service de Prévention de l’Enfance en Danger , choix professionnel qui découle directement de ce qu’elle a pu observer à Ravensbrück

      

      

    Propos recueillis et mis en forme par Marie-Céline Bard, 15 ans

      

    sources :

    https://sites.google.com/site/parolesderesistantsnormands/7-jeanne-ferres

      

      

     

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  • La résistance locale

    La résistance dans le Calvados est représentée par divers groupes actifs bien implantés en particulier:
    - l'OCM (Organisation Civile Militaire) efficace et très structurée avec un responsable par canton (Jouin à Trévières), dirigée localement par R Delente et G Mercader de Bayeux, qui ont constitué un réseau de renseignements "Centurie" qui fournira de précieuses indications sur la pointe du Hoc grâce au groupe de Grandcamp de Jean Marion et A Farine. C'est également ce réseau qui a permis d'aider le rescapé du commando anglais "Aquatint" par l'intermédiaire de Madame de Brunville d'Asnières.
    - le réseau Mithridate travaillant pour le renseignement anglais,
    - le mouvement de Libération-Nord dirigé par M Fouque, dont les seuls représentant du Bessin furent les cousins Poitevin (dont Arthur, professeur de musique aveugle ! qui se promène sur le littoral accompagné d'un jeune garçon qui lui décrit ce qu'il voit.. Arthur mémorise tout...)
    - enfin par le réseau Alliance qui était le seul implanté sur le secteur d'Omaha.

    Le groupe Alliance

    Le réseau "Alliance" a été créé en 1940 par Georges Loustaunau Lacau dit "Navarre", arrêté en 1941, puis repris par Marie Madeleine Fourcade dit "Hérisson" et par Léon Faye.

    Ce réseau s'étend à toute la France, aussi est-il diviséen 1942 en zones :Sud Ouest, Sud Est, et Ouest, commandé par Jean Roger Sainteny dit "Dragon". Ce secteur Ouest était lui même divisé, et, la Normandie était appelée "Ferme".

    La partie ouest du Calvados, dirigée par Robert Douin dit "Civette", était elle même divisée en 4 autres secteurs dont le "Bessin" créé par Jean Sainteny,qui réside parfois à Aignerville (près de Trévières). Sainteny fédère son équipe avec d'autres résistants locaux : Bernier de Port, et surtout avec l'instituteur de Formigny, M Couliboeuf dit "Bison noir" qui devint le chef et la boîte aux lettres du groupe "Bessin" aidé par Rodriguez dit "Pie",le radio.

    Cette zone "Bessin" est elle même divisée en 3 secteurs : Bayeux, Port en Besssin (Paul Bernier,avec des pêcheurs: Payen, les Cardron, et surtout G Thomine dit "Cachalot"...)et, enfin, Saint Laurent-Trévières qui est représenté par : Désiré Lemière dit "Chordeille" facteur à St Laurent; Albert Anne, forgeron-charron, d'Asnières ; Robert Boulard facteur à Trévières; Charles Olard, le receveur du bureau de poste de St Laurent.
    Ces équipes observent et transmettent des renseignements d'une grande précision, en effet quoi de plus naturel qu'un facteur en tournée qui n'hésite pas à discuter [se renseigner discrètement]avec les habitants ? De même qui se méfierait de ces braves pêcheurs qui jettent leurs filets face aux bunkers en construction? Enfin, qui se méfierait d'un aveugle qui se promène sur le littoral avec sa canne blanche ?

    L'équipe de Villers Bocage dirigée par J Caby dit "Emouchet" est également fort active car elle dresse des cartes d'etat major très précises localisant toutes les activités et constructions allemandes de la région.

    Le groupe Alliance dont l'activité est le "renseignement" fonctionne par un système organisé de "boites aux lettres" dont celle de Bayeux est centrale ; de là, des contacts émis par un poste emetteur radio vers Londres. L'épicentre de ce réseau est donc la "maison des gouverneurs" à Bayeux, résidence de deux institutrices Julia Picot et Germaine Limeul, qui centralisent toutes les informations.

    A partir de l'été 1943 les alliés sollicitent davantage de renseignements : la décision de débarquer en Normandie a été prise... Robert Douin s'active et peaufine ses cartes qu'il agrandit au 1/10.000 puis les fait parvenir à Paris par l'intermédiaire d'un agent de liaison, Jean Truffaut, dit "Tadorne". En mars 1944,toutes ses cartes sont finies.

     

     

    Désiré Lemière, paysan, facteur et résistant, membre du réseau "alliance"
    fusillé le 6 juin 1944 à la prison de Caen

     

    Désiré Lemière dit "Chordeille"

    D Lemière, né le 9 novembre 1887 à Louvières, est marié et a trois enfants. Il est agriculteur dans la commune de St Laurent/Mer mais son travail est réduit en raison de l'impossibilité d'exploiter une partie de ses terres en raison de la présence mines, aussi devient-il le "facteur" que l'on voyait chaque jour sur son vélo de Saint Laurent à Colleville.Le responsable du renseignement du secteur, Georges Thomine, pêcheur de Port en Bessin âgé de 38 ans, le contacte et Désiré Lemière rentre dans les rangs de la résistance le 1° janvier 1943. Ainsi pouvait-il observer à son aise les réalisations allemandes de dispositifs de défense du fameux "mur de l'atlantique" : construction de casemates et canons, emplacement des champs de mines, position des troupes.... Il transmettait ses observations à G Thomines qui lui même les rapportaient à Londres.

     


     

    Le groupe Alliance
    A Port en Bessin, le "groupe Alliance" de Georges Thomine (photo) et Paul Bernier centralise les renseignements des communes voisines. Le réseau "Alliance" a été créé en 1940 par Georges Loustaunau Lacau "Navarre" (arrêté en 1941) aidé de Marie Madeleine Fourcade "hérisson". En 1942 "Alliance" fut scindé en 3 zones : Sud Ouest, Sud Est, et Ouest, commandé par Jean Roger "Sainteny". Ce secteur Ouest était lui même divisé, et, la Basse Normandie était appelée "ferme". La partie ouest du Calvados, dirigée par Robert Douin "civette", était elle même divisée en 4 autres secteurs dont le "Bessin" créé par Sainteny, Berbier de Port, et par l'instituteur de Formigny, M Coliboeuf "Bison noir" qui était la boîte aux lettres du groupe. Cette zone "Bessin" est elle même divisée en 3 secteurs : Bayeux, Port en Besssin et Saint Laurent-Trévières qui est représenté par : Désiré Lemière "Chordeille" ; Albert Anne, charron, d'Asnières ; Robert Boulard ; Charles Olard.

    Le groupe Alliance dont l'activité est le "renseignement" fonctionne par un système organisé de "boites aux lettres" dont celle de Bayeux est centrale et par des contacts radios émis depuis Bayeux.
    Georges Thomine

     

    Les arrestations de 1944
    L'ensemble du groupe Alliance a connu en automne 1973 une vague d'arrestations au niveau national , la Normandie ne fut pas touchée. Mais le 14 mars 1944 la Gestapo organise un coup de filet important probablement suite à l'arrestation à Paris d'un agent de liaison "tadorne" (Jean Truffaut de Rennes)qui était en possession de documents importants. Ainsi le 17 mars, R Douin , le chef départemental (chez qui était passé tadorne) est arrêté ainsi que G Thomine de Port et trois autres résistants. A chaque fois ce sont des français, membres de la gestapo qui font le travail des nazis en arrêtant les résistants.
    Puis, progressivement, trois résistants sont arrêtés les 20 et 28 avril avril, ensuite neuf résistants le 4 mai essentiellement à Villers Bocage. Enfin le 5 mai, c'est Désiré Lemière qui est arrêté ainsi que plusieurs autres camarades : Albert Anne, 36 ans, charpentier à Asnières ;Robert Boulard, facteur à Trévières et le receveur de la poste de St Laurent.
    Le réseau alliance du calvados est décapité, sur les 21 arrestations, 4 seront libérés, un sera envoyé en camp de travail et 16 seront fusillés le 6 juin à la prison de Caen, dont Désiré Lemière de Saint Laurent, Robert Boulard facteur à Trévières, Albert Anne d'Asnières et G Thomine de Port en Bessin.

     


    Simone Lemière témoigne de l'arrestation de son père.

     

    le 5 mai 1994, Simone Lemière, agée de 17 ans, trayait le vaches avec sa mère lorsque :

     

    "De ma fenêtre, j'ai vu la traction s'arrêter devant notre ferme. Papa en est descendu, accompagné par les deux types de la "Gestapo". Il a appelé maman. Ils sont entrés dans la maison. On tremblait de peur. Le poste de TSF était simplement caché dans une armoire, recouvert d'une couverture. Papa était toujours à l'écoute de la BBC. Souvent, il revenait chez nous, aux environs de minuit. Sans cesse, il nous répétait la même excuse: j'ai bu un coup chez un tel. Bien plus tard, nous avons compris que Papa ne voulait pas nous mêler à ses activités, pour nous protéger en cas de coup dur.
    Papa s'est débarbouillé sous le regard indifférent d'un des types de la " Gestapo ". L'autre surveillait les alentours, debout devant l'entrée. Maman était figée, ne comprenant rien à cette arrestation. Papa était très calme. Il l'a rassurée, lui disant qu'il serait très vite de retour. La gestapo ne lui a pas permis de dire au revoir à ma sœur et mon frère, ils avaient 14 ans et 3 ans, et ils étaient à la fenêtre quand Papa est reparti, ils pleuraient. Puis, ils sont tous remontés dans la traction et sont partis en direction de Caen.
    On ne savait rien des activités de notre père. Il s'en allait souvent à vélo, le soir, c'est tout. Dans la journée, il était facteur, en plus de son travail à la ferme, un complément indispensable, on ne pouvait plus mettre les vaches dans les champs à cause des mines.

     

    Les semaines qui suivirent furent affreuses. Aucune visite n'était autorisée, mais, Monsieur Etasse, de Saint-Laurent, chaque semaine, allait en vélo à la prison y déposer du linge propre et maman y glissait des galettes.Je ne sais pas très bien comment, mais maman a reçu des lettres de mon père, griffonnées sur des bouts de papier. Il conseillait à ma mère de les brûler après les avoir lus. Sur l'une, il expliquait que des plans de champs minés étaient encore dans notre maison (plans que l'on a jamais retrouvés)

     

    Périodiquement, on le transférait rue des Jacobins( siège de la gestapo). Là, il était torturé. On raconte qu'à chaque sortie de cette odieuse maison, "le sang lui pissait au bout des doigts ! ". Le 7 juin, les américains sont arrivés. Nous attendions toujours le retour de papa, mais n'avions plus aucune nouvelle.Puis Caen fut libéré, mais papa ne revenait toujours pas... On y croyait tous les jours, avec la Libération, il pouvait revenir d'un moment à l'autre.

    Ce n'est qu'au mois de septembre que maman, mon petit frère, ma soeur et moi, avons reçu la visite d"un officiel" nous annonçant son exécution, survenue le matin du 6 juin 1944. Il mourut dignement pour la France, ainsi que Georges Thomine, Albert Anne et Robert Boulard. Même après l'annonce officielle de sa disparition, par écrit, nous avons continué à y croire, il pouvait être parti à l'étranger...
    Un service religieux a été célébré en la mémoire de papa le 24 septembre 1946 à Louvières, sa commune de naissance. Son nom sera gravé sur le monument aux morts de St-Laurent et de Vierville, une rue de St-Laurent lui sera dédiée. Mais jamais son corps ne sera retrouvé, ni ceux des autres fusillés de la prison, pourtant des prisonniers de Caen ayant témoigné au procès des responsables de la fusillade ont indiqué que la rotation des camions emmenant les corps avait été courte, ils ont peut-être été enterré pas très loin de la prison…"

      

      

    sources : http://6juin.omaha.free.fr/resistance/lemiere.htm

      

     

     

     

     

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    Pour brouiller leurs traces, les membres du réseau Alliance ne se connaissaient que sous des noms d'animaux, Aigle, Hermine, Rossignol, Tigre.
    Les Allemands les appelaient " l'Arche de Noé ". Trois mille soldats de l'ombre, cent postes émetteurs, une liaison aérienne tous les mois avec Londres, " l'Arche de Noé " a été selon le général de Gaulle " l'un des premiers et plus importants services de renseignement sous l'Occupation ". Fonctionnant sans interruption en France de 1940 à 1945, l'Arche a fourni aux Alliés des renseignements aussi précieux que l'existence des armes secrètes, l'emplacement de leurs rampes de lancement, le mouvement des escadrilles fascistes et des ravitailleurs allemands pendant la bataille du désert, celui des U-Boot dans l'Atlantique, la carte complète des plages du débarquement du 6 juin.

     

    Le roi George VI a pu dire que c'était " notre plus grande organisation indépendante de renseignenemt opérant en France ". Marie-Madeleine Fourcade avait trente ans quand elle participa, dès 1940, à la création de l'organisation de résistance qui allait devenir l'Alliance. Elle restera à la tête du réseau jusqu'à la fin des hostilités et a le rare privilège d'être le seul témoin vivant tout au long du " combat des animaux " contre le IIIe Reich.

    La qualité unique des archives utilisées explique pourquoi L'Arche de Noé donne, malgré le nombre de livres sur la Résistance, une impression de jamais lu. Construite de main de maître avec le riche matériau de faits réels vécus par l'auteur, vouée à l'évocation d'êtres auxquels des événements exceptionnels ont forgé un destin hors série, L'Arche de Noé est une bouleversante aventure qui se compare aux plus grands romans de la littérature contemporaine.       

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  • Les déportés du réseau Alliance arrêtés ou nés en Bretagne

     

    Au total, seuls 4 des 128 membres du réseau Alliance qui ont pu être retrouvés comme déportés entre décembre 1943 et janvier 1944, sont revenus de déportation en 1945

    Les déportés du réseau arrêtés en Bretagne L'organisation du réseau La fusillade d'Helbronn

    L'hommage aux résistants français par la municipalité de Pforzheim

    Le Général de GAULLE qualifiera ce réseau de "l'un des premiers et plus importants services de renseignement sous l'Occupation".

    À l'actif du réseau Alliance figurent les relevés des rampes de lancement des armes secrètes, les informations immédiates sur le mouvements des escadrilles, des navires de ravitaillement et des sous-marins dans l'Atlantique ainsi que la carte complète des installations allemandes sur les plages de Normandie. Ce réseau bénéficie d'une aide très importante des services secrets britanniques qui le reconnaisse comme la plus efficace centrale indépendante de renseignements en France occupée. Les informations sont collectées par des patrouilles de 2 à 3 hommes et transmises par diverses voies.

    Cette liste est incomplète. (De nombreux déportés n'ont pas de lieu de naissance sur les listes du mémorial).
    Si vous avez des informations pour la construire écrivez-moi

     

    Déportés du réseau Alliance nés ou arrêtés en Bretagne .

    Audran Émile. Né le 18 mars 1904 à Hennebont (56). Membre du réseau Alliance. "S75" agent technique principal de la Marine, agent de renseignement de Lorient, a pris en charge le secteur Nantes après la disparition de "S.7" (Coindeau). Arrêté le 13 mars 1944. Déporté de Rennes début août 1944 vers Belfort, puis transféré à Natzweiler le 26 août 1944 en provenance de Belfort. Matricule 23807. DCD à Hannover le 22 février 1945. Lieux de déportation: Dachau

    Cardineau Suzanne. Née le 11 juin 1916 à Nantes (44). Arrêtée pour appartenance au réseau Alliance. Déportée «NN» le 29/04/1944 à Natzweiler où elle meurt le 02 septembre 1944 exécutée d'une balle dans la nuque. Déportée "NN" à Natzweiler le 20 mai 1944. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

    Chantrel Henri. Né le 22 mai 1880 à Evriguet (56). Arrêté pour appartenance au réseau Alliance. Retraité de l'enseignement, agent de renseignement du sous-secteur de Laval. Il est arrêté le 9 mars 1943. Déporté "NN" à Natzweiler le 20 mai 1944. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

    Chantrel Paul. Né le 25 novembre 1913 au Mans (72). Arrêté pour appartenance au réseau Alliance. agent de renseignement du sous-secteur de Laval. Il est arrêté le 9 mars 1943. Il est déporté "NN" à Natzweiler le 20 mai 1944. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

    Coindeau André. Né le 6 janvier 1906. Contrôleur maritime à Rochefort-sur-Mer. (17)Chef du secteur de Chapelle, Loire-Inférieure-Maine, Maine-et-Loire. "Urus" "S.7". Arrêté lors d'un parachutage. Déporté en décembre 1943. Massacré avec 7 autres camarades le 23/11/1944 à Kehl .

    Coindeau Mandin. Yvonne, née le 17 septembre 1908 aux Sables d’Olonne (85). Déportée "NN" à Natzweiler le 20 mai 1944. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

    .Coudol Alice, née le 10 février 1923 à Brest (29). Dés 1942, cette marchande foraine de 19 ans, mi-Lesnevienne, mi-Brestoise, recrute des partisans, distribue des armes et des journaux clandestins, fournit à Londres des renseignements sur les bases sous-marines de Brest, l'arsenal, la base aéro-navale du Poulmic, le terrain d'aviation de Guipavas. Dans le réseau, on l'appelait "Violette". Arrêtée à Lesneven pour appartenance au réseau Alliance "S.529") le 4 octobre 1942. Commerçante, estafette du secteur de Brest. Déportée de Paris le 31 janvier 1944. Lors de l’avance des Alliés sur le Rhin, elle est extraite de la prison de Pforzheim le 30 novembre 1944 avec 17 hommes et 7 autres femmes du réseau Alliance pour être exécutée .

    De Fougerolles Yves, né le 06 juillet 1913 à ?. Déporté en Allemagne le 16/12/1943. Fusillé le 21 août 1944 à Heilbronn. Lieux. Industriel, agent de renseignements région Bretagne "S. 110". Arrêté en octobre 1943. Lieux de déportation Kehl, Freiburg-im-Breisgau, Schwäbisch-Hall , Heilbronn.

    De La Motte Rouge (Christian, Marie, Élie, Georges, Joseph), né le 14 décembre 1897 à Pommerit-le-Vicomte (22). Commandant d’active ,Christian de La Motte Rouge est agent principal du secteur de la Rochelle. Il est arrêté pour appartenance au réseau Alliance. Déporté «NN» le 29/4/1944 à Natzweiler. Il meurt d’épuisement au bunker de Schirmeck le 22 avril 1944.

    Duffosset Marcel. Né le 27 juillet 1909 à Charleville (08). Brigadier de police, agent de renseignements du réseau Alliance. Il est arrêté le 20 novembre 1911 et déporté en janvier 1944. Lors de l’avance des Alliés sur le Rhin, il est extrait de la prison de Pforzheim le 30 novembre avec 16 autres hommes et 8 femmes du réseau Alliance pour être exécuté.

    Eozenou Jean . Né le 14 avril 1913 à Lannilis (29 ). Commis de la marine à l'arsenal de Brest, agent de renseignements pour le réseau Alliance, il est arrêté le 15 novembre 1943. Incarcéré à Rennes, il est torturé et confronté à la personne qui avait vendu les membres du réseau. Lors de l’avance des Alliés sur le Rhin, il est extrait de la prison de Pforzheim le 30 novembre avec 16 autres hommes et 8 femmes du réseau Alliance pour être exécuté.

     


    Photo prise lors de son incarcération

    Gillaizeau Gustave(Justinien). Né le 28 février 1880 à Nantes (44). Arrêté pour appartenance au réseau Alliance. Cultivateur, spécialisé dans les parachutages du secteur de Nantes, il est arrêté le 07 janvier 1944. Déporté «NN» à Natzweiler le 20 mai 1944. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

    Gillet Léon. Né le 28septembre 1875 à Paris (75). Colonel. Arrêté comme complice avec sa femme, sa belle-soeur, son fils Maurice, sa belle-fille, la sœur de celle-ci et deux neveux le 29 septembre 1943. Déporté «NN» à Natzweiler le 20 mai 1944. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

    Gillet Marie. Née le 09 janvier 1900 à Brest ?. Adjointe au chef de secteur de Brest (Réseau Alliance). Arrêtée le 27 septembre 1943, en même temps que son mari Gillet Maurice (massacré au Struthof) et 5 autres membres de sa famille. Déportée en Allemagne en janvier 1944 à Pforzheim. Lors de l’avance des Alliés sur le Rhin, elle est extraite de la prison de Pforzheim le 30 novembre avec 17 hommes et 7 autres femmes du réseau Alliance pour être exécutée.

    Gillet Maurice "Licorne". Né le 21 août 1914 à Moncay (?). Courtier maritime, chef du réseau de Brest (réseau marine). Arrêté le 29 septembre /1943, en même temps que sa femme Marie Gillet. (Réseau Alliance). Déporté à Natzweiler le 20 mai 1944. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

    Glévarec Émile né le 06 mai 1919 à Loperec (29). Arrêté pour appartenance au réseau Alliance. Déportée "NN" à Natzweiler le 20 mai 1944. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

    Guézenec Pierre. Né le 09 janvier 1899 à Brest (29). Arrêté le 27 septembre 1943 pour appartenance au réseau Alliance. Représentant de la Marine, agent de renseignement du groupe Licorne (frère de René). Déporté "NN" à Natzweiler le 20 mai 1944. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

    Guézenec René. Né le 25 juin 1905 à St-Marc (29). Arrêté le 27 septembre 1943 pour appartenance au réseau Alliance. Représentant de la Marine, agent de renseignement du groupe Licorne (frère de Pierre). Déporté "NN" à Natzweiler le 20 mai 1944. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

    Guillet Georges. Né le 25 janvier 1902 à Nantes (44). Arrêté pour appartenance au réseau Alliance. Agent "S.76", chef d'études aux chantiers de la Loire, spécialiste des questions maritimes, il est arrêté le 23 décembre 1943. Déporté «NN» le 20/5/1944 au SL Schirmeck. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

    Guinel Édouard. Né le 21 janvier à Marolles-les-Braultz (72). Rédacteur à la Préfecture d'Angers, agent de renseignements du sous-secteur. Arrêté le 16 mars 1944. . Déporté "NN" à Natzweiler le 20 mai 1944. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

    Hermer (Raymond, Marie, Jules), né le 29 décembre 1903 à Rennes (35). Membre du réseau Alliance qui fournissait des renseignements militaires aux Alliés. Chef d'orchestre, boîte aux lettres. "S.11". Arrêté le 2 septembre 1943. Déporté en Allemagne le 16 décembre 1943. Fusillé le 21 août 1944 à Heilbronn. Lieux de déportation Kehl, Freiburg-im-Breisgau, Schwäbisch-Hall , Heilbronn.

    Jamault René, né le 10 septembre 1919 à Brest. Clerc de notaire, il devait succéder à son père lorsqu'il a été arrêté. Agent de renseignements "S.27", le 25 septembre 1943, 'il rentrait de Crozon avec son père en ayant pris le bateau au port du Fret de l'autre côté de la rade de Brest . A l'arrivée à Brest, plutôt que de se rendre à l'étude pour travailler, il a dit à son père qu'il avait une course à faire. En fait il avait un message pour le réseau à livrer au 102 rue Jean Jaurès à Brest. Il y était attendu et y a été arrêté. Son père a toujours dit qu'il avait été dénoncé. Il racontait qu'une personne était venue lui annoncer l'arrestation de son fils alors que celle-ci n'avait pas encore eu lieu et qu'il n'avait aucun moyen de le prévenir. Il sera déporté le 24 janvier 1944 à Pforzheim. Lors de l’avance des Alliés sur le Rhin, il est extrait de la prison de Pforzheim le 30 novembre avec 16 autres hommes et 8 femmes du réseau Alliance pour être exécuté.

    Labalec Louis. Né le 08 mars 1894 Nantes (44). Arrêté pour appartenance au réseau Alliance. Employé aux chantiers maritimes de Nantes. Agent de renseignements de Loire-Inférieure. Arrêté le 23 décembre 1944. Déporté "NN" à Natzweiler le 20 mai 1944. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire

    Lacroix Georges. né le 16 janvier 1879. Biscuitier. membre du réseau Alliance du secteur de Brest."Limande", et "S.25". Participait aux départs clandestins par mer et collectait des renseignements militaires. Il est arrêté le 27 septembre 1943. Lors de l’avance des Alliés sur le Rhin, il est extrait de la prison de Pforzheim le 30 novembre avec 16 autres hommes et 8 femmes du réseau Alliance pour être exécuté.

    Lebastard de Villeneuve Yves. Né le 01 août 1920. Membre du réseau "Alliance". Étudiant, agent de renseignement région Bretagne. "Sapajou". Frère d'Alain de Villeneuve, fusillé le même jour. Arrêté à Rennes le 30 septembre 1943. Déporté en Allemagne le 16/12/1943. Fusillé le 21 août 1944 à Heilbronn. Lieux de déportation Kehl, Freiburg-im-Breisgau, Schwäbisch-Hall , Heilbronn.

    Lebré René. Né le 26 septembre 1921. Opérateur radio de Rennes. "Chardonneret". Arrêté à Rennes le 23 septembre 1943. Déporté en Allemagne le 16/12/1943. Fusillé le 21 août 1944 à Heilbronn. Lieux de déportation Kehl, Freiburg-im-Breisgau, Schwäbisch-Hall, Heilbronn.

     

    Le Bacquet née Menez Marie-Jeanne, le 4 août 1884 à Brest (29). Commerçante, arrêtée comme otage en même temps que sa fille Marguerite et René Premel, son gendre. Déportée en janvier 1944 de Paris. Lors de l’avance des Alliés sur le Rhin, elle est extraite de la prison de Pforzheim le 30 novembre avec 17 hommes et 7 autres femmes du réseau Alliance pour être exécutée.

     

     

    Le Meur Louis. Né le 12 juin 1917 à Clohars (29). Déporté "NN" à Natzweiler le 20 mai 1944. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

    Le Tullier Pierre. Né le 6 février 1914. "Daim", inspecteur de la surveillance du territoire, chef du secteur de Rennes, arrêté le 30 septembre 1943 avec sa femme pour appartenance au réseau Alliance. Déporté "NN" à Natzweiler le 20 mai 1944. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

    Lefebvre Philippe. Né le 15 avril 1917 à Paris. . Lieutenant d'active, agent de liaison région Bretagne "Lieutenant Robert". Arrêté pour appartenance au réseau Alliance le 25 septembre 1943 à Paris. Il est déporté en Allemagne le 16 décembre 1912. Lieux de déportation: Kehl, Freiburg-im-Breisgau, Schwäbisch-Hall , Heilbronn. Condamné à mort par un tribunal, il est fusillé avec 23 autres camarades le 21 août 1944 à Heilbronn.

    Lemoigne (Joël, Maurice), né le 8 juillet 1912 à Brest (29). Membre du réseau Alliance en Bretagne. Fonctionnaire de la Marine, chef du réseau marine Seastar. "Triton". Arrêté en Bretagne en novembre 1943. Déporté en Allemagne le 19 décembre 1912. Lieux de déportation: Kehl, Freiburg-im-Breisgau, Schwäbisch-Hall , Heilbronn. Condamné à mort par un tribunal, il est fusillé avec 23 autres camarades le 21 août 1944 à Heilbronn.

    Loué René, né le 29 mars 1920 à Pouzanges en Vendée. Il est arrêté le 15 mars 1944 à Nantes par la gestapo, il est déporté au SL Schimerck le 20 mai 1944. Le 2septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

    Machtou Clara. Née le 18 avril 1918. Arrêtée pour appartenance au réseau Alliance le 27 septembre 1943. . Estafette, secteur de Brest "S.250". Lors de l’avance des Alliés sur le Rhin, elle est extraite de la prison de Pforzheim le 30 novembre avec 17 hommes et 7 autres femmes du réseau Alliance pour être exécutée.

    Maistre Jeanne, née le 19 avril 1895 à Tahiti. Directrice de la Croix-Rouge de Bret. Elle est déportée «NN» au SL Schimerck le 20 mai 1944. Elle décède le 2 septembre 1944 à Natzweiler

    Mandin Maurice. Né le 27 juillet 1922. Agriculteur, aide aux parachutages, secteur Loire-Inférieure, beau-frère de Coindeau. "S.700". Arrêté le 12 décembre 1943. Déporté en décembre 1943. Massacré avec 7 autres camarades le 23/11/1944 à Kehl.

    Monclin Hugues. Né le 22 septembre 1920. Postier, opérateur radio, secteur de la Loire-Inférieure "Pingouin" et "S.72". Arrêté en novembre 1943. Déporté en décembre 1943. Massacré avec 7 autres camarades le 23/11/1944 à Kehl .

    Masson Paul, né le 14 janvier 1894 à Paris (75). Employé de laboratoire, agent de renseignements du réseau Alliance, il est arrêté le 3 octobre 1943 à Brest. Lors de l’avance des Alliés sur le Rhin, il est extrait de la prison de Pforzheim le 30 novembre avec 16 autres hommes et 8 femmes pour être exécuté.

    Muriel Georges. né le 30 septembre 1914 à Montsurs (53). Arrêté le 9 mars 1944 pour appartenance au réseau Alliance. Agent de renseignements et de liaison de la zone Poitiers-Angers. Déporté "NN" à Natzweiler le 20 mai 1944. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

     

    Mury Léon, né le 21/11/1920 à St-Malo (35). Exécuté le 24/11/1944 à Rastatt.

     

     

    Premel Marguerite, née Corre le 5 mai 1906 à Brest (29). Agente de liaison, arrêtée en même temps que son mari et sa mère Mme Le Bacquet. Déportée en janvier 1944 de Paris. Lors de l’avance des Alliés sur le Rhin, elle est extraite de la prison de Pforzheim le 30 novembre avec 17 hommes et 7 autres femmes du réseau Alliance pour être exécuté.

    Premel René, Jean, né le 6 juin 1902 à Brest (29). Manoeuvre à l'arsenal de Brest. Agent de renseignements du réseau Alliance et radio du secteur "Grèbe". Arrêté le 17 septembre 1943. Lors de l’avance des Alliés sur le Rhin, il est extrait de la prison de Pforzheim le 30 novembre avec 16 autres hommes et 8 femmes pour être exécuté.

     

    Perrier Rémi, né le 23/10/1899 à Guérande (44). Déporté le 17/12/1943 de Paris. Lieux de déportation: Kehl, Freiburg-im-Breisgau, Sonnenburg , Sachsenhausen. DCD le 05 février 1945 à Sachsenhausen.

     

     

    Raulo Armel. Né le 21 mai 1917 à Brou (28). "S.73", précepteur, adjoint de LeTullier, arrêté le 16 mars 1944 pour appartenance au réseau Alliance. Déporté "NN" à Natzweiler le 20 mai 1944. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

    Son frère Paul, né le 6 août 1918 à Tours (37), membre du réseau Alliance est déporté «NN» le 20 mai 1944 vers le SL Schirmeck .Le 1er septembre 1944 au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 106 détenus du réseau, par groupe de 12, au KL Natzweiler. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire. (Source: Mémorial des déportés de France p348 tome II)

    Régent Auguste. Né le 14 août 1909 à Redon (35). Agent de police, agent de renseignements de Le Tullier le 07 octobre 1943. Arrêté le 16 mars 1944 pour appartenance au réseau Alliance. Déporté "NN" à Natzweiler le 20 mai 1944. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

    Rézeau Fernand. Né le 17 avril 1906à Lesneven (29) Arrêté pour appartenance au réseau Alliance. Déporté "NN" à Natzweiler le 20 mai 1944. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

    Roudaut Georges. Né le 17 mars 1903. "S.23". Pharmacien, agent de renseignement du groupe "Licorne" et neveu de Gillet Léon. Arrêté le 20 novembre 1943 pour appartenance au réseau Alliance. Déporté "NN" à Natzweiler le 20 mai 1944. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

    Simottel (Marie, Désirée, Amélie), née le 29 février 1876 à Brest (29). Agent d'assurances. Arrêtée à Brest en même temps que la famille Gillet le 27 septembre 1943.. Lors de l’avance des Alliés sur le Rhin, elle est extraite de la prison de Pforzheim le 30 novembre avec 17 hommes et 7 autres femmes du réseau Alliance pour être exécutée.

    Stosskopf Jacques. Né le 27 novembre 1898 à Paris. Polytechnicien, ingénieur du génie maritime, il a fourni à l’Amirauté britannique de manière continue, depuis l’arsenal de Lorient et via le réseau Alliance, de précieux renseignements sur les mouvements de sous-marins allemands. Il est arrêté le 21 février 1944. Déporté "NN" à Natzweiler le 20 mai 1944. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

     

    Troudet Armand né le 24 février 1903 à Lorient (56). Dessinateur, agent de renseignements du secteur de la Loire-Inférieure. Arrêté le 17 décembre 1943. Déporté en décembre 1943. Massacré avec 7 autres camarades le 23/11/1944 à Kehl.

     

     

    Yvinec Fernand. Né le 17/5/1920 à Landerneau (29). Il faisait partie du réseau Alliance. Déporté "NN" à Natzweiler le 20 mai 1944. Le 1er septembre 1944 à Natzweiler au soir, une camionnette emmène jusqu’à l’aube 108 détenus du réseau alliance, par groupe de 12. Tous sont exécutés d’une balle dans la nuque et leurs cadavres brûlés ensuite au four crématoire.

     

    Autres sources:
    • Le Mémorial des déportés de France
    • Mémorial des déportés d'Ille-et-Vilaine
    • Bibliographie

      Marie-Madeleine Fourcade, L'arche de Noé. Réseau "Alliance", 1940-1945, Plon, 1998 (ISBN : 2-259-18677-7). Le livre est une histoire du réseau fondée essentiellement sur le témoignage de l’auteur.

      Un drame de la branche Nord du Réseau Alliance Cet ouvrage de Patrick Oddone, membre de la Commission Historique du Nord, président de MEMOR, a reçu le prix Histoire de La Renaissance Française du Nord-Pas-de-Calais en octobre 2003

      Publication
      PUNCH Éditions - DMPA - SDHA ISBN 2-913132-51-0 mars 2003 - 72 pages

    •   

    • SOURCES : http://memoiredeguerre.pagesperso-orange.fr/deportation/alliance.htm

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     File:Marie Helene Fourcade.jpg

    RESEAU ALLIANCE

    Marie Madeleine Fourcade, Remi Douin

      

    M. Rémy Douin, né en 1927 dans une famille de petite bourgeoisie aux modestes ressources , est le fils de Robert Douin, sculpteur et directeur de l’Ecole des Beaux Arts de Caen , ancien combattant de 14/18.

     

    L’ancienne Ecole des Beaux Arts :

      

      

     

    http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Caen_beauxarts.jpg

     

     Son enfance est heureuse auprès de ses parents, d’une sœur trisomique et d’un demi-frère. 

    La famille réside à Saint-Aubin-sur-Mer, sur la Côte de Nacre, près de Courseulles. M. Douin père est en effet en charge de l’entretien ou de la restauration du clocher de l’église.

     

    Mme Douin est une mère au foyer, effacée peut-être , et toute dévouée à ses enfants et à son époux.

     

    Rémy suit les cours de l’Institut Saint-Joseph de Caen.

     

    A la maison, les conversations sont libres, et Rémy échange sur tous les sujets avec un père qu’il aime et qu’il admire.

     

    L’avant-guerre a été marqué pour lui comme pour ses parents, par un net sentiment patriotique et anti-allemand, fondé sur les réminiscences de la première guerre, pendant laquelle son père a été blessé par deux fois, ce dont il garde des séquelles importantes à un bras. On raconte beaucoup la Grande Guerre à la maison.

     

    Il a été marqué par l’angoisse de l’imminence d’une seconde guerre et frappé par un antisémitisme ambiant que nourrissait « la peur du juif ». A ses yeux, celle-ci découle d’une perversion de la culture chrétienne. Rémy Douin insiste sur le fait que lui-même n’a jamais été antisémite.

     

    La mise en place de la Collaboration en 1940 met en rage Robert Douin. Il tient Pétain d’emblée pour un traître.

     

    Il cherche alors comment lutter contre l’occupant et prend des contacts avec des résistants, sur les indications de collègues des Beaux-Arts . En novembre 1940, il entre dans la résistance à Caen et est contacté, fin 1941, par le chef du réseau Alliance

     

    ( 1 ). Il signe son engagement. Il deviendra le chef du réseau du Calvados. Son pseudonyme : Civette.

     

    A la maison, on écoute Radio-Londres et on parle du Général de Gaulle, même si on n’a pas entendu son Appel. On écoute Maurice Schuman et on reprend courage.

     

    Robert Douin cache des juifs. Car on a connaissance d’ arrestations, de déportations. On a entendu parler de fours crématoires…

     

    Au début 1941, Robert informe son fils, qui a alors 14 ans, de son entrée dans la Résistance. Mme Douin ne sera informée que bien plus tard.

     

    Rémy Douin présente ainsi sa vision du réseau Alliance et de la figure de son fondateur :

     

    Le réseau Alliance fut créé par le commandant Loustaunau – Lacau (1894 – 1955), commandant de carrière,

    (2) qui fut mis en disponibilité pour avoir voulu protéger l’Armée d’une décadence certaine et l’avoir trop crié.

     

    De plus, celui – ci créa et dirigea sous le pseudonyme « Navarre » un petit groupe de presse dénonçant la montée du nazisme, le manque de jugement des dirigeants, la publication de l’Ordre de Bataille Terre – Air – Mer de Hitler … La secrétaire de ce groupe était Marie – Madeleine Fourcade qui deviendra chef du réseau Alliance à la fin de 1940 ( 2 ).

     

    archivesdefrance.culture.gouv.fr :

     

    http://multimedia.fnac.com/multimedia/images_produits/ZoomPE/2/5/6/9782262023652.jpg

     

     

     

    Elle avait 30 ans en 1939.

     

    En 1939, le commandant Loustaunau – Lacau est réintégré dans l’armée, il part au front. Mais il fait part à l’État – Major du fait qu’il existerait des relations suivies à Amsterdam entre un Ministre et un sénateur français et un agent allemand de l’espionnage économique, que le 2ème Bureau avait chassé de France en juillet 1939… En haut lieu, on étouffe l’affaire, et le commandant Loustaunau – Lacau est incarcéré dans la Forteresse de Mützig. Il est relâché grâce à un juge et à des accusations vérifiées. Mais il est , plus tard, grièvement blessé et constitué prisonnier à l’hôpital militaire de Châlons-sur-Marne. Evadé, il se rend à Vichy, pensant que c’était le lieu et le meilleur moyen d’avoir des contacts et des renseignements. C’est à partir de Vichy qu’il dirige ses contacts vers Marie – Madeleine Fourcade à qui il confie la direction du Réseau Alliance.

     

    Le Réseau Alliance a compris 3000 membres dont 700 femmes. Parmi ces 3000 membres, 432 personnes ont été assassinées, dont Robert Douin ; 237 furent internés et 423 qui ont été déportés, dont 206 seulement sont revenus.

     

    Pour Rémy Douin, Alliance n’était pas un mouvement politique, puisqu’ il a rassemblé des membres appartenant à des partis ou à des sensibilités très divers.

     

    Rémy décide donc de suivre les traces de son père et de participer concrètelent à

     

    l’ action de celui-ci. Ses motivations : le patriotisme, la lutte contre le nazisme, la haine de l’occupant, l’admiration pour les réfractaires du S.T.O.. Rémy , comme son père, observe aussi avec honte et mépris les engagés de la Légion des Volontaires contre le Bolchévisme ( L.V.F. ) de Darnand.

     

    En prenant des notes mentalement, il aide son père à cartographier les défenses allemandes, pour transmission aux Anglais ( Intelligence Service). Robert se rend sur la plage à bicyclette avec son fils, présenté comme son apprenti, prétextant un besoin de peindre, afin de repérer les défenses allemandes et la construction du mur de l’ Atlantique et d’ élaborer une carte de 17 m de long .Rémy, qui connaît bien la côte en indique à son père tous les sentiers d’accès . Il ajoute lui-même à la carte un sentier. Il observe les travaux de l’organisation Todt, il relève l’emplacement de fosses anti-chars. Lors d’un repérage, ils manquent d’être arrêtés par une patrouille allemande. Les retours à la maison, après le couvre-feu de 22h , sont toujours périlleux.

     

    Rémy Douin ne connaissait que trois personnes du réseau : ANIME Albert, surnommé Pieuvre ( un Charron), CABY Jean, surnommé Emouchet (un Radio Electricien) et THOMINE Georges, surnommé Cachalot ( un Marin Pêcheur ). D’autres personnes , plus importantes, venaient parfois à la maison , mais leur identité lui était cachée, d’autant qu’ il n’était pas membre officiel du réseau . Il a cependant connu un officier, M. Gouliboeuf.

     

    Il ne quitte sa maison qu’en février 1944 pour raisons de santé et se soigner à 30 km de Caen chez son demi-frère.

     

    Il a alors 17 ans.

     

    Son père est surveillé pendant six mois par une française, maîtresse du chef de la Gestapo locale. Il refuse la proposition du réseau de partir avec sa famille en Angleterre, arguant du fait que sa carte est inachevée. Ce document parviendra cependant à destination. Finalement, M. Douin père est arrêté , le 17 mars 1944, sur son lieu de travail, suivi par Jean Caby et Georges Thomine . Emprisonnés à Caen,ils y sont torturés puis fusillés le 6 juin 1944 . ( 4 )

     

    Rémy retourna alors chez lui et fut obligé de travailler dur pour nourrir sa mère et sa sœur.

     

    Ses sentiments furent partagés à l’annonce du débarquement : bonheur de voir son père vengé, de voir justifiée l’œuvre de celui-ci , mais aussi immense tristesse devant toutes les pertes civiles et l’anéantissement des villes . Il se souvient traumatiquement du vacarme des avions et de la lueur des flammes rouges. Mais l’un des chemins inscrit par Rémy sur la carte sera utilisé par les anglais lors du Débarquement, entre le 6 et le 8 juin 1944 ( 5 ) .

     

    Rémy Douin a su délivrer aux jeunes gens une leçon de sagesse, directement inspirée par la mémoire héroïque de son père :

     

    Il faut tout faire pour que de tels événements ne se reproduisent pas, il faut s’ouvrir à des idéaux, il faut respecter la vie ; mais il faut aussi dire non à certains moments, et , dans l’avenir, , rester vigilant ; enfin, miser sur l’éducation, pour soi-même comme pour autrui.

     

      

    Notes :

    1 Alliance est un réseau de la Résistance intérieure française pendant la deuxième guerre mondiale. Alliance était l’un des plus actifs réseaux de renseignements de la Résistance, avec la Confrérie Notre-Dame et, comptant jusqu’à 3.000 membres, le plus important des réseaux dépendants de l’Intelligence Service britannique (IS) sur le territoire français. Le réseau dénombre au total 438 morts[1] sur 1 000 arrestations. Chaque membre, pour préserver son identité, se vit désigner un matricule par l’IS. Puis, pour rendre plus pratique la communication entre les différentes parties, ils adoptèrent des surnoms ou pseudonymes. Les fondateurs du réseau Alliance et la plupart des autres membres choisirent de porter comme pseudonymes des noms d’animaux. C’est pourquoi la police allemande lui a attribué le nom original d’Arche de Noé. Toutefois, certains groupes à l’intérieur du réseau reçurent des pseudonymes de métier, ou de tribus indiennes… ( source : Wikipedia ) 

    2 Loustanau-Lacau :nommé par Xavier Vallat, en septembre 1940, délégué général de la Légion française des combattants, dont le siège est à l’Hôtel des sports à Vichy, il entreprend d’y recruter des agents qui établiront des liaisons avec les services anglais. Il recrute d’abord parmi les anciens de Corvignolles et de la Spirale, c’est-à-dire au sein de la droite nationaliste et de l’armée. ( source : Wikipedia )

     

     Marie-Madeleine Fourcade : appartenant à la haute bourgeoisie, élevée au Couvent des Oiseaux, pianiste, elle prend la tête du réseau en 1941. Arrêtée avec son état-major le 10 novembre 1942, elle s’évade et peut rejoindre Londres d’où elle dirige le réseau, qui finit par se rattacher au BCRA.

    Elle a publié chez Fayard l’Arche de Noé en 1968. gaulliste, jusqu’à la capitulation allemande. Elle revient en France en 1943 et est capturée en juillet 1944. Son pseudonyme : Hérisson.

     

    4 Dans le réseau Alliance du Calvados, la période sombre a commencé le 14 mars 1944 avec l’arrestation à Paris d’un agent de liaison de Robert Douin

     

    (Jean Truffaut dit Tadorne, qui possédait sur lui des documents importants sur le réseau et qui avait rencontré Robert Douin le 9 mars).
    A sa suite, le 17 mars, Robert Douin a été arrêté à Caen, Georges Thomine a été arrêté à Port-en-Bessin, Jean Caby a été arrêté à Villers-Bocage.
    Le 4 mai, la quasi totalité du groupe de Villers-Bocage a été arrêtée.
    Le 5 mai, c’est le tour du groupe de Vierville-Saint-Laurent-Trévières qui, lui aussi, est arrêté en totalité: Désiré Lemière, Albert Anne, Robert Boulard et Charles Olard.

    Ces arrestations étaient en général faites par des Français travaillant pour la Gestapo.

    Tous ont été interrogés sous la torture à Caen, 4 ont été libérés, 1 déporté et 16 fusillés le 6 juin 1944 à la prison de Caen, dans la panique qui semble avoir saisi les Allemands le matin du débarquement. Leurs dépouilles n’ont jamais été retrouvées.

     

    ( source : vierville.free.fr/811-ResistanceVierville.htm )

     

     

     

    5 Opération Sword Beach . Cette plage était attribuée à la Seconde armée britannique.

     Elle s’étend sur 8 km de Ouistreham à Saint-Aubin-sur-Mer.

     

     

     

    INTERVIEW :

     

    1°) Comment était votre enfance ?

     

    En 1938, je sentais venir la guerre et la montée du nazisme. Pendant la guerre, j’écoutais la radio de Londres et j’ai entendu parler du Général De Gaulle. J’allai à l’école. Le jour de repos était le jeudi mais le samedi je travaillais.

     

    2°) De quoi parlaient les gens avant la guerre ?

     

    Il fut torturé par la Gestapo. Les Allemands avaient constaté que tous les membres du réseau avaient des pseudonymes d’animaux. Le 16 mars 1944, mon père devait rencontrer, durant la guerre de Caen, Jean Truffaut, âgé de 20 ans, qui avait pour pseudonyme «tadorne » ; mais celui – ci fut arrêté le 11 mars 1944 et mourut au Struthof. Il y avait beaucoup de perte pour le réseau car durant septembre 1943 et début 1944 il y avait encore des arrestations.

     

    3°) L’avez – vous ressenti avant la guerre ?

     

    . Cependant, les déportations marquaient les gens.

     

    4°) Comment était la résistance ?

    Il connut plus tard, Duchèze, Margerie, « Dragon ». Il cherchait un point de chute en Normandie. Mon père ne cachait pas ses opinions. Je n’avais que 14 ans quand j’ai su que mon père faisait de la résistance. Les gens ne devaient pas connaître beaucoup de personnes. J’ai vu un officier qui se nommait Gouliboeuf. Il y avait beaucoup de réseaux dans la région mais à l’époque je l’ignorais. Les gens ne se connaissaient pratiquement pas. Mon père était le chef du réseau du Calvados.

     

    5°) Pourquoi votre père vous a t – il informé de son entrée dans la résistance ?

     

    Parce qu’il avait confiance en moi et qu’on était patriote de père en fils. Il a du sentir le patriotisme en moi.

     

    6°) Mais il prenait des risques ?

     

    Oui, mais je l’aidais. J’ai ajouté un chemin que je connaissais sur la carte que faisait mon père. Le plan de mon père est arrivé en Angleterre. Le jour du débarquement, j’ai vu sur une carte d’un anglais le chemin que j’avais ajouté. Un jour, mon père a dit à ma mère qu’il faisait de la résistance.

     

    7°) Comment a t – elle réagi ?

     

    Avec appréhension mais elle ne le montrait pas du moins elle essayait de le cacher. Quand mon père fut arrêté, elle a dû mal à s’en remettre. Ma sœur étant mongolienne et ma mère sans travail, à 17 ans j’ai du assuré la fonction à la maison.

     

    8°) Comment votre père a t – il réagi quand vous lui avez demandé d’entrer dans la résistance ?

     

    Ca coulé de source. Mon père trouvait ça normal. J’inspectais des endroits. Dans la région d’Arromanche où les alliés ont débarqué, un port artificiel a été crée afin de permettre la circulation des chars, des caissons… Les Allemands, quant à eux, creusèrent des fosses anti – chars. Un jour, alors que mon père et moi étions allés inspecter des nouveaux endroits à bicyclette, nous avons rencontré un officier allemand. Il nous demanda ce qu’on faisait et mon père répondit qu’il cherchait un endroit pour la carte de ses Beaux Arts.

    Heureusement pour nous, la baigneuse, qui accompagnait l’officier, avait froid donc ce dernier partit plus occuper par la baigneuse que par nous. Mon père était inquiet pour moi que pour lui – même. La carte d’état major faisait 17m quand elle arriva en Angleterre. Mon père était surveillé par la Gestapo, c’est pourquoi, le réseau lui propose de partir avec sa famille en Angleterre mais il refusa à cause de la carte qu’il n’avait pas finit.

     

    9°) Avez – vous eu des faux papiers ?

     

    Non. Mon père travaillait avec son nom bien qu’il savait qu’il était surveillé par la Gestapo.

     

    10°) Avez – vous souffert de la guerre ?

     

    En 1941 – 1942, mon année scolaire se passa à Saint Aubin où j’habitais car mon père était chargé du clocher donc c’était plus commode d’aller vivre là – bas. Mon père partait de la maison à 7h du matin et rentrait le soir à 20H. On mangeait de la viande rarement. J’étais beaucoup plus mince qu’aujourd’hui. Je souffrais de la faim, et de plus, il y avait le rationnement, mais avec le marché noir cela allait. Des biscuits vitaminés étaient distribués en classe. On buvait du lait écrémé et le pain était rationné. Il y avait une carte de rationnement et chaque catégorie était classée, exemple, travailleur de force G1, enfant E … On avait 1 kilo de sucre par mois. On ne connaissait pas l’orange.

     

    11°) Etes – vous toujours resté en France ?

     

    Oui, je suis plutôt F.F.I (Force française de l’Intérieur).

     

    12°) Avez – vous des amis déportés ?

     

    Avant non et après oui. Je ne connaissais pas beaucoup d’amis pendant la guerre mais après j’en ai connu.

     

    13°) Qu’est ce qui a changé dans votre ville ?

     

    Le climat moral. Il y avait moins de voitures qui circulaient car l’essence était rare. Seul le médecin avait le droit de disposer de l’essence pour ses visites. Quand les pneus pneumatiques étaient endommagés, on les recousait pour les réparer. J’ai même vu une voiture descendre une rue de pavé sur la jante. Les gens sortaient moins et le couvre – feu était à 22h. La ville n’était pas animée, les activités de jeunes avaient disparu. Les femmes se peignaient les jambes car il n’y avait plus de bas. Il n’y avait pas beaucoup de tissu, de plus, il n’y avait plus de charbon. Du point de vue moral, il y avait peu de gens gai. Il suivait tous l’évolution des fronts alliés et écoutait la radio de Londres et la propagande impériale. Maurice Schuman arrivait à remonter le moral. C’était un climat triste bien que les gens vivaient à peu près normalement.

     

    14°) Connaissiez – vous des juifs ?

     

    Oui. Il y avait une famille juive à Saint Aubin dont la femme avait une prothèse poliomyélite. Un jour, ils ont disparus. Ils ont sans doute du être arrêté. Mon père cachait des juifs. ( Juste )

     

    15°) De quel parti politique faisiez – vous parti ?

     

    Je ne faisais parti d’aucun parti politique. La politique n’est jamais entré durant cette événement. Je peux dire que mon père était un profond républicain. On parlait de politique seulement après la guerre. Les partis structurés comme les communistes résistants étaient plus efficaces et plus forts. Pour moi, le Réseau Alliance n’est pas politique puisque les origines des gens appartenant à ce réseau sont différentes.

     

    16°) Dans la vie de tous les jours, y avait – il des sujets tabous ?

     

    . Bien sûr, mon père ne me disait pas les dates des réunions du réseau. A l’époque, il n’y avait aucune éducation sexuelle. J’ai toujours été libre avec mon père. On parlait de tout, des allemands qui étaient l’ennemi, des SS, de la Gestapo française. A l’intérieur de la maison, on écoutait la radio de Londres.

     

    17°) Que pensiez – vous des actions menées par Pétain et Laval ?

     

    Indigne ! Je n’ai pas entendu l’appel de De Gaulle mais j’ai pleuré de rage en entendant le discours de Pétain. J’ai eu honte. Je trouve que Pétain a réduit les Français. Sous prétexte qu’il était officiellement le vainqueur, les gens avaient confiance dans l’honneur d’un maréchal. Mon père n’a jamais cru en Pétain en 1940. Il n’a pas admis la défaite.

     

    18°) Pensiez – vous que Pétain était contre sa patrie ?

     

    Oui. Il a composé avec les ennemis. C’était illogique car la France était en guerre contre l’Allemagne puis tout d’un coup s’allie avec l’Allemagne. L’influence de Pétain n’a pas toujours duré. Au début, les gens étaient plus pétinistes mais peu à peu le nombre de pétinistes décroît.

     

    19°) Quels ont été vos sentiments lorsque vous voyez un allemand ?

     

    On aimait pas les Allemands car c’était l’occupant et l’ennemi. Les souris grises, c’est – à – dire les infirmières, les auxiliaires de l’armée allemande, et les Allemands étaient fiers d’avoir gagné. Il y avait un brin de haine contre les LVF et les Allemands qui réquisitionnés pour la STO. Un jour, j’ai accompagné des camarades à Caen qui devaient partir en Allemagne et ils chantaient la Marseillaise. Les réfractaires cachaient les employés agricoles. La réquisition allemande était de 2500 hommes. Certains ont lutté contre ça.

     

    20°) Aviez – vous honte des français LVF ?

     

    Si. Ils étaient aussi mal vu que les Allemands. On avait honte pour eux. Ils étaient pires que la Gestapo allemande. La milice de Darnand combattait contre le maquis. Il chassait les résistants.

     

    21°) Aviez – vous des prisonniers allemands dans votre réseau ?

     

    Le réseau était essentiellement des renseignements. Il ne faisait pas parti du maquis. Il y avait des ramifications qui faisaient espionner des ports militaires. Les espions signalaient les bateaux allemands en partance et le Réseau Alliance par relation prévient les Anglais qui ont pu en détruire.

     

    22°) Aviez – vous des armes ?

     

    Mon père possédait un pistolet qu’il cachait à l’Eglise Saint Nicolas.

     

    23°) Avez – vous déjà tué un Allemand ?

     

    Non.

     

    24°) Et votre père ?

     

    Si, pendant la guerre de 14 – 18.  

      

    25°) Comment s’est passé la reconstruction des industries ?

     

    70% de Caen a été écrasé par les bombardements. A Caen, il ne restait pas grand chose. La reconstruction de Caen a commencé en 1951. Une grande industrie métallurgique s’est restauré. Les industries se sont remis en route petit à petit.

     

    26°) Où étiez – vous lors du débarquement ?

     

    J’étais à 30 km de Caen. J’ai entendu les bombardements et j’ai vu les avions des alliés. Au début, ça a été la joie. Il y avait beaucoup de morts dont des personnes de la ville. On comptait 5000 habitants à Caen. Beaucoup ont quitté la ville. Ma mère est restée à Caen qui était une ville libérée. Elle a failli être tué car elle habitait pas loin du temple des protestants. Il y avait une ruée de moustique, de plus, le choléra sévissait. Ma mère l’a attrapé. La ville sentait la charogne.

     

    27°) Que s’est – il passé pour les collaborateurs ?

     

    Les collaborateurs fut éliminé. Les femmes étaient rasées. Certains étaient accusés à tort.

     

    28°) Quel était votre état de santé ?

     

    J’ai survécu. Je suis parti car j’étais affaiblie. J’étais fatigué et assez amoindri. Certaines personnes pensaient que mon père m’avait envoyé à la campagne pour me protéger.

     

    29°) Quel était le mot de passe de la BBC pour annoncer le débarquement ?

     

    Je ne sais pas. Il y en avait sûrement, des codes, peut – être. Je sais que 60 à 80 personnes ont été fusillés au 6 juin jusqu’à la fin de l’après – midi.

     

    30°) Etes vous fier que votre père soit mort le jour du débarquement ?

     

    Non. J’étais plutôt fier du rôle qu’il a joué. Théoriquement, il a été évacué et a été emmené loin.

     

    31°) Dans quelles circonstances, a t- il été arrêté ?

     

    Des agents de la Gestapo, habillé en civil, sont arrivé à la maison et ont demandé où était mon père. Ma mère répondit qu’il était sur son lieu de travail. Puis, ils sont allés le chercher à l’entreprise le vendredi 17 mars à 9h00. 

     

    32°) Avez – vous essayé de faire évader votre père ?

     

    Non. J’étais chez mon demi – frère et il était interdit pour moi de rejoindre Caen. Mon père correspondait avec ma mère, il épinglait dans le linge salle des bouts de papier où il disait qu’aujourd’hui c’était l’anniversaire de ma grand – mère, ou bien qu’il avait faim, ou bien il demandait à ma mère de préparer ses grosses chaussures. Il n’y avait pas de parloirs.

     

    33°) Depuis combien de temps votre père était – il suivi par la Gestapo ?

     

    Depuis longtemps. C’était une française, la maîtresse du chef de la Gestapo, qui filait mon père depuis 6 mois peut – être.

     

    34°) Gardez – vous une haine envers les Allemands ?

     

    Non… à la limite une certaine défiance. Je suis européen et rester désuni ne même à rien. IL faut savoir enterrer la hache de guerre.

     

    35°) Pendant la guerre, les gens pensaient – ils que les juifs étaient des êtres inférieurs ?

     

    Non, ils ne pensaient pas que les juifs étaient inférieurs. Je pense qu’ils étaient plutôt jaloux car les juifs avaient la réputation de réussir tout ce qu’ils entreprenaient. C’est à cause du jugement nazi.

     

    36°) Aviez – vous-même peur des juifs ?

     

    Non. Je ne crois pas à la race aryenne.

     

    37°) Avez – vous retrouver votre famille ?

     

    Oui, ma mère et ma sœur. J’ai dû attendre le mois d’août quand les alliés sont partis pour rejoindre Caen. Il n’y avait plus personnes. J’ai dû aller m’adresser au chef local de la résistance pour savoir où elles étaient parties. A la fin du mois d’août, je les rejoins à Bayeux, puis, nous sommes retournés à Caen.

     

    38°) Avez – vous souffert ou eu des séquelles ?

     

    Non. J’ai seulement souffert de la malnutrition comme toutes les autres personnes.

     

    39°) Devez – vous une reconnaissance aux soldats allemands ?

     

    Je leur devais reconnaissance que s’ils libéraient un résistant. Sinon à part cela, il n’y avait aucune raison de leur devoir une reconnaissance. Je ne vois pas pourquoi car c’était l’occupant.

     

    40°) Connaissiez – vous des Allemands ?

     

    Non, je n’ai jamais connu d’allemand, à part, qu’un jour, j’ai rencontré un aumônier allemand.

     

    41°) Comment est – ce que L’État a pu se laisser faire ?

     

    Hitler a manœuvrer en Allemagne. Il a réussi à remettre sur pied une armée et une idéologie.

     

    42°) Quand les Allemands ont commencé à annexé la France, y avait – il des révoltes ?

     

    Non, pas tellement. Il y avait plus d’appréhension. Les gens n’étaient pas apathique mais ils voulaient la paix à n’importe quel prix.

     

    43°) Pouvez – vous nous parler d’Hitler ?

     

    Qu’est ce que je peux vous apprendre de plus que ce que vous avez appris sur lui ? … C’était une bête à tuer, un despote. Il a crée un parti pour diriger sur l’Europe néfaste.

     

    44°) Comment arriviez – vous à savoir que des résistants ont été arrêtés ?

     

    De bouche à oreille. Quand Duchèze vit des agents, il sut que c’était lui qu’on venait arrêter ; il dit alors au revoir à sa femme qui elle – même fut déportée. Les gens qui étaient arrêtés ont été déportés. Il y a eu des rafles.

     

    45°) Comment ça se passait dans les camps de concentration ?

     

    Je savais juste que les juifs étaient arrêtés. J’ai entendu parler des fours crématoires.

     

    46°) Et si des Allemands prenait des otages, que se passait – il ?

     

    Un jour, il y avait eu un sabotage sur le chemin de fer près de Caen. 42 personnes n’étaient pas encore mortes. Il n’est souvent pas possible de libérer les gens qui sont arrêtés.

     

    47°) Connaissiez – vous beaucoup de personne ayant été tué ?

     

    Non, je sais juste qu’il y a eu 300 morts le dernier dimanche d’avril.

     

    48°) Quand vous faisiez de la résistance, ressentiez – vous un sentiment de réussite ?

     

    Oui, sans ça je n’avais rien fait. Une bonne partie de la population attendait que ça se passe. Ceux qui ont résisté avaient de l’espoir en eux. 

     

    49°) Après la guerre, est ce que l’État avait de la reconnaissance pour les résistants ?

     

    Oui, mais c’était plutôt une reconnaissance moral. On avait fait un silence pour les déportés, les résistants étant la minorité de personnes. Certaines personnes considéraient qu’ils n’étaient pas écoutés et pas cru. Moi, je croyais contrairement aux non – résistants qui eux n’y croyaient pas. La population, ayant plus participer, se sentait moins concerné. D’autres souffraient en silence.

     

    50°) Combien de temps a t – il fallu pour reprendre une vie normale après la guerre ?

     

    Cela dépendait des personnes qui ont été plus ou moins touchés. Mais de façon générale, du point de vue morale et matérielle, il a fallu tout une génération pour masquer les blessures.

     

    51°) Etes vous déjà allé à Vichy ?

     

    Non. Je suis juste passé à Vichy mais je ne l’ai pas visité.

     

    52°) Quels sont vos sentiments concernant la guerre ?

     

    Je souhaite que ça ne se repasse jamais. La jeunesse doit prendre conscience que la guerre ne doit pas exister. Il faut avoir l’esprit large pour éviter des conflits car il faut savoir qu’il y a eu 60 millions de morts. Il faut éviter la guerre à n’importe quel prix. Il est souhaitable que vous ne le viviez pas.

     

    53°) Etant l’une des dernières personnes à avoir vécu pendant la résistance, quel est votre message que vous souhaiteriez faire passer ?

     

    Il faut tout faire dans les limites raisonnables pour que ça ne se reproduise pas. Il faut être ouvert à un idéal de l’homme, et, avoir beaucoup de respect, envers la vie surtout. Il ne faut pas admettre n’importe quoi. Il faut s’éduquer, éduquer les autres et être vigilant.

     

     
     
      SOURCES : https://sites.google.com/site/parolesderesistantsnormands/8-remi-douin

     

     

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  • Madame Héron nous est apparue comme une petite femme vive et énergique : ses lunettes sombres qu’elle enleva souvent révélaient un visage expressif.

    Elle nous raconta son expérience avec passion, agitant souvent ses mains avec vigueur. L’atmosphère, un peu tendue du début de l’entretien, se détendit pour devenir finalement très amicale.

    La période de l’installation des Allemands en Normandie fut celle aussi d’une grave pollution des eaux de la ville de Caen. Elle eut pour conséquence une terrible épidémie de typhus, qui entraîna la mort de près de trois-cents personnes dont la sœur aînée de Madame Héron, âgée de dix-sept ans.

    Comme au Moyen-Age pour les pestiférés, les Allemands avaient fait placarder des affiches avec une tête de mort et une croix sur les maisons des malades où il était écrit : danger typhus. « A ce moment-là, j’ai décidé que je ne pouvais plus les laisser faire, je devais agir pour libérer notre pays. Et puis, vous savez, nous n’étions déjà pas très heureux d’être envahis quand les Allemands sont arrivés. Nous sommes avant tout Français ; notre devoir était de défendre notre pays, de le libérer de la domination allemande. Aussi, dès 1941, je me suis engagée dans la Résistance . »

    Travaillant alors à la préfecture du Calvados, Madame Héron a pu accumuler de nombreux documents et renseignements précieux pour la Résistance.

    Malgré les arrestations, elle poursuivit avec la même ardeur son action en faisant preuve cependant de plus en plus de prudence.

    Madame Héron nous expliqua comment était née la Résistance et comment fonctionnaient les réseaux. Le Général De Gaulle sur les ondes de la BBC, le 18 juin 1940, lança l’appel connu maintenant de tous. De cet acte, le Gouvernement Provisoire de la République Française (G.P.R.F) naquit. Avec d’éminents Français venus le rejoindre, le BCRA (Bureau Central de Renseignements et d’Action) fut crée. Jean Moulin, ancien préfet, fut nommé par De Gaulle premier délégué général et parachuté en France avec pour mission d’établir des contacts pour former des réseaux de renseignements et d’action.

    Ces réseaux devaient fonctionner avec des agents : Les agents P2, qui avaient signé un engagement pour toute la durée de la guerre plus six mois et qui étaient considérés comme des officiers ou sous-officiers.

    Les agents PI, qui étaient des agents permanents sans grade d’assimilation…

    Enfin et surtout, il y avait des agents occasionnels qui se chargeaient de petites informations. Ils pouvaient par exemple voler quelques tampons à la mairie ou à la feldkommandantur allemande, ce qui était fort utile à la réalisation de faux papiers.

    Le but des réseaux qui se constituèrent était d’avoir des liaisons rapides et fréquentes pour acheminer rapidement vers Londres tous renseignements recueillis sur l’implantation et l’action de l’armée d’occupation. Ils étaient en quelque sorte, le deuxième bureau traditionnel de l’armée française, qui avait des missions plus étendues.

    Ces réseaux se partageaient pour organiser trois actions essentielles : le renseignement, l’évasion et l’action.

    Ils disposaient de moyens importants : émetteurs-radios, liaisons par avions, par navires ou sous-marins. Par ailleurs, la presse clandestine fit son apparition dès 1940.

    La Gestapo et la Milice étaient des polices, respectivement allemande et française, qui fonctionnaient en raison des nombreuses lettres anonymes que certains Français leur envoyaient. Leur tâche principale fut de lutter contre les résistants.

    Ceux-ci, arrêtés, étaient torturés, envoyés en prison, ou même, déportés à partir de 1942. Madame Héron évoqua auprès de nous les atroces supplices qu’ils subirent.

    Sa mémoire garde le vif souvenir d’un homme : son propre beau-frère. Chirurgien, il avait une clinique, rue des Jacobins à Caen. Arrêté, il fut déporté à Auschwitz. Sa clinique fut réquisitionnée par la Gestapo qui y établit ses bureaux et le lieu de ses supplices : « On utilisait là, par exemple le supplice de la baignoire : on plongeait la personne sous l’eau jusqu’à ce qu’elle manque d’air, puis on lui demandait des renseignements sur son réseau. Certains sont morts noyés car ils n’ont pas voulu dénoncer leurs camarades. D’autres tortures, encore plus humiliantes, étaient aussi pratiquées. Il n’y avait en définitive que deux conclusions possibles : soit la personne arrêtée parlait, soit elle était tuée ou envoyée en camp de concentration.

    Bien sûr, nous étions considérés par les Allemands comme des espions, je reconnais que nous étions des hors-la-loi.

    Mais, c’était inadmissible d’utiliser la torture, la torture la plus avilissante pour nous faire parler. La devise du nazisme était l’esclavage de l’ennemi et la disparition de celui-ci. Il ne faut pas retirer aujourd’hui un sentiment de vengeance de ces actions, mais il faut s’en souvenir tout comme des horreurs des camps de concentration.

    « Mon beau-frère est mon à Auschwitz. Médecin au camp, il s’insurgea contre le traitement de ses malades : ils étaient en effet régulièrement battus… Les nazis le punirent d’atroce façon : il dut monter et descendre un escalier en portant une lourde pierre jusqu’à épuisement. Mon beau-frère tomba, l’Allemand qui le surveillait prit alors sa charge et lui fracassa la tête avec la pierre. Comme il n’était pas encore mort, on l’enterra debout et l’on fit passer un rouleau sur sa tête ! ».. Hitler, ajouta-t-elle, était l’incarnation totale du mal. La réalité de cette époque dépasse tout ce que l’on peut dire aujourd’hui. »

    Après la guerre, Madame Héron a exercé la fonction de Consul de France notamment en Pologne. Dans ce pays se trouvaient la plupart des camps de concentration. Dans ces camps, les juifs étaient entassés la nuit sur des planches, ils étaient habillés de loques, leurs cheveux étaient rasés. Le matin, les gardiens les réveillaient en les arrosant d’eau froide même lorsqu’il faisait moins quarante degrés, en hiver. L’appel se faisait à cinq ou six heures du matin, les prisonniers se tenaient en ligne près des barbelés électrifiés. Parfois certaines personnes tombaient d’épuisement, d’autres préféraient se suicider en se jetant sur les barbelés. Mais souvent, il arrivait que les autres prisonniers gardent ces morts debout pour recevoir leurs portions de nourriture…

    Nommée officier de rapatriement à la fin de la guerre, Mme Héron se souvient de sa rencontre avec un jeune juif auquel on avait remonté les bras à l’envers…

    Les fours crématoires pourtant nombreux et qui fonctionnaient sans arrêt, étaient insuffisants. Aussi les morts s’entassaient sur plusieurs mètres de hauteur devant les baraquements. Mais, il y avait pire : à Meizenek, la chaleur dégagée par les fours crématoires servait à chauffer la salle de bain du chef de camp !…

    Madame Héron était à la fin de la guerre à la Sécurité Militaire au rapatriement des déportés féminines de Ravensbruck à Annemasse. Elle accueillit ces femmes qui étaient encore habillées de robes à rayures, avec aux pieds des morceaux de bois tenus par des ficelles… Sur leur tête complètement rasée apparaissait une double raie qui avait été établie pour mieux les repérer en cas de fuite… « Elles sentaient le cadavre » ajouta Madame Héron… « Plus on est cruel, plus on cherche à être cruel ; c’était la cruauté la plus infernale, c’était terrible. Si vous trouvez que ce n’est pas un acte de sadisme… Ces tortures pour extirper les dénonciations atteignaient à la dignité de l’Homme. C’était une course infernale vers l’extermination, juifs et aryens confondus.

    « Mais le pire c’est que tout était programmé. Les Nazis savaient que s’ils vous donnaient tant et tant de nourriture à manger, vous alliez mettre tant et tant de jours à mourir. Ce n’était pas une guerre loyale, c’était une infernale saleté, quelque chose d’immonde ! Tout semblait normal, on pouvait tout se permettre. Celui qui tuait le plus, c’était le vainqueur. C’est l’homme qui a fait tout cela ! On n’a pas le droit de massacrer les hommes, on n’a pas le droit à une cruauté aussi sauvage. C’était le mal pour le mal… Je ne veux plus trop y penser, mais de toutes ces atrocités il faut tirer une philosophie :

    Si les hommes pouvaient comprendre que le bonheur est simple, proche et facile et que seule la tolérance et la compréhension en sont les principaux éléments» !

    Après la guerre, Madame Héron a connu des gens qui ont été torturés par la Gestapo. Mais ces personnes ont une certaine pudeur à révéler ce qu’elles ont subi. Leurs supplices étaient tellement avilissants qu’elles ne diront pas certaines choses…

    Chanceuse, Madame Héron n’a jamais été arrêtée. Mais alors que, jeune comédienne, elle participait à une représentation du Jeu de l’amour et du hasard de Marivaux, elle apprit qu’elle allait être incarcérée. Elle dut s’enfuir et ce fut pour elle le début d’une longue pérégrination. Désormais, elle ne resta jamais pendant plus de vingt-quatre heures au même endroit, et dut même une fois adopter pour cachette un asile de fous… Malgré cela, elle put et voulut poursuivre l’accomplissement des missions qu’on lui confiait.

    Avez-vous déjà pensé que la Résistance serait vaincue par la Milice et la Gestapo ?

    « Il était temps que les Américains débarquent. Nous étions de plus en plus attaqués, les réseaux étaient infiltrés par des Allemands aidés de collaborateurs français.

    La milice de Pétain était constituée en général déjeunes gens volontaires, souvent « anarchistes ». Ils étaient attirés à cause de la politique ou par l’appât du gain.

    Brière, chef français de la Gestapo pour la région de Caen, aurait, selon Madame Héron, abattu froidement dans la rue et sans motif véritable, une cinquantaine de personnes. Il causa de nombreuses difficultés au réseau, à tel point qu’on jugea indispensable de l’exécuter.

    Le réseau Arc en ciel de Madame Héron a d’abord demandé l’autorisation à Londres de l’éliminer. Puis Jean Héron, son mari et deux autres camarades sont passés à l’action le 15 mai 1944.— « Malheureusement, cet attentat ne passa pas inaperçu, et il y eut de graves répercussions sur notre réseau ». En effet, le jour du Débarquement allié, le 6 juin 1944, à la prison de Caen, près de quatre-vingt-dix-sept personnes furent tuées, dix-huit résistants sur les quarante que comportait le réseau furent fusillés les uns après les autres. Parmi eux, le propre père de Madame Héron. Deux résistants de ce groupe eurent miraculeusement la vie sauve :

    le nom du premier fut mal prononcé par les Allemands et il ne sortit pas de sa cellule, le deuxième qui était un enfant de treize ans fut épargné. La propre mère de Madame Héron fut emprisonnée elle aussi. Dans la grande confusion qui régnait lors du Débarquement, par manque de temps peut-être, elle fut relâchée comme la plupart de ses camarades. Fuyant les bombardements et les Allemands, elles se réfugièrent quarante jours dans les champignonnières de Fleury-sur-Ome. Sur les quatre-vingt-dix-sept personnes tuées à la prison de Caen, aucun corps n’a jamais été retrouvé à ce jour.

    Ce n’est qu’après le Débarquement, et avec les Américains, que Madame Héron regagna Caen. A la prison, seul et ultime souvenir de son père, un pardessus taché de sang…

    Pensez-vous qu’une situation semblable à celle que vous avez connue pourrait se reproduire à l’avenir ?

    « Aujourd’hui, je pense que l’Eurone unifiée est une garantie pour la démocratie. Mais le danger vient de la dissolution de l’URSS et de la perspective persistante d’un gouvernement islamiste en Algérie.

    Croyez-vous que les jeunes, aujourd’hui, résisteraient comme vous l’avez fait ?

    —Oui, je crois à la jeunesse. Elle a besoin de faire quelque chose, de défendre des idées. »

    Cette expérience vous a-t-elle rendue plus tolérante ?

    « Cette expérience m’a donné le sens des vraies valeurs. J’ai connu de vrais patriotes : j’ai vu que l’homme était capable de donner sa vie contre la liberté de son pays. C’était un choix de devenir’ résistant, chacun savait ce qui 1′ attendait. Il n’y avait alors plus de différence de classe sociale entre les résistants… La tolérance, c’est que chacun a le droit d’être ce qu’il est, pourvu qu’il ne nuise pas à son prochain »

    Madame Héron a reçu comme récompenses pour son courage : la croix de guerre avec citation, la médaille de la Résistance, la croix nationale du mérite, la croix de guerre polonaise.

    Nous nous sommes séparées de Madame Héron après un repas pris en commun. Nous étions tous à la fois émus et enthousiasmés par ces rencontres. Nous avions pu discuter avec des gens exceptionnels qui avaient affronté des situations difficiles avec un courage remarquable. Ces personnes avaient une expérience de la vie qu’elles ont su faire partager. J’ai entendu plusieurs élèves s’exclamer que ces entrevues resteraient à jamais gravées dans leur mémoire.

    Ce séjour à Caen m’a donné un nouvel intérêt pour cette période de l’Histoire,

    une meilleure compréhension de 1a guerre, et un regard neuf sur le monde actuel.

    L’humanité en a-t-elle tiré des leçons ?

    Combien de temps l’Europe se rappellera-t-elle de ces horreurs, et dira-t-elle : Plus jamais ça ! Dans le monde, des guerres persistent toujours : Non loin de nous enYougoslavie ; en Azerbaïdjan… E ceci depuis le commencement de l’humanité…

    Y aura-t-il un jour un espoir de paix durable et de tolérance sincère entre le hommes ?…

    Propos recueillis et mis en forme par A B, 14 ans

      

      

    sources : https://sites.google.com/site/parolesderesistantsnormands/6-paulette-heron

      

     

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